Spectacle vu le 6 juin 2021, au Théâtre du Balcon, à Avignon (10 ème anniversaire de la mort de Jorge Semprùn)
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Ma patrie, c’est le langage, dit Jorge Semprún, qui écrivait aussi bien dans sa langue maternelle, l’espagnol, que dans celle de son pays d’adoption, le français, ou encore en allemand, langue apprise dans son enfance, et qu’il eut hélas l’occasion de pratiquer plus tard en déportation. L’histoire de cet homme exemplaire habité par le langage, résistant dans plusieurs pays et écrivant en plusieurs langues, c’est donc l’histoire de l’Europe, de son identité et de sa diversité, de sa culture commune et de ses déchirements barbares, jusqu’à sa difficile et fragile construction. À travers la fragilité de cette lecture, pour reprendre l’heureuse expression de Serge Barbuscia, ce spectacle à trois voix, illustré d’extraits d’archives et de films, évoque le destin tragique de l’Europe, et l’espoir d’un avenir apaisé. Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde, nous prévenait Brecht. Entre l’inconcevable barbarie d’hier et le dangereux oubli du passé, de la Shoah au programme Erasmus, comment conjurer nos démons et construire un monde meilleur pour nos enfants? Placer le sens de la vie au-dessus de la vie elle-même, voilà la leçon de Jorge Semprún. Que des camps de la mort aient pu ressortir pleins de vie de tels hommes et de telles femmes ne peut que nous redonner foi en l’humanité.
Critique de Jean-Pierre Martinez
Montage et réalisation : Franck Appréderis
Avec : Serge Barbuscia, Salvatore Caltabiano et Arnaud Appréderis
Conception techniques et images : Sébastien Lebert