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Viande

Alban et Ève sont toujours là.

Alban – C’est dingue. Tout pousse dans ce jardin.

Ève – On n’a même pas besoin de semer des graines.

Alban – Ni d’arroser.

Ève – Et la récolte est miraculeuse.

Ève – On n’a qu’à tendre le bras pour cueillir les fruits.

Alban – Et se baisser pour ramasser les légumes.

Ève – Et tout est absolument bio.

Alban – Oui… Ça veut dire quoi, au fait ?

Ève – Quoi ?

Alban – Bio.

Ève – Aucune idée.

Alban – Qu’est-ce que ça pourrait être, des fruits et des légumes qui ne soient pas bio ?

Ève – Je ne sais pas.

Alban – En tout, c’est bio, et c’est bion.

Ève – Tu veux dire c’est beau et c’est bon…

Alban – Ce n’est pas ce que j’ai dit ?

Un temps.

Ève – Parfois, j’en ai un peu marre de bouffer des légumes, pas toi ?

Alban – Si. Mais qu’est-ce qu’on pourrait bouffer d’autre ?

Ève – Qu’est-ce qui se mange, ici, à part les primeurs ?

Alban – On ne va pas bouffer de la terre…

Ève – On ne va pas bouffer de l’air.

Alban – On ne va pas boire l’eau de mer.

Ève – Et on ne va pas se bouffer entre nous.

Alban – Ben non…

Un temps.

Ève – On pourrait bouffer les animaux.

Alban – Les animaux ?

Ève – Non, mais je déconne.

Silence.

Alban – Remarque, c’est peut-être bon.

Ève – Tu crois ?

Alban – Ce n’est pas très appétissant

Ève – Mais c’est vrai que ça changerait un peu.

Alban – Comment on peut savoir que ce n’est pas bon…

Ève – On n’a jamais essayé.

Alban – Et… on les mangerait vivants ?

Ève – Qu’est-ce que ça veut dire, vivants ?

Alban – Comme les fruits.

Ève – Tu veux dire crus.

Alban – C’est ça. Nature, quoi. En salade.

Ève – Tu crois qu’ils se laisseraient bouffer tout cru ?

Alban – Tu as raison, il vaudrait peut-être mieux les tuer avant.

Ève – Les tuer ?

Silence embarrassé.

Alban – Tu as déjà tué quelqu’un, toi ?

Ève – Tu veux dire, un animal ?

Alban – Ben oui. Pas un homme. Comme on n’est que deux, si tu avais déjà tué quelqu’un, je ne serais plus là pour poser la question.

Ève – Non… Enfin, pas intentionnellement…

Alban – Si on ne le fait pas exprès, c’est moins grave, non ?

Ève – Oui, c’est… un homicide involontaire.

Alban – Si on tuait un animal. Sans le faire exprès. On pourrait le bouffer après. Pour voir quel goût ça a.

Ève – Oui… Si on ne le fait pas exprès…

Un temps.

Alban – Ça commence à me faire peur, cette conversation…

Ève – Moi aussi…

Alban – Et puis les animaux, c’est comme nous, il n’y en a qu’un couple de chaque espèce.

Ève – On en bouffe un chacun et aussitôt, c’est l’extinction de la race.

Alban – Je vais reprendre un peu de salade, plutôt.

Ils mâchouillent chacun une feuille de salade sans appétit.

Ève – Tu veux une pomme, pour ton dessert ?

Alban – Allez…

Ils mangent une pomme.

Ève – Je commence à en avoir un peu marre, des pommes.

Alban – Oui… Moi aussi…

Ève – Tiens, il y avait un asticot dans cette pomme.

Alban – Non ?

Ève – Ben j’en ai bouffé la moitié. Sans le faire exprès…

Alban – Et alors ?

Ève – Ce n’est pas mauvais…

Noir

Alban et Ève

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Tête à tête

Le jardin peut avoir rapetissé. Ève est assise. Alban tourne un peu en rond.

Alban – Il n’est pas très grand, ce jardin, non ?

Ève – Il est bien assez grand pour nous deux.

Alban – Il n’était pas un peu plus grand, avant ?

Ève – Avant ?

Alban – Ou alors, c’est nous qui avons grandi.

Ève – Je ne sais pas.

Alban – Parfois, j’aimerais bien avoir un peu plus de place.

Ève – Pour quoi faire ?

Alban – Pour pouvoir étendre les jambes, déjà.

Ève – D’accord…

Alban – Et puis je ne sais pas moi… Qu’il reste quelque chose à explorer. Qu’il y ait encore des choses à découvrir…

Ève – Tu peux toujours découvrir… les détails.

Alban – Les détails ?

Ève – Les petites choses.

Alban – Mouais.

Ève – Ce qu’on ne voit pas tout de suite à l’?il nu.

Alban – Qu’est-ce qu’on ne voit pas à l’?il nu ?

Ève – Tiens, un trèfle à quatre feuilles, par exemple.

Alban – Ça existe, un trèfle à quatre feuilles ?

Ève – Je ne sais pas. Sûrement.

Alban – Parfois je me demande si la vie vaut la peine d’être vécue.

Ève – Tu pourrais chercher un trèfle à quatre feuilles.

Alban – Mais pour quoi faire, bordel ?

Ève – Pour me l’offrir, par exemple.

Alban – Mouais.

Ève – Ça nous porterait chance.

Alban – Tu crois ?

Ève – En tout cas, ça t’occuperait.

Alban – Je ne sais pas.

Silence.

Ève – En même temps, je me demande si ce n’est pas toi qui as raison…

Alban – Sur quoi ?

Ève – Ben… On s’emmerde, non ?

Alban – Oui, c’est bien ce que je disais.

Ève – C’est vrai que ce jardin, on le connaît par c?ur…

Alban – C’est sûrement pour ça qu’il nous paraît de plus en plus petit.

Ève – Si encore on pouvait partir en vacances, de temps en temps.

Alban – En vacances ? Où ça ?

Ève – Ailleurs…

Alban – Mais ailleurs, c’est…

Ève – Oui… On est entourés d’eau et on ne sait pas nager.

Un temps.

Alban – On n’était pas plus nombreux que ça, avant ?

Ève – Avant quoi ?

Alban – Je ne sais pas.

Ève – Plus nombreux ? Tu veux dire trois ?

Alban – Trois, quatre… Plusieurs, quoi.

Ève – Plusieurs toi, et plusieurs moi ? Je ne sais pas.

Alban – J’ai l’impression qu’il y avait plus de monde.

Ève – Où ça ?

Alban – Autour de nous !

Ève – Oui, peut-être.

Alban – Mais alors où ils sont passés ?

Ève – Plus de monde, tu es sûr ?

Alban – Je me demandais juste si…

Ève – Quoi ?

Alban – Est-ce qu’on est les premiers… ou les derniers ?

Ève – En tout cas, pour l’instant, on n’est que deux…

Un temps.

Alban – J’ai même l’impression qu’au début, j’étais tout seul.

Ève – Au début…

Alban – Je crois que toi, tu n’es arrivée qu’après.

Ève – Ah ouais ?

Alban – Ouais.

Ève – Donc, le premier, c’était toi.

Alban – Ouais.

Ève – Alors tu seras peut-être aussi le premier à partir.

Alban – Où ?

Ève – Je ne sais pas. Où j’étais avant d’arriver ici ?

Alban – Ça…

Ève – De l’autre côté de la mer, peut-être.

Alban – Ou au fond.

Ève – Je ne sais pas si c’est profond.

Alban – Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut pas marcher sur l’eau.

Ève – Quand on a essayé, on a failli se noyer.

Un temps.

Alban – C’est curieux, tout de même.

Ève – Quoi ?

Alban – Je n’ai jamais connu quelqu’un d’autre que toi ?

Ève – Connu, tu veux dire…

Alban – Connu, quoi !

Ève – Tu voudrais connaître quelqu’un d’autre que moi ?

Alban – Non, pas spécialement, mais… Savoir que c’est possible. Toi, tu n’aimerais pas connaître quelqu’un d’autre ?

Ève – Je n’y ai jamais réfléchi. Oui, peut-être.

Alban – Savoir qu’on a le choix.

Ève – Ne pas se limiter au premier choix… Préférer le deuxième choix, alors ?

Alban – Là, on ne s’est pas choisis. Puisqu’on n’est que deux.

Ève – Oui, évidemment.

Alban – Comment savoir si on est vraiment faits l’un pour l’autre…

Ève – On n’est que deux, on est forcément faits l’un pour l’autre.

Alban – Oui, c’est sûr…

Un temps.

Ève – À plusieurs, dans ce petit jardin…?

Alban – C’est vrai qu’on aurait du mal à tenir à trois.

Ève – On est déjà tellement à l’étroit.

Alban – À trois… Je crois que je commence à délirer.

Ève – Allez, va me chercher un trèfle à quatre feuilles, plutôt…

Noir

Alban et Ève

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Rejetons

Ce qui ressemble à un jardin, qui peut être un Eden ou un square. Ève est là. Alban arrive. Ils peuvent être en tenue d’Adam, ou pas. Il tourne un peu autour d’elle, et hésite avant de lui tendre la main.

Alban – Bonjour, je m’appelle Alban.

Elle lui sert la main.

Ève – Ève.

Un temps.

Alban – Tu baises ?

Ève – Je ne sais pas…

Alban – Tu ne sais pas comment on fait ?

Ève – Aussi, oui.

Alban – Remarque, moi non plus. Tu es la première femme que je rencontre.

Ève – Pour moi aussi… Tu es le premier…

Alban – Enfin quand je dis la première femme. Je devrais plutôt dire la première personne.

Ève – La première personne ?

Alban – Je ne savais pas que ce serait une femme.

Ève – Bon…

Alban – Alors ?

Ève – J’hésite un peu.

Alban – Tu hésites ?

Ève – Tu te rends compte de ce qu’on s’apprête à déclencher ?

Alban – Non…

Ève – C’est peut-être le début de quelque chose qu’on ne maîtrise pas du tout.

Alban – Le début de…

Ève – Une réaction en chaîne.

Alban – Un truc atomique, tu veux dire ?

Ève – Ça pourrait faire toute une histoire.

Alban – Quelle histoire ?

Ève – Celle de l’humanité ! Notre enfant, ce serait le début d’une interminable lignée.

Alban – Je parlais seulement de tirer un coup.

Ève – Des milliards et des milliards d’humains, qui vont devoir travailler pour gagner leur pain à la sueur de leur front. Parce qu’ici, entre nous, il y a tout juste assez à bouffer pour deux.

Alban – Et encore… Surtout de la salade et des pommes.

Ève – Alors évidemment, il faudra qu’ils se mettent à bosser, tous ces bâtards. À travailler la terre.

Alban – C’est sûr.

Ève – Et après, ils vont se battre entre eux pour la posséder, cette terre.

Alban – Ce n’est pas impossible.

Ève – Toute une lignée de petits salopards qui vont se massacrer joyeusement pendant les siècles des siècles.

Alban – Oui…

Ève – Et bien entendu, qui vont se mettre à forniquer, eux-aussi. À se multiplier. À proliférer, encore et encore.

Alban – C’est clair.

Ève – Et qui vont finir par détruire ce petit coin de paradis avec leurs déjections, leurs pets, leurs rots, et leurs gaz à effet de serre.

Alban – Vu comme ça, évidemment… Ce n’est pas très bandant.

Ève – Ben non.

Alban – Et tu es sûre que…

Ève – Ben oui.

Alban – Bon…

Ève – On va engendrer des générations et des générations d’enfants qui auront des problèmes d’œdipe avec leurs parents ! Et qui toutes les nuits, ne rêveront que d’une chose, c’est de les tuer. Avant pour certains de passer à l’acte.

Alban – Ah oui… Alors, qu’est-ce qu’on fait ?

Ève – Je crois que je vais réfléchir encore un peu.

Alban – Bon, ben… Tiens-moi au courant… (Il s’apprête à repartir) Sinon… je peux faire attention.

Ève – Attention… Ils disent tous ça…

Alban – Tous ?

Ève – Tu ne crois pas que tu es vraiment le premier, quand même ?

Alban – Non, bien sûr, mais… En même temps, on n’est que deux.

Ève – Ah oui ?

Alban – Ben oui… Alban et Ève…

Ève – Je vois… Donc, c’était toi ?

Alban – Moi ?

Ève – La dernière fois. C’était déjà toi…

Alban – Oui, il faut croire.

Ève – Ça ne m’a pas laissé un grand souvenir.

Alban – Dans un sens, tant mieux…

Ève – Tu trouves ?

Alban – Non, je veux dire, que ça ne t’ait pas laissé un mauvais souvenir… Par rapport à ce que tu disais tout à l’heure… Notre premier enfant, tout ça… Et les milliards de rejetons qui s’ensuivraient.

Ève – C’est vrai que ça fout les jetons.

Alban – Oui.

Ève – Tu veux une pomme, en attendant ?

Noir

Alban et Ève

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Scène de crime

Ramirez, inspecteur de police, arrive, suivi par son adjoint Sanchez. Ils jettent un regard autour d’eux.

Ramirez – Vous n’avez touché à rien ?

Sanchez – Non… À quoi j’aurais bien pu toucher ?

Ramirez – C’est vrai que… je n’ai jamais vu une scène de crime aussi… désespérément vide.

Sanchez – Oui…

Ramirez – Pour trouver des indices, ça va être compliqué.

Sanchez – Je ne vois pas ce qu’on pourrait envoyer au labo… à part l’air qu’on respire.

Ramirez – Remarquez, c’est une idée…

Sanchez – Vous voulez que j’envoie un échantillon d’air au labo ?

Ramirez – On ne voit pas l’arme du crime… C’est peut-être une intoxication au gaz.

Sanchez – Seule une autopsie pourrait nous le dire…

Ramirez regarde à nouveau autour de lui.

Ramirez – Une autopsie, d’accord, mais… où sont les cadavres ?

Sanchez cherche aussi du regard.

Sanchez – Apparemment, il n’y a pas de cadavres non plus.

Ramirez – Comment ça, pas de cadavres ? S’il n’y a pas de cadavres, il n’y a pas de crime ! Et s’il n’y a pas de crime, il n’y a pas de scène de crime…

Sanchez – Il doit quand même bien y avoir des victimes. Sinon, on ne serait pas là.

Ramirez – Il y a des victimes, mais il n’y a pas de cadavres ?

Sanchez – Je n’en vois pas…

Ramirez – L’auteur de ce crime aurait fait disparaître les corps… Mais comment ?

Sanchez – J’imagine que nous sommes là pour le découvrir…

Ils jettent à nouveau un regard autour d’eux, puis par terre.

Ramirez – Je ne vois rien.

Sanchez – Ah, je crois que je tiens quelque chose.

Ramirez – Qu’est-ce que c’est ?

Sanchez – Un livre.

Ramirez – Un livre ?

Sanchez (feuilletant le bouquin) – Un livre de théâtre.

Ramirez – À quoi vous voyez que c’est un livre de théâtre.

Sanchez – C’est publié aux Éditions La Comédiathèque.

Ramirez – Vous croyez que ça peut faire avancer notre enquête ?

Sanchez – Allez savoir… (Il continue à lire) C’est troublant… Les personnages là-dedans portent les mêmes noms que nous…

Ramirez – Non ?

Sanchez – L’inspecteur Ramirez et son adjoint Sanchez…

Ramirez – Faites voir… (Il prend le livre et lit quelques pages) Et leur description correspond exactement à celles des victimes sur lesquelles on nous a chargés d’enquêter.

Sanchez – Mais alors… Si on retient cette hypothèse… Nous serions des personnages de théâtre ?

Ramirez – Plus grave que ça : nous serions morts…

Sanchez – Et on nous aurait chargé d’enquêter sur notre propre disparition…?

Ramirez – C’est l’affaire la plus étrange que j’ai eu à traiter au cours de ma longue carrière.

Sanchez – C’est quel genre de pièces ? Comique ? Dramatique ?

Ramirez – Vous savez, moi, le théâtre…

Sanchez – C’est quoi, le titre ?

Ramirez – C’est pas un drame.

Sanchez – Non, je ne dis pas ça, mais… c’est quoi le titre de la pièce ?

Ramirez – C’est pas un drame. C’est le titre de la pièce.

Ils échangent un regard interloqué.

Sanchez – Comment des personnages de théâtre pourraient-ils mourir. Puisqu’ils n’existent pas vraiment.

Ramirez – Tout ça n’est pas banal.

Sanchez – Mourir sur scène, en plus…

Ramirez – Ah parce qu’à votre avis… nous sommes sur une scène de théâtre ?

Sanchez se tourne vers le public.

Sanchez – Regardez tous ces gens, dans le noir… On dirait qu’ils sont venus pour nous voir…

Ramirez – Merde, c’est vrai… C’est qui à votre avis… Des témoins ?

Sanchez – Ils sont peut-être là pour assister à la reconstitution.

Ramirez – C’est dingue… Ne me dites pas qu’en plus, ils ont payé leur place.

Sanchez – Vous n’avez qu’à leur demander.

Ramirez – Vous croyez qu’on peut leur parler ?

Sanchez – Je ne sais pas…

Ramirez – Ça pourrait nous aider pour notre enquête…

Sanchez – Ils ont peut-être vu quelque chose…

Ramirez s’approche d’un spectateur.

Ramirez – Vous avez payé votre place, vous ?

Petite improvisation en fonction de la réponse ou de la non réponse du spectateur.

Sanchez – Et sinon… Vous avez vu quelque chose ?

Ramirez – On va devoir se débrouiller tout seuls, comme d’habitude.

Sanchez – Oui, parce que visiblement, nos personnages n’ont pas laissé un grand souvenir…

Ramirez – C’est hélas le lot du commun des mortels. Ne laisser aucun souvenir après son passage sur terre.

Sanchez – Tout de même… Nous, des personnages de théâtre…

Ramirez – C’est vrai… On aurait pu espérer que ça nous apporte une certaine notoriété…

Sanchez – La pièce était peut-être un navet. Quand c’est un chef d’œuvre, les gens se souviennent des personnages, non ?

Ramirez – Surtout des premiers rôles… Certains personnages deviennent même plus célèbres que leurs auteurs.

Sanchez – Prenez Sherlock Holmes, tout le monde se souvient de lui. Mais qui se souvient du nom de l’auteur de Sherlock Holmes ?

Ramirez – Élémentaire, mon cher Watson. C’est Conan Doyle.

Sanchez – Hélas, vous n’êtes pas Sherlock Holmes.

Ramirez – Ni vous le Docteur Watson.

Sanchez – Sinon, nous aurions déjà résolu cette énigme depuis longtemps.

Ramirez – Que voulez-vous… Nous ne sommes que des personnages secondaires.

Sanchez – Ceux dont personne ne se souvient une fois le rideau baissé… Qui disait que la vie est un songe ?

Ramirez – La vie… Ça paraît long, surtout au début. On commence à dire son texte au premier acte.

Sanchez – On ne se rend pas tout de suite compte que la pièce est écrite d’avance.

Ramirez – Et puis petit à petit, on se souvient des mots en les disant.

Sanchez – Jusqu’à ce qu’on s’en souvienne avant de les avoir dits.

Ramirez – Et quand l’histoire touche à sa fin… On espère seulement ne pas rater sa sortie…

Sanchez – Ça sent un peu le renfermé, ici, non ?

Ramirez – C’est l’odeur du théâtre.

Sanchez – La bonne nouvelle, c’est qu’on a réussi à retrouver les corps.

Ramirez – Oui… Et on dirait qu’ils commencent à sentir.

Sanchez – L’odeur des personnages en décomposition… Ceux de tous navets qui n’ont pas tenu l’affiche.

Sanchez – Les pièces qui n’ont pas su rencontrer leur public, comme on dit…

Ramirez – Celle dans laquelle on a joué ne devait pas être dans l’air du temps… Prélevez un échantillon de l’air ambiant. On l’enverra au labo pour vérification.

Sanchez sort une petite bouteille de sa poche, ouvre le bouchon, attend un instant, puis referme le bouchon et remet la bouteille dans sa poche.

Sanchez – Et voilà. La pièce est finie.

Ramirez – C’est le moment de quitter la scène. Définitivement. Pour nous, c’était la dernière séance…

Sanchez – On n’a qu’à sortir par là.

Ramirez – Dire que tous ces pauvres gens ont payé leur place…

Sanchez – C’est pas un drame.

Ramirez – On aurait dû appeler ça « Autopsie d’un four ».

Sanchez – J’aurais préféré jouer dans un chef d’œuvre… Pour passer à la postérité.

Ramirez – La prochaine fois, peut-être…

Ils sortent.

Noir. Fin.

Mélimélodrames

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Changement de décor

Le faisceau d’une lampe torche dans l’obscurité. Puis un deuxième. Le premier éclaire le visage de la deuxième.

Lui – Ah, c’est toi ! Tu m’as fait peur…

Elle – Alors ?

Lui – Ça y est, tout est dans le camion.

Elle – Ça s’est bien passé ?

Lui – La routine.

Elle dirige le faisceau vers le public.

Elle – Donc, il n’y avait personne…

Lui – Avec le vacarme qu’a fait le clébard quand je suis arrivé… S’il y avait quelqu’un dans la maison, il se serait déjà réveillé.

Elle – Ou alors, c’est qu’il est mort.

Lui – Ne parle pas de malheur. Tu imagines un peu ? Tu rentres dans une baraque la nuit pour la cambrioler, et tu tombes sur un macchabée…

Elle – Avec la poisse que j’ai en ce moment, ça ne m’étonnerait qu’à moitié.

Lui – Ouais… J’ai vu ça dans un film, une fois. Je ne sais plus comment ça s’appelait…

Elle – Tu me raconteras ça une autre fois. Et, le clébard… Ça va ?

Lui – Merci de t’inquiéter de savoir si je ne me suis pas fait mordre…

Elle – Tu t’es fait mordre ?

Lui – Il a déchiré mon pantalon. J’ai dû l’assommer…

Elle – S’il n’y a personne, on peut allumer, non ?

Lui – Vassy, les maisons tout autour sont inoccupées. C’est surtout des résidences secondaires. Sans parler de ceux qui ont déjà déménagé.

Elle – À cause des cambriolages, sûrement.

Lui – Si ça continue, il n’y aura plus que des maisons vides à cambrioler dans la région.

Elle actionne un interrupteur et la lumière se fait. Les vêtements de l’homme sont en lambeaux.

Elle – Ah oui, il t’a bien arrangé. Pauvre bête… Tu ne lui as pas fait trop mal, au moins ?

Lui – Pourquoi ? Tu veux faire un signalement à la SPA ?

Ils jettent un regard circulaire sur les lieux.

Elle – Tu as fait le grand nettoyage, dis donc. Il n’y a plus rien.

Lui – Tout est rentré dans le camion.

Elle – Des choses intéressantes ?

Lui – Des meubles surtout. Des bibelots. Plutôt de mauvais goût.

Elle – Je vois…

Lui – Genre nouveau riche.

Elle – Il vaut mieux être un nouveau riche qu’un nouveau pauvre.

Lui – En revanche, il y avait un coffre-fort.

Elle – Non ?

Lui – J’en suis venu à bout.

Elle – Combien ?

Lui – Tout est dans le camion. Je n’ai pas compté.

Elle – On verra ça tout à l’heure. On ne va pas traîner ici. Tu as regardé dans les autres pièces ?

Lui – J’ai tout vidé. Tu es venue avec Momo ?

Elle – J’ai piqué un roupillon dans la voiture en venant, je ne sais même pas où on est. (Elle regarde à nouveau autour d’elle) C’est fou ce qu’une maison vide peut ressembler à une autre.

Lui – Oui…

Elle – Tu es sûr que c’est la bonne maison ?

Lui – Tu as vu la croix, en bas, sur la façade. Momo a fait le repérage dans le coin la semaine dernière.

Elle – Ouais… Le genre de croix qui veut dire objets de valeurs, pas d’alarme, effraction facile…

Lui – Il ne s’était pas trompé. Sauf pour le chien. Il devait dormir quand il est passé.

Elle – C’est bizarre. Cette maison me dit vaguement quelque chose…

Lui – Des gens que tu connais, peut-être…

Elle – Peut-être…

Elle ramasse quelque chose par terre.

Lui – Qu’est-ce que c’est ?

Elle – Une quittance EDF.

Lui – Ça a dû tomber d’un tiroir.

Elle – Elle est à mon nom…

Lui – Non…?

Elle – Je me disais bien aussi…

Lui – Tu veux dire que…

Elle – On est chez moi ! Je rêve… Vous avez cambriolé chez moi !

Lui – Comment je pouvais savoir, moi ! Il y avait la croix sur le mur. Tu n’as pas dit à Momo où tu habitais ?

Elle – Non… Et toi ?

Lui – Ça ne m’est pas venu à l’idée…

Elle – Oh putain… Il y avait une chance sur mille…

Silence.

Lui – Bon… Ben le déménagement sera plus vite fait…

Elle – Je n’avais pas l’intention de déménager.

Lui – Alors qu’est-ce qu’on fait ?

Elle – Que veux-tu qu’on fasse ? On n’a plus qu’à remettre les meubles en place. Tu sais, les meubles et les bibelots de mauvais goût. Genre nouveau riche…

Lui – OK…

Elle – Et puis tu vas me rendre mon fric. J’aurai peut-être assez pour me payer un nouveau coffre-fort avec. Maintenant que t’as percé le mien…

Lui – Tu n’as rien à regretter de ce côté-là. C’était de la camelote. J’en suis venu à bout en cinq minutes…

Elle – C’est dingue. J’espère que le chien s’en sortira, au moins…

Lui – Tu te préoccupes encore de ce putain de clébard ?

Elle – C’est le mien ! C’est mon chien que tu as assommé !

Lui – Ah oui, c’est vrai, excuse-moi… Bon, ça va, il s’en remettra.

Elle – Oui… Il était allongé devant sa niche quand je suis passée. Je me demandais pourquoi il n’avait pas aboyé quand il m’a vue.

Lui – Il a reconnu sa maîtresse, forcément.

Elle – Ouais… Et moi, je n’ai même pas reconnu ma propre baraque…

Lui – Et après on va dire que les bêtes sont moins intelligentes que nous.

Elle – Bon, alors au boulot. Parce qu’on n’a pas fini, hein…

Lui – Sinon, on déclare le cambriolage, et tu te fais rembourser par l’assurance.

Elle – Tu crois ?

Lui – On se débarrasse de tout ce bazar, si on arrive à le refourguer à quelqu’un. Et tu en profites pour changer la déco…

Elle – Ouais… Et puis ça évitera un changement de décor au metteur en scène.

Lui – On sort par la cour ou par le jardin ?

Ils sortent.

Noir.

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Auteur anonyme

Elle est là, debout au milieu de la scène vide, et jette un regard autour d’elle. Il arrive.

Lui – Ah, tu es là ! Je te cherchais partout…

Elle – Ça y est, le dernier camion vient de partir avec les derniers cartons.

Lui – Tu as regardé partout ? Il ne reste plus rien dans la maison ?

Elle – Plus rien. À part nos souvenirs…

Il pose une main sur son épaule.

Lui – Allez… On va s’en fabriquer d’autres !

Elle – Bien sûr… Mais les projets, ça n’empêche pas la nostalgie.

Lui – Tu regrettes ?

Elle – Non…

Lui – Tu te souviens la première fois où on est entrés dans cette maison, pour la visiter ?

Elle – Elle était vide aussi.

Lui – Et entre ces deux vides, on a vécu. On a rempli cette maison. De meubles. De tableaux. D’enfants…

Elle – Et elle nous a remplis. De joie. De bonheur. De souvenirs.

Lui – On les emporte avec nous.

Elle – Et on laisse cet endroit presqu’aussi propre qu’on l’a trouvé en entrant.

Lui – Beaucoup plus propre, si tu veux mon avis.

Elle – Qui seront les suivants ? On ne sait rien d’eux.

Lui – Et iIs ne sauront rien de nous.

Elle – Comme nous ne savons rien de ceux qui nous ont précédés ici.

Lui – Les gens passent, les maisons restent.

Elle – Jusqu’à ce que les maisons s’écroulent elles aussi. Ou qu’on les démolisse. Pour construire des immeubles à la place.

Lui – Il y a aussi des maisons hantées par de mauvais souvenirs.

Elle – Oui… Toutes les maisons ont une histoire. Des histoires.

Lui – Comme l’histoire d’un crime, par exemple.

Elle – Un crime ?

Lui – Tous les crimes n’ont pas lieu en plein air, tu sais. La plupart sont perpétrés à domicile. En famille, souvent… Et quand ce crime fait la une des faits divers, la maison devient invendable. J’imagine que parfois, on doit même finir par la démolir, pour en reconstruire une autre à la place. Une maison sans histoire…

Elle – Merci, ça me remonte le moral, ce que tu dis.

Lui – On ne sait pas… Peut-être que cette maison, avant nous, n’a pas abrité que des moments heureux.

Elle – En tout cas, on n’a jamais trouvé de cadavres dans les placards.

Lui – Peut-être que si on avait creusé dans la cave…

Elle – Bon… Ben du coup, je préfère autant qu’on y aille, maintenant.

Lui – Tu vois ? Il suffisait de demander…

Elle – Merci… Je sais que je peux toujours compter sur toi dans les moments difficiles.

Ils se dirigent vers la sortie. Elle se baisse et ramasse quelque chose par terre.

Lui – Qu’est-ce que c’est ?

Elle – Un manuscrit, apparemment.

Lui – Un manuscrit ?

Elle – On dirait une pièce de théâtre.

Lui – À quoi tu vois ça ?

Elle feuillette le manuscrit.

Elle – Avec des gens qui parlent, si tu préfères. Pas comme un roman.

Lui – Je vois… Des dialogues…

Elle – Ou alors, c’est le scénario d’un film.

Lui – Ça parle d’un crime ?

Elle – Je ne sais pas.

Lui – Il avait dû rester coincé derrière un radiateur, et avec le déménagement, il est tombé par terre. Le papier est complètement jauni.

Elle – Mais ça reste lisible. Après toutes ces années. Tu te rends compte ?

Lui – C’est quoi ? Une comédie ? Un drame ?

Elle – Il faudrait le lire.

Lui – Qui a bien pu écrire ça ?

Elle – Quelqu’un qui habitait ici avant nous, j’imagine.

Lui – C’est dingue… Et si c’était un chef d’œuvre…

Elle – Ça peut aussi être un navet.

Lui – C’est signé ?

Elle – Non… Je ne vois pas le nom de l’auteur.

Lui – C’est peut-être inédit. Un manuscrit anonyme, tu te rends compte ? Tu pourrais le signer et le publier… Tu es éditrice. Pour toi, ce serait facile.

Elle – Ce serait un plagiat.

Lui – Si l’auteur est mort. Et que personne ne sait qu’il a écrit ça…

Elle – Je vais commencer par le lire…

Lui – C’est bizarre, non ?

Elle – Quoi ?

Lui – On quitte cette maison, et c’est l’histoire de quelqu’un d’autre qu’on emporte avec nous.

Elle – J’espère que ce n’est pas un drame…

Lui – Au moins, on n’a pas trouvé de cadavre.

Elle – Ça me donnerait presque envie de chercher…

Lui – Tu crois ?

Elle – L’auteur est peut-être enterré dans la cave…

Ils s’en vont.

Noir.

Mélimélodrames

Auteur anonyme Lire la suite »

Huis clos

Un couple. Quatre chaises. Ils sont assis.

Elle – Ça va ?

Lui – Ça va… Et toi ?

Elle – Ça va… (Un temps) Tu veux boire quelque chose ?

Lui – Quoi ?

Elle – Un apéro ? Des cacahuètes ?

Lui – Merci, ça ira.

Un temps.

Elle – On est bien, ici, non ?

Lui – Ici ?

Elle – Dans cette maison.

Lui – Oui… (Un temps) Mais on n’est pas chez nous.

Elle – Ah, non ?

Lui – Non.

Elle – C’est vrai.

Lui – C’est une maison, ou un appartement ?

Elle – Un appartement, je crois. Je ne sais pas.

Un temps.

Lui – Tu te souviens où c’est, notre maison ?

Elle – Notre maison ?

Lui – Notre vraie maison. Chez nous !

Elle – Non… Et toi ?

Lui – Moi non plus. Je ne sais même plus à quoi ça ressemblait.

Elle – On a tellement déménagé.

Lui – C’est vrai. On déménage beaucoup.

Elle – Oui. De plus en plus.

Lui – Il faudrait qu’on arrive à se souvenir.

Elle – De quoi ?

Lui – Où on habite.

Elle – Toutes les maisons se ressemblent un peu.

Lui – Même quand c’est un appartement.

Elle – Il y a des chambres. Une salle à manger. Une cuisine.

Lui – Dans la cuisine, il y a un frigo, une cuisinière, une table, des tiroirs…

Elle – Dans les tiroirs, il y a des fourchettes, des couteaux, des petites cuillères.

Lui – Dans les chambres, il y a des enfants. Parfois…

Elle – Quand il n’y en a pas, c’est qu’ils sont déjà partis. Dans une autre maison.

Un temps.

Lui – Tu crois qu’ils reviendront un jour ?

Elle – Les enfants ?

Lui – Les propriétaires !

Elle – Va savoir… Ça fait combien de temps qu’on est là ?

Lui – Je ne sais pas… Pas mal de temps, non ?

Elle – Oui.

Lui – J’ai toujours peur qu’on sonne à la porte, et que ce soit eux.

Elle – Les enfants ?

Lui – Ceux qui habitent ici ! Les vrais propriétaires…

Elle – Ah oui…

Lui – Pas toi ?

Elle – Si. D’ailleurs, je me demande si elle marche.

Lui – Quoi ?

Elle – La sonnette ! On ne l’a jamais entendue.

Lui – De toute façon, quand les gens qui habitent ici reviendront, ils ne sonneront pas.

Elle – Pourquoi ça ?

Lui – C’est chez eux ! Ils auront la clef.

Elle – Bien sûr.

Lui – Quand les gens rentrent chez eux, ils ne sonnent pas. Ils n’ont aucune raison de penser qu’il y a quelqu’un à l’intérieur quand ils ne sont pas là.

Elle – C’est vrai… On a la clef, nous ?

Lui – Je ne sais pas. Tu as la clef, toi ?

Elle – Non.

Lui – Moi non plus.

Elle – Alors comment on est rentrés ici ?

Lui – Je ne me souviens plus.

Elle – On nous a peut-être ouvert.

Lui – Qui est-ce qui aurait bien pu nous ouvrir ?

Elle – Les propriétaires ?

Lui – Mais puisqu’on est seuls dans cet appartement.

Elle – Depuis combien de temps ?

Lui – Je ne sais pas…

Un temps.

Elle – C’est sûrement pour ça qu’on ne sort jamais. On ne pourrait plus rentrer.

Lui – Non. Puisqu’on n’a pas la clef.

On sonne. Ils échangent un regard inquiet.

Elle – Tu crois que c’est eux ?

Lui – On a dit que si c’était eux, ils ne sonneraient pas.

Elle – Alors qui ça peut bien être ?

Lui – Va savoir…

Elle – Qu’est-ce qu’on fait ?

Lui – Il faut aller ouvrir, non ?

Elle – Tu crois ?

Lui – Ils ont vu la lumière. Ils savent qu’on est là.

Elle – Cette fois, ça y est… On est foutus…

Lui – On va encore devoir déménager.

Elle – Mais où est-ce qu’on va aller ?

Lui – Je vais faire notre valise.

Elle – On a une valise ?

Lui – Tout le monde a une valise chez lui, non ?

Elle – Je vais leur ouvrir…

Lui – Qu’est-ce que tu vas leur dire ?

Elle – Je ne sais pas…

Lui – Il va bien falloir leur dire quelque chose, pour expliquer le fait qu’on est là. Chez eux.

Elle – Ils rentrent peut-être de vacances.

Lui – Je vais voir si on a une valise.

Elle sort. Il sort aussi. Elle revient avec un autre couple. Jean-Marc a une bouteille à la main, et Christelle un bouquet de fleurs. Il revient avec une valise.

Elle – C’est Jean-Marc et Christelle.

Lui – Ah, bonjour…

Jean-Marc – Salut. Ça va ?

Lui – Ça va, et vous ?

Christelle – Super. Vous partez en vacances ?

Lui – Non, pourquoi ?

Jean-Marc – Comme tu as une valise à la main…

Lui – Ah, oui, non, c’est… Je m’apprêtais à la ranger. Vous savez ce que c’est, les valises, on ne sait jamais où les mettre.

Elle – Et une valise vide, ça prend autant de place qu’une valise pleine.

Christelle – Oui. Mais c’est moins lourd.

Jean-Marc – C’est vrai. On devrait partir en vacances avec des valises vides. On voyagerait plus léger.

Ils rient tous les quatre d’un rire un peu forcé.

Christelle – Alors comment ça va ?

Lui – Ça va.

Jean-Marc – Tenez, j’ai apporté du champagne, pour fêter ça.

Lui – Fêter quoi ?

Jean-Marc éclate de rire.

Jean-Marc – Fêter quoi ? Toujours le mot pour rire, hein ?

Christelle – Il est drôle ! Tenez, moi j’ai apporté des fleurs.

Elle – Ah oui, c’est bien aussi.

Lui – Je vais aller chercher des flûtes.

Elle – Tu veux qu’on leur joue de la flûte ?

Jean-Marc – Des flûtes ! Pour le champagne !

Elle – Ah oui !

Ils rient à nouveau.

Christelle – Elle est drôle !

Elle – Et moi je vais chercher un vase. Pour les fleurs.

Christelle – Vous ne voulez pas qu’on vous aide ?

Lui – Pensez-vous !

Elle – Mais asseyez-vous donc !

Lui – Faites comme chez vous.

Elle – Vous connaissez la maison.

Ils sortent tous les deux.

Jean-Marc (souriant) – Qu’est-ce qu’ils sont drôles…

Christelle – Oui…

Jean-Marc – Ils n’ont pas changé. Toujours aussi…

Christelle – Tu trouves ?

Jean-Marc – Quoi ?

Christelle – Qu’ils n’ont pas changé.

Jean-Marc – Maintenant que tu le dis, c’est vrai que…

Christelle – Non, mais ils ne ressemblent pas du tout à…

Jean-Marc – Si, un peu quand même…

Christelle – Mouais…

Jean-Marc – Et puis tu sais, les gens… Ils changent…

Christelle – Pas à ce point là… Pas en une semaine…

Jean-Marc – C’était il y a une semaine ?

Christelle – C’était la semaine dernière. La dernière fois qu’on les a vus.

Jean-Marc – C’est vrai qu’ils ont beaucoup changé.

Un temps.

Christelle – Ou alors, ce n’est pas eux.

Jean-Marc – Pas eux ? Mais qu’est-ce qu’ils feraient ici ? Si ce n’est pas chez eux…

Un temps.

Christelle – Tu crois qu’on aurait pu se tromper de porte ?

Jean-Marc – Je ne pense pas… Et puis eux, ils ont l’air de nous connaître, non ? Si ils nous connaissent, c’est qu’on les connaît aussi.

Christelle – Oui, évidemment…

L’homme revient.

Lui – Je suis vraiment désolé, je n’ai pas trouvé les flûtes.

Christelle – Ah, les hommes…

Jean-Marc – Tu n’as qu’à demander à ta femme.

La femme revient aussi.

Lui – Tu sais où sont les flûtes, chérie ?

Elle – Non… Il n’y en a peut-être pas…

Christelle – Comment ça ? Vous n’avez pas de flûtes ? Tout le monde a des flûtes à champagne, non ?

Jean-Marc – Ce n’est pas grave. On va le boire dans des verres, ce champagne.

Christelle – Vous avez bien des verres à pied ? (Ils n’ont pas l’air sûrs) Des verres à moutarde ?

Lui – Je n’ai rien vu…

Elle – Je n’ai pas trouvé de vase non plus.

Christelle – Des verres, tout de même. Dans une cuisine…

Elle – Je n’ai pas trouvé la cuisine.

Moment d’embarras.

Jean-Marc – Bon… Vous savez quoi ? On le boira à la bouteille, ce champagne. Comme les Russes !

Christelle – Les Russes boivent le champagne à la bouteille ?

Jean-Marc – Les Cosaques, sûrement. Sans même descendre de leur cheval. En sabrant la bouteille avec…

Christelle – Avec leur sabre.

Elle – En attendant, asseyez-vous, je vous en prie.

Ils s’asseyent tous les quatre. Sourires. Silence embarrassé.

Lui – Et les enfants, ça va ? (Jean-Marc et Christelle, qui n’ont visiblement pas d’enfants, échangent un regard perplexe) Non, je voulais dire, les enfants en général. Pas spécialement les vôtres. Si vous n’en avez pas…

Elle – Ou plus… Je veux dire… Vous pourriez en avoir, et qu’ils soient morts.

Lui – On n’a pas dit que c’était le cas.

Malaise.

Elle – Je vais voir si je trouve des cacahuètes…

Elle sort.

Lui – En tout cas, c’est sympa d’être passés nous voir.

Christelle – On est amis, non ?

Lui – Bien sûr.

Jean-Marc et Christelle échangent un regard embarrassé. Christelle fait signe à Jean-Marc de se lancer.

Jean-Marc – Ma question va te paraître idiote, mais… vous habitez vraiment ici ?

Lui – Pourquoi vous me demandez ça ?

Christelle – Ben… Nos amis qui habitent ici ne vous ressemblent pas du tout.

Jean-Marc – En tout cas, la dernière fois qu’on est venus, ils ne ressemblaient pas du tout à ça…

Elle revient.

Elle – Ça y est, j’ai trouvé les cacahuètes !

Christelle – Vous avez trouvé la cuisine…?

Elle – J’ai même trouvé des verres.

Jean-Marc – Alors on peut boire l’apéro !

Christelle – Allez…

Jean-Marc débouche la bouteille, et remplit les verres. Ils trinquent.

Jean-Marc – À votre santé !

Lui – À l’amitié !

Ils boivent.

Elle – Prenez des cacahuètes.

Ils mangent des cacahuètes.

Christelle – Je n’ai jamais osé vous poser la question, mais…

Lui – Oui…?

Christelle – Vous vous êtes rencontrés où, tous les deux ? (Silence embarrassé) Excusez-moi d’avoir été aussi indiscrète. Je ne sais pas ce qui m’a pris…

Elle – Non, non, pas du tout, c’est juste que…

Lui – On ne sait plus très bien.

Christelle – Vous ne savez plus ?

Jean-Marc – Vous ne savez plus où vous vous êtes rencontrés ?

Un temps.

Elle – Je dirais ici, non ?

Christelle – Ici ?

Elle – Un jour, on s’est rendu compte qu’on habitait le même appartement.

Lui – Oui, c’est curieux… Je crois que ça s’est passé comme ça.

Elle – C’était il y a un certain temps, évidemment.

Lui – Oui… Une semaine, peut-être.

Elle – Oui, c’est ça, une bonne semaine.

Christelle – Ah oui, quand même…

Lui – Et vous ?

Jean-Marc – Nous ?

Elle – Vous vous connaissez depuis longtemps ?

Christelle – Non, pas très…

Jean-Marc – Je dirais… Oui, pas très longtemps.

Christelle – On s’est rencontrés dans le hall de l’immeuble, en bas.

Jean-Marc – J’avais une bouteille de champagne à la main.

Christelle – Et moi un bouquet de fleurs.

Jean-Marc – On s’est dit qu’on allait sûrement au même endroit.

Christelle – Comme je n’avais pas le code…

Jean-Marc – Moi non plus. J’ai sonné sur plusieurs boutons, au hasard. Vous êtes les premiers à nous avoir ouvert la porte.

Christelle – Comme il avait l’air de savoir où il allait, je l’ai suivi.

Lui – Ah, oui…

Elle – Oui, c’est… une belle histoire.

Lui – Très romantique.

Elle – Vous verrez que ça finira par un mariage.

Jean-Marc et Christelle échangent un regard gêné.

Jean-Marc – Donc, si je comprends bien, personne ici ne se connaît vraiment.

Elle – Apparemment non…

Christelle – Et personne n’a rien à faire dans cette maison.

Lui – Visiblement pas…

Jean-Marc – Mais alors on est chez qui ?

Silence.

Christelle – Vous reprendrez bien un peu de champagne ?

Elle – Merci, mais il est tard. On va peut-être vous laisser.

Lui – En tout cas, merci de votre hospitalité.

Jean-Marc – Mais de rien, je vous en prie.

Il prend la valise, et se dirige avec elle vers la sortie.

Christelle – Je vous raccompagne ?

Elle – Ne vous dérangez pas, on connaît le chemin.

Jean-Marc – Vous voulez que je vous aide avec la valise.

Lui – Non… Ça ne pèse rien… Elle est vide.

Christelle – Eh bien… À une autre fois, alors !

Jean-Marc – Et merci de votre visite !

Ils sortent. Jean-Marc et Christelle se rasseyent. Silence.

Christelle – Ça va ?

Jean-Marc – Ça va… Et toi ?

Christelle – Ça va… (Un temps) Tu veux reboire quelque chose ?

Jean-Marc – Merci, ça ira.

Christelle – Des cacahuètes ?

Il prend une poignée de cacahuète et commence à les mastiquer.

Christelle – On est bien, ici, non ?

Lui – Oui… (Un temps) Mais on n’est pas chez nous.

Elle – C’est vrai.

Lui – C’est une maison, ou un appartement ?

Elle – Un appartement, je crois.

Noir.

Mélimélodrames

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Fatal comique

Sur une table basse, une cafetière, deux tasses et un journal. Pierre entre en robe de chambre. Il se sert une tasse de café et prend le journal pour le lire. Marie, sa femme, arrive.

Marie – Ça va ?

Pierre – Ça va.

Marie se sert une tasse et observe Pierre.

Marie – Tu as l’air soucieux… Un problème ?

Pierre – Non… Enfin… Toujours pas d’idée pour ma nouvelle pièce.

Marie – Ne t’inquiète pas, ça va venir… Ça finit toujours par venir, non ?

Pierre – Oui… Jusqu’à maintenant…

Marie – Il n’y a pas une bonne histoire, dans le journal, dont tu pourrais t’inspirer ?

Il repose le journal.

Pierre – Les nouvelles sont de plus en plus déprimantes… Je crois que je vais arrêter de lire la presse. J’ai déjà arrêté de regarder la télé et d’écouter la radio…

Marie – C’est vrai que tout ça n’est pas très gai, mais bon. D’un autre côté… c’est pour ça qu’on aura toujours besoin d’auteurs comme toi.

Pierre – Ah oui ? Et c’est quoi, un auteur comme moi ?

Marie – Tu sais bien… Quelqu’un pour nous faire rire… Un comique !

Pierre – Un comique ? Alors c’est comme ça que tu me vois ? Comme un comique !

Marie – Il faut bien des auteurs pour nous écrire de bonnes comédies ! Oublier un peu nos soucis… Nous faire passer un bon moment en ne pensant à rien…

Pierre – En ne pensant à rien ?

Marie – Excuse-moi… Je veux dire… en pensant à autre chose.

Pierre – Je vois… Donc pour toi, je suis seulement un amuseur… Un type qui fait diversion… Qui détourne l’attention du peuple des vrais problèmes de la société…

Marie – Le peuple ! Tout de suite, les grands mots… Divertir le public, il n’y a pas de honte à ça, si ?

Pierre – Je ne sais pas… On peut aussi avoir envie d’autre chose…

Marie – Quoi, par exemple ?

Pierre – D’être utile…

Marie – Pour moi, distraire les gens, leur faire retrouver le sourire, c’est très utile. Et ce n’est pas donné à tout le monde d’avoir ce talent.

Pierre – Ouais…

Marie – Quoi ?

Pierre – Des comédies, j’en ai déjà écrit près d’une centaine.

Marie – Et ça a toujours été de gros succès.

Pierre – Oui, mais je commence à être à court d’idées. Je me demande si je n’en ai pas fait le tour.

Marie – Tu veux arrêter d’écrire ?

Pierre – Ça je ne suis pas sûr d’y arriver non plus… Non, je me demandais si…

Marie – Quoi ?

Pierre – Et si j’essayais un autre genre ?

Marie – Un roman, tu veux dire ? Depuis des années, je te répète que tu devrais essayer. Il y a des romans très drôles, aussi…

Pierre – Malheureusement, je ne suis pas romancier, je le sais bien. Le théâtre, je ne sais rien faire d’autre.

Marie – Bon, alors il ne te reste plus qu’à trouver un bon sujet de comédie.

Pierre – Et si j’écrivais… un autre genre de pièces.

Marie – Un autre genre de pièce ?

Pierre – Un truc qui ne soit pas forcément drôle, tu vois ?

Marie – Une comédie pas drôle ?

Pierre – Non, pas une comédie, justement !

Marie – Tu veux dire… une comédie dramatique ?

Pierre – Je veux dire pas une comédie du tout !

Marie – Tu veux écrire un drame ?

Pierre – Un drame, une tragédie… Appelle ça comme tu veux.

Marie – Bon…

Pierre – Quoi ?

Marie – Je ne sais pas… (Silence) Tu es sûr que ça va ?

Pierre – Je n’ai plus d’idée de comédie. Je voudrais essayer d’écrire autre chose. C’est pas un drame, non plus !

Marie – OK… (Un temps) Tu veux encore du café ?

Pierre – Non, merci.

Marie – Bon, alors je te laisse réfléchir… à ta nouvelle pièce.

Elle sort. Il soupire et ouvre à nouveau son journal. Le téléphone sonne. Il répond.

Pierre – Oui ? Ah oui… Non, non, je voulais t’appeler justement… Écoute, je ne sais pas encore… Non, pour l’instant, je suis en panne d’inspiration. Oui, je sais, j’ai toujours dit que ça n’existait pas. Mais tu sais l’inspiration, c’est comme Dieu. On dit que ça n’existe pas jusqu’au moment où on en a vraiment besoin… Et toi, ça va ? Bon… Je vois… D’accord… Écoute, il va falloir que je te laisse, là… On s’appelle et on essaie de déjeuner ensemble la semaine prochaine ? OK, on fait comme ça… Salut, t’embrasse.

Marie revient, l’air un peu embarrassé.

Marie – Je dois faire quelques courses, je n’en ai pas pour longtemps. Ça va ?

Pierre – Euh… Oui. Depuis tout à l’heure, la situation n’a pas beaucoup évolué, mais oui. Ça va.

Marie – Bon, alors j’y vais.

Pierre – C’est ça. À tout à l’heure.

Elle sort. Il reprend la lecture de son journal, mais à peine a-t-il commencé que la sonnette de la porte d’entrée retentit. Il sort un instant pour aller ouvrir et revient accompagné d’une femme.

Alex – Je ne te dérange pas, j’espère ?

Pierre – Non, non, pas du tout, j’étais en train de… Tu veux un café ?

Alex – Merci, ça ira.

Pierre – C’est sympa de passer comme ça à l’improviste.

Alex – Quand on habite le même immeuble que son agent, c’est toujours un risque de le voir débarquer sans avoir été invité…

Pierre – Il va peut-être falloir que je déménage, alors…

Sourires, suivi d’un silence embarrassé.

Alex – Tu es sur quoi, en ce moment ?

Pierre – Rien… J’étais au téléphone avec… Comment elle s’appelle, déjà… Tu sais, cette comédienne qui jouait dans… Elle est devenue éditrice.

Alex – Éditrice ?

Pierre – Tu sais ce que c’est. La vie est cruelle pour les comédiennes. Surtout pour les jeunes premières. Passée la trentaine…

Alex – Tu cherches un nouvel éditeur ?

Pierre – Pas spécialement… C’est elle qui m’a appelé. Elle voulait juste prendre de mes nouvelles… Ça commence à m’inquiéter. Tout le monde me demande si ça va aujourd’hui…

Alex – Et… ça va ?

Pierre – Ça va, je te remercie… C’est dingue…

Alex – Quoi ?

Pierre – Je termine la conversation en lui disant : « on se rappelle et on déjeune…? » Ça m’est sorti comme ça. L’habitude. Finalement, on aurait aussi bien pu déjeuner ensemble à midi.

Alex – Qu’est-ce que tu veux… C’est Paris… On est tous débordés…

Pierre – Ou alors on a rien à foutre et on fait semblant…

Alex – Ouais…

Pierre – Toi, par exemple. Tu es particulièrement débordée, aujourd’hui ? (Silence) Non, évidemment, sinon, tu ne serais pas là. Tu imagines ? Tu acceptes de déjeuner comme ça à l’improviste… Le lendemain, tout Paris va savoir que tu n’as rien à foutre de tes journées. Que plus personne ne veut travailler avec toi. Que tu es au chômage. Ou pire que tu es sur liste noire… Du coup, plus personne ne t’appellerait, et tu serais vraiment total has been.

Alex – Ouais… (Silence) Et sinon, elle, ça va ?

Pierre – Qui ça ?

Alex – Ton éditrice !

Pierre – Je ne sais pas… Tu as raison… Finalement, c’est peut-être elle qui ne va pas bien. Elle m’a appelé parce qu’elle avait besoin de parler à quelqu’un. Et moi, je lui ai presque raccroché au nez… J’aurais dû lui proposer de déjeuner avec elle à midi… Et toi, ça va ?

Alex – Ça va…

Pierre – Tu es sûre que tu ne veux pas du café ?

Alex – Sûre… (Silence) Tu écris un peu, en ce moment ?

Pierre – Non, pas vraiment. Je crois que je suis arrivé au bout de quelque chose là. Il faudrait que je change un peu de style.

Alex – Oui, je sais, j’ai croisé Marie dans l’escalier.

Pierre – Ne me dis pas que c’est pour ça que tu es passée me voir.

Alex – Alors comme ça, tu veux écrire un drame.

Pierre – Oui, enfin… Pourquoi pas ?

Alex – C’est une blague, c’est ça ?

Pierre – Tu vois, Alex, c’est ça mon problème. La simple idée que j’envisage d’écrire autre chose qu’une comédie, les gens prennent ça pour une blague.

Alex – Disons que… ce n’est pas sur ce terrain-là qu’on t’attend habituellement.

Pierre – Et ?

Alex – Ça risque de surprendre ton public… De le décevoir, peut-être…

Pierre – Le décevoir ? Je n’ai encore pas écrit une ligne, et tu me dis déjà que ce sera décevant. Merci de tes encouragements. Au moins, je sais pourquoi j’ai un agent.

Alex – Et… tu as déjà un sujet ?

Pierre – Non… C’est juste une idée…

Alex – Bon, donc c’est juste une idée.

Pierre – C’est ça…

Alex – Excuse-moi, je me suis peut-être emballée un peu vite.

Pierre – Je ne sais pas… Je pensais écrire quelque chose sur ces migrants qui viennent s’échouer sur nos côtes. Quand ils ne sont pas morts noyés pendant la traversée, évidemment…

Alex – Une comédie, tu veux dire ? (L’autre lui lance un regard navré) Excuse-moi, je ne sais pas pourquoi j’ai dit ça… Alors c’est sérieux, tu veux vraiment écrire quelque chose de…

Pierre – Je n’ai plus vingt ans… Toi non plus… Il serait peut-être temps qu’on commence à s’interroger sur le monde qui nous entoure, non ?

Alex – Le monde qui nous entoure ?

Pierre – Imagine qu’après notre mort, on soit réincarnés. Comme ça. Au hasard. Le monde est principalement peuplé de gens qui ont une vie de merde. Si on peut appeler ça une vie. Si on y réfléchit bien, à part une minorité de privilégiés, dont les plus chanceux vivent dans des paradis fiscaux, la Terre est un enfer.

Alex – Et alors ?

Pierre – Et alors ? Statistiquement, la réincarnation, c’est l’enfer assuré… Si on ne change pas le monde de notre vivant, on est à peu près certain de vivre un enfer quand on sera réincarnés !

Alex le regarde, estomaquée.

Alex – OK…

Pierre – Je te laisse réfléchir à ça. Je vais m’habiller…

Il sort. Marie revient.

Marie – Alors ?

Alex – Il va très mal.

Marie – Je te l’avais dit.

Alex – Il est en plein délire. Il parle de la mort. Du paradis. De l’enfer.

Marie – Non ?

Alex – Il veut écrire une pièce sur les exilés.

Marie – Les exilés fiscaux ?

Alex – Les exilés économiques !

Marie – Tu veux dire… les retraités qui vont s’installer au Portugal ou au Maroc, parce que la vie est moins chère là-bas ?

Alex – Les migrants ! En Méditerranée ! La jungle de Calais.

Marie – Ce n’est pas vrai… Il te l’a dit ?

Alex – J’ai essayé de lui parler, mais il ne veut rien savoir.

Marie – Il est où ?

Alex – Il est parti s’habiller.

Marie – Je ne comprends pas… Jusqu’à ce matin, il était tout à fait normal. Enfin… il était comme d’habitude, quoi…

Alex – Ce n’est peut-être que passager. Il doit être un peu déprimé. Mais il ne faut pas prendre ça à la légère.

Marie – C’est sûr… J’ai du mal à le dire mais… j’ai l’impression qu’il a des tendances suicidaires.

Alex – Il faudrait lui suggérer de voir un médecin.

Marie – Un psychiatre, tu veux dire ?

Alex – Je ne sais pas.

Marie – Parfois avec une simple cure de vitamines… Un homéopathe ?

Pierre revient.

Pierre – Ah, tu es revenue ?

Alex – Je vais vous laisser.

Pierre – Non, mais je ne te chasse pas.

Alex – J’allais partir, de toute façon. J’ai… Il faut que j’y aille. J’ai une grosse journée. On s’appelle et on déjeune ensemble ?

Il sort. Marie lance à Pierre un regard embarrassé.

Marie – Je lui ai simplement dit que tu étais là, et que si elle voulait monter prendre un café…

Pierre – Elle n’en a pas voulu.

Marie – Quoi ?

Pierre – Du café. Je lui en ai proposé, elle n’en a pas voulu.

Silence.

Marie – Mais qu’est-ce que tu cherches, Pierre, au juste ?

Pierre – Je ne sais pas…

Marie – On n’est pas bien, ensemble ?

Pierre – Mais si, ce n’est pas la question.

Marie – Tu as une maîtresse, c’est ça ?

Pierre – Mais non, pas du tout !

Marie – On a la vie qu’on voulait, non ? Tu fais le métier que tu aimes. Tu n’as pas de patron. Tu gagnes bien ta vie.

Pierre – Je sais.

Marie – Mais alors qu’est-ce qui se passe ?

Pierre – Tout ça n’a plus de sens pour moi. J’ai besoin… d’essayer autre chose.

Marie – Mais pourquoi ?

Pierre – Je ne sais pas… Pour qu’à mon enterrement, les gens ne se contentent pas de dire : celui-là, c’était un comique…

Silence.

Marie – Tu veux qu’on déménage ?

Pierre – Ailleurs, ce serait pareil.

Marie – Tu ne vas pas faire une bêtise, au moins ?

Pierre – Une bêtise ? Comme quoi ?

Marie tente de cacher son trouble.

Marie – Je te laisse travailler…

Elle sort. Il reste un instant perplexe. Il prend un cahier et un crayon et essaie d’écrire, mais visiblement, l’inspiration n’est pas au rendez-vous. Il décroche le téléphone et compose un numéro.

Pierre – Oui, pardon, c’est encore moi… Écoute, finalement, j’ai réussi à me libérer pour ce soir. Tu pourrais venir dîner à la maison ? Je voudrais te parler d’un nouveau projet… Oui, bien sûr, viens avec ton mari. OK, vingt heures, c’est parfait. Bon, alors à ce soir…

Il raccroche. Il reprend le cahier et le crayon, et il commence à écrire avec fébrilité. Il s’interrompt et s’adresse au public.

Pierre – Vous allez voir. Cette fois, vous n’allez pas rigoler.

Il se remet à écrire.

Noir.

Mélimélodrames

Fatal comique Lire la suite »

Mélimélodrames

Dramedies (english) –  Dramedias (español)Dramédias (portugués)

Une comédie de Jean-Pierre Martinez

4 à 16 personnages (hommes ou femmes)
Si le monde est un théâtre, la pièce n’est souvent qu’un navet. Son auteur reste anonyme, et les seconds rôles sont les plus vite oubliés. Entre absurde et boulevard se joue la tragicomédie de la vie. L’important est de ne pas rater sa sortie… Six saynètes d’un humour amer, sur le mélimélodrames de nos vies ordinaires.


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TEXTE INTÉGRAL DE LA PIÈCE

Mélimélodrames

1 – Fatal comique

2 – Ce n’est pas un drame

3 – Huis-clos

4 – Auteur anonyme

5 – Changement de décor

6 – Scène de crime


Fatal comique

Sur une table basse, une cafetière, deux tasses et un journal. Pierre entre en robe de chambre. Il se sert une tasse de café et prend le journal pour le lire. Marie, sa femme, arrive.

Marie – Ça va ?

Pierre – Ça va.

Marie se sert une tasse et observe Pierre.

Marie – Tu as l’air soucieux… Un problème ?

Pierre – Non… Enfin… Toujours pas d’idée pour ma nouvelle pièce.

Marie – Ne t’inquiète pas, ça va venir… Ça finit toujours par venir, non ?

Pierre – Oui… Jusqu’à maintenant…

Marie – Il n’y a pas une bonne histoire, dans le journal, dont tu pourrais t’inspirer ?

Il repose le journal.

Pierre – Les nouvelles sont de plus en plus déprimantes… Je crois que je vais arrêter de lire la presse. J’ai déjà arrêté de regarder la télé et d’écouter la radio…

Marie – C’est vrai que tout ça n’est pas très gai, mais bon. D’un autre côté… c’est pour ça qu’on aura toujours besoin d’auteurs comme toi.

Pierre – Ah oui ? Et c’est quoi, un auteur comme moi ?

Marie – Tu sais bien… Quelqu’un pour nous faire rire… Un comique !

Pierre – Un comique ? Alors c’est comme ça que tu me vois ? Comme un comique !

Marie – Il faut bien des auteurs pour nous écrire de bonnes comédies ! Oublier un peu nos soucis… Nous faire passer un bon moment en ne pensant à rien…

Pierre – En ne pensant à rien ?

Marie – Excuse-moi… Je veux dire… en pensant à autre chose.

Pierre – Je vois… Donc pour toi, je suis seulement un amuseur… Un type qui fait diversion… Qui détourne l’attention du peuple des vrais problèmes de la société…

Marie – Le peuple ! Tout de suite, les grands mots… Divertir le public, il n’y a pas de honte à ça, si ?

Pierre – Je ne sais pas… On peut aussi avoir envie d’autre chose…

Marie – Quoi, par exemple ?

Pierre – D’être utile…

Marie – Pour moi, distraire les gens, leur faire retrouver le sourire, c’est très utile. Et ce n’est pas donné à tout le monde d’avoir ce talent.

Pierre – Ouais…

Marie – Quoi ?

Pierre – Des comédies, j’en ai déjà écrit près d’une centaine.

Marie – Et ça a toujours été de gros succès.

Pierre – Oui, mais je commence à être à court d’idées. Je me demande si je n’en ai pas fait le tour.

Marie – Tu veux arrêter d’écrire ?

Pierre – Ça je ne suis pas sûr d’y arriver non plus… Non, je me demandais si…

Marie – Quoi ?

Pierre – Et si j’essayais un autre genre ?

Marie – Un roman, tu veux dire ? Depuis des années, je te répète que tu devrais essayer. Il y a des romans très drôles, aussi…

Pierre – Malheureusement, je ne suis pas romancier, je le sais bien. Le théâtre, je ne sais rien faire d’autre.

Marie – Bon, alors il ne te reste plus qu’à trouver un bon sujet de comédie.

Pierre – Et si j’écrivais… un autre genre de pièces.

Marie – Un autre genre de pièce ?

Pierre – Un truc qui ne soit pas forcément drôle, tu vois ?

Marie – Une comédie pas drôle ?

Pierre – Non, pas une comédie, justement !

Marie – Tu veux dire… une comédie dramatique ?

Pierre – Je veux dire pas une comédie du tout !

Marie – Tu veux écrire un drame ?

Pierre – Un drame, une tragédie… Appelle ça comme tu veux.

Marie – Bon…

Pierre – Quoi ?

Marie – Je ne sais pas… (Silence) Tu es sûr que ça va ?

Pierre – Je n’ai plus d’idée de comédie. Je voudrais essayer d’écrire autre chose. C’est pas un drame, non plus !

Marie – OK… (Un temps) Tu veux encore du café ?

Pierre – Non, merci.

Marie – Bon, alors je te laisse réfléchir… à ta nouvelle pièce.

Elle sort. Il soupire et ouvre à nouveau son journal. Le téléphone sonne. Il répond.

Pierre – Oui ? Ah oui… Non, non, je voulais t’appeler justement… Écoute, je ne sais pas encore… Non, pour l’instant, je suis en panne d’inspiration. Oui, je sais, j’ai toujours dit que ça n’existait pas. Mais tu sais l’inspiration, c’est comme Dieu. On dit que ça n’existe pas jusqu’au moment où on en a vraiment besoin… Et toi, ça va ? Bon… Je vois… D’accord… Écoute, il va falloir que je te laisse, là… On s’appelle et on essaie de déjeuner ensemble la semaine prochaine ? OK, on fait comme ça… Salut, t’embrasse.

Marie revient, l’air un peu embarrassé.

Marie – Je dois faire quelques courses, je n’en ai pas pour longtemps. Ça va ?

Pierre – Euh… Oui. Depuis tout à l’heure, la situation n’a pas beaucoup évolué, mais oui. Ça va.

Marie – Bon, alors j’y vais.

Pierre – C’est ça. À tout à l’heure.

Elle sort. Il reprend la lecture de son journal, mais à peine a-t-il commencé que la sonnette de la porte d’entrée retentit. Il sort un instant pour aller ouvrir et revient accompagné d’une femme.

Alex – Je ne te dérange pas, j’espère ?

Pierre – Non, non, pas du tout, j’étais en train de… Tu veux un café ?

Alex – Merci, ça ira.

Pierre – C’est sympa de passer comme ça à l’improviste.

Alex – Quand on habite le même immeuble que son agent, c’est toujours un risque de le voir débarquer sans avoir été invité…

Pierre – Il va peut-être falloir que je déménage, alors…

Sourires, suivi d’un silence embarrassé.

Alex – Tu es sur quoi, en ce moment ?

Pierre – Rien… J’étais au téléphone avec… Comment elle s’appelle, déjà… Tu sais, cette comédienne qui jouait dans… Elle est devenue éditrice.

Alex – Éditrice ?

Pierre – Tu sais ce que c’est. La vie est cruelle pour les comédiennes. Surtout pour les jeunes premières. Passée la trentaine…

Alex – Tu cherches un nouvel éditeur ?

Pierre – Pas spécialement… C’est elle qui m’a appelé. Elle voulait juste prendre de mes nouvelles… Ça commence à m’inquiéter. Tout le monde me demande si ça va aujourd’hui…

Alex – Et… ça va ?

Pierre – Ça va, je te remercie… C’est dingue…

Alex – Quoi ?

Pierre – Je termine la conversation en lui disant : « on se rappelle et on déjeune…? » Ça m’est sorti comme ça. L’habitude. Finalement, on aurait aussi bien pu déjeuner ensemble à midi.

Alex – Qu’est-ce que tu veux… C’est Paris… On est tous débordés…

Pierre – Ou alors on a rien à foutre et on fait semblant…

Alex – Ouais…

Pierre – Toi, par exemple. Tu es particulièrement débordée, aujourd’hui ? (Silence) Non, évidemment, sinon, tu ne serais pas là. Tu imagines ? Tu acceptes de déjeuner comme ça à l’improviste… Le lendemain, tout Paris va savoir que tu n’as rien à foutre de tes journées. Que plus personne ne veut travailler avec toi. Que tu es au chômage. Ou pire que tu es sur liste noire… Du coup, plus personne ne t’appellerait, et tu serais vraiment total has been.

Alex – Ouais… (Silence) Et sinon, elle, ça va ?

Pierre – Qui ça ?

Alex – Ton éditrice !

Pierre – Je ne sais pas… Tu as raison… Finalement, c’est peut-être elle qui ne va pas bien. Elle m’a appelé parce qu’elle avait besoin de parler à quelqu’un. Et moi, je lui ai presque raccroché au nez… J’aurais dû lui proposer de déjeuner avec elle à midi… Et toi, ça va ?

Alex – Ça va…

Pierre – Tu es sûre que tu ne veux pas du café ?

Alex – Sûre… (Silence) Tu écris un peu, en ce moment ?

Pierre – Non, pas vraiment. Je crois que je suis arrivé au bout de quelque chose là. Il faudrait que je change un peu de style.

Alex – Oui, je sais, j’ai croisé Marie dans l’escalier.

Pierre – Ne me dis pas que c’est pour ça que tu es passée me voir.

Alex – Alors comme ça, tu veux écrire un drame.

Pierre – Oui, enfin… Pourquoi pas ?

Alex – C’est une blague, c’est ça ?

Pierre – Tu vois, Alex, c’est ça mon problème. La simple idée que j’envisage d’écrire autre chose qu’une comédie, les gens prennent ça pour une blague.

Alex – Disons que… ce n’est pas sur ce terrain-là qu’on t’attend habituellement.

Pierre – Et ?

Alex – Ça risque de surprendre ton public… De le décevoir, peut-être…

Pierre – Le décevoir ? Je n’ai encore pas écrit une ligne, et tu me dis déjà que ce sera décevant. Merci de tes encouragements. Au moins, je sais pourquoi j’ai un agent.

Alex – Et… tu as déjà un sujet ?

Pierre – Non… C’est juste une idée…

Alex – Bon, donc c’est juste une idée.

Pierre – C’est ça…

Alex – Excuse-moi, je me suis peut-être emballée un peu vite.

Pierre – Je ne sais pas… Je pensais écrire quelque chose sur ces migrants qui viennent s’échouer sur nos côtes. Quand ils ne sont pas morts noyés pendant la traversée, évidemment…

Alex – Une comédie, tu veux dire ? (L’autre lui lance un regard navré) Excuse-moi, je ne sais pas pourquoi j’ai dit ça… Alors c’est sérieux, tu veux vraiment écrire quelque chose de…

Pierre – Je n’ai plus vingt ans… Toi non plus… Il serait peut-être temps qu’on commence à s’interroger sur le monde qui nous entoure, non ?

Alex – Le monde qui nous entoure ?

Pierre – Imagine qu’après notre mort, on soit réincarnés. Comme ça. Au hasard. Le monde est principalement peuplé de gens qui ont une vie de merde. Si on peut appeler ça une vie. Si on y réfléchit bien, à part une minorité de privilégiés, dont les plus chanceux vivent dans des paradis fiscaux, la Terre est un enfer.

Alex – Et alors ?

Pierre – Et alors ? Statistiquement, la réincarnation, c’est l’enfer assuré… Si on ne change pas le monde de notre vivant, on est à peu près certain de vivre un enfer quand on sera réincarnés !

Alex le regarde, estomaquée.

Alex – OK…

Pierre – Je te laisse réfléchir à ça. Je vais m’habiller…

Il sort. Marie revient.

Marie – Alors ?

Alex – Il va très mal.

Marie – Je te l’avais dit.

Alex – Il est en plein délire. Il parle de la mort. Du paradis. De l’enfer.

Marie – Non ?

Alex – Il veut écrire une pièce sur les exilés.

Marie – Les exilés fiscaux ?

Alex – Les exilés économiques !

Marie – Tu veux dire… les retraités qui vont s’installer au Portugal ou au Maroc, parce que la vie est moins chère là-bas ?

Alex – Les migrants ! En Méditerranée ! La jungle de Calais.

Marie – Ce n’est pas vrai… Il te l’a dit ?

Alex – J’ai essayé de lui parler, mais il ne veut rien savoir.

Marie – Il est où ?

Alex – Il est parti s’habiller.

Marie – Je ne comprends pas… Jusqu’à ce matin, il était tout à fait normal. Enfin… il était comme d’habitude, quoi…

Alex – Ce n’est peut-être que passager. Il doit être un peu déprimé. Mais il ne faut pas prendre ça à la légère.

Marie – C’est sûr… J’ai du mal à le dire mais… j’ai l’impression qu’il a des tendances suicidaires.

Alex – Il faudrait lui suggérer de voir un médecin.

Marie – Un psychiatre, tu veux dire ?

Alex – Je ne sais pas.

Marie – Parfois avec une simple cure de vitamines… Un homéopathe ?

Pierre revient.

Pierre – Ah, tu es revenue ?

Alex – Je vais vous laisser.

Pierre – Non, mais je ne te chasse pas.

Alex – J’allais partir, de toute façon. J’ai… Il faut que j’y aille. J’ai une grosse journée. On s’appelle et on déjeune ensemble ?

Il sort. Marie lance à Pierre un regard embarrassé.

Marie – Je lui ai simplement dit que tu étais là, et que si elle voulait monter prendre un café…

Pierre – Elle n’en a pas voulu.

Marie – Quoi ?

Pierre – Du café. Je lui en ai proposé, elle n’en a pas voulu.

Silence.

Marie – Mais qu’est-ce que tu cherches, Pierre, au juste ?

Pierre – Je ne sais pas…

Marie – On n’est pas bien, ensemble ?

Pierre – Mais si, ce n’est pas la question.

Marie – Tu as une maîtresse, c’est ça ?

Pierre – Mais non, pas du tout !

Marie – On a la vie qu’on voulait, non ? Tu fais le métier que tu aimes. Tu n’as pas de patron. Tu gagnes bien ta vie.

Pierre – Je sais.

Marie – Mais alors qu’est-ce qui se passe ?

Pierre – Tout ça n’a plus de sens pour moi. J’ai besoin… d’essayer autre chose.

Marie – Mais pourquoi ?

Pierre – Je ne sais pas… Pour qu’à mon enterrement, les gens ne se contentent pas de dire : celui-là, c’était un comique…

Silence.

Marie – Tu veux qu’on déménage ?

Pierre – Ailleurs, ce serait pareil.

Marie – Tu ne vas pas faire une bêtise, au moins ?

Pierre – Une bêtise ? Comme quoi ?

Marie tente de cacher son trouble.

Marie – Je te laisse travailler…

Elle sort. Il reste un instant perplexe. Il prend un cahier et un crayon et essaie d’écrire, mais visiblement, l’inspiration n’est pas au rendez-vous. Il décroche le téléphone et compose un numéro.

Pierre – Oui, pardon, c’est encore moi… Écoute, finalement, j’ai réussi à me libérer pour ce soir. Tu pourrais venir dîner à la maison ? Je voudrais te parler d’un nouveau projet… Oui, bien sûr, viens avec ton mari. OK, vingt heures, c’est parfait. Bon, alors à ce soir…

Il raccroche. Il reprend le cahier et le crayon, et il commence à écrire avec fébrilité. Il s’interrompt et s’adresse au public.

Pierre – Vous allez voir. Cette fois, vous n’allez pas rigoler.

Il se remet à écrire.

Noir.

2 – Huis clos

Un couple. Quatre chaises. Ils sont assis.

Elle – Ça va ?

Lui – Ça va… Et toi ?

Elle – Ça va… (Un temps) Tu veux boire quelque chose ?

Lui – Quoi ?

Elle – Un apéro ? Des cacahuètes ?

Lui – Merci, ça ira.

Un temps.

Elle – On est bien, ici, non ?

Lui – Ici ?

Elle – Dans cette maison.

Lui – Oui… (Un temps) Mais on n’est pas chez nous.

Elle – Ah, non ?

Lui – Non.

Elle – C’est vrai.

Lui – C’est une maison, ou un appartement ?

Elle – Un appartement, je crois. Je ne sais pas.

Un temps.

Lui – Tu te souviens où c’est, notre maison ?

Elle – Notre maison ?

Lui – Notre vraie maison. Chez nous !

Elle – Non… Et toi ?

Lui – Moi non plus. Je ne sais même plus à quoi ça ressemblait.

Elle – On a tellement déménagé.

Lui – C’est vrai. On déménage beaucoup.

Elle – Oui. De plus en plus.

Lui – Il faudrait qu’on arrive à se souvenir.

Elle – De quoi ?

Lui – Où on habite.

Elle – Toutes les maisons se ressemblent un peu.

Lui – Même quand c’est un appartement.

Elle – Il y a des chambres. Une salle à manger. Une cuisine.

Lui – Dans la cuisine, il y a un frigo, une cuisinière, une table, des tiroirs…

Elle – Dans les tiroirs, il y a des fourchettes, des couteaux, des petites cuillères.

Lui – Dans les chambres, il y a des enfants. Parfois…

Elle – Quand il n’y en a pas, c’est qu’ils sont déjà partis. Dans une autre maison.

Un temps.

Lui – Tu crois qu’ils reviendront un jour ?

Elle – Les enfants ?

Lui – Les propriétaires !

Elle – Va savoir… Ça fait combien de temps qu’on est là ?

Lui – Je ne sais pas… Pas mal de temps, non ?

Elle – Oui.

Lui – J’ai toujours peur qu’on sonne à la porte, et que ce soit eux.

Elle – Les enfants ?

Lui – Ceux qui habitent ici ! Les vrais propriétaires…

Elle – Ah oui…

Lui – Pas toi ?

Elle – Si. D’ailleurs, je me demande si elle marche.

Lui – Quoi ?

Elle – La sonnette ! On ne l’a jamais entendue.

Lui – De toute façon, quand les gens qui habitent ici reviendront, ils ne sonneront pas.

Elle – Pourquoi ça ?

Lui – C’est chez eux ! Ils auront la clef.

Elle – Bien sûr.

Lui – Quand les gens rentrent chez eux, ils ne sonnent pas. Ils n’ont aucune raison de penser qu’il y a quelqu’un à l’intérieur quand ils ne sont pas là.

Elle – C’est vrai… On a la clef, nous ?

Lui – Je ne sais pas. Tu as la clef, toi ?

Elle – Non.

Lui – Moi non plus.

Elle – Alors comment on est rentrés ici ?

Lui – Je ne me souviens plus.

Elle – On nous a peut-être ouvert.

Lui – Qui est-ce qui aurait bien pu nous ouvrir ?

Elle – Les propriétaires ?

Lui – Mais puisqu’on est seuls dans cet appartement.

Elle – Depuis combien de temps ?

Lui – Je ne sais pas…

Un temps.

Elle – C’est sûrement pour ça qu’on ne sort jamais. On ne pourrait plus rentrer.

Lui – Non. Puisqu’on n’a pas la clef.

On sonne. Ils échangent un regard inquiet.

Elle – Tu crois que c’est eux ?

Lui – On a dit que si c’était eux, ils ne sonneraient pas.

Elle – Alors qui ça peut bien être ?

Lui – Va savoir…

Elle – Qu’est-ce qu’on fait ?

Lui – Il faut aller ouvrir, non ?

Elle – Tu crois ?

Lui – Ils ont vu la lumière. Ils savent qu’on est là.

Elle – Cette fois, ça y est… On est foutus…

Lui – On va encore devoir déménager.

Elle – Mais où est-ce qu’on va aller ?

Lui – Je vais faire notre valise.

Elle – On a une valise ?

Lui – Tout le monde a une valise chez lui, non ?

Elle – Je vais leur ouvrir…

Lui – Qu’est-ce que tu vas leur dire ?

Elle – Je ne sais pas…

Lui – Il va bien falloir leur dire quelque chose, pour expliquer le fait qu’on est là. Chez eux.

Elle – Ils rentrent peut-être de vacances.

Lui – Je vais voir si on a une valise.

Elle sort. Il sort aussi. Elle revient avec un autre couple. Jean-Marc a une bouteille à la main, et Christelle un bouquet de fleurs. Il revient avec une valise.

Elle – C’est Jean-Marc et Christelle.

Lui – Ah, bonjour…

Jean-Marc – Salut. Ça va ?

Lui – Ça va, et vous ?

Christelle – Super. Vous partez en vacances ?

Lui – Non, pourquoi ?

Jean-Marc – Comme tu as une valise à la main…

Lui – Ah, oui, non, c’est… Je m’apprêtais à la ranger. Vous savez ce que c’est, les valises, on ne sait jamais où les mettre.

Elle – Et une valise vide, ça prend autant de place qu’une valise pleine.

Christelle – Oui. Mais c’est moins lourd.

Jean-Marc – C’est vrai. On devrait partir en vacances avec des valises vides. On voyagerait plus léger.

Ils rient tous les quatre d’un rire un peu forcé.

Christelle – Alors comment ça va ?

Lui – Ça va.

Jean-Marc – Tenez, j’ai apporté du champagne, pour fêter ça.

Lui – Fêter quoi ?

Jean-Marc éclate de rire.

Jean-Marc – Fêter quoi ? Toujours le mot pour rire, hein ?

Christelle – Il est drôle ! Tenez, moi j’ai apporté des fleurs.

Elle – Ah oui, c’est bien aussi.

Lui – Je vais aller chercher des flûtes.

Elle – Tu veux qu’on leur joue de la flûte ?

Jean-Marc – Des flûtes ! Pour le champagne !

Elle – Ah oui !

Ils rient à nouveau.

Christelle – Elle est drôle !

Elle – Et moi je vais chercher un vase. Pour les fleurs.

Christelle – Vous ne voulez pas qu’on vous aide ?

Lui – Pensez-vous !

Elle – Mais asseyez-vous donc !

Lui – Faites comme chez vous.

Elle – Vous connaissez la maison.

Ils sortent tous les deux.

Jean-Marc (souriant) – Qu’est-ce qu’ils sont drôles…

Christelle – Oui…

Jean-Marc – Ils n’ont pas changé. Toujours aussi…

Christelle – Tu trouves ?

Jean-Marc – Quoi ?

Christelle – Qu’ils n’ont pas changé.

Jean-Marc – Maintenant que tu le dis, c’est vrai que…

Christelle – Non, mais ils ne ressemblent pas du tout à…

Jean-Marc – Si, un peu quand même…

Christelle – Mouais…

Jean-Marc – Et puis tu sais, les gens… Ils changent…

Christelle – Pas à ce point là… Pas en une semaine…

Jean-Marc – C’était il y a une semaine ?

Christelle – C’était la semaine dernière. La dernière fois qu’on les a vus.

Jean-Marc – C’est vrai qu’ils ont beaucoup changé.

Un temps.

Christelle – Ou alors, ce n’est pas eux.

Jean-Marc – Pas eux ? Mais qu’est-ce qu’ils feraient ici ? Si ce n’est pas chez eux…

Un temps.

Christelle – Tu crois qu’on aurait pu se tromper de porte ?

Jean-Marc – Je ne pense pas… Et puis eux, ils ont l’air de nous connaître, non ? Si ils nous connaissent, c’est qu’on les connaît aussi.

Christelle – Oui, évidemment…

L’homme revient.

Lui – Je suis vraiment désolé, je n’ai pas trouvé les flûtes.

Christelle – Ah, les hommes…

Jean-Marc – Tu n’as qu’à demander à ta femme.

La femme revient aussi.

Lui – Tu sais où sont les flûtes, chérie ?

Elle – Non… Il n’y en a peut-être pas…

Christelle – Comment ça ? Vous n’avez pas de flûtes ? Tout le monde a des flûtes à champagne, non ?

Jean-Marc – Ce n’est pas grave. On va le boire dans des verres, ce champagne.

Christelle – Vous avez bien des verres à pied ? (Ils n’ont pas l’air sûrs) Des verres à moutarde ?

Lui – Je n’ai rien vu…

Elle – Je n’ai pas trouvé de vase non plus.

Christelle – Des verres, tout de même. Dans une cuisine…

Elle – Je n’ai pas trouvé la cuisine.

Moment d’embarras.

Jean-Marc – Bon… Vous savez quoi ? On le boira à la bouteille, ce champagne. Comme les Russes !

Christelle – Les Russes boivent le champagne à la bouteille ?

Jean-Marc – Les Cosaques, sûrement. Sans même descendre de leur cheval. En sabrant la bouteille avec…

Christelle – Avec leur sabre.

Elle – En attendant, asseyez-vous, je vous en prie.

Ils s’asseyent tous les quatre. Sourires. Silence embarrassé.

Lui – Et les enfants, ça va ? (Jean-Marc et Christelle, qui n’ont visiblement pas d’enfants, échangent un regard perplexe) Non, je voulais dire, les enfants en général. Pas spécialement les vôtres. Si vous n’en avez pas…

Elle – Ou plus… Je veux dire… Vous pourriez en avoir, et qu’ils soient morts.

Lui – On n’a pas dit que c’était le cas.

Malaise.

Elle – Je vais voir si je trouve des cacahuètes…

Elle sort.

Lui – En tout cas, c’est sympa d’être passés nous voir.

Christelle – On est amis, non ?

Lui – Bien sûr.

Jean-Marc et Christelle échangent un regard embarrassé. Christelle fait signe à Jean-Marc de se lancer.

Jean-Marc – Ma question va te paraître idiote, mais… vous habitez vraiment ici ?

Lui – Pourquoi vous me demandez ça ?

Christelle – Ben… Nos amis qui habitent ici ne vous ressemblent pas du tout.

Jean-Marc – En tout cas, la dernière fois qu’on est venus, ils ne ressemblaient pas du tout à ça…

Elle revient.

Elle – Ça y est, j’ai trouvé les cacahuètes !

Christelle – Vous avez trouvé la cuisine…?

Elle – J’ai même trouvé des verres.

Jean-Marc – Alors on peut boire l’apéro !

Christelle – Allez…

Jean-Marc débouche la bouteille, et remplit les verres. Ils trinquent.

Jean-Marc – À votre santé !

Lui – À l’amitié !

Ils boivent.

Elle – Prenez des cacahuètes.

Ils mangent des cacahuètes.

Christelle – Je n’ai jamais osé vous poser la question, mais…

Lui – Oui…?

Christelle – Vous vous êtes rencontrés où, tous les deux ? (Silence embarrassé) Excusez-moi d’avoir été aussi indiscrète. Je ne sais pas ce qui m’a pris…

Elle – Non, non, pas du tout, c’est juste que…

Lui – On ne sait plus très bien.

Christelle – Vous ne savez plus ?

Jean-Marc – Vous ne savez plus où vous vous êtes rencontrés ?

Un temps.

Elle – Je dirais ici, non ?

Christelle – Ici ?

Elle – Un jour, on s’est rendu compte qu’on habitait le même appartement.

Lui – Oui, c’est curieux… Je crois que ça s’est passé comme ça.

Elle – C’était il y a un certain temps, évidemment.

Lui – Oui… Une semaine, peut-être.

Elle – Oui, c’est ça, une bonne semaine.

Christelle – Ah oui, quand même…

Lui – Et vous ?

Jean-Marc – Nous ?

Elle – Vous vous connaissez depuis longtemps ?

Christelle – Non, pas très…

Jean-Marc – Je dirais… Oui, pas très longtemps.

Christelle – On s’est rencontrés dans le hall de l’immeuble, en bas.

Jean-Marc – J’avais une bouteille de champagne à la main.

Christelle – Et moi un bouquet de fleurs.

Jean-Marc – On s’est dit qu’on allait sûrement au même endroit.

Christelle – Comme je n’avais pas le code…

Jean-Marc – Moi non plus. J’ai sonné sur plusieurs boutons, au hasard. Vous êtes les premiers à nous avoir ouvert la porte.

Christelle – Comme il avait l’air de savoir où il allait, je l’ai suivi.

Lui – Ah, oui…

Elle – Oui, c’est… une belle histoire.

Lui – Très romantique.

Elle – Vous verrez que ça finira par un mariage.

Jean-Marc et Christelle échangent un regard gêné.

Jean-Marc – Donc, si je comprends bien, personne ici ne se connaît vraiment.

Elle – Apparemment non…

Christelle – Et personne n’a rien à faire dans cette maison.

Lui – Visiblement pas…

Jean-Marc – Mais alors on est chez qui ?

Silence.

Christelle – Vous reprendrez bien un peu de champagne ?

Elle – Merci, mais il est tard. On va peut-être vous laisser.

Lui – En tout cas, merci de votre hospitalité.

Jean-Marc – Mais de rien, je vous en prie.

Il prend la valise, et se dirige avec elle vers la sortie.

Christelle – Je vous raccompagne ?

Elle – Ne vous dérangez pas, on connaît le chemin.

Jean-Marc – Vous voulez que je vous aide avec la valise.

Lui – Non… Ça ne pèse rien… Elle est vide.

Christelle – Eh bien… À une autre fois, alors !

Jean-Marc – Et merci de votre visite !

Ils sortent. Jean-Marc et Christelle se rasseyent. Silence.

Christelle – Ça va ?

Jean-Marc – Ça va… Et toi ?

Christelle – Ça va… (Un temps) Tu veux reboire quelque chose ?

Jean-Marc – Merci, ça ira.

Christelle – Des cacahuètes ?

Il prend une poignée de cacahuète et commence à les mastiquer.

Christelle – On est bien, ici, non ?

Lui – Oui… (Un temps) Mais on n’est pas chez nous.

Elle – C’est vrai.

Lui – C’est une maison, ou un appartement ?

Elle – Un appartement, je crois.

Noir.

3 – Auteur anonyme

Elle est là, debout au milieu de la scène vide, et jette un regard autour d’elle. Il arrive.

Lui – Ah, tu es là ! Je te cherchais partout…

Elle – Ça y est, le dernier camion vient de partir avec les derniers cartons.

Lui – Tu as regardé partout ? Il ne reste plus rien dans la maison ?

Elle – Plus rien. À part nos souvenirs…

Il pose une main sur son épaule.

Lui – Allez… On va s’en fabriquer d’autres !

Elle – Bien sûr… Mais les projets, ça n’empêche pas la nostalgie.

Lui – Tu regrettes ?

Elle – Non…

Lui – Tu te souviens la première fois où on est entrés dans cette maison, pour la visiter ?

Elle – Elle était vide aussi.

Lui – Et entre ces deux vides, on a vécu. On a rempli cette maison. De meubles. De tableaux. D’enfants…

Elle – Et elle nous a remplis. De joie. De bonheur. De souvenirs.

Lui – On les emporte avec nous.

Elle – Et on laisse cet endroit presqu’aussi propre qu’on l’a trouvé en entrant.

Lui – Beaucoup plus propre, si tu veux mon avis.

Elle – Qui seront les suivants ? On ne sait rien d’eux.

Lui – Et iIs ne sauront rien de nous.

Elle – Comme nous ne savons rien de ceux qui nous ont précédés ici.

Lui – Les gens passent, les maisons restent.

Elle – Jusqu’à ce que les maisons s’écroulent elles aussi. Ou qu’on les démolisse. Pour construire des immeubles à la place.

Lui – Il y a aussi des maisons hantées par de mauvais souvenirs.

Elle – Oui… Toutes les maisons ont une histoire. Des histoires.

Lui – Comme l’histoire d’un crime, par exemple.

Elle – Un crime ?

Lui – Tous les crimes n’ont pas lieu en plein air, tu sais. La plupart sont perpétrés à domicile. En famille, souvent… Et quand ce crime fait la une des faits divers, la maison devient invendable. J’imagine que parfois, on doit même finir par la démolir, pour en reconstruire une autre à la place. Une maison sans histoire…

Elle – Merci, ça me remonte le moral, ce que tu dis.

Lui – On ne sait pas… Peut-être que cette maison, avant nous, n’a pas abrité que des moments heureux.

Elle – En tout cas, on n’a jamais trouvé de cadavres dans les placards.

Lui – Peut-être que si on avait creusé dans la cave…

Elle – Bon… Ben du coup, je préfère autant qu’on y aille, maintenant.

Lui – Tu vois ? Il suffisait de demander…

Elle – Merci… Je sais que je peux toujours compter sur toi dans les moments difficiles.

Ils se dirigent vers la sortie. Elle se baisse et ramasse quelque chose par terre.

Lui – Qu’est-ce que c’est ?

Elle – Un manuscrit, apparemment.

Lui – Un manuscrit ?

Elle – On dirait une pièce de théâtre.

Lui – À quoi tu vois ça ?

Elle feuillette le manuscrit.

Elle – Avec des gens qui parlent, si tu préfères. Pas comme un roman.

Lui – Je vois… Des dialogues…

Elle – Ou alors, c’est le scénario d’un film.

Lui – Ça parle d’un crime ?

Elle – Je ne sais pas.

Lui – Il avait dû rester coincé derrière un radiateur, et avec le déménagement, il est tombé par terre. Le papier est complètement jauni.

Elle – Mais ça reste lisible. Après toutes ces années. Tu te rends compte ?

Lui – C’est quoi ? Une comédie ? Un drame ?

Elle – Il faudrait le lire.

Lui – Qui a bien pu écrire ça ?

Elle – Quelqu’un qui habitait ici avant nous, j’imagine.

Lui – C’est dingue… Et si c’était un chef d’œuvre…

Elle – Ça peut aussi être un navet.

Lui – C’est signé ?

Elle – Non… Je ne vois pas le nom de l’auteur.

Lui – C’est peut-être inédit. Un manuscrit anonyme, tu te rends compte ? Tu pourrais le signer et le publier… Tu es éditrice. Pour toi, ce serait facile.

Elle – Ce serait un plagiat.

Lui – Si l’auteur est mort. Et que personne ne sait qu’il a écrit ça…

Elle – Je vais commencer par le lire…

Lui – C’est bizarre, non ?

Elle – Quoi ?

Lui – On quitte cette maison, et c’est l’histoire de quelqu’un d’autre qu’on emporte avec nous.

Elle – J’espère que ce n’est pas un drame…

Lui – Au moins, on n’a pas trouvé de cadavre.

Elle – Ça me donnerait presque envie de chercher…

Lui – Tu crois ?

Elle – L’auteur est peut-être enterré dans la cave…

Ils s’en vont.

Noir.

4 – Changement de décor

Le faisceau d’une lampe torche dans l’obscurité. Puis un deuxième. Le premier éclaire le visage de la deuxième.

Lui – Ah, c’est toi ! Tu m’as fait peur…

Elle – Alors ?

Lui – Ça y est, tout est dans le camion.

Elle – Ça s’est bien passé ?

Lui – La routine.

Elle dirige le faisceau vers le public.

Elle – Donc, il n’y avait personne…

Lui – Avec le vacarme qu’a fait le clébard quand je suis arrivé… S’il y avait quelqu’un dans la maison, il se serait déjà réveillé.

Elle – Ou alors, c’est qu’il est mort.

Lui – Ne parle pas de malheur. Tu imagines un peu ? Tu rentres dans une baraque la nuit pour la cambrioler, et tu tombes sur un macchabée…

Elle – Avec la poisse que j’ai en ce moment, ça ne m’étonnerait qu’à moitié.

Lui – Ouais… J’ai vu ça dans un film, une fois. Je ne sais plus comment ça s’appelait…

Elle – Tu me raconteras ça une autre fois. Et, le clébard… Ça va ?

Lui – Merci de t’inquiéter de savoir si je ne me suis pas fait mordre…

Elle – Tu t’es fait mordre ?

Lui – Il a déchiré mon pantalon. J’ai dû l’assommer…

Elle – S’il n’y a personne, on peut allumer, non ?

Lui – Vassy, les maisons tout autour sont inoccupées. C’est surtout des résidences secondaires. Sans parler de ceux qui ont déjà déménagé.

Elle – À cause des cambriolages, sûrement.

Lui – Si ça continue, il n’y aura plus que des maisons vides à cambrioler dans la région.

Elle actionne un interrupteur et la lumière se fait. Les vêtements de l’homme sont en lambeaux.

Elle – Ah oui, il t’a bien arrangé. Pauvre bête… Tu ne lui as pas fait trop mal, au moins ?

Lui – Pourquoi ? Tu veux faire un signalement à la SPA ?

Ils jettent un regard circulaire sur les lieux.

Elle – Tu as fait le grand nettoyage, dis donc. Il n’y a plus rien.

Lui – Tout est rentré dans le camion.

Elle – Des choses intéressantes ?

Lui – Des meubles surtout. Des bibelots. Plutôt de mauvais goût.

Elle – Je vois…

Lui – Genre nouveau riche.

Elle – Il vaut mieux être un nouveau riche qu’un nouveau pauvre.

Lui – En revanche, il y avait un coffre-fort.

Elle – Non ?

Lui – J’en suis venu à bout.

Elle – Combien ?

Lui – Tout est dans le camion. Je n’ai pas compté.

Elle – On verra ça tout à l’heure. On ne va pas traîner ici. Tu as regardé dans les autres pièces ?

Lui – J’ai tout vidé. Tu es venue avec Momo ?

Elle – J’ai piqué un roupillon dans la voiture en venant, je ne sais même pas où on est. (Elle regarde à nouveau autour d’elle) C’est fou ce qu’une maison vide peut ressembler à une autre.

Lui – Oui…

Elle – Tu es sûr que c’est la bonne maison ?

Lui – Tu as vu la croix, en bas, sur la façade. Momo a fait le repérage dans le coin la semaine dernière.

Elle – Ouais… Le genre de croix qui veut dire objets de valeurs, pas d’alarme, effraction facile…

Lui – Il ne s’était pas trompé. Sauf pour le chien. Il devait dormir quand il est passé.

Elle – C’est bizarre. Cette maison me dit vaguement quelque chose…

Lui – Des gens que tu connais, peut-être…

Elle – Peut-être…

Elle ramasse quelque chose par terre.

Lui – Qu’est-ce que c’est ?

Elle – Une quittance EDF.

Lui – Ça a dû tomber d’un tiroir.

Elle – Elle est à mon nom…

Lui – Non…?

Elle – Je me disais bien aussi…

Lui – Tu veux dire que…

Elle – On est chez moi ! Je rêve… Vous avez cambriolé chez moi !

Lui – Comment je pouvais savoir, moi ! Il y avait la croix sur le mur. Tu n’as pas dit à Momo où tu habitais ?

Elle – Non… Et toi ?

Lui – Ça ne m’est pas venu à l’idée…

Elle – Oh putain… Il y avait une chance sur mille…

Silence.

Lui – Bon… Ben le déménagement sera plus vite fait…

Elle – Je n’avais pas l’intention de déménager.

Lui – Alors qu’est-ce qu’on fait ?

Elle – Que veux-tu qu’on fasse ? On n’a plus qu’à remettre les meubles en place. Tu sais, les meubles et les bibelots de mauvais goût. Genre nouveau riche…

Lui – OK…

Elle – Et puis tu vas me rendre mon fric. J’aurai peut-être assez pour me payer un nouveau coffre-fort avec. Maintenant que t’as percé le mien…

Lui – Tu n’as rien à regretter de ce côté-là. C’était de la camelote. J’en suis venu à bout en cinq minutes…

Elle – C’est dingue. J’espère que le chien s’en sortira, au moins…

Lui – Tu te préoccupes encore de ce putain de clébard ?

Elle – C’est le mien ! C’est mon chien que tu as assommé !

Lui – Ah oui, c’est vrai, excuse-moi… Bon, ça va, il s’en remettra.

Elle – Oui… Il était allongé devant sa niche quand je suis passée. Je me demandais pourquoi il n’avait pas aboyé quand il m’a vue.

Lui – Il a reconnu sa maîtresse, forcément.

Elle – Ouais… Et moi, je n’ai même pas reconnu ma propre baraque…

Lui – Et après on va dire que les bêtes sont moins intelligentes que nous.

Elle – Bon, alors au boulot. Parce qu’on n’a pas fini, hein…

Lui – Sinon, on déclare le cambriolage, et tu te fais rembourser par l’assurance.

Elle – Tu crois ?

Lui – On se débarrasse de tout ce bazar, si on arrive à le refourguer à quelqu’un. Et tu en profites pour changer la déco…

Elle – Ouais… Et puis ça évitera un changement de décor au metteur en scène.

Lui – On sort par la cour ou par le jardin ?

Ils sortent.

Noir.

5 – Scène de crime

Ramirez, inspecteur de police, arrive, suivi par son adjoint Sanchez. Ils jettent un regard autour d’eux.

Ramirez – Vous n’avez touché à rien ?

Sanchez – Non… À quoi j’aurais bien pu toucher ?

Ramirez – C’est vrai que… je n’ai jamais vu une scène de crime aussi… désespérément vide.

Sanchez – Oui…

Ramirez – Pour trouver des indices, ça va être compliqué.

Sanchez – Je ne vois pas ce qu’on pourrait envoyer au labo… à part l’air qu’on respire.

Ramirez – Remarquez, c’est une idée…

Sanchez – Vous voulez que j’envoie un échantillon d’air au labo ?

Ramirez – On ne voit pas l’arme du crime… C’est peut-être une intoxication au gaz.

Sanchez – Seule une autopsie pourrait nous le dire…

Ramirez regarde à nouveau autour de lui.

Ramirez – Une autopsie, d’accord, mais… où sont les cadavres ?

Sanchez cherche aussi du regard.

Sanchez – Apparemment, il n’y a pas de cadavres non plus.

Ramirez – Comment ça, pas de cadavres ? S’il n’y a pas de cadavres, il n’y a pas de crime ! Et s’il n’y a pas de crime, il n’y a pas de scène de crime…

Sanchez – Il doit quand même bien y avoir des victimes. Sinon, on ne serait pas là.

Ramirez – Il y a des victimes, mais il n’y a pas de cadavres ?

Sanchez – Je n’en vois pas…

Ramirez – L’auteur de ce crime aurait fait disparaître les corps… Mais comment ?

Sanchez – J’imagine que nous sommes là pour le découvrir…

Ils jettent à nouveau un regard autour d’eux, puis par terre.

Ramirez – Je ne vois rien.

Sanchez – Ah, je crois que je tiens quelque chose.

Ramirez – Qu’est-ce que c’est ?

Sanchez – Un livre.

Ramirez – Un livre ?

Sanchez (feuilletant le bouquin) – Un livre de théâtre.

Ramirez – À quoi vous voyez que c’est un livre de théâtre.

Sanchez – C’est publié aux Éditions La Comédiathèque.

Ramirez – Vous croyez que ça peut faire avancer notre enquête ?

Sanchez – Allez savoir… (Il continue à lire) C’est troublant… Les personnages là-dedans portent les mêmes noms que nous…

Ramirez – Non ?

Sanchez – L’inspecteur Ramirez et son adjoint Sanchez…

Ramirez – Faites voir… (Il prend le livre et lit quelques pages) Et leur description correspond exactement à celles des victimes sur lesquelles on nous a chargés d’enquêter.

Sanchez – Mais alors… Si on retient cette hypothèse… Nous serions des personnages de théâtre ?

Ramirez – Plus grave que ça : nous serions morts…

Sanchez – Et on nous aurait chargé d’enquêter sur notre propre disparition…?

Ramirez – C’est l’affaire la plus étrange que j’ai eu à traiter au cours de ma longue carrière.

Sanchez – C’est quel genre de pièces ? Comique ? Dramatique ?

Ramirez – Vous savez, moi, le théâtre…

Sanchez – C’est quoi, le titre ?

Ramirez – C’est pas un drame.

Sanchez – Non, je ne dis pas ça, mais… c’est quoi le titre de la pièce ?

Ramirez – C’est pas un drame. C’est le titre de la pièce.

Ils échangent un regard interloqué.

Sanchez – Comment des personnages de théâtre pourraient-ils mourir. Puisqu’ils n’existent pas vraiment.

Ramirez – Tout ça n’est pas banal.

Sanchez – Mourir sur scène, en plus…

Ramirez – Ah parce qu’à votre avis… nous sommes sur une scène de théâtre ?

Sanchez se tourne vers le public.

Sanchez – Regardez tous ces gens, dans le noir… On dirait qu’ils sont venus pour nous voir…

Ramirez – Merde, c’est vrai… C’est qui à votre avis… Des témoins ?

Sanchez – Ils sont peut-être là pour assister à la reconstitution.

Ramirez – C’est dingue… Ne me dites pas qu’en plus, ils ont payé leur place.

Sanchez – Vous n’avez qu’à leur demander.

Ramirez – Vous croyez qu’on peut leur parler ?

Sanchez – Je ne sais pas…

Ramirez – Ça pourrait nous aider pour notre enquête…

Sanchez – Ils ont peut-être vu quelque chose…

Ramirez s’approche d’un spectateur.

Ramirez – Vous avez payé votre place, vous ?

Petite improvisation en fonction de la réponse ou de la non réponse du spectateur.

Sanchez – Et sinon… Vous avez vu quelque chose ?

Ramirez – On va devoir se débrouiller tout seuls, comme d’habitude.

Sanchez – Oui, parce que visiblement, nos personnages n’ont pas laissé un grand souvenir…

Ramirez – C’est hélas le lot du commun des mortels. Ne laisser aucun souvenir après son passage sur terre.

Sanchez – Tout de même… Nous, des personnages de théâtre…

Ramirez – C’est vrai… On aurait pu espérer que ça nous apporte une certaine notoriété…

Sanchez – La pièce était peut-être un navet. Quand c’est un chef d’œuvre, les gens se souviennent des personnages, non ?

Ramirez – Surtout des premiers rôles… Certains personnages deviennent même plus célèbres que leurs auteurs.

Sanchez – Prenez Sherlock Holmes, tout le monde se souvient de lui. Mais qui se souvient du nom de l’auteur de Sherlock Holmes ?

Ramirez – Élémentaire, mon cher Watson. C’est Conan Doyle.

Sanchez – Hélas, vous n’êtes pas Sherlock Holmes.

Ramirez – Ni vous le Docteur Watson.

Sanchez – Sinon, nous aurions déjà résolu cette énigme depuis longtemps.

Ramirez – Que voulez-vous… Nous ne sommes que des personnages secondaires.

Sanchez – Ceux dont personne ne se souvient une fois le rideau baissé… Qui disait que la vie est un songe ?

Ramirez – La vie… Ça paraît long, surtout au début. On commence à dire son texte au premier acte.

Sanchez – On ne se rend pas tout de suite compte que la pièce est écrite d’avance.

Ramirez – Et puis petit à petit, on se souvient des mots en les disant.

Sanchez – Jusqu’à ce qu’on s’en souvienne avant de les avoir dits.

Ramirez – Et quand l’histoire touche à sa fin… On espère seulement ne pas rater sa sortie…

Sanchez – Ça sent un peu le renfermé, ici, non ?

Ramirez – C’est l’odeur du théâtre.

Sanchez – La bonne nouvelle, c’est qu’on a réussi à retrouver les corps.

Ramirez – Oui… Et on dirait qu’ils commencent à sentir.

Sanchez – L’odeur des personnages en décomposition… Ceux de tous navets qui n’ont pas tenu l’affiche.

Sanchez – Les pièces qui n’ont pas su rencontrer leur public, comme on dit…

Ramirez – Celle dans laquelle on a joué ne devait pas être dans l’air du temps… Prélevez un échantillon de l’air ambiant. On l’enverra au labo pour vérification.

Sanchez sort une petite bouteille de sa poche, ouvre le bouchon, attend un instant, puis referme le bouchon et remet la bouteille dans sa poche.

Sanchez – Et voilà. La pièce est finie.

Ramirez – C’est le moment de quitter la scène. Définitivement. Pour nous, c’était la dernière séance…

Sanchez – On n’a qu’à sortir par là.

Ramirez – Dire que tous ces pauvres gens ont payé leur place…

Sanchez – C’est pas un drame.

Ramirez – On aurait dû appeler ça « Autopsie d’un four ».

Sanchez – J’aurais préféré jouer dans un chef d’œuvre… Pour passer à la postérité.

Ramirez – La prochaine fois, peut-être…

Ils sortent.

Noir. Fin.

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Critical but stable

A comedy by Jean-Pierre Martinez

English translation by Anne-Christine Gasc

Raymond is in a deep coma following an accident on a Boris Bike. His long lost relatives are called to his bedside to decide what to do and avoid prolonged therapeutic interventions. But this collective decision becomes even more difficult when the patient turns out not to be who everyone thought he was. And is the keeper of a secret that could make everyone very rich…

This character comedy’s main purpose is to ridicule the hypocrisy often associated with family ties, which can become evident when unexpected financial matters arise. The mask of social conventions then falls, revealing the grimacing face of greed…


This text is available to read for free. However, an authorization is required from the author prior to any public performance, whether by professional or amateur companies. To get in touch with Jean-Pierre Martinez and ask an authorization to represent one of his works : http://comediatheque.net


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A WORD FROM THE AUTHOR

The worse tragedies often make the best material for comedies… Euthanasia is an old socio-political chestnut that regularly finds its way in the news (and hospital rooms). I took this play on as a personal challenge to get laughter from an audience with the story of a man in a deep coma – I had to produce comedic content from a tragic situation. When a patient falls in a deep coma their relatives are asked whether to keep them on life support. In this comedy, two siblings are contacted by a doctor after an accident sent their brother in a coma, but since they haven’t spoken to their brother in a long time they aren’t sure what to do – especially since they don’t really care all that much and have their own problems to deal with. And then someone presumed to be the brother’s life partner shows up and provides more information about the circumstances of the accident. These new elements are given to the audience piece by piece and cause the siblings to cynically alternate between wishing to maintain life support and wanting to ‘unplug’ their brother. Life is a joke, and when someone dies or is about to die it becomes a tragicomedy whose components are defined by the social hypocrisy that governs our behaviours in such solemn circumstances. Society forces us to respect, even sacralise death. The problem of course, is that except for the Pope, the living do not become saints simply by taking their last breath, and when people die they tend to leave money. Sometimes even dirty money… This tragi-comic aspect of life makes it difficult to keep a straight face when confronted with death. The best fits of laughter are those you get at funerals. Or in a theatre. I hope I have written a comedy where you will laugh yourselves to death…


Jean-Pierre Martinez

A semiologist and a writer, Jean-Pierre Martinez has created a unique theatrical universe borrowing and blending elements from light comedy, black humour and the absurd. A powder-keg of a mix that is seducing an ever increasing audience. A script-writer for the French television series Avocats & Associés (France 2), he has written over a hundred television screenplays and seventy comedies for the theatre. He is one of the most frequently played contemporary playwrights in France and his plays have been translated in English, Spanish and Portuguese. Friday the 13th is his biggest play and has been performed in theatres all over the world, from Paris to Broadway and from Buenos Aires to Mexico. All his plays are published by La Comediathèque and are available online (http://comediatheque.net). Originally from Paris but in love with Provence, he spends the best part of the year in Tarascon where he registered the Compagnie Libre Théâtre, of which he is a director along with Ruth Martinez.


 Critical but stable

English translation by Anne-Christine Gasc

Raymond is in a deep coma following an accident on a Boris Bike. His long lost relatives are called to his bedside to decide what to do and avoid prolonged therapeutic interventions. But this collective decision becomes even more difficult when the patient turns out not to be who everyone thought he was. And is the keeper of a secret that could make everyone very rich…

6 characters (male or female)

Quentin: Raymond’s brother (or sister)

Beatrice: Raymond’s sister (or brother)

Peggy: Raymond’s partner

Doctor Killhem: the doctor

Nurse Diggold: the nurse

Detective McManigal: the police officer

© La Comédi@thèque

A hospital room. The body of a patient lies on a hospital bed, slightly reclined, with an IV drip and several machines and monitors. His face is covered by a sheet. Since this isn’t a speaking part, a mannequin will be used. Doctor Killhem (male or female) and Nurse Diggold (male or female) enter the room, both wearing white coats.

Killhem – Hospitals are always overheated. Makes me want to open a private clinic just for the air conditioning.

Diggold – No wonder germs thrive in hospital environments.

Killhem – They always go on about the cost of health care. Maybe if they stopped heating hospitals during the summer it would help.

Diggold – And it would reduce the chances of getting one of those hospital-acquired infections, Doctor Killhem.

Killhem – Actually, I think I may be incubating a nice little MRSA myself. Or maybe a tropical disease. You, on the other hand, Nurse Diggold, look like a picture of health.

Diggold – Thank you, Doctor. I’ve been eating carrots, for the carotene. I’m not too orange, am I?

Killhem – Not at all, my little bunny. So, what do we have here?

She hands him a medical file.

Diggold – Raymond Mariani, forty years old. He’s in a deep coma following an accident on a Boris Bike.

The doctor glances at the file.

Killhem – Helmets should be mandatory for push bikes.

Diggold – Actually, he was wearing a helmet. Unfortunately, it didn’t help when he was hit by a bus and met the pavement at forty miles per hour.

The nurse lifts the sheet and we can see the patient’s head in a full-face helmet.

Killhem – But now the only danger is falling off the bed, so why is he still wearing his helmet?

Diggold – It’s such a mess inside… We didn’t dare remove it for fear brain matter would spill all over the pillow.

Killhem – Hmm, then there’s little chance he’ll wake up soon …

Diggold – Respiratory arrest most likely triggering loss of oxygen to the brain.

The doctor looks at the file again.

Killhem – I see… Flat EEG… probably brain dead. Shouldn’t we ease his suffering?

Diggold – It would free up a bed for sure, but…

Killhem – You’re right, we should speak to his relatives first. Did you contact his family?

Diggold – Yes, they should be here soon.

Killhem – Perfect.

Diggold – No other recommendations for this patient, Doctor?

Killhem – Let me think… Leave the visor closed so the flies don’t get inside.

Diggold – Oh, Doctor Killhem, you’re really something else…

Killhem – Something else! Exactly! That’s why I will soon join the two-tier medical system my dear. The public sector doesn’t have the means to pay me what I am worth… Would you like to join me in my new private clinic, as head nurse?

Diggold – I would follow you to the ends of the Earth, Doctor Killhem… Even the university hospital in Scarborough if you wanted me to. So a nicely air conditioned private clinic in Belgravia sounds even better.

Killhem – I can feel we’ll do great things together, Nurse Diggold… I just need to find some generous donors to fundraise for my project!

Diggold – I think I have an idea…

Killhem – Really? You’re wonderful, Nurse Diggold.

She pulls the sheet over the helmet.

Killhem – Why cover his face with the sheet? When I came in I thought he was dead.

Diggold – Sometimes he opens his eyes. Must be a nervous reflex. It’s to protect them from the light.

Killhem – It’s true, strip lighting is so harsh on the eyes… In our private clinic I’ll have them install pearlescent lighting. It’s much more flattering on the complexion.

Diggold – Especially for those getting end of life care.

Killhem – Don’t worry, my private clinic will only admit patients that are credit-worthy and in perfect health. I’m thinking of transitioning to plastic surgery.

Diggold – The rich are also entitled to have access to medical care to solve their little problems… No one is perfect. (Looking down at her chest) In fact I was thinking of a bit and nip and tuck myself.

They make their way out.

Killhem – I’ll take a closer look later, Nurse Diggold. A very close look. Who’s the next patient?

Diggold – A homeless man that was found last night in an alcohol-induced coma. He probably won’t wake up either.

Killhem – In this heat we shouldn’t keep him here long, or he’ll stink up the place… Do they have room in the kitchen freezer? They could tuck him in behind the processed meats, that’d keep him cool.

Diggold – Oh Doctor, you’re too much! You make everything so funny… I’m the one who’s going to die of laughter!

Killhem – With the jobs we have, if we can’t laugh a little…

They leave the room. Immediately, Quentin (or Quentine), a boho chic man (or woman), enters with a mobile phone glued to their ear.

Quentin – Listen, I don’t know everything yet. I just got to the hospital, but I went to the wrong room. I found some poor guy suffering from hypothermia who didn’t smell very nice. But now I’ve found him, I’m standing right in front of him…

He notices the patient on the bed.

Quentin – He doesn’t look too well either, actually… He’s got tubes and wires everywhere… Like a mini substation. Actually, I’m not entirely sure it’s him. His face is covered by a sheet… Yes, I know, it’s not a good sign… Well, the doctor will be here soon, I’ll find out more…

Beatrice, a Sloane Ranger type, arrives.

Quentin – Sorry, I have to go. My sister just came in. Ok, I’ll call you when I know more, but don’t wait for me for lunch… Love you too…

He puts his mobile phone away and greets his sister (hugs or kisses).

Beatrice – Hi Quentin.

Quentin – Hello Beatrice.

She notices the patient with the sheet over his face.

Beatrice – Oh my God! Don’t tell me I’m too late… Is he dead?

Quentin – I think if he was dead they’d have unplugged all of this.

Beatrice – Are you sure it’s him? I got the wrong room at first…

Quentin – You too? I don’t know why they have a room 13 and a 13 a…

Beatrice – Maybe it will bring him luck.

Quentin – What will?

Beatrice – Number 13!

He looks at the chart at the foot of the bed.

Quentin – Raymond Mariani. Yes, that’s him.

Beatrice – Maybe we could remove this sheet from his face, no?

Quentin – It does look a little like a shroud, but… I don’t know if…

Beatrice – You’re right. It’s best not to touch anything until the police arrive.

Quentin – You mean the doctor…

Beatrice – I bumped into him in the hall, he said he would be here shortly.

Quentin – What an unbelievable story… It’s been so long since I heard from him… To see him again today, like this… in this state… And you? How are you?

Beatrice – I’m ok.

Awkward silence.

Quentin – Do you still live in Windermere?

Beatrice – I’ve never lived in Windermere.

Quentin – Really?

Beatrice – I live in Windsor.

Quentin – Oh, that’s right…

Another awkward silence.

Beatrice – Are you still working for that ad company?

Quentin – I’m in finance.

Beatrice – Oh, that’s right…

Quentin – How about Raymond, were you in contact?

Beatrice – No more than you… The last time I saw him was at Dad’s funeral. Which you didn’t attend, if I remember correctly.

Quentin – Something came up at the last minute. But you have to admit that our family… doesn’t really have a sense of family.

Beatrice – It’s awful… He never had any luck.

Quentin – No… Poor Raymond… Just his first name…

Beatrice – What about it?

Quentin – Don’t you think it’s strange that he’s named Raymond?

Beatrice – Plenty of people are called Raymond.

Quentin – Not people like us. And not his age.

Beatrice – That’s true … And to my knowledge we don’t have any grandparents or uncles that he could be named after.

Quentin – I don’t know… Maybe he was adopted…

Beatrice – It would explain a lot…

Quentin – He always was the ugly duckling…

Beatrice – That’s true… He doesn’t even look like us.

Quentin – There’s something Asian about him, don’t you think?

Beatrice – Asian?

Quentin – Just a touch, mind you.

Beatrice – You think he’s adopted and they let him keep his first name?

Quentin – I don’t think there’s a lot of Asians called Raymond…

Beatrice – No…

A beat.

Quentin – On the bright side, if it turned out we weren’t from the same family, if he needed a kidney we wouldn’t be compatible…

Beatrice – There’s that.

Quentin – Speaking of which… Here’s the doctor… (Quietly to Beatrice) And given his name, I’d be surprised if he brought good news…

The doctor and the nurse arrive with appropriately gloomy faces.

Killhem – Doctor Killhem. And this is Nurse Diggold.

Beatrice – Hello Doctor.

Quentin – Nurse…

Beatrice – We came as soon as the hospital contacted us.

Killhem – You’re the patient’s brother and sister, am I right?

Quentin – Yes, well…

Killhem – I am sincerely sorry for what happened to your brother.

Beatrice – Is it that bad?

Killhem – I won’t lie to you, his condition is extremely worrying. He’s in a critical state and we don’t know which way it’ll go.

Beatrice – You think there’s still hope?

Killhem – Mr Mariani suffered a catastrophic head trauma and unfortunately the skull has been severely damaged. He is currently in a deep coma, and is on life support. We are going to do more tests but it would seem he is already brain dead.

Quentin – You mean he’s a vegetable…

Killhem – I studied medicine for 14 years. I wanted to give you some context and more information to justify my astronomically high salary. But yes, that’s what he is. A vegetable.

Beatrice – So there’s no chance he’ll ever wake from his coma?

Killhem takes the x-ray that Diggold took out of a file, and shows it to them.

Killhem – This is an x-ray of Mr Mariani’s skull. As you can see, there are numerous lesions and several fractures.

Quentin and Beatrice look at the x-ray pretending they understand what they are looking at.

Beatrice – Indeed, it’s not pretty.

Quentin – But the skull looks intact… the curve is perfect…

Killhem – That’s not his skull, that’s his helmet.

Beatrice – His helmet?

Diggold – The skull is so damaged that we chose to leave the helmet to keep the brain in place.

Killhem – At least what’s left of it…

Quentin – Do you mean that without the helmet…

Killhem – Imagine spaghetti in a broken colander, in a saucepan. We felt it was safer to keep the saucepan under the colander so the spaghetti didn’t spill in the sink.

Quentin – Oh, now I understand.

Killhem puts the x-rays away.

Killhem – I am very sorry to have to ask you this so bluntly, but… Do you know whether Mr Mariani had made any provision for continued care and organ donation, particularly in the case where he would need to be kept artificially alive?

Beatrice – I don’t know… We never had the chance to discuss that particular subject… We didn’t see each other very often, you see… (To Quentin) Did he mention anything to you?

Quentin – No… The last time I saw him was at your wedding. I imagine he didn’t think the circumstances were ideal to bring it up. Although… Who hasn’t considered assisted suicide during the Birdie Song? Honestly?

Killhem – I don’t want to rush you of course. But you’ll need think about it now.

Diggold – And if it becomes relevant, there’s also a decision to be made regarding organ donation.

Quentin – Organ donation? Oh no, but… We need to tell you, Doctor… We have reason to think that Raymond is our adopted brother… Therefore we wouldn’t be compatible for an organ donation…

Diggold – I think Doctor Killhem was talking about donating Raymond’s organs…

Quentin – Raymond’s… Of course… Yes… Personally I am totally in favour, of course. If it can help save another life…

Killhem – In any case, we would also need Mrs Mariani’s agreement. She just called, she’ll be here soon.

Beatrice – Mrs Mariani…

Diggold – His wife. Your sister-in-law.

Quentin – Of course…

Killhem – I will leave you with your brother… You can talk to him, of course, but we’re not sure he can hear you.

Quentin – Thank you Doctor.

Killhem – Let me know if you have any other questions… And if you need anything you can ring and a nurse will come… or a priest.

The doctor and the nurse leave the room. Quentin and Beatrice turn toward the patient.

Beatrice – Did you know he was married?

Quentin – No…

Beatrice – He could have at least told us. I don’t know that I would have gone to his wedding but you know… Don’t you think?

Quentin – I don’t know why but I can’t picture him with a wife.

Beatrice – Yeah… I’m curious to see what she looks like…

Quentin – According to the doctor it won’t be long before we find out…

At that moment, Peggy, Raymond’s presumed wife, arrives. The character can be played by a woman who looks and moves in an unfeminine way, or by a man dressed as a woman.

Peggy – Oh my God! Raymond!

Quentin and Beatrice glance at each other, intrigued.

Peggy – Don’t tell me I’m too late?

Quentin – Don’t worry, he’s still alive. Well, so to speak…

Peggy – Peggy. I am Raymond’s partner. Who are you?

Quentin – I’m his brother…

Beatrice – And I’m his sister…

Peggy – Strange… He never mentioned either of you…

Quentin – He never told us he was married either…

Peggy – He always was very discreet. I mean… He’s still very discreet.

Quentin – For sure, in his condition, he couldn’t be more discreet.

Peggy – Did the doctor say whether there was still any hope?

Beatrice – He wasn’t very reassuring, actually… We are just as distraught as you are… Do you have children?

Peggy – Not yet, unfortunately… I would have had something left of him…

Beatrice – Of course.

Peggy – But they are going to fix him, aren’t they?

Quentin – I think they asked us here to see whether we were in agreement about putting him out of his misery…

Peggy – Putting him out of his misery?

Beatrice – Raymond is unfortunately in a deep coma following this accident.

Peggy – His accident? What happened, exactly?

Quentin – That’s true… What happened, exactly?

Beatrice – We forgot to ask…

Quentin – A traffic accident, maybe.

Peggy – Raymond didn’t drive.

Quentin – Regardless, I think that Doctor Killhem is waiting for the greenlight to unplug him…

Peggy – Unplug him? This isn’t a toaster you’re talking about! Raymond is your brother!

Beatrice – To be honest, it’s been years since we last saw him…

Quentin – I even wonder why they asked us to come.

Beatrice – We are his only family, apart from you, but to ask us to make such an important decision…

Quentin – I’m not a believer so I don’t have anything against euthanasia… In fact, don’t you think it’s a sign?

Peggy – A sign?

Quentin – Euthan-asia.

Beatrice – We think that Raymond might well have come from Asia.

Quentin – I think it’s a sign.

Beatrice – Maybe you should be the one to make the decision. After all, you knew him much better than we did…

Peggy starts sobbing in an unconvincing manner.

Peggy – No, I am not ready to… to unplug him… Not just yet anyway…

Beatrice – We totally respect your decision. Don’t we, Quentin?

Quentin – Of course… (He glances at his watch) Actually, I have to go soon… Since we can’t do anything for the moment…

Beatrice – Me too… I have guests for dinner tonight and…

Quentin – Actually, I don’t think that our presence makes a big difference, the state he’s in…

Peggy – I’ll stay with him, if that’s ok with you…

Beatrice – But of course… You are his wife after all…

Quentin and Beatrice are about to leave but the nurse comes back.

Diggold – Oh, you must be Mrs Mariani…

Peggy – Yes… Could you give me some more information on Raymond’s condition?

Diggold – We are waiting for the latest results, but to be honest we are not very optimistic.

Peggy – Is he getting worse?

Diggold – No, not really. His condition is stable.

Peggy – In that case maybe there’s still hope.

Diggold – Unfortunately, my dear, in this instance stable isn’t a positive.

Quentin – A vegetable is also in a stable condition.

Diggold – Mr Mariani is indeed in a vegetative state. There are very few chances of his condition improving.

Peggy – Are you sure?

Diggold – Unfortunately. I think you should start thinking about what would be best for him.

Beatrice – Do you think he’s in pain?

Diggold – Hard to tell, but… kept alive in this sort of state, that’s not much of a life, don’t you think?

Beatrice – The nurse is right, Peggy. I understand your pain, but we can’t leave him like this…

Diggold – Your sister-in-law is right. Of course the departure of a loved one is one of our Lord’s greatest tests, but at some point you must start the grieving process, get a move on and face things head on. There’s lots of paperwork to fill in. And the inheritance of course. There’s no need to drag things on.

Quentin – Inheritance?

Beatrice – But of course… the inheritance… We’d forgotten about that…

Quentin – Who are the beneficiaries?

Diggold – Well, typically… (To Peggy) You’re his wife, aren’t you?

Peggy – Yes, well, yes, I mean …

Diggold – If your husband came to die, you would inherit… Actually, since you’re the patient’s spouse I would need to get you to sign some forms while you’re here…

Peggy – Well… Actually, we weren’t married yet…

Diggold – Oh… And you didn’t have any children either?

Peggy – No…

Diggold – In that case, it’s his brother and sister who are the beneficiaries… But I don’t think that’s your main worry right now.

Quentin (dreamily) – No, of course not…

Diggold – I’ll let you talk it over as a family…

The nurse leaves the room.

Peggy – Sorry, nature’s calling.

Peggy leaves for the bathroom.

Quentin – So we’re the beneficiaries…

Beatrice – We are his only family if he isn’t married…

Quentin – That’s crazy…

Beatrice – Yes…

Quentin – Do you think he had a lot of cash?

Beatrice – I doubt it, but… Who knows… We hadn’t seen him for years.

Quentin – I don’t even know what he does for a living.

Beatrice – I’m going to guess he’s on benefits.

Quentin – I don’t know… maybe he does work.

Beatrice – Well, I doubt he makes it past the income tax threshold.

Quentin – We should ask his wife… I mean, Peggy… She would know…

Peggy comes back.

Beatrice – Feeling better?

Peggy seems to be looking for something.

Peggy – I’m ok… Do you know where they put his belongings?

Beatrice – His belongings?

Peggy – Didn’t he have a suitcase when they brought him in?

Quentin – If he was hospitalised following an accident, I wouldn’t have thought he’d had time to pack a suitcase…

Beatrice – It’s not as if he was heading for a stay in the maternity ward…

Quentin – Why do you want to know if he had a suitcase? I don’t think he’s going to need one for a while…

Peggy – No, of course… I’m sorry… I’m not myself…

Quentin – As you were living with him… could you tell us a little about his life? I mean, since we hadn’t seen him for a long time…

Beatrice – Yes, how were things going for him?

Peggy – What do you mean, things?

Beatrice – Business… Did he have a job?

Peggy (distracted) – A job? Raymond?

Quentin – I knew it…

Peggy seems preoccupied by something else.

Peggy – I’ll go ask the nurse if they stored his suitcase somewhere…

She leaves the room.

Quentin – She seems rather upset, doesn’t she?

Beatrice – That’s understandable.

Quentin – In any case, apparently he didn’t have a fortune… So for the inheritance…

Beatrice – He may not have earned a fortune… but three years ago when Mum died, he would have inherited his share of Mum and Dad’s estate.

Quentin – Shit, you’re right…

Beatrice – We could at least get that back… I mean, it makes sense that it should come to us. We’re his family after all.

Quentin – Especially since Raymond may not have actually been part of the family. If he was adopted from Bangladesh. Or even Birmingham.

Beatrice – I wouldn’t mind some money right now. We’ve just bought property in Provence, right next to Cliff Richard’s place…

Quentin – No, really? Provence is stunning. The light. The lavender…

Beatrice – The thing is there really is a lot of work to do before it looks like Cliffy’s house. Right now even Lulu wouldn’t take a summer holiday there.

Quentin – I see. And since he’s lying here like a vegetable…

Beatrice – Unplugging him would be the compassionate thing to do.

They are lost in thought for a moment.

Quentin – What if he’d already blown it all?

Beatrice – You think?

Quentin – This is Raymond we’re talking about…

Peggy returns.

Peggy – Apparently he didn’t have a suitcase…

Beatrice – But other than that, everything was good? He didn’t have any financial troubles?

Peggy – Financial troubles?

Quentin – I think he recently came into a small inheritance. I hope he would have managed the money sensibly.

Peggy – Sensibly? Raymond?

Beatrice – Oh, that’s right…

The nurse comes back.

Diggold – So? Have you been able to have a family discussion about the best course of action for your loved one?

Quentin – Well, actually…

Beatrice – We haven’t made a decision yet.

Quentin – And we’re not necessarily in agreement…

Beatrice – Peggy isn’t quite ready for…

Peggy is still looking for something.

Peggy – So, he didn’t have a suitcase when he arrived?

She even looks under the bed.

Diggold – Having said that, if Mr Mariani wasn’t married, it’s up to his brother and sister to decide what’s best for him.

Quentin – Actually… we would like a little more information.

Diggold – On his medical condition? Well, as I was telling you earlier…

Quentin – We were thinking more in terms of the finances.

Diggold – Don’t worry about that. Euthanasia is not covered by the NHS yet but we consider this medical procedure a charitable and Christian act that we perform without charge. However, if you insist on making a donation, Doctor Killhem is considering creating a foundation in Belgravia for…

Beatrice – We were thinking more about the inheritance aspect of the finances.

Diggold – The inheritance. I see. Well, of course.

Quentin – Did you know whether Mr Mariani was a man of means?

Diggold – He was comfortable enough to have a subscription to Boris Bikes… But you should really ask his most recent partner…

Peggy wasn’t paying attention but reacts when she hears her name.

Peggy – Pardon?

Diggold – You need to know that in accepting your brother’s inheritance you agree to take on his potential debts as well as his assets. That includes his hospital fees…

Beatrice – You’re kidding…?

Quentin and Beatrice consider for a moment the patient and all the medical apparatus that surrounds him.

Quentin – Private rooms costs a packet, right?

Diggold – A fortune, indeed. His care is covered under the NHS but by rights if he hasn’t got private healthcare he should have been out on the ward with the rest of the great unwell.

Beatrice – Did Raymond have private healthcare?

Diggold – I’ll have to check with accounts… But if you’re not sure you can always refuse the inheritance and make Doctor Killhem’s foundation the beneficiary…

Quentin – But of course… I see…

Diggold – In any case, with regards to the life support decision, I would advise you to carefully weigh the pros and cons… Because he could stay in a coma for years and who knows how much that will end up costing.

Beatrice – In that case we may have to put him quickly out of his misery. What do you think, Quentin?

Diggold – I’ll give you a few more minutes to decide…

She leaves the room.

Beatrice (to Peggy) – What do you think?

Peggy – Isn’t there a small chance that he could wake from his coma?

Quentin – After all, if we renounce the inheritance, whether he lives or dies…

Beatrice – True, we don’t need to rush his death. It’s not very Christian…

Quentin – I need to talk to my solicitor, but I wonder if the hospital bills aren’t the family’s responsibility even if we turn down the inheritance.

Beatrice – But we hardly even know Raymond!

They move close to the patient.

Quentin – You think he can hear us?

Peggy– Go figure…

Beatrice – What about the organ donation, what do you think about that?

Quentin – Donating his organs?

Beatrice – What? You want to sell them?

Quentin – I don’t know… How much do you think we could get for them?

Beatrice – It could go towards the hospital bills… I’m kidding, my nerves are shot.

Quentin – Are you sure he can’t hear us?

Beatrice (to Peggy) – Do you know where he stood on organ donation?

Peggy – No…

A beat.

Beatrice (to Peggy) – Would you consider marring Raymond, before we unplug him?

Quentin – And before we remove his organs, naturally.

Beatrice – That way you could have his name. Think of it as a souvenir.

Quentin – Since you don’t have children.

Beatrice – Post-mortem artificial insemination would be one step too far.

Quentin – I’m not sure you can marry someone in a coma… That’s another question for my solicitor.

Peggy – Yeah, right. I see what you’re up to… A few minutes ago I wasn’t part of the family and now you want me to marry him so I can foot the hospital bills.

Beatrice – That’s such a negative way to see things…

Doctor Killhem enters the room.

Killhem – So, everything good in here? I mean… Given the circumstances. Did someone offer you a coffee? Or a danish? Oops, I forget I’m still working for the NHS. A rich tea and a Nescafe perhaps?

Beatrice – Oh, Doctor! Perfect timing, we need your advice.

Killhem – Please, we are here to help.

Quentin – It’s about Raymond’s private health care.

Killhem – Unfortunately, your brother didn’t have private healthcare. And I don’t want to worry you but some sort of admin error means that he was placed in a private room and has already incurred some considerable expenses.

Beatrice – It’s ok, we’re already pretty worried anyway…

Killhem – I understand… Seeing your brother… Or your life partner in such a state… It’s difficult to comprehend, I know.

Peggy – But you think there’s a chance he might talk again one day?

Killhem – Talk? Dear God… A miracle is always possible, but you’ll have to send the request much higher than me (looks skyward). And while miracles are not guaranteed to work they are free… euthanasia on the other hand is a dead cert but not covered by the NHS.

Beatrice – Thank you for these comforting words, Doctor…

Killhem – Oh, before I forget, the police are waiting at reception.

Peggy – The police?

Killhem – I told them the patient wasn’t able to answer questions, but they are keen to talk to friends and family. I told the officer to come to the room… Anyway, if you change your mind about coffee and danish there’s always Deliveroo.

The doctor leaves.

Quentin – The police? Why are the police here?

Beatrice – Maybe they’re investigating the circumstances of the accident… it would make sense…

Quentin – Of course. Actually, we still don’t know anything about this accident.

Beatrice – The nurse said something about a Boris Bike…

Quentin – You don’t know what happened, do you?

Peggy – Well… I… No, not really.

Beatrice – Maybe this police officer will be able to tell us more.

Quentin (seeing Peggy very uncomfortable) – You don’t want to find out?

Peggy – Look, I don’t have time to explain, but please, don’t tell the police about me, ok?

Quentin – Why not?

Peggy – I… I’m not Raymond’s wife… I mean, I’m not his life partner either.

Beatrice – Really? So who are you?

Peggy – I’m his partner… His business partner.

Quentin – Business partner? What kind of business?

Beatrice – The kind of business that the police shouldn’t know about, apparently…

Someone knocks on the door.

Peggy – I’ll tell you later. I’ll go and hide in the bathroom until they leave.

Detective McManigal (man or woman) comes into the room.

McManigal – Detective McManigal (wiping his brow) It’s hot in here, isn’t it? You must be the family, I presume…

Quentin – His brother and sister, yes.

McManigal – I am investigating the case your brother is involved in.

Beatrice – A case? There’s more to this than an accident with a Boris Bike? Did he fail to return it within the two-hour limit?

McManigal – It’s a little more complicated than that, actually…

Quentin – Really?

McManigal – I thought you already knew… Your brother is in a coma following an armed robbery.

Beatrice – An armed robbery?

McManigal – The Post Office next to where he lived.

Quentin – I see. Raymond never did like banks.

Beatrice – Either that or he was picking up his benefits.

Quentin – He was riding by on his bike and was hit by a stray bullet, is that it?

Beatrice – Deep down I’m not surprised.

Quentin – Our brother never had any luck…

McManigal – Actually, that’s not what happened… Your brother is involved in the armed robbery… he was the robber.

The other two are dumbfounded.

Beatrice – Raymond? He robbed the Post Office?

McManigal – Yes, he did. With an accomplice.

Quentin – Armed robbery… That’s so unlike him.

Beatrice – An armed robbery on a Boris Bike? With a full helmet?

Quentin – Actually, that is more like him.

McManigal – Did you know anything about his illegal activities?

Beatrice – Of course not. It’s been years since we last saw him…

Quentin – On a Boris Bike… That must be grounds for an insanity plea, no? Either that or an award for inventing the eco-friendly robbery.

Beatrice – So it’s not a traffic accident?

McManigal – Yes and no… Your brother got hit by a bus after a police chase through London.

Quentin – A police chase? He was on a Boris Bike! What were the cops riding? Roller skates?

McManigal – This isn’t a joke, Mr Mariani. We’re talking about an armed robbery.

Beatrice – No one is taking this more seriously than we are, Detective. I will remind you that our brother is between life and death…

McManigal – I am genuinely very sorry… Especially since his accomplice escaped and he could have given us her name.

Quentin – Her name? So it’s a woman…

McManigal shows them a piece of paper.

McManigal – This is her e-fit. Have you seen this woman before?

Quentin – Unfortunately I don’t have my reading glasses… (He pretends to have difficulty reading) You know what it’s like when you get older…

McManigal (to Beatrice) – And you?

Beatrice – Who? Me? Oh you know… I’m terrible with faces… It’s very simple: I can’t tell people apart. I once went to a swinger’s club on the Kingsland Road and came home with my own husband. It was only when he took the dog out the following morning the penny dropped.

McManigal – I see…

Quentin – Lucky you…

McManigal steps closer to the bed.

McManigal – I spoke with the doctor earlier… According to him there’s little chance that Mr Mariani will wake from his coma any time soon.

Quentin – If he wakes up he’ll go to prison… That’s hardly a great motivator to step away from the light.

Beatrice – What will he get?

McManigal – If he were to give us the name of his accomplice, return the money and show remorse, the judge might be lenient…

Quentin – How much?

McManigal – Well, the gun was fake but that doesn’t make any difference. In theory, up to twenty years.

Quentin – No, I meant the money… How much?

McManigal – Three million.

Quentin – Three million pounds?

Beatrice – I see.

Quentin – And there I was thinking Raymond didn’t have any ambition… I’m almost impressed…

Beatrice – And you say you still haven’t found the money?

McManigal – Witnesses have confirmed that it was your brother who was holding the suitcase after the robbery… But when we found him after the accident, the suitcase had gone…

Quentin – So what happened, exactly?

McManigal – After the robbery, the two suspects split to make it harder to follow them. We lost her but your brother was later spotted near King’s Cross station.

Beatrice – Spotted…

McManigal – A bloke on a Boris Bike with a full helmet is easy to spot…

Quentin – Obviously not enough for the bus driver who ran him over…

McManigal – Regardless, before his accident he had time to get rid of the suitcase.

Beatrice – The suitcase…

McManigal – You know something about the suitcase?

Beatrice – No, no, nothing…

McManigal – In any case, know that your brother is under arrest. In principle I should stay here and stand guard in case he wakes up, but…

Quentin – The state he’s in, he’s not going to run away…

McManigal – And to be honest with you, hospitals depress me…

Quentin – I know what you mean… And they say they’re full of germs that resist all antibiotics these days.

Beatrice – Quite. There’s that saying about hospitals: you might know what you come in with but God only knows what you’re taking home.

Quentin – Same if you’re just visiting… I refused to attend all three of my children’s births for that very reason.

McManigal – Really?

Beatrice – Absolutely, in terms of germs and viruses, hospitals are one big, petri dish playpen.

Quentin – And you know the tropical disease ward is right next door. Doctor Killhem was just telling us that just last week they had the first case of malaria in over a century.

Beatrice – Didn’t he say ebola?

Quentin – Possibly…

McManigal – He told you that?

Beatrice – Just between us, I think this hospital is on the verge of being quarantined. Apparently, the nurses are dropping like flies.

McManigal now seems in a hurry to leave.

McManigal – Right, in that case I’ll leave you to it… I’ll come back to check on him once in a while…

Quentin – Thank you for your kindness, Detective.

Quentin holds out his hand that he can’t refuse to shake.

McManigal – Do you mind if I wash my hands before I leave?

Beatrice – Where?

McManigal – In the bathroom!

The other two are dismayed.

Quentin – Well, I mean…

Beatrice – No, no problem at all…

McManigal enters the bathroom. The other two exchange worried looks.

Quentin – We’ll just say that she threatened to kill us if we said anything…

Beatrice – With her fake gun?

Quentin – We didn’t know that then!

McManigal returns.

McManigal – You know, I’ve been feeling a little peaky since I’ve arrived. I hope I haven’t caught something nasty… You’ll let me know if your brother wakes up, won’t you?

Beatrice – Of course we will, Detective…

McManigal leaves.

Beatrice – How did she do that?

Quentin – Maybe she hid behind the shower curtain. They do that in horror films all the time.

Quentin – Well, I think that we can forget about the inheritance. If Raymond was reduced to robbing the Post Office on a Boris Bike, he obviously wasn’t flush.

Beatrice – But there’s the loot…

Quentin – Right… The suitcase…

Beatrice – That’s why Peggy didn’t want to unplug Raymond before he told her what he did with the money…

Quentin – Now I understand why she was so intent on finding out whether Raymond had any luggage when he arrived…

Peggy returns.

Peggy – Thank goodness the bathroom is shared between both rooms.

Quentin – The patient next door wasn’t surprised to see you?

Peggy – He’s in a coma, too…

Beatrice – Oh that’s right, room 13a…

Peggy – I overheard everything.

Beatrice – So?

Peggy – Yeah, ok, I’m the accomplice.

Quentin – No kidding… Actually the e-fit is a perfect likeness.

Beatrice – It’s going to be difficult to convince the Detective that we didn’t recognise you if he finds out we saw you here…

Peggy – Thank you for your discretion…

Quentin – We could still be in real trouble…

Beatrice – And what’s in it for us?

Peggy – Ok, if you help me find the money we’ll share. One million each…

Beatrice – We split it three ways?

Quentin – Now we just need Raymond to tell us where it is.

Peggy – In the state he’s in…

Beatrice – Precisely. It’s not going to be easy to get him to tell us what he did with the money.

Peggy – He might confide more easily if it’s his family asking.

Quentin – And then?

Peggy – If we can get him to spill the beans, we can unplug him right after. Rather than let him live like a vegetable. And three million split four ways that’s not a round number anyway…

Quentin – And he won’t be tempted to shop you to the cops, right?

Peggy – It’s my understanding that you weren’t very close. It would also ensure you don’t have to pay his medical bills for years to come…

Beatrice – I would really be more comfortable if I were sure he couldn’t hear us…

Quentin – You think he could be faking?

Peggy – Faking a deep coma? Is that possible?

Beatrice – He was always a natural. Do you remember when we were kids? Sometimes he would sleep so soundly… in the morning we often thought he had fallen in a coma.

They all come around the bed.

Peggy – Maybe this little shit wants to keep the money for himself…

Beatrice – Raymond, can you hear us?

Quentin – The helmet isn’t helping.

Beatrice – The doctor said that if we removed it, his brain may spill on the pillow…

Peggy – We could just open the visor.

She opens the visor.

Quentin – Raymond, this is your brother, Quentin…

Peggy shakes him a little roughly.

Peggy – Raymond? Raymond? Where the fuck is the fucking money?

Beatrice – Careful, you’ll kill him!

Quentin – He opened his mouth…

Peggy – Shit, he did.

Beatrice – It looks like he wants to tell us something…

Quentin – Maybe it’s a reflex…

Peggy – Look, it’s… there’s something in his mouth!

Beatrice – Yes there is…

Peggy sticks her hand through the visor.

Peggy – Spit it out god dammit!

Quentin – All right, gently.

Peggy – The fucker, he bit me.

Quentin – I hope for your sake he’s not contagious.

Beatrice – So, what is it?

Peggy removes a key from Raymond’s mouth which she holds for all to see.

Peggy – Fuck me! It’s a key!

Beatrice – A key?

Peggy – It looks like a key to a train station locker… Maybe he had time to hide the suitcase in a train station somewhere…

Beatrice – And he tried to swallow the key knowing the police would catch him.

Quentin – Great… It’s not like there’s only a couple of train stations with lockers in London…

Peggy – The detective said his accident happened near King’s Cross station.

Quentin – Wow… Do you think that’s where it might be? It’s like we’re in a whodunit movie.

Beatrice – Or a play…

Peggy – I can’t go. The police are looking for me, and they have my e-fit.

Quentin – And a very lifelike one, too.

Peggy (to Beatrice) – You should go.

Beatrice – Me?

Peggy – Yes, you. In that stuck up yummy mummy garb of yours you’ll blend right in.

Beatrice – Thanks a lot… What if I get arrested?

Peggy – Tell them it’s for the kid’s school fees.

Quentin – This is three million pounds we’re talking about… Think about all the home improvements you’ll be able to afford for your place in Provence.

Beatrice – Why don’t we go together?

Peggy – That’s right, so you can both leave with the money? Not a chance. (She takes out a gun and points it at them) He stays here with me.

Beatrice – Oh come on… The detective told us it was a fake gun.

Peggy – Alright, but screw me over and see what happens.

Quentin – And in any case, one of us should stay with Raymond, or it will be look odd.

Beatrice – I’m still not sure… You don’t think we should call the police?

Peggy – And send me to prison?

Quentin – And there might not be anything in that locker. If we do find something we can work out a plan from there.

Beatrice – Yeah, well whatever we find if we keep it that’s fencing…

Quentin – Just focus on what you could do with a million pounds.

Beatrice – Yeah…

Quentin – You could turn your wind mill ruin into a castle! With a swimming pool even bigger than Cliff Richard’s!

Beatrice – Alright, I’m going.

She leaves. The other two exchange embarrassed looks. Quentin’s mobile phone rings, he answers. Peggy steps closer to the patient.

Quentin – Yes… No, I’m still at the hospital… It’s just that… Let’s say it’s more complicated than we thought… Listen, silver lining and all that, it might just be good news in the end… Raymond? Oh no, he’s still in a coma… Listen, I’ll tell you more… I can’t talk now… No, no, don’t wait I won’t be home for dinner… OK, me too…

Peggy – Looks like he’s breathing better since we removed the key from his mouth, don’t you think?

Quentin – Maybe we saved his life…

Peggy – Let’s not get carried away.

Quentin – Shouldn’t we tell the doctor?

Peggy – So the cops can throw him in prison?

At that moment, the nurse shows up briefly.

Diggold – Everything ok?

Peggy – Well, it’s… stable.

Diggold – Do call me if you need anything.

She leaves.

Quentin – Right, so what do we do?

Peggy – For now, we wait.

They each sit in a chair and start to doze off. We assume they fall asleep for a short while. Ellipse can be suggested by the changing of the light. Quentin’s mobile phone rings again. He wakes suddenly. Peggy is still asleep.

Quentin – Ah, Beatrice… Did you find the locker? A suitcase! Wowzers… No, you’re right, better not open it on the tube, it’s full of pickpockets so if the suitcase is full of bank notes… Peggy? No, she’s asleep here… Listen, I don’t know if… I can’t just sneak out, like that, without saying anything? We made a deal with her… True, robbing a robber isn’t really robbing, but still…

Peggy wakes up and hears the last part of the conversation. Quentin notices and changes tone.

Quentin – I think you should come back here as soon as you can and we’ll sort this out together. Ok? See you soon…

He puts his mobile phone away. Peggy looks at him suspiciously.

Peggy – You’re not looking to double cross me, are you?

Quentin – Not at all! Beatrice has the suitcase! She’s on her way…

The doctor returns.

Killhem – What lovely family scene… Raymond is very lucky to have such caring relatives… Sadly, it’s not always the case you know…

Quentin – Yes, I… After all, you only die once, don’t you?

The doctor studies the machines that surround the patient.

Killhem – Sadly, there is no change. The EEG is still flat.

Quentin – What control data are you using? I’m not sure that before his accident Raymond’s brain showed more activity… I’m kidding.

Killhem – You’re right. Joking helps one cope. It’s like I always say to my patients in hospice care: we’re all dying…

Quentin – You such a way with words, Doctor Killhem. I’m sure it makes them feel so much better…

Killhem – Why, thank you. It’s not just a job but a God-given vocation… You know where to find me if you need me…

Peggy – Thank you doctor…

The doctor is about to leave. Beatrice returns with a suitcase and is face-to-face with the doctor. A moment of uncertainty.

Killhem – You went to get him some clothes. That’s very nice of you. Although I’m not sure that in the state he’s in… I’ll tell you what, I’ll leave you to it.

The doctor leaves the room. Beatrice puts the suitcase at the foot of the bed. They look at it, fascinated.

Quentin – So? Did you look inside…?

Beatrice – I wanted to wait to open it here, it’s safer, isn’t it?

Peggy – Good idea.

Beatrice – And there’s a code…

Quentin – A code? What a shit… He must have been wary of thieves.

Beatrice – What are we going to do?

Peggy – Don’t worry, I know the code.

Peggy takes the suitcase and enters the code.

Quentin – 007? So creative…

Peggy opens the suitcase. Deception on everyone’s face. Beatrice calls out the contents of the suitcase.

Beatrice – A few pieces of clothing… A bathing suit…

Quentin – And a book to learn Dutch.

Peggy – This bastard tried to double cross me. He must have planned to escape to Holland with the money.

Beatrice – From King’s Cross?

Peggy – Well the money isn’t there…

Quentin (to Beatrice) – You aren’t trying to double cross US, are you?

Beatrice – Me? But I didn’t even have the code!

Peggy – Come on, let’s keep calm… It’s your sister you’re talking about… And we’re almost family now…

Beatrice comes close to the patient.

Beatrice – He opened his eyes!

Quentin – There’s still hope.

Beatrice – To find the money, you mean?

Quentin – Yes, that too…

Peggy – Maybe it’s a reflex?

Beatrice – Raymond, can you hear us?

Quentin – He blinked!

Beatrice – Maybe that means yes…

Quentin – You’re right. That’s how they talk to patients in a coma. I saw it in a film. Once for yes, twice for no. Or the other way around, I can’t remember…

Beatrice – Raymond? Listen carefully and try to answer this question with either yes or now: is your name Raymond?

Quentin – That’s a stupid fucking question…

Beatrice – It’s just to check that he understands the code.

Quentin – Did he blink or not?

Peggy – It’s not easy to see with the helmet on. Maybe we could try and remove it?

Beatrice – You want to kill him, is that it?

Peggy – Of course not!

Quentin – And it could be very messy…

The nurse comes into the room. Peggy slams the helmet visor shut.

Diggold – I just wanted to let you know that Detective McManigal was downstairs. He’ll be here momentarily…

Beatrice – Very well, thanks for letting us know Nurse Diggold…

The nurse leaves.

Quentin – I think you should hide again.

Peggy – I’ll take the suitcase with me, so he doesn’t see it.

Beatrice – Why don’t we put it under the bed?

She takes the suitcase and slides it under the bed. Peggy looks resentful.

Beatrice – Alright, go! What are you waiting for?

Peggy goes to hide in the bathroom. McManigal walks into the room. He is covered with either red blotches or spots.

Quentin – Detective McManigal, how are you?

McManigal – Not very well to tell you the truth… I’m still having hot flushes…

Beatrice – Please, sit down…

McManigal – Actually, I came for a consultation with Doctor Killhem… You haven’t seen him by any chance?

Quentin – I’m sure he’s around. You should ask nurse Diggold, they seem very close.

Beatrice – Where do you get that from, that they’re very close?

Quentin – I don’t know… masculine intuition… And also when I arrived I walked in the wrong room and I thought I saw Doctor Killhem ploughing Nurse Diggold in 13a.

Beatrice – Disgraceful… Thankfully the patient in that room is also in a coma…

McManigal – And what about your brother, any change?

Beatrice – Not in the right way, to tell you the truth.

Quentin – If things continue the way they are we’re going to have to have him put down…

Beatrice – And what about your investigation, any progress?

McManigal – We’re not dealing with Bonnie and Clyde, here. I’m sure I won’t surprise you if I told you that you brother had the IQ of a carrot. It would appear that his accomplice organised everything. She was the brains.

Quentin – A carrot?

Beatrice – Fitting for someone now in a vegetative state…

McManigal – She set him up knowing he had limited chances of escaping and hoping to get her hands on the money. Unfortunately for her… and for your brother, things didn’t quite happen the way she planned.

Quentin – I see…

Beatrice – He never was the lucky one.

Quentin – Anything else?

McManigal – Witnesses say they saw Raymond drop off a suitcase in a locker at Kings Cross. We searched the lockers but didn’t find anything…

Beatrice – Kings Cross… Maybe that will bring him luck…

McManigal – How do you mean?

Beatrice – Kings Cross! Protected by the cross of Jesus Christ, our Lord and Saviour!

McManigal – Yes… Well, I’ll try and locate this Killhem doctor… (wiping his brow with his handkerchief) I’m feeling worse and worse by the minute… I’ll let you know if I find anything else…

Quentin – Thank you Detective… And do take care of yourself…

McManigal leaves. The nurse enters.

Diggold – I don’t want to rush you, but I’m going to need you to make a decision about your brother… We just received a request for a liver. He could save someone’s life…

Beatrice – Alright… I promise we’ll give you the answer you want to hear. Could you give us some privacy for a last goodbye with just the family?

Diggold – But of course…

She leaves the room. Beatrice loses it and shakes Raymond to wake him up.

Beatrice – God dammit Raymond, wake up! Do you really want to end up with just one lung?

The other two look at each other, a little worried.

Quentin – I think she said liver.

Peggy – Right, I’ll leave you to it, you’re his family after all… And I need to not be here when the cop comes back…

Quentin – Do you think he’s playing dead to avoid going to prison?

Beatrice – And keep the money for himself!

Peggy – I can take the suitcase with me if you want. For you it doesn’t represent anything, but for me it has great sentimental value…

Quentin – Sentimental value?

Peggy – This suitcase, it’s… it’s a gift from Raymond…

Beatrice – You’ve been after this suitcase from the very beginning.

Quentin – That’s right, even before we had the code.

Beatrice – So you knew the money was inside…

Peggy – But you can see for yourselves that it isn’t!

Beatrice – Maybe we didn’t look carefully enough…

Beatrice tries to grab the suitcase from Peggy, who doesn’t want to give it up. A tug of war ensues and the suitcase breaks in two pieces. Quentin comes closer.

Quentin – There’s a false bottom…

Beatrice – And the money’s inside.

Quentin – You knew it and you wanted to double cross us!

Peggy – Ok, so I did know… So what do we do now?

Beatrice – We split it, just like we said!

Peggy – Why should I share with you?

Quentin – I don’t know… to ensure we don’t report you to the cops? So that you don’t leave this hospital to serve at Her Majesty’s Pleasure for twenty years.

Peggy – Alright, you convinced me…

Quentin removes a few bank notes from the suitcase.

Quentin – Three million pounds.

Beatrice – I feel like I’ve just won the lottery…

Peggy – Can I remind you that this is still dirty money?

Quentin – Dirty, and in small used notes.

Beatrice – Just what I need to pay the renovations on my house on the black market…

The nurse returns with a syringe.

Diggold – Alright, I am ready…

Quentin – Ready?

Beatrice – Oh God, Raymond! He’s still our brother after all…

Diggold (with a scary face) – Don’t worry. I’ve never had a patient complain.

Black.

Peggy – What’s going on?

Diggold – Power cut. I don’t understand, the backup system should have kicked in… I’ll go check …

Quentin – Yes, please do. Because in the dark… You don’t want to inject the wrong person…

The nurse leaves the room.

Beatrice – Well, we’ll soon find out if he really needed all this equipment to stay alive…

Quentin – I’m not staying here in the dark with a living-dead. It gives me the heebie jeebies.

Beatrice – Me too.

Peggy – Let’s go.

They leave the room.

We hear music on hold, Vivaldi’s Four Season style. Ellipsis.

The lights come back on. Quentin, Beatrice and Peggy return to the room. Then the nurse.

Diggold (very upset) – Oh my God! The backup system also broke down. This shouldn’t ever happen… We fixed it now, but…

Quentin – What?

Diggold – Your brother’s life support depended on several machines… and they all need electricity…

Beatrice – And?

Diggold – And I’m afraid that the question of whether to unplug him or not doesn’t need an answer any longer.

Peggy – He’s dead?

Diggold – He hadn’t been very much alive for some time, but now… I’m afraid he’s completely dead. I’ll check anyway…

She comes to the bed and checks the patient quickly.

Diggold – Yes, it’s over… It didn’t happen exactly the way we would have wanted but perhaps it’s for the best after all? I’ll leave you alone. The doctor will be with you in a moment.

She leaves. The others are stunned.

Beatrice – How awful…

Quentin – He was our brother after all…

Peggy walk to the bed.

Peggy – I think we can remove his helmet now.

Quentin – I’m not sure… It’ll make a mess…

Beatrice – Well, we can’t bury him with his helmet…

Peggy – At least we can open the visor… So we can say our goodbyes…

She opens the visor.

Quentin – Did he have green eyes?

Beatrice – He would be the only one in the family…

Quentin – Which is just another proof that he isn’t actually part of the family…

Peggy looks as well.

Peggy – No!

Quentin – What now?

Peggy – This isn’t Raymond!

Beatrice – This isn’t Raymond? But a few moments ago it was Raymond.

Quentin comes closer.

Quentin – Yeah, well now it’s not Raymond.

Beatrice – So who is it?

Peggy – This bloke looks a lot like the living-dead I saw in the room next door.

Quentin – That’s right! I saw him too when I arrived at the hospital. It’s him!

Beatrice – He didn’t walk himself into this bed…

Peggy – So where’s Raymond?

Quentin looks under the bed.

Quentin – Raymond isn’t the only thing that’s disappeared…

Beatrice – The suitcase! It’s gone!

McManigal arrives.

McManigal – Doctor Killhem has decided to keep me in for observation and a checkup… You were right: hospitals, you know what you get admitted with…

McManigal turns and ends up face to face with Peggy.

McManigal – You look a lot like someone whose e-fit I have in my pocket.

Peggy – Did you grass me and hide the money too?

Beatrice – What? No!

Quentin – I assure you, Detective, we have no idea what she’s talking about.

McManigal (suspicious) – But you told me earlier you didn’t know her.

Beatrice – But we don’t know her. At all. This is the first time we see her. Isn’t it, Quentin? Actually, who is she?

Quentin – We’re very upset, Detective, you can understand that.

Beatrice – And I would ask that you respect our family’s privacy at this difficult time.

Quentin – Our brother has just died.

McManigal – Well he won’t go to prison, but this one is coming with me. And as for you two, I’ll deal with you later. I am going to ask you to drop by the police station to make a statement. For now, I offer my condolences.

Beatrice – Thank you Detective.

McManigal (to Peggy) – As for you, as they say in Hawaii Five O, you have the right to remain silent, everything you say can and will be held against you…

McManigal handcuffs Peggy and they leave.

Quentin – I don’t understand.

Beatrice – What do you think happened?

Quentin – Do you think he could have faked being in a coma all this time?

Beatrice – And he would have used the power cut to put the homeless corpse in his bed so to make us believe he was dead so we would leave and drop the whole thing?

Quentin – Well, that would explain why his eyes were a different colour…

Beatrice – It would also explain why the money’s gone…

Quentin – Maybe Raymond wasn’t so stupid after all…

Beatrice – Yes… that’s why I don’t buy it.

Quentin – What colour were his eyes?

Beatrice doesn’t seem to know.

Beatrice – He was ginger I think… They don’t have green eyes…

Quentin – Raymond was ginger?

Beatrice – Wasn’t he?

The doctor arrives.

Killhem – I am so very sorry for what happened. I want to present the hospital’s and my own heartfelt apologies and of course our deepest sympathies for your loss.

Beatrice – Thank you…

Killhem – Since you were already considering helping your brother leave this world sooner rather than later, I do hope we can rely on you to not take this minor mishap any further… After all, we saved you from making a very painful decision.

Quentin – Don’t worry. We have enough troubles as it is…

Killhem – Consider it fate… Or even the hand of God…

Quentin – Hang on a minute. Are you saying it’s the hand of God that cut off the electricity in the whole hospital?

Killhem – More like the workers’ union… I think it’s an unplanned strike.

Quentin – In exchange for our understanding, Doctor Killhem, perhaps you could agree that as a gesture of goodwil…

Killhem – A gesture of goodwill?

Quentin – In consideration of the hospital fees accrued by our dearly departed. Because if you had a ‘100% satisfaction or your money back’ guarantee …

Killhem – Yes, of course, we’ll waive the fees. Consider it done.

Beatrice – We would also like to ask you, if possible, to spare our brother an autopsy. We feel he has suffered enough.

Killhem – Of course, thank you for your understanding and please come and see us soon. There will always be room for you here.

The doctor leaves, relieved. The siblings turn their head towards the bed.

Beatrice – At least, as far as he’s concerned, all is well that ends well.

Quentin – But it’s not him!

Beatrice – I know! That means he’s not dead!

Quentin – You’re right. And since the cops think he’s dead they’ll leave him alone.

Beatrice – And with his three million they won’t find him any time soon.

Quentin – Shame, I was starting to like him…

Awkward moment. If desired, the song ‘He ain’t heavy he’s my brother’ by Neil Young can be played here: So on we go / His welfare is of my concern / No burden is he to bear / We’ll get there…

Beatrice – Well, he double crossed us, this brother whose welfare is our concern.

Quentin – Yep… It’s like they say: Only when the tide goes out do you discover who’s swimming naked.

Beatrice – Quentin Tarantino?

Quentin – Warren Buffet.

Beatrice – Never heard of this philosopher…

Quentin – He’s an American billionaire who earned his fortune playing the stock market… But aren’t the kings of the finance world the philosophers of the 21st century?

Beatrice – Still. Ripping off his siblings. How ungrateful can you be…?

Quentin – I’ve told you, he never had any family values.

They make for the door.

Quentin – So where exactly is your house in Provence, the one next to Cliff Richard?

Beatrice – Bidet-sur-Mer

Quentin – Never heard of it.

They leave. The doctor and the nurse return. She pushes a small medical cart covered by white linen.

Diggold – Good, they’re gone.

Killhem – At last. Can I see the baby?

The nurse uncovers the cart and we can see the suitcase full of bank notes.

Killhem – This is it! We can finally open our private clinic Nurse Diggold!

Diggold – Please call me Scarlet…

Killhem kisses her.

Killhem – Scarlet, you are my guardian angel! So you knew from the start he wasn’t in a coma?

Diggold – I struck a deal with Raymond as soon as he was admitted. We reported he was in a coma so he wouldn’t go to prison, and he would give us two thirds of the money.

Killhem – The helmet was a genius idea. It almost fooled me too, at first…

They laugh.

Diggold – But going to the train station that was too risky. So much better to get them to bring the cash to us!

Killhem – By dangling the locker key right under their noses…

Diggold – Or rather, on Raymond’s tongue!

Killhem – And what do we do about him now? I mean, the real Raymond, the one in the room next door…

Diggold – When he’s feeling better, and when the police have forgotten about him, we can hire him as a gardener in our new plastic surgery clinic in Belgravia.

Killhem – And we’ll give him a facial reconstruction for free, of course…

Diggold – He can be your first patient! You could use the practice…

Killhem – You’re right. Especially since we promised him he’d be a majority stakeholder.

They laugh.

Killhem – And your suggestion to fake a power cut, that was brilliant. Have you ever thought of writing thrillers?

Diggold – Or plays!

Killhem – I told you, together we’ll accomplish great things, Nurse Diggold.

Diggold – Please, call me Scarlet…

They kiss. Black.

Killhem – We don’t need another power cut now, it’s all over. You’re overdoing it a little, don’t you think?

Diggold – Doctor Killhem, I think this time it’s a real power cut.

Killhem – Poor Raymond is still under respiratory support…

Diggold – Indeed… If the power doesn’t come back soon… He won’t even be claiming his share…

Killhem – In that case, we should just wait a little longer…

They kiss again. We hear Vivaldi’s Four Seasons.

They leave the room.

Light.

For a happy ending, we can see Raymond with his helmet on (played by the actor playing Quentin, for example) in the room next door quickly poke his head through the bathroom and then run out in the corridor.

The author

Jean-Pierre Martinez is a French playwright and scriptwriter. He was born in 1955 in Auvers-sur-Oise, France. He wrote 62 comedies, three of them (Friday the 13th, Strip Poker and Him and Her), translated in English.

Jean-Pierre Martinez experienced first the stage as a drummer in various rock bands, before to become a semiologist in the field of advertising. He worked afterwards as television scriptwriter, and came back to the stage as a playwright. Today he is among the most played contemporaries playwrights in France, and several of his plays have already been translated in Spanish and English.

He graduated in Spanish and English litterature (Sorbonne), in linguistics (Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales), in economics (Institut d’Études Politique de Paris) and scriptwriting (Conservatoire Européen d’Ecriture Audiovisuelle).

Jean-Pierre Martinez made the choice to offer all the texts of his plays to free download on his website : comediatheque.net

Other plays by the same author in English

 Friday the 13th

Him and Her

Strip Poker

Casket for two

 

 This text is protected under copyright laws.

Criminal copyright infringement will be investigated

and may result in a maximum penalty of up to 3 years in prison

and a EUR 300.000 fine.

Paris – November 2017

© La Comédi@thèque – ISBN 978-2-37705-113-7

http://comediatheque.net

Play available for free download

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