Deux personnages. Le premier s’approche du deuxième.
Un – Vous savez pourquoi je vous arrête.
Deux – Non…
Un – Vous êtes passé à l’orange.
Deux – À l’orange, vous êtes sûr ?
Un – Vous ne reconnaissez pas être passé à l’orange ?
Deux – À l’orange, peut-être, mais reconnaissez entre nous que les feux tricolores sont très mal faits.
Un – Pardon ?
Deux – On a beau passer au vert, il y a bien un moment où le feu passe du vert à l’orange. Alors évidemment, parfois, pendant qu’on est en train de passer au vert, le feu, lui passe à l’orange.
Un – C’est ça… En somme, ce n’est pas vous qui êtes passé à l’orange, c’est le feu. C’est peut-être lui que je devrais verbaliser, qu’est-ce que vous en pensez ?
Deux – Ça c’est vous qui voyez…
Un – Admettons, vous passez au vert, et pendant ce temps-là, le feu passe à l’orange. Le problème, c’est que vous, lorsque vous êtes passé à l’orange, l’orange était bien mûre…
Deux – Écoutez, ça ne tient pas debout !
Un – Et pourquoi ça ?
Deux – Mais enfin, une orange, même bien mûre, ça reste toujours orange. Vous avez déjà vu des oranges rouges, vous ?
Un – Ma foi…
Deux – Une orange, ça passe du vert, quand elle n’est pas encore mûre, à l’orange, quand elle arrive à maturité. C’est la raison pour laquelle on appelle ça une orange.
Un – Vous ne seriez pas en train de vous foutre de ma poire, par hasard ?
Deux – Pas du tout ! Je vous ferais d’ailleurs remarquer qu’une poire, c’est jaune, pas orange. Et que cette amende, ça va être pour ma pomme.
Un – Vos papiers…
L’autre lui tend ses papiers.
Un – Vous êtes née à Orange…
Deux – Vous n’allez pas me verbaliser pour ça ?
Un – Vous vous appelez Clémentine…
Deux – Oui, je l’avoue.
Un – Et vous êtes grossiste en fruits et légumes.
Deux – C’est une circonstance aggravante, j’en ai bien conscience.
Un – Aggravante ? Donc vous reconnaissez les faits ?
L’autre réfléchit une seconde.
Deux – D’accord, j’avais un peu trop la pêche, je suis passée à l’orange. Laissez-moi au moins repartir avec la banane…
Noir