.

Mortelle Saint-Sylvestre

The Castaways of New Year’s Eve –  Los Náufragos de Nochevieja (español) – Os Náufragos do Réveillon (portugués)

Une comédie de Jean-Pierre Martinez

5 personnages  : 1H/4F, 2H/3F, 3H/2F

Ce petit moment de panique, le 31 décembre, quand on n’a aucun plan pour la soirée… On est prêt à accepter n’importe quelle invitation pour ne pas fêter la nouvelle année tout seul. Au risque de passer le pire réveillon de sa vie…


Ce texte est offert gracieusement à la lecture. Avant toute exploitation publique, professionnelle ou amateur, vous devez obtenir l’autorisation de la SACD.


TÉLÉCHARGER
PDF GRATUIT
TÉLÉCHARGER
EBOOK GRATUIT

ACHETER LE LIVRE

Cet ouvrage peut être commandé en impression à la demande sur le site The Book Edition, avec des réductions sur quantité (5% à partir de 4 exemplaires et 10% à partir de 12 exemplaires), livraison dans un délai d’une semaine environ.


TEXTE INTÉGRAL DE LA PIÈCE

Mortelle Saint Sylvestre


Salon d’un appartement vide, néanmoins préparé pour une fête de nouvel an low cost (décoration kitsch, maigre buffet). Quelques cartons épars pouvant servir de sièges ou de tables. Contre une cloison un panneau contre lequel sont accrochées des pipes de formes diverses. En fond de scène, une tente Quechua. Le téléphone sonne. Le répondeur se déclenche.

 Sissi (off) – Bonjour, vous êtes bien chez Sissi. Je ne peux pas vous répondre pour l’instant, j’ai décidé de me suicider. Pas la peine de laisser un message non plus, je ne pourrai pas vous rappeler.

Invitée 1 (off) – Très drôle, ton message, bravo. Écoute, je t’appelle pour te dire que… je suis vraiment désolée, mais je ne pourrai pas venir chez toi ce soir pour le réveillon. J’avais complètement oublié, mais j’ai une autre invitation. Voilà, allez, bonne soirée à toi, bonne année, et surtout bonne santé.

 La toile de tente s’ouvre, laissant apparaître Sissi, tel un zombie sortant de sa boîte. Sissi est un garçon à la sexualité ambiguë et au teint blafard. Sissi avale coup sur coup toute une boîte de cachets, avant de disparaître à nouveau dans la tente. Le téléphone sonne encore.

Sissi (off) – Bonjour, vous êtes bien chez Sissi. Je ne peux pas vous répondre pour l’instant, j’ai décidé de me suicider. Pas la peine de laisser un message non plus, je ne pourrai pas vous rappeler.

Invité 2 (off) – Oui, salut Sissi, j’espère que tu vas bien. Je voulais juste te prévenir que finalement, pour ce soir, ça ne va pas être possible. J’ai une amie qui… Bref, ça ne va pas le faire. Allez bonne soirée ma poule, et à l’année prochaine peut-être.

Sissi réapparaît pour avaler le contenu d’une deuxième boîte de cachets, avant de disparaître à nouveau dans la tente.

Noir suggérant une ellipse. Lumière.

Bruit de sonnette. Personne ne vient pour ouvrir. Alex, la parisienne (ou le parisien), style branché décontracté, arrive avec une bouteille de mousseux. Elle jette un regard circonspect sur les lieux avant de pénétrer dans la pièce.

Alex – Il y a quelqu’un ?

Comme personne ne répond, après avoir jeté un regard intrigué sur la tente, elle va vers le buffet situé du côté opposé. Pendant qu’elle a le dos tourné arrive Pat, la provinciale un peu coincée, qui a fait un effort de toilette de plus ou moins bon goût pour le réveillon. Elle a une bouteille de champagne à la main. Alex, qui ne l’a pas entendue entrer, hésite un peu avant de prendre une poignée de cacahuètes. Elle se retourne et sursaute en apercevant Pat.

Alex – Oh putain, tu m’as fait peur…

Pat – Désolée, la porte était ouverte, je suis entrée.

Alex – Ok.

Pat – Je… suis une amie de Chris. C’est elle qui m’a invitée.

Alex – D’accord… Apparemment, elle n’est pas encore arrivée.

Pat – Non… J’espère que ça ne vous dérange pas.

Alex – Que Chris ne soit pas encore arrivée ?

Pat – Qu’elle m’ait invitée.

Alex – Ah non, mais… ce n’est pas chez moi, ici. Moi je suis une amie de… Enfin, j’ai oublié son nom mais… Bref, comme je n’avais pas de plan pour le réveillon, c’est elle qui m’a proposé de venir.

Pat – Visiblement, elle n’est pas encore là non plus.

Alex – Non… Je ne l’ai jamais vue mais bon… Si je la vois, je la reconnaîtrai sûrement. Enfin j’espère…

Pat – Qui ça ?

Alex – Eh ben… La fille qui m’a invitée. Celle dont j’ai oublié le nom et qui n’est pas encore là.

Pat – Ah oui… Remarquez, ce n’est pas toujours évident de reconnaître quelqu’un qu’on n’a jamais vu, comme ça dans la foule…

Alex – La foule…

Pat – Je plaisante. Comme pour l’instant on n’est que deux…

Alex (se présentant) – Je m’appelle Alex.

Pat – Pat.

Silence. Alex regarde autour d’elle.

Alex – Je ne sais pas du tout chez qui on est, en fait… Je ne sais déjà pas qui m’a invitée.

Pat – J’avoue que moi non plus. Enfin, moi je sais qui m’a invitée, mais…

Alex – Les plans pourris du réveillon… Tous les ans c’est pareil. On a peur de se retrouver toute seule, comme une conne…

Pat – Oui…

Alex – J’avais un plan, mais… il est tombé à l’eau au dernier moment. Alors c’est le plan B…

Pat – Je vois…

Alex – Et toi ?

Pat – Ah non, moi je.. Je n’avais pas de plan A. Et donc vous…

Alex – On se tutoie, non ?

Pat – Ok. Donc tu… Tu ne sais pas du tout où on est ?

Alex – Non… Enfin si, je sais où on est, mais… On m’a juste envoyé l’adresse…

Pat – Oui moi aussi… C’est une collègue qui…

Alex – Chris.

Pat – C’est ça… Mais vous êtes vraiment sûre que… Je veux dire, tu es vraiment sûre que c’est là ?

Alex – Qu’est-ce qu’on t’a donné comme adresse.

Pat lui tend un bout de papier. Alex regarde.

Alex – Ça a l’air d’être ça.

Pat – On s’est peut-être trompé d’étage.

Alex – Bof… Il y a un buffet, non ? Là ou ailleurs…

Pat – Oui…

Alex – On t’a dit que c’était une soirée habillée ?

Pat – Je ne sais pas. Non. Pourquoi ?

Alex – Non, comme tu es sapée plutôt…

Pat – C’est le réveillon, non ?

Alex – Moi je suis venue comme ça.

Pat – Oui… Tout de même, c’est bizarre.

Alex – Quoi ?

Pat – Il n’y a personne.

Alex – Ouais, je ne sais pas…

Pat – Ils n’ont peut-être pas entendu.

Alex – Pas entendu ? Tu veux dire…

Pat – Ceux qui nous ont invitées… Enfin, ceux chez qui on est…

Alex – Ou alors, ils sont à côté… Ils n’ont pas fini de se préparer.

Pat – À côté, ça n’a pas l’air très grand.

Alex – Dans la salle de bain, peut-être.

Pat – C’est pour ça qu’ils ont laissé la porte ouverte. Pour qu’on puisse entrer en attendant.

Alex – Ouais.

Silence embarrassé. Le regard de Pat s’arrête sur la tente.

Pat – C’est curieux… C’est quoi, cette tente ?

Alex – Je ne sais pas… C’est peut-être la chambre d’amis…

Pat – Oui… Pour ceux qui préféreront passer la nuit ici après la fête.

Un temps.

Alex – Tu as amené du champ.

Pat – Oui.

Alex – Cool.

Pat – On m’a dit de venir avec une bouteille. Toi aussi, j’imagine…

Alex – Oui. Enfin, on ne va pas ouvrir une bouteille de champ tout de suite…

Pat – Non. Surtout que ça ferait du bruit. Je veux dire avec le bouchon.

Alex – Ça les ferait peut-être venir. (Elle s’approche du buffet) Il y a de la sangria. C’est silencieux, la sangria. Tu en veux ?

Pat – On va peut-être attendre qu’ils arrivent, non ?

Alex – Ouais, tu as raison…

 

Pat – C’est vrai qu’il n’y a pas foule.

Alex – Dire que l’idée c’était de ne pas passer le réveillon toute seule.

Pat – On sera au moins deux… C’est quand même bizarre. Il n’est pas loin de onze heures. Ils ne sont pas déjà couchés, quand même.

Alex – Ou alors ils sont en train de niquer. (Pat la regarde un peu choquée) On va attendre qu’ils aient fini. Ils vont certainement pas tarder.

Pat – Je ne sais pas…

Alex – Tu as un autre plan pour le réveillon ? Je veux dire, une soirée où tu pourrais m’inviter ?

Pat – Non… Je te dis, pas de plan B…

Alex – Quelle heure il est ?

Pat – Il y a cinq minutes il était onze heures (Regardant sa montre) Il est onze heures cinq.

Alex – Dans ce cas, on n’a plus le choix. Si on ne veut pas finir l’année toutes seules.

Pat – On sera au moins deux.

Alex – On l’a déjà dit, non ?

Pat – Oui, peut-être…

Un temps.

Alex – Ce petit moment de panique, le 31 décembre vers 20 heures quand on n’a pas de plan pour le réveillon. Il y aurait de quoi se suicider, non ?

Pat – Oui… D’ailleurs il y a une recrudescence de suicide le soir du réveillon, tu savais ?

Alex – Non, mais ça ne m’étonne pas du tout. Comment tu sais ça ? Tu es croquemort ?

Pat – Je suis facteur.

Alex – Facteur ?

Pat – Enfin factrice. Et j’ai remarqué qu’on distribue beaucoup plus de faire-part au mois de janvier.

Alex – Tu ne confonds pas avec les cartes de vœux ?

Pat – Je viens de Bretagne… C’est là où j’ai passé mon concours.

Alex – Il y a un concours pour devenir facteur ?

Pat – Ben oui… Il faut croire que je ne l’ai pas trop bien réussi. J’avais demandé Concarneau, j’ai été affectée dans le Dix-neuvième arrondissement.

Alex – D’accord… Mais dis-moi, ils ne font pas un bal, les postiers, pour la Saint Sylvestre ?

Pat – Les postiers ? Non, le bal, c’est les pompiers.

Alex – C’est ça… Les pompiers…

Pat – Je ne connais personne à Paris. Alors Chris m’a dit que…

Alex – Ah ouais…

Pat – Et toi ?

Alex – Moi, je suis née à Paris. Mais je te rassure, je ne connais personne non plus…

Pat – Ah oui, d’accord…

Alex – Sinon tu penses bien que je ne serai pas là ce soir, toute seule avec quelqu’un que je ne connais pas, invitée par quelqu’un que je ne connais pas, chez quelqu’un que je ne connais pas.

Pat – Et toi, qu’est-ce que tu fais ? Je veux dire, dans la vie…

Alex – Je suis éboueur.

Pat – Ah oui…

Alex – Enfin éboueuse. Mais il n’y a pas de concours, hein ?

Pat – Et j’imagine que les éboueurs non plus n’organisent pas un bal, chaque année, pour la Saint Sylvestre.

Alex – C’est dommage d’ailleurs, ça pourrait être curieux à voir.

Pat – Je ne savais pas qu’il y avait des femmes éboueuses.

Alex – C’est une profession qui se féminise beaucoup depuis quelque temps. Une nouvelle conquête de la lutte pour l’égalité des sexes, probablement.

Pat – Oui, c’est bien… Et… c’est intéressant comme métier ? Excuse-moi, c’est idiot… Ramasser les poubelles des autres, évidement… C’est déjà une telle corvée de sortir la sienne sur le trottoir…

Alex – Non mais c’est… Ce n’est pas si chiant que ça, en fait.

Pat – Ah oui ?

Alex – Au moins, on a l’impression de servir à quelque chose. Je veux dire… plus qu’un prof de banlieue ou un juge pour enfants, tu vois ?

Pat – Oui… Moi aussi, facteur, je trouve que c’est une profession injustement dévalorisée. C’est vrai, nous aussi on rend service aux gens. On ne fait pas des métiers si différents, finalement. Et puis en somme, on est presque concurrents. En cette période de l’année.

Alex – Concurrents ?

Pat – Pour les calendriers !

Alex – Ah oui… Non mais moi, éboueur, c’est provisoire. Je fais seulement ça pour pouvoir me payer le Cours Florent.

Pat – Ah d’accord… Super… Alors tu es comédienne ?

Alex – Oui… Enfin pour l’instant, je suis surtout éboueur. Mais je suis sur un projet pour monter une pièce que j’ai écrite.

Pat – Ah oui ?

Alex – Les Jeux de Hasard et de l’Amour.

Pat – Super…

Alex – C’est inspiré de la célèbre pièce de Marivaux, tu vois ?

Pat – Ah d’accord…

Alex – C’est une comédie romantique, mais très contemporaine en même temps.

Pat – Et ça parle de quoi ?

Alex – C’est un peu compliqué mais… En gros, c’est l’histoire d’un puceau qui joue au loto pour pouvoir se payer une pute.

Pat – Ah oui, c’est… Ça a l’air intéressant. Mais j’imagine que pour monter une pièce comme ça, ça doit coûter cher.

Alex – J’ai fait un crowfunding sur Kisskissbankbank. Mais pour assurer le coup, j’ai aussi pris un billet pour le Super Tirage de la Saint Sylvestre.

Alex montre le billet. Pat, qui se demande visiblement si l’autre parle sérieusement ou pas, préfère changer de sujet, et regarde sa montre.

Pat – On va attendre, on n’a plus le choix, non ? Les autres invités vont sûrement arriver.

Alex – Ouais…

Pat – C’est quoi, tous ces cartons ? On dirait un déménagement…

Alex – Au moins, si on finit bourrées, on sera sûre de ne rien casser. Et si on n’est pas en état de rentrer chez nous, on pourra toujours dormir sous la tente.

Pat – Je ne sais pas où on pourrait mettre le champagne au frais. Si on ne le boit pas tout de suite. Le champagne, c’est meilleur quand c’est frais. Il est frais, le tien ?

Alex – C’est de la Blanquette de Limoux. Vu l’état de mon compte en banque, je n’ai pas trop les moyens pour la Veuve Clicquot. En revanche, elle est super fraîche. Je l’avais oubliée dans le congélo.

Pat regarde la bouteille.

Pat – Ah oui, dis donc. C’est complètement gelé…

Alex – Oui… Un gros glaçon avec des bulles dedans.

Pat – Il vaut mieux que tu ne la mettes pas au frigo, alors.

Alex – Tu as raison… On va attendre un peu que ça dégèle…

 

Silence embarrassé.

Pat – C’est vraiment ce qui s’appelle attendre le dégel…

Alex – Ouais.

Pat – C’est combien, la Super Cagnotte de la Saint Sylvestre ?

Alex – Vingt millions. Si je gagne, ce ne sera même pas la peine de me souhaiter une bonne année.

Pat – Vingt millions… Je n’arrive même pas à imaginer… Qu’est-ce qu’on peut bien faire avec vingt millions ?

Alex – Je ne sais pas… J’imagine qu’on peut commencer par se payer des amis avec qui passer le réveillon. Je veux dire… des amis à peu près présentables, tu vois. Pas comme nous, quoi…

Ben arrive, look gothique. Elle a des boutons sur le visage, et une bouteille de cidre à la main.

Alex (moins fort) – Et surtout pas comme elle.

Ben – Salut…

Alex – Salut.

Ben – Euh… C’est bien là ?

Alex – Ouais, mais tu arrives trop tard. Halloween, c’était il y a deux mois, et on n’a plus de bonbons… (Ben ne semble pas comprendre la blague) Excuse-moi, je déconne…

Ben – Moi c’est Ben…

Pat – Pat.

Alex – Alex.

Ben – En tout cas, merci de m’avoir invitée…

Alex – Ah non, mais on ne t’a pas invitée.

Ben – Ah non ?

Pat – Non, c’est à dire que… Nous aussi on nous a invitées… Je veux dire, ce n’est pas chez nous ici…

Ben – Ah d’accord… Je suis une amie de Jeff. Enfin, amie Facebook.

Alex – Jeff…?

Ben – C’est lui qui m’a invitée.

Pat – Apparemment, il n’est pas encore là.

Alex – Non… Il semblerait que tous ceux qui nous ont invitées à cette fête aient préféré ne pas venir.

Ben – En fait, je ne l’ai jamais rencontré en vrai, Jeff. C’est juste un ami Facebook.

Pat – Ah oui…

Ben – D’ailleurs, en général, je ne rencontre pas grand monde. Je ne sors pas beaucoup.

Pat – Ah non…

Ben – Mais là, mes parents m’ont virée de chez moi. Enfin de chez eux.

Pat – Un 31 décembre ? Mais c’est horrible…

Ben – Ils organisent une fête eux aussi pour le réveillon, mais je n’étais pas invitée… Alors je ne savais pas trop où aller. C’est un peu pour ça que je suis là…

Alex – Cool…

Ben – On va être nombreux ?

Alex – Je ne sais pas… Pour l’instant, on est trois…

Ben – Mais alors on est chez qui ?

Alex – Alors là…

Pat – On nous a juste donné l’adresse…

Ben – Ah ouais d’accord. Et vous êtes sûres que c’est la bonne adresse ?

Alex – Non… Tu as amené une bouteille ?

Ben – Du cidre.

Alex – Champagne, mousseux, cidre… On baisse en gamme. Vous allez voir que le prochain invité va se pointer avec une bouteille de Perrier. Enfin, tant qu’il y a des bulles…

Ben remarque que les deux autres la dévisagent.

Ben – Quoi, qu’est-ce que j’ai ?

Pat – Non, non, rien, c’est juste que…

Alex – C’est quoi, ce truc que tu as sur la figure ? Ce n’est pas contagieux, au moins ?

Ben – Ah oui, les boutons… Non, c’est juste que je fais des essais pour un labo pharmaceutique. Pour un nouveau médicament. C’est les effets secondaires.

Alex – Eh ben… J’espère que c’est bien payé.

Ben – En fait, c’est un peu pour ça que mes parents m’ont virée de chez eux. Ils ne voulaient pas que je fasse peur à leurs invités pour le réveillon…

Alex – Sympa.

Pat – Alors c’est ça que tu fais comme métier ?

Ben – Cobaye ? Ah, non, c’est juste pour me faire un peu d’argent. En plus de mon boulot.

Alex – Et qu’est-ce que tu fais autrement ?

Ben – Je travaille pour une boucherie chevaline.

Pat – Une boucherie chevaline ? Quelle horreur… Non, je veux dire, excuse-moi, mais je ne savais même pas que ça existait encore.

Ben – Je m’occupe de leur site internet.

Alex – Tu es community manager pour une boucherie chevaline ?

Ben – Non, enfin… Plusieurs. C’est une chaîne, en fait.

Pat – Ah ouais, d’accord…

Silence embarrassé.

Alex – Et donc, ce type chez qui on est, tu ne le connais pas non plus ?

Ben – Non. J’ai trouvé ce réveillon par un événement Facebook.

Alex – Putain, il faut vraiment être désespéré pour faire de son réveillon un événement Facebook.

Pat – Et encore plus désespéré pour accepter l’invitation…

Ben – Ouais… D’ailleurs apparemment, j’étais la seule à avoir accepté.

Le téléphone sonne.

Alex – Qu’est-ce qu’on fait ? On répond ?

Pat – C’est un peu embarrassant… On n’est pas chez nous…

Le répondeur se déclenche.

Sissi (off) – Bonjour, vous êtes bien chez Sissi. Je ne peux pas vous répondre pour l’instant, j’ai décidé de me suicider. Pas la peine de laisser un message non plus, je ne pourrai pas vous rappeler.

Les trois présents échangent un regard perplexe.

Mère (off) – Oui, c’est maman. J’espère que tu vas bien. Moi je suis un peu déprimée en ce moment. Je comptais sur mon fils pour me remonter un peu le moral, mais comme d’habitude, on ne peut pas compter sur toi. Bon ben… rappelle-moi si tu n’es pas encore mort. C’était ta mère.

Pat – Il était un peu inquiétant, ce message, non ?

Alex – Tu crois ?

Ben – On ferait peut-être mieux d’aller faire un tour dans l’appart pour voir s’il n’y a pas un cadavre dans un placard.

Alex – Super… Allez-y toutes les deux, moi je reste à l’accueil… Au cas où d’autres invitées Facebook se pointeraient.

Pat et Ben sortent. Alex fait le tour de la pièce. Elle s’arrête devant la tente.

Alex – Une tente…

Elle va vers le buffet et se sert un verre de sangria. Elle se plante ensuite devant le panneau contre lequel sont accrochées les pipes.

 

Alex – Et une collection de pipes… Putain, c’est space ici…

Pat et Ben reviennent.

Ben – On n’a rien vu.

Pat – Il y a juste une petite cuisine et une salle de bain.

Pat voit que Alex a un verre à la main.

 

Pat – Après tout, tu as raison. On ne va pas se laisser abattre, on va boire un coup. C’est le réveillon, malgré tout.

Elle se sert un verre elle aussi. Pendant que Ben fait le tour de la pièce.

Ben – Qu’est-ce que c’est que tout ça ? On dirait un déménagement.

Alex – Si tu trouves le carton où ils ont rangé la vaisselle. Ce serait plus pratique pour le buffet…

Ben regarde ce qui est écrit sur divers cartons.

Ben – Va savoir… Il n’y a rien de marqué…

Pat s’approche de la tente.

Pat – C’est tout de même bizarre, cette tente, non ? Plantée là au milieu de la pièce…

Alex – Si tu veux mon avis, il n’y a pas que ça de bizarre.

Pat – À quoi ça peut bien servir de planter une tente dans son salon ?

Ben – Ouvre, tu verras bien…

Pat – Tu crois ? Je ne sais pas si… Oh puis après tout…

Pat soulève la toile de la tente, et pousse un cri.

Pat – Oh mon Dieu !

Alex – Quoi ?

Pat – Il y a quelqu’un là-dedans…

Ben – Comment ça quelqu’un ?

Alex et Ben approchent.

Alex – Ah ouais dis donc…

Ben – On dirait qu’il roupille.

Pat – C’est dingue. (À Alex) Il était déjà là quand tu es arrivée ?

Alex – Je ne sais pas… Je n’ai vu personne…

Ben – Mais c’est qui, ce mec ?

Alex – Celui qui nous a invitées, probablement… Enfin… Celui chez qui on nous a invitées…

Ben – Il est déjà bourré ?

Pat – Bourré ? Il n’est même pas encore minuit.

Ben – Vous croyez qu’il faut le réveiller ?

Pat – Il a l’air de dormir très profondément, c’est un peu gênant…

Alex – Ou alors c’est Frankenstein. Il ne sort de sa boîte qu’après minuit…

Pat – Donc personne ne le connaît ?

Ben – Non…

Alex – Il a un peu l’air d’un SDF…

Ben – Enfermé chez lui dans une tente Quechua.

Pat – Ce n’est pas encore ce soir qu’on va trouver un mec…

Ben – On n’a plus qu’à se bourrer la gueule nous aussi pour oublier qu’on finira l’année toutes seules, comme on l’a commencée…

Alex – Tu as raison. On est là pour faire la fête, non ?

Elles se servent, et boivent cul sec.

Ben – Elle a un drôle de goût, cette sangria, vous ne trouvez pas ?

Pat – Si… Elle a un goût de…

Alex – En tout cas, elle n’a pas un goût de sangria.

Elles se resservent un verre.

Pat – Je vais mettre un peu de musique, ça va peut-être le réveiller… (Pat s’approche de l’appareil pour mettre de la musique). Ah, on dirait qu’il nous a concocté une petite play list…

 

Elle déclenche la musique, très forte et très bizarre. Elles se mettent à danser sur cette musique absurde dans une chorégraphie comique. On entend à peine résonner la sonnette de la porte.

Pat – Baisse un peu la musique, j’ai l’impression d’avoir entendu quelque chose.

Alex baisse la musique. On entend la sonnette.

Alex – Vous voyez, il ne faut jamais désespérer. Voilà les autres invités Facebook qui arrivent !

Pat – Il faudrait peut-être aller ouvrir.

Ben – Ce n’est pas déjà ouvert ?

Entre Jo, prostituée (éventuellement travesti).

Jo – Non mais c’est quoi, ce bordel ?

Alex éteint la musique.

Alex – Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?

Jo – Qu’est-ce qu’il y a ? Il y a que j’aimerais bien pouvoir dormir, moi !

Pat – Dormir ? Mais enfin… Il n’est même pas encore minuit ! C’est le réveillon, tout de même…

Ben – Et puis vous êtes qui, d’abord ?

Jo – Je suis la voisine du dessous. Mais c’est plutôt moi qui devrais vous demander qui vous êtes. Hein ? Qui vous êtes, vous, d’abord ?

Alex – Nous ? Ben… On est…

Pat – Les invitées.

Jo – Les invitées ? Et Sissi, il est où ?

Ben – Sissi ?

Jo – Vous ne connaissez pas Sissi ?

Alex – Non. C’est qui Sissi ?

Jo – C’est qui Sissi ?

Pat – Ben oui, c’est qui, Sissi ?

Jo – Vous êtes chez Sissi, et vous ne connaissez pas Sissi ?

Alex – Si, si, enfin…

Ben – Ah d’accord, il s’appelle Sissi.

Jo – Non mais qu’est-ce que vous foutez là, alors ?

Pat – Moi, c’est Chris qui m’a invitée…

Alex – Et moi, c’est…

Jo – Et Sissi, il est où ?

Alex – Ben il est là, à côté… Il roupille

Jo – C’est le 31 décembre, il roupille à côté, et il vous a laissé son appartement pour réveillonner sans lui ?

Pat – Oui, c’est… C’est vrai que dit comme ça, ça peut paraître un peu bizarre, mais… Oui, c’est à peu près ça…

Jo – Ce n’est pas très clair tout ça… Je me demande si je ne ferais pas mieux d’appeler les flics… Parce que j’aimerais bien dormir, moi.

Ben – C’est la Saint Sylvestre, vous n’allez pas vous coucher avant minuit !

Alex – Vous êtes toute seule pour le réveillon ?

Jo – Ben… ouais.

Pat – Vous allez boire un verre avec nous. C’est vrai, quoi. Vous n’allez pas rester toute seule un soir pareil.

Jo hésite puis se détend un peu.

Jo – Bon, ok. Juste un petit coup vite fait, alors.

Alex – Qu’est-ce que je vous sers ?

Jo – Oh, ce qu’il y a.

Alex – Ok.

Ben lui sert un verre de sangria.

Pat – On va se tutoyer, non ? C’est comment, votre nom ?

Jo – Jo. (Elle boit) C’est quoi, cette horreur ?

Pat – De la sangria, je crois.

Jo – Ça n’a pas tellement le goût de sangria.

Alex – D’ailleurs, tout ça ne ressemble pas tellement à un réveillon.

Jo – C’est vrai que c’est plutôt calme, aujourd’hui… Je veux dire, les affaires…

Pat – Ah oui ? Qu’est-ce que tu fais ?

Jo – Disons que je suis autoentrepreneur dans le domaine des services à la personne.

Pat – Ah oui… Et comme ça… tu travailles à domicile ?

Jo – Ouais, on peut dire ça comme ça. J’ai des horaires de consultation, mais je fais aussi les visites à domicile pour les personnes qui ne peuvent pas se déplacer.

Pat – D’accord… Et donc… Le 31, c’est calme.

Jo – Ouais… Je ne sais pas pourquoi. C’est vrai que mes clients en règle générale, ils sont plutôt du genre dépressifs. Mais alors en fin d’année… Le pire, c’est le 24 au soir. À part quelques pervers qui arrivent habillés en Père Noël.

Alex – Vous le connaissez bien, le type qui habite là ?

Jo – Oh, comme ça… Alors lui, dans le genre dépressif…

Pat – Ah ce point-là ?

Jo – Le genre de mec qu’on s’attend à retrouver un jour pendu avec le rideau de sa douche.

Alex – Je vois…

Jo – Ça m’étonne même qu’il ait assez d’amis pour organiser une fête. Mais il est où, d’ailleurs ?

Ben – Par là… Il dort dans la tente.

Jo – Ah ouais, d’accord…

Alex – Ça n’a pas l’air de t’étonner ? D’habitude, quand on dort dans une tente, c’est dehors, non ?

Jo – Peut-être qu’il s’entraîne pour quand il sera à la rue.

Pat – Vous avez des raisons de penser qu’il sera bientôt sur le trottoir ? Enfin, je veux dire, à la rue ?

Jo – Vous n’avez pas vu l’avis d’expulsion sur la porte ?

Ben – Non…

Alex – Alors les cartons, c’était ça. Un déménagement.

Jo – Voilà… Sauf qu’après son déménagement, lui il emménagera dans ses cartons.

Un temps.

Ben – C’est un client à vous ?

Jo – Non. Au début, il n’avait jamais de quoi payer. Et puis après, quand on connaît les gens, ce n’est pas facile de les faire payer…

Alex – C’est clair…

Jo – Il a bien essayé de me draguer. Il est même plutôt du genre lourd. Mais bon, je ne suis pas encore désespérée au point de coucher gratuitement avec un mec pareil.

Ben – D’accord…

Silence. Pat regarde sa montre.

Pat – Ah, il est bientôt minuit…

Alex – Oui…

Ben – C’est curieux que le bruit de la musique ne l’ait pas réveillé tout à l’heure, non ?

Pat – Vous pensez vraiment qu’il faut le laisser dormir ? On ne va pas fêter la nouvelle année sans lui…

Alex – Tu as raison, essaie de le réveiller.

Pat (à Ben) – Tu ne veux pas essayer, toi ?

Ben – Ok…

Elle ouvre la tente et le secoue un peu.

Ben – C’est bizarre.

Alex – Quoi ?

Ben – Il a l’air mort.

Pat – Mort ?

Elles approchent pour regarder.

Alex – Ah oui, merde…

Pat – Ce n’est pas possible !

Jo – Il a l’air déjà raide comme un bout de bois.

Ben – Qu’est-ce qu’on fait ?

Pat – Il faudrait peut-être appeler la police.

Moment de flottement.

Alex – Ou alors on se barre ?

Ben – Il n’est pas encore minuit et il reste de la sangria. On ne va pas se barrer tout de suite.

Alex – C’est vrai que s’il est mort, ça peut attendre jusqu’à l’année prochaine…

Jo – Oui ben moi, je m’en vais. Je ne veux pas être mêlée à tout ça (Elle regarde son portable) D’ailleurs j’ai un client dans dix minutes.

Ben – Je croyais que c’était calme, ce soir ?

Jo – Apparemment, les affaires reprennent. En tout cas, je vous préviens, moi je ne vous ai jamais vues et je ne suis au courant de rien.

Jo se barre.

Pat – Alors qu’est-ce qu’on fait ?

On entend le crépitement d’un feu d’artifice pouvant passer pour des coups de feu.

Ben – Qu’est-ce que c’est que ça ?

Alex – Le GIGN qui débarque, déjà ?

Ben – Un feu d’artifice !

Pat – Ah ouais, dis donc ! Allons sur le balcon, on verra mieux !

Elles sortent toutes les trois sur le balcon pour voir le spectacle. Sissi sort de la tente tel un zombie… Ambiance film d’horreur. Il ne voit personne. Comme un somnambule, il sort un instant (pour aller vomir et fermer la porte). Il revient et décroche le téléphone.

Sissi – Oui maman, c’est ton fils, Sissi. Là je me suis raté, mais la prochaine, ce sera la bonne, tu verras.

Il sort. Alex, Pat et Ben reviennent.

Pat – Eh ben… C’était un beau feu d’artifice.

Ben – Ouais, super.

Pat (regardant sa montre) – Dans deux minutes, minuit !

Alex – Tiens en attendant je vais regarder si je n’ai pas gagné au loto.

Il regarde son smartphone.

Alex – Alors, la Française des Jeux… Le Super Tirage de la Saint Sylvestre… Malheureusement non… Pas encore de miracle pour cette année…

Ben – Combien tu aurais pu gagner ?

Alex – Vingt millions d’euros.

Ben – Ah ouais, quand même.

Pat – Cette fois, ça y est ! Cinq, quatre, trois, deux, un… Bonne année !

Alex et Pat s’embrassent.

 

Alex – Bonne année !

Pat – Et surtout bonne santé…

Ben s’approche pour embrasser Alex, qui a un mouvement de recul.

Alex – Excuse-moi, mais avec les trucs que tu as sur la figure…

Ben – Non mais je comprends…

L’ambiance redescend.

Pat – On avait presque oublié le macchabée…

Alex – Bon allez, assez rigolé. Maintenant, on se casse, et vite fait.

Pat – Tu as raison. On n’a rien à faire ici. Après tout, on ne le connaît pas ce type.

Elles sortent.

Alex – Qu’est-ce qu’il y a ?

Pat (off) – La porte est fermée !

Alex – Fais voir… Ah, oui, merde…

Ben (off) – Il n’y a pas les clefs dessus ?

Alex (off) – Non, et c’est une porte blindée.

Pat – C’est dingue, cette histoire.

Ben – Alors qu’est-ce fait ?

Pat – Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ? C’est fermé, c’est fermé…

Elles reviennent.

Alex – Oh putain, je ne le sentais pas ce réveillon.

Pat – Et moi qui suis du genre claustrophobe. On ne peut pas sortir ! On est enfermés dans cet appart avec un zombie !

Ben – J’ai un mauvais pressentiment, ça me rappelle un film…

Alex – Quel film ?

Ben – Un film d’horreur… Mortelle Saint Valentin.

Pat – C’est quoi, l’histoire ?

Ben – Quatre filles qui ont humilié un mec il y a des années au collège. Le type revient pour les tuer.

Pat – Mais on est que trois.

Ben – Avec Jo la pute, ça fait quatre.

Alex – Ouais bon, ce n’est pas le problème. Mais pourquoi ce type voudrait nous tuer ?

Pat – On ne lui a rien fait. On ne le connaît même pas.

Ben – Allez savoir. Il a peut-être mis un truc dans la sangria pour nous empoisonner.

Alex – C’est ça… Il nous a drogué, et après il va nous découper à la hache…

Pat – C’est vrai qu’elle a un drôle de goût, cette sangria.

Alex – Ou alors c’est un pervers qui veut nous violer.

Ben – Tu crois ?

Pat – Cette fois, on n’a pas le choix. Il faut appeler la police… (Pat sort son portable et compose un numéro) On dira que ce type nous a séquestrées.

Pat – Mais puisqu’il est mort ?

Ben – C’est peut-être un mort-vivant.

Alex – Un type qui vit dans une tente chez lui…

Pat – Ça sonne.

Ben – Il vaudrait mieux vérifier…

Pat – Vérifier quoi ?

Ben – S’il est vraiment mort.

Alex – Mais tu es folle, qu’est-ce que tu fais ?

Ben soulève la toile de tente.

Ben – Il n’est plus là !

Alex – Quoi ?

Ben – Le mort ! Il n’est plus dans la tente !

Pat raccroche.

Pat – Mais alors il est où ?

Alex – Oh putain…

Consternation générale.

Pat – Ça se termine comment, ce film d’horreur ?

Ben – Mal. Très mal…

Alex – Les films d’horreur ça se terminent rarement bien.

Pat – On n’a pas le choix, il faut regarder s’il n’est pas autre part dans l’appartement.

Ben – Et il vaudrait mieux qu’on ait de quoi se défendre…

Elles prennent chacune la bouteille qu’elles ont apportée en la tenant par le goulot, et sortent pour fouiller l’appartement. Elles reviennent un instant après.

Pat – Rien.

Ben – Je ne sais pas si ça doit nous rassurer.

Pat – Tu crois que ce zombie pourrait avoir des pouvoirs surnaturels ?

Ben – À ton avis ? Comment un cadavre peut quitter un appartement à travers une porte blindée fermée à clef…

Alex – Je ne sais pas… En ayant la clef, par exemple… Mais tu as raison, il faut rester sur nos gardes.

Pat – Je crois que j’ai besoin d’un petit remontant.

Ben – On va quand même éviter la sangria.

Alex – C’est le moment où jamais de faire péter le champagne. C’est peut-être la dernière fois qu’on en boit.

Alex débouche la bouteille, et remplit les verres. Elles trinquent.

 

Ben – Allez, bonne année !

Alex – C’est ça… Bonne année toi-même…

Ben se plante devant le panneau contre lequel sont accrochées les pipes.

 

Ben – Qu’est-ce que c’est que ça ?

Alex – Une collection de pipes, apparemment.

Pat – Il faut vraiment être perturbé pour collectionner les pipes…

Pendant qu’elles sont toutes les trois plantées devant le panneaux, Sissi revient derrière, le visage un peu en sang. Elles se retournent.

 

Sissi – Salut les filles ! Ça vous dirait, une petite pipe ?

Moment de panique. Pat saisit une bouteille et, avec une violence qu’on ne soupçonnait pas, assène un grand coup sur la tête de Sissi. Il s’effondre.

Pat – Cette fois, je crois qu’il est mort…

Alex – Tu l’as tué ?

Pat – Mais, il était déjà mort, non ? C’est un zombie ! On ne peut pas tuer un zombie !

Ben – Ça va être difficile de faire avaler ça à la police.

Elles se précipitent au chevet de Sissi et font tout pour le réveiller. Sissi revient à lui. Son regard tombe d’abord sur Ben, la gothique.

 

Sissi – Alors ça y est, je suis en enfer ?

Alex – Non, non, rassure-toi. Tu es toujours chez toi.

 

Il est surpris de voir tout ce monde chez lui.

Sissi – Qu’est-ce qui m’est arrivé ?

Alex – Je ne sais pas… Apparemment, tu as eu un petit malaise…

Sissi – Qu’est-ce que vous faites là ? Je ne vous connais pas…

Pat – Je suis une amie de Chris… C’est elle qui m’a invitée. J’espère que ça ne te dérange pas…

Sissi – Chris ?

Alex – Moi je suis une amie de… Mais tu ne la connais sûrement pas non plus…

Ben – Eh moi, je suis… l’invitée Facebook !

Sissi – Ah Ben ! Tu es venue, finalement.

Alex – Ça va ?

Sissi – J’avais organisé une fête mais tout le monde a décommandé.

Alex – Ah merde…

Pat – Mais on est là, nous !

Sissi – Heureusement, parce que j’avais prévu une participation aux frais.

Alex – Ah merde…

Sissi – Si personne n’était venu, j’étais mal…

Pat – Eh oui…

Alex – Et c’est combien la…

Sissi – Je n’ai pas encore calculé… J’ai claqué les trois cents euros qui me restaient sur mon Livret de Développement Durable. On divisera par le nombre de gens qui sont là…

Ben – Trois cent euros ? Divisés par…

Sissi – Trois.

Alex – Ah oui, quand même…

Sissi – C’est en partie pour ça que j’ai pris des cachets. Quand j’ai vu que personne ne venait.

Pat – Quel genre de cachets ?

Sissi – Ce que j’ai trouvé dans ma pharmacie. Il n’avait que de l’aspirine et des antidouleurs…

Alex – Alors forcément, ça n’a pas marché…

Sissi – Non, c’est pour ça que je me suis jeté par la fenêtre.

Ben – Mais comme on n’est qu’au premier étage, ça n’a pas marché non plus.

Sissi – Je suis tombé sur une haie. Et j’ai rebondi sur un vieux matelas.

Ben – Ah oui, ce n’est pas de bol…

Sissi – J’ai quand même atterri sur le bitume. C’est comme ça que je me suis un peu éraflé le visage. L’avantage avec les antidouleurs c’est que je n’ai même pas mal.

Ben – Ah oui, ça c’est une veine.

Sissi – Et toi… C’est quoi ce truc que tu as sur la figure ?

Ben – Je fais des essais pour un labo pharmaceutique.

Sissi – On peut être payé pour prendre des médocs ?

Ben – Je te donnerai l’adresse, si tu veux. S’ils veulent tester des médocs pour se suicider.

Sissi se met à pleurer.

Pat – Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?

Ben – Ne t’inquiète pas, on est là, maintenant.

Sissi – Justement… Vous, vous êtes venues… Ça me touche beaucoup que vous soyez là.

Alex – Et oui…

Sissi – C’est vrai, vous auriez pu réveillonner n’importe où. Et vous avez choisi de réveillonner avec moi.

Pat – Et oui…

Sissi – Ça vous dirait, une petite pipe ?

Pat – Pardon ?

Sissi – J’en ai toute une collection, là. J’ai acheté ça sur le Bon Coin. Ça vous dit ?

Alex – Sur le Bon Coin ? Donc c’est des pipes d’occase, quoi…

Pat – De deuxième main, comme on dit.

Alex – Des pipes de deuxième bouche, c’est vrai que c’est tentant, mais…

Ben – Et si on buvait un coup plutôt ?

Pat – Après tout on est là pour faire la fête, non ?

Alex – C’est le réveillon !

Ils lui servent du champagne et ils boivent tous.

 

Ben – On remet un peu de musique ?

Sissi – Ok…

Ben remet la musique et danse avec Sissi. Alex et Pat s’éloignent un peu des deux autres.

Alex – C’est vrai que c’est une musique qui donne plutôt des envies de suicide.

Pat – Je commence à me demander si on a bien fait d’accepter cette invitation…

Alex – Si on peut appeler ça une invitation…

Ben – J’ai l’impression qu’il va nous claquer dans les pattes avant la fin de la soirée.

Sissi s’effondre par terre. Ben arrête la musique. Pat et Alex relèvent Sissi et le font asseoir.

Pat – Ça va aller ?

Sissi – Ça doit être les cachets… mélangés avec le punch.

Pat – Ah c’était du punch ? On se disait aussi que pour de la sangria, ça avait un drôle de goût.

Sissi – En fait, j’ai mélangé tous les restes de bouteilles que j’avais dans mon placard. Je ne sais pas trop comment on peut appeler ça…

Alex – Un pot pourri, peut-être.

Sissi – Je n’ai pas trop le moral, en ce moment. Je viens d’être licencié. Je n’ai plus une thune et j’ai reçu mon avis d’expulsion.

Alex – Ah merde…

Pat – Mais tu vas sûrement retrouver un logement.

Alex – En même temps, sans boulot…

Ben – Tu faisais quoi, comme travail ?

Sissi – Je faisais les vendanges.

Alex – Ah oui, c’est quand même assez saisonnier, comme boulot.

Pat – Et tu ne peux pas retourner chez ta mère ?

Sissi – Ma mère ? Elle en est à sa quatrième tentative de suicide, elle aussi.

Alex – Si c’est une tradition familiale, alors…

Ben – Au moins, si tu te retrouves à la rue, tu as déjà une tente.

Sissi – Même ma copine n’est pas venue, ce soir.

Ben – Ah, tu as une copine ?

Sissi – Enfin, ce n’est pas encore vraiment ma copine. C’est la voisine du dessous.

Pat – Jo ?

Sissi – Vous la connaissez ? Justement, je l’avais invitée ce soir pour… Mais elle non plus, elle n’est pas venue… (Il se met à pleurer) Excusez-moi, je n’ai plus de mouchoir

Il sort.

Pat – Le pauvre…

Alxe – Ben oui, mais qu’est-ce qu’on peut y faire, nous ?

Ben – Elle habite juste en dessous. On pourrait peut-être l’aider ?

Alex – Comment ça, l’aider ? Tu voudrais qu’on se cotise pour lui payer une pipe à ajouter à sa collection, c’est ça ?

Pat – Il a l’air tellement abruti. Je ne suis pas sûre qu’il ait vraiment compris dans quel domaine elle exerçait son activité d’autoentrepreneur…

Alex – Les sévices à la personne…

Ben – Alors qu’est-ce qu’on fait ?

Alex – Ok, j’y vais… Je vais voir ce que je peux faire…

Alex sort.

Pat – Je ne le sens pas…

Ben – Quoi ?

Pat – Tout ça ! Cette soirée de merde. C’est le pire réveillon de ma vie, pas toi ?

Ben – Attends que je réfléchisse… Non, je ne crois pas…

Pat – Non ? Tu as déjà passé un réveillon pire que celui-là ? Alors là, je suis curieuse d’entendre ça…

Ben – Je devais avoir une dizaine d’années. Mes parents et moi on était invités chez mon oncle, qui est thanatopracteur du côté du Creil. C’est dans l’Oise. Tu connais, Creil ?

Pat – Non…

Ben – En fait, je ne suis pas sûre que c’était vraiment mon oncle, mais bon… Donc, on arrive là-bas, et mon oncle me dit : tu veux voir l’endroit où je travaille ? Moi j’étais un peu méfiante, parce que mes parents m’avaient dit qu’il sortait de prison pour une sombre affaire impliquant des mineures. Mais moi, à l’époque, les mineurs… Je pensais que c’était ces pauvres types qui travaillent dans les mines pour extraire le charbon. Bref, j’accepte de le suivre à la morgue et là…

Pat – Excuse-moi, mais finalement, je crois que je n’ai pas du tout envie d’entendre cette histoire…

Jo, la voisine revient avec Alex.

Jo – Oh non… Il me fait le coup du suicide au moins une fois par semaine. Ce type est un détraqué. Pas question que je cède à son chantage.

Alex – Mais il est où, Sissi ?

Pat – Oh, non, merde.

 

Elle sort précipitamment. Elle revient aussi vite.

Pat – Il a essayé de se noyer dans la baignoire…

Alex – Il a vraiment décidé de nous pourrir la soirée.

Pat – Qu’est-ce qu’on fait ? On appelle SAMU ?

Jo – Est-ce qu’au moins il est vraiment mort, cette fois ?

Elles vont voir dans la salle de bain et le ramènent.

Pat – Il a l’air un peu mort, non ?

Alex – Pas tout à fait, on dirait…

Ben – Il faudrait lui faire du bouche à bouche…

Alex – Je ne sais pas faire ça, moi… Qui est-ce qui s’y colle ?

Les regards se tournent vers Jo.

Jo – Qu’est-ce que vous croyez ? Que dans mon métier, pour être agréée, il faut avoir son brevet de secourisme.

Ben – Je veux bien essayer

Alex – Ok.

Ben lui fait du bouche à bouche.

Jo – Je me demande s’il n’a pas fait tout ça pour ça…

Sissi reprend connaissance et aperçoit le visage purulent de Ben penché sur lui.

Sissi – Cette fois, ça y est, je suis en enfer… J’ai vu une succube en train de me sucer le sang !

Jo – Bon, je n’ai pas que ça à faire moi ? Alors, les jeunes ? Vous avez de quoi payer, oui ou non ?

Alex – Tu prends les chèques ?

Jo – C’est ça. Et pourquoi pas les tickets restaurant, aussi ? Bon moi je me casse. J’ai laissé du travail en plan, figurez-vous…

Jo sort. Sissi reprend ses esprits.

Pat – Il s’est encore raté.

Alex – À ce niveau là, ça ferait presque pitié.

Pat – Oui…

Ben – On devrait peut-être l’aider.

Pat – Tu veux dire l’aider à se suicider ? Ça s’appelle un meurtre, non ?

Ben – Mais non, l’aider à… se trouver quelqu’un.

Pat – En même temps, si on est là ce soir, c’est qu’on est aussi désespérées que lui…

Alex – On pourrait lui laisser croire juste pour ce soir qu’il a une ouverture…

Pat – Avec qui ?

Alex – Tu as raison, ça ne marchera jamais.

Le téléphone sonne. Sissi ne répond pas. Pat se décide à décrocher.

Pat – Oui ? Bonjour Madame. Non, je ne suis pas sa fiancée. Non, je ne suis pas prostituée non plus. Oui, je vous le passe tout de suite. (À Sissi) C’est ta mère…

Sissi prend le combiné.

Sissi – Oui… Non, je ne suis pas mort… Oui, je sais, j’aurais vraiment tout raté dans la vie, même mon suicide… Oui, ne t’inquiète pas, j’ai bien reçu ton cadeau, merci. Moi aussi je te souhaite une bonne année. Au revoir maman…

Il raccroche.

Alex – Tout va bien ?

Sissi – Je suis né le 31 décembre. Et m’a mère n’a rien trouvé de mieux que de m’appeler Sylvestre.

Pat – D’où ce diminutif ridicule.

Alex – Sissi…

Sissi – Donc le 31 décembre, c’est aussi mon anniversaire et ma fête. Et comme ça n’est qu’une semaine après Noël.

Ben – Ah ouais, ce n’est pas de bol…

Sissi – Chaque année depuis que je suis né, entre Noël et le Jour de l’An, ma mère m’offre une grille de loto, avec ma date de naissance pour numéro… Ça me fait office de Noël et de cadeau d’anniversaire.

Ben – La vie est une loterie.

Il montre un billet de loto et le pose sur un carton.

Alex – Moi aussi, j’avais joué. Le Super Tirage de la Saint Sylvestre. Mais malheureusement…

Pat – Dans ce cas, tu as peut-être une chance, Sissi… Malheureux en amour, heureux au jeu…

Alex – Tu as regardé si tu avais gagné ?

Sissi – Même pas… Au début, tous les ans, j’attendais les résultats du tirage avec impatience… Comme un gosse qui regarde au pied du sapin pour voir si le Père Noël est passé… Et puis maintenant, je ne regarde même plus… J’ai compris que le Père Noël ne passerait pas… Et pour ce qui est de l’amour…

Ben – Quoi ?

Sissi – Ben… J’ai compris que pour ce qui est du tirage, la Mère Noël ne passerait pas non plus.

Pat – Non ? Tu veux dire que…

Sissi – Oui, je sais, c’est à peine croyable, mais je n’ai encore jamais connu l’amour… D’après les statistiques, à mon âge, il paraît que c’est très rare…

Ben – Je ne savais même pas qu’il existait des statistiques là-dessus.

Alex – Les Jeux de l’Amour et de la Malchance…

Sissi – Vous comprendrez que tous les ans, à cette période de l’année, je sois un peu déprimé… Excusez-moi une minute…

Pat – Tu ne vas pas te pendre avec le rideau de douche, au moins ?

Sissi – Rassurez-vous, cette fois, je vais juste vomir aux toilettes.

Sissi sort.

Ben – Il faudrait quand même faire quelque chose pour lui.

Pat – Quoi ?

Alex – Tu veux te dévouer ?

Pat – Moi non, mais… Ben ?

Ben – C’est vrai qu’il me ferait presque pitié, mais bon… Je ne sais pas si je suis vraiment son genre…

Pat la regarde avec un air sceptique. Alex examine le billet de loto laissé par Sissi. Sissi revient. Alex repose le billet.

Alex – C’est par là, les toilettes ?

Sissi – Au fond du couloir.

Alex – Je crois que je vais aller vomir aussi.

Alex sort.

 

Sissi – Servez-vous à boire, hein ?

Ben – Ok…

Sissi – En tout cas, c’est sympa d’être venues.

Ben – Tu sais, on n’avait pas beaucoup le choix… C’était ça ou passer le réveillon toutes seules.

Sissi – C’est gentil quand même. Je suis sûr que parmi tous les gens que j’ai invités, il y en a plusieurs qui ont préféré passer le réveillon tout seuls.

Pat – Oui… Et bizarrement, je commence à comprendre pourquoi.

Alex revient.

Alex – J’ai regardé les résultats du loto tout à l’heure. Je m’étais mis une alerte. Moi j’ai perdu mais on ne sait jamais, tu devrais regarder si ce n’est pas ta date de naissance qui est sortie.

Sissi – Je ne sais pas… Je n’y crois plus… Je ne crois plus en rien…

Alex – Attends, je vais regarder pour toi. Tiens, c’est là…

Alex lui montre un écran de smartphone. Sissi regarde d’abord, incrédule.

Sissi – Ce n’est pas mes numéros.

Alex – Ah ouais, merde… Non mais fais voir… Attends, regarde ! Tu as quand même quatre numéros !

Sissi – Et alors ?

Alex – Ça fait déjà pas mal d’argent.

Sissi – Combien ?

Alex – Attends une minute… Quatre numéros… Cinquante mille euros !

Sissi est d’abord abasourdi.

Sissi – Ce n’est pas possible. Tu es sûre ?

Alex – Absolument. Regarde, c’est marqué là !

Pat – C’est dingue…

Sissi commence à y croire.

Sissi – Alors j’ai gagné ?

Alex – Ben ouais.

Sissi – Depuis ma naissance, je n’ai jamais gagné un euro au Super Tirage de la Saint Sylvestre. J’avais l’impression que Dieu m’avait oublié, et là… C’est grâce à vous ! C’est un miracle ! Et vous êtes mes Rois Mages !

Alex – Il ne faut pas exagérer, non plus…

Sissi – On va partager.

Alex – Tu dis ça parce que tu as pris des médicaments, mais demain tu le regretterais, crois-moi.

Sissi – On devait partager les frais pour le réveillon, alors c’est normal ! Entre amis on partage tout ! Le meilleur comme le pire…

Ben – C’est vrai que vu comme ça…

Alex – Non, il faut que tu gardes cet argent pour toi, Sissi. Tu en as plus besoin que nous.

Pat – Bravo Alex, tu vois, je t’avais mal jugé. Moi aussi, je pense que c’est un signe du ciel. Cet argent, pour lui, ce sera un nouveau départ dans la vie…

Sissi – Bon… En tout cas, je ne vous demande pas de participation pour ce réveillon.

Alex – Ça c’est bien, Sissi… C’est très généreux de ta part. Merci.

Sissi – Je vais annoncer ça à Jo. Vous m’attendez ?

Il sort.

Pat – C’est incroyable. Ce type qui était au bout du rouleau. Et tout d’un coup…

Alex – Tu as raison, c’est un miracle.

Pat – Dieu existe… Je crois que je viens de retrouver la foi…

Alex – C’est vrai que c’est assez incroyable. Comme quoi, il ne faut jamais désespérer.

Ben – Moi aussi, j’aurais bien besoin d’un petit coup de pouce…

Pat – Tu n’as qu’à tenter ta chance, toi aussi !

Alex – Tu verras bien si le Diable accepte de te venir en aide…

Sissi revient avec Jo, habillée en Mère Noël.

Jo – Alors c’est vrai, il a gagné ?

Alex – Cinquante mille euros.

Ben – Et eux qui te prenaient pour un looser… Moi j’ai vu tout de suite que tu avais une tête de gagnant.

Sissi – C’est vrai ?

Jo – Eh doucement, la sorcière, je le connaissais avant toi.

Ben – Tout à l’heure tu disais que c’était un gros lourd dépressif… Moi je saurai le rendre heureux, hein Sissi ?

Alex – Désolé, Ben, mais lui, ce qui le fait fantasmer, c’est la Mère Noël. Pas vrai, Sissi ?

Jo – Ouais enfin… La Mère Noël, elle ne fait pas crédit, non plus. Vous avez de quoi payer ?

Alex – Là tous les tabacs sont fermés. Mais il aura l’argent demain matin, c’est sûr !

Sissi – Et puis maintenant que je suis milliardaire, les femmes vont tomber comme des mouches.

Pat – Ne t’emballe pas trop vite, Sissi, c’est que cinquante mille euros. Si j’étais toi, je prendrais les bonnes choses comme elles viennent.

Alex – Elle a raison, comme dit aussi le poète : Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie. C’est vrai que là, le choix n’est pas évident mais bon…

Pat – Comme disait ma grand-mère, faute de grive, on mange du merle.

Alex – Je suis sûre que Ben a tout pour faire le bonheur d’un homme. Et en plus, elle ne demande pas à être payée d’avance…

Sissi – Elle n’est pas contagieuse, au moins ?

Alex – Ben ?

Mais Ben tombe comme une masse.

Alex – Ça doit être les médocs qu’elle a pris…

Pat – Plus la sangria. Moi aussi, j’ai un peu la tête qui me tourne…

Alex – Allez, Jo… C’est la Saint Sylvestre. Un beau geste !

Jo – Bon, d’accord… Mais je veux mon pognon demain, ok ?

Alex – C’est promis. Demain dès l’aube, à l’heure où blanchit la Française des Jeux.

Jo – Allez chéri, viens avec maman…

Jo entraîne Sissi.

Pat (attendrie) – Les couples se forment, on dirait.

Alex – Oui… Cette fois, il ne reste plus que nous deux…

Pat semble interloquée.

Noir.

Lendemain de fête. Ben est toujours affalée dans un coin contre un carton. Alex et Pat sortent de la tente Quechua.

 

Alex – Ça va ?

Pat – J’ai toujours la tête qui me tourne… Je ne sais pas ce qu’il avait mis dans cette sangria…

Alex – Je préfère ne pas le savoir.

Pat – Je ne me souviens de rien… Mais qu’est-ce qu’on fout dans cette tente ?

Alex – Tu ne te souviens vraiment pas ?

Pat lui lance un regard inquiet. Sissi arrive. Aux anges.

Alex – Alors Sissi, heureux ?

Sissi – Heureux ? Tu parles ! Je suis riche ! Tous mes problèmes d’argent sont résolus ! Je vais pouvoir payer mon loyer et déballer mes cartons.

Alex – Si j’étais toi, j’attendrais un peu avant de déballer les cartons.

Sissi – Pourquoi ça ?

Pat – Maintenant que tu es riche, tu pourrais avoir envie d’emménager dans un appartement plus grand.

Sissi – Oui, c’est sûr.

Alex – Non, quand je disais heureux… je pensais plutôt à la nuit que tu viens de passer… avec la Mère Noël.

Pat – C’était la première fois, non ?

Sissi – À vrai dire, avec tous les antidouleurs que je me suis enfilé hier soir, je n’ai rien senti…

Alex – Ah merde, c’est dommage…

Sissi – En fait, dans l’état où j’étais, je ne suis même pas sûr que la Mère Noël, ce n’était pas en réalité le Père Noël…

Pat – Ah d’accord…

Sissi – Bon, le principal, c’est que j’ai gagné au loto. Je fonce tout de suite au bureau de tabac pour encaisser le gros lot.

Alex – Je ne sais pas s’ils auront dix mille euros en liquide, mais ils te diront où t’adresser…

Sissi – Dix mille ? Hier tu m’as dit cinquante ?

Alex – Ah oui, excuse-moi, cinquante, peut-être…

Ben reprend ses esprits.

 

Ben – Salut…

Sissi – Ah Ben ! Merci encore d’être venue à mon réveillon. J’espère que tu as passé une bonne soirée.

Ben – Oui, mais je ne sais pas très bien où je vais aller. Mes parents m’ont foutue à la porte.

Sissi – Tu n’as qu’à prendre ma tente Quechua, maintenant, je n’en ai plus besoin.

Ben – C’est gentil, merci.

Sissi – Bon, j’y vais…

Ben – Je peux t’accompagner, si tu veux ?

Sissi – D’accord…

Ben (aux autres) – On reste en contact sur Facebook ?

Alex – Ok, j’espère que tu auras du wifi dans ta tente Quechua.

Pat – Bonne année…

Sissi – Vous claquez la porte en partant ?

Sissi et Ben sortent.

Alex – Il vaudrait mieux qu’on file avant qu’il revienne.

Pat – Pourquoi ça ?

Alex – Mais parce qu’il n’a rien gagné du tout !

Pat – Quoi ?

Alex – Le loto, les résultats que je lui ai donnés, c’est bidon. Il n’a rien gagné du tout.

Pat – Tu plaisantes ?

Alex – Ne me dis que tu as cru à une histoire pareille ?

Pat – Mais c’est horrible ! Quand il va se rendre compte que ce n’est pas vrai…

Alex – Il aura une bonne raison pour se suicider. Mais au moins, grâce à moi, il ne mourra pas puceau !

Pat – On n’est même pas sûres qu’il ait passé la nuit avec une vraie femme…

Alex – Le principal, c’est qu’il ait passé une bonne soirée. Et nous aussi… Et puis ce n’est pas comme si on lui avait dit qu’il était millionnaire. Ce n’est que cinquante mille euros, après tout.

Pat – Dis-moi que ce n’est pas vrai…

Alex – Je voulais lui faire gagner le gros lot mais je me suis un peu planté dans les chiffres.

Pat – C’est affreux !

Alex – On a réveillonné gratos ! Et en plus il nous fait cadeau de la participation aux frais de sa soirée de merde. Barrons-nous avant qu’il change d’avis.

Pat – C’est dingue… Mais où tu es allée chercher une histoire pareille ?

Alex – Les Jeux de Hasard et de l’Amour, tu te souviens ? C’est à peu près le scénario de ma pièce.

Pat – Bon… Enfin, tu as raison… Au moins il aura connu l’amour…

Alex – Techniquement, je ne sais pas si on peut dire qu’on n’est plus puceau après avoir passé la nuit avec un travelo, mais bon.

Pat – En tous cas, tu as raison, il vaut mieux qu’on soit parties avant qu’il ne revienne…

Alex – On n’a rien oublié ?

Pat – Je ne crois pas…

Alex – Tiens, je vais récupérer ma bouteille de mousseux, elle doit être décongelée, maintenant. Ça pourra toujours me servir pour l’année prochaine…

Pat – Je crois que c’est le pire réveillon que j’aie jamais passé. Et toi ?

Alex – Attends que je réfléchisse… Non. Mon pire réveillon, c’était il y a trois…

Pat – Je ne suis pas sûre de vouloir entendre ça…

Elles partent ensemble.

 

Noir.

 

Fin.

 

 

Scénariste pour la télévision et auteur de théâtre,

Jean-Pierre Martinez a écrit une cinquantaine de comédies

régulièrement montées en France et à l’étranger.

Toutes les pièces de Jean-Pierre Martinez

sont librement téléchargeables sur :

http://comediatheque.net

 

Ce texte est protégé par les lois relatives

au droit de propriété intellectuelle.

Toute contrefaçon est passible d’une condamnation

allant jusqu’à 300 000 euros et 3 ans de prison

Paris – Janvier 2016

© La Comédi@thèque – ISBN 979-10-90908-65-9

Ouvrage téléchargeable gratuitement

Mortelle Saint-Sylvestre Lire la suite »

Libre Théâtre

Libre Théâtre

Bibliothèque des oeuvres théâtrales

du domaine public français

 125 auteurs et 664 oeuvres 

en téléchargement gratuit

Une notice pour chaque auteur et chaque œuvre

Un moteur de recherche par distribution

Des indications de mises en scène

Des vidéos de spectacles

Cliquez sur le logo pour accéder au site

Libre Théâtre

***

Libre Théâtre est un portail internet, créé par Ruth et Jean-Pierre Martinez, pour promouvoir la diffusion du répertoire de théâtre français libre de droit, en proposant en libre accès les textes des œuvres ainsi qu’un ensemble de ressources documentaires autour de ces œuvres.

Ruth Martinez est spécialiste des questions de l’open data, du libre accès et de l’édition numérique. Elle a été pendant 16 ans déléguée générale du GFII, association professionnelle dans le secteur de l’information numérique. Elle est titulaire d’une maîtrise d’histoire à l’Université Paris IV-Sorbonne et du DESS Information et Documentation de Sciences Po Paris.

Jean-Pierre Martinez est auteur de théâtre. Après une carrière de sémiologue publicitaire, il a travaillé comme scénariste pour la télévision (notamment pour la sérieAvocats et Associés diffusée sur France 2). Pour la scène, il a écrit une soixantaine de comédies proposées en téléchargement gratuit sur son site La Comédiathèque.

La Comédiathèque

Libre Théâtre Lire la suite »

Drama scripts free download

Jean-Pierre Martinez is a French playwright and scriptwriter. He was born in 1955 in Auvers-sur-Oise, France. He wrote 62 comedies, three of them (Friday the 13th, Strip Poker and Him and Her), translated in English. Jean-Pierre Martinez experienced first the stage as a drummer in various rock bands, before to become a semiologist in the field of advertising. He worked afterwards as television scriptwriter, and came back to the stage as a playwright. Today he is among the most played contemporaries playwrights in France, and several of his plays have already been translated in spanish and english. He graduated in spanish and english litterature (Sorbonne), in linguistics (Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales), in economics (Institut d’Études Politique de Paris) and scriptwriting (Conservatoire Européen d’Ecriture Audiovisuelle). Jean-Pierre Martinez made the choice to offer all the texts of his plays to free download on his website : comediatheque.net

The texts of these plays, sketches and playlets are to free download. However, an authorization is required from the author for any public representation. To get in touch with Jean-Pierre Martinez and ask an authorization to represent one of his works :

 CONTACT FORM

 

Strip Poker

4 characters : 2 males and 2 females

Asking the new neighbours over for dinner to get to know them: a risky move that could end up costing more than it’s worth and a perfect opportunity for a poker comedy where every player must eventually show their hand.

FREE DOWNLOAD THE SCRIPT OR BUY THE BOOK

 

Friday the 13th

3 characters : 1 male and 2 females

John and Christine have invited two of their friends for dinner in their London home. Natalie arrives without her husband, distraught, having just heard that the plane bringing him home crashed at sea. With the potential widow they wait with baited breath for news confirming whether her husband is among the survivors … and learn that they are the winners of that evening’s super jackpot lottery draw. From then on, the operative words are “controlling emotions”. And that is just the beginning of this eventful evening, with twists, turns and revelations galore.

FREE DOWNLOAD THE SCRIPT OR BUY THE BOOK

 

Him and Her

Interactive Monologue

One or several couples

About the exciting adventure of living together…

FREE DOWNLOAD THE SCRIPT OR BUY THE BOOK

 

Critical but Stable

6 characters (male or female)

Raymond is in a deep coma following an accident on a Boris Bike. His long lost relatives are called to his bedside to decide what to do and avoid prolonged therapeutic interventions. But this collective decision becomes even more difficult when the patient turns out not to be who everyone thought he was. And is the keeper of a secret that could make everyone very rich…

FREE DOWNLOAD THE SCRIPT OR BUY THE BOOK

 

Casket for two

4 characters : 2 males and 2 females

When two candidates in a local by-election cremate their spouses on election day, conditions are rife for spoiled ballots and stray bullets. Especially when the funeral director’s newly hired temp has a mind of her own…

DOWNLOAD THE PDF FOR FREE OR BUY THE BOOK

 

Running on empty

2 characters (males or females)

An old has been playwright receives for an interview a young journalist who might help him to return to the spotlight. But on the stage, things are not always what they look like.

DOWNLOAD THE PDF FOR FREE OR BUY THE BOOK

 

The worst village in England

10 characters (males or females)

The last survivors of a dying village, forsaken by God and bypassed by the motorway, decide to take matters into their own hands and create an event that will drive traffic to their village. But it’s not easy to turn the worst village in England into the next must-see tourist attraction…

DOWNLOAD THE PDF FOR FREE OR BUY THE BOOK

 

 


 

 

ebooks book

Drama scripts free download Lire la suite »

Vous m’en direz des nouvelles

Recueil de nouvelles de Jean-Pierre Martinez

1 ou plusieurs homme(s) ou femme(s)

Nouvelles à lire, à dire ou à jouer

La nouvelle n’est pas seulement un roman court, c’est un genre littéraire en soi, obéissant à des règles propres. Tout l’intérêt de la nouvelle repose, en effet, sur l’art de la chute. Une chute qui se doit d’être imprévisible, et donc surprenante. Si dans la nouvelle le récit est tendu vers une fin que le lecteur, pris par le suspense, brûle de connaître, tout dans la narration est mis en œuvre pour détourner l’attention d’un dénouement qui, pour imprévisible qu’il soit, reste implacablement logique. Bon sang, mais c’est bien sûr ! Voilà ce que le lecteur s’exclame en terminant la lecture d’une nouvelle bien construite et bien menée. Tout était là et pourtant, grâce à l’habileté du narrateur, je n’ai rien vu venir. Dans «Vous m’en direz des nouvelles», Jean-Pierre Martinez, auteur de théâtre et scénariste de séries policière (cf. Avocats et Associés pour France 2) manie avec virtuosité cet art de la chute. Avec ces dix-sept nouvelles, qui nous entraînent dans les univers les plus variés, il se joue avec brio de la sagacité du lecteur, pour son plus grand plaisir.


Ce texte est offert gracieusement à la lecture. Avant toute exploitation publique, professionnelle ou amateur, vous devez obtenir l’autorisation de la SACD.


TÉLÉCHARGER
PDF GRATUIT
TÉLÉCHARGER
EBOOK GRATUIT

ACHETER
LE LIVRE
LIVRE
AUDIO
 

 


Cet ouvrage peut être commandé en impression à la demande sur le site The Book Edition, avec des réductions sur quantité (5% à partir de 4 exemplaires et 10% à partir de 12 exemplaires), livraison dans un délai d’une semaine environ.


LIRE UN EXTRAIT


UN VISAGE FAMILIER

C’était mon dernier rendez-vous de la journée. Lorsque je l’ai aperçu dans la salle d’attente de mon cabinet, je ne l’ai pas reconnu tout de suite. Il portait des lunettes noires, et une écharpe masquait l’autre moitié de son visage. J’ai d’abord pensé qu’il s’agissait d’un grand brûlé, tentant de cacher ainsi sa face défigurée. Hélas, dans ma clinique, je reçois tous les jours ce genre de malheureux, auxquels je m’efforce de venir en aide. Je suis chirurgien esthétique. Et je me targue de compter parmi les meilleurs spécialistes de Paris en ce qui concerne les opérations réparatrices du visage. Évidemment, parce qu’il faut bien vivre, je m’occupe aussi de rectifier, d’embellir ou de rajeunir les attributs naturels de patients tout à fait bien portants, mais désireux de mieux coller aux canons de beauté imposés par les magazines. Un créneau infiniment plus lucratif, touchant principalement une cible féminine. À tort ou à raison, les hommes éprouvent beaucoup moins que les femmes le désir de changer de tête. À moins, bien sûr, de circonstances exceptionnelles…

Ce n’est donc que lorsqu’il s’est assis en face de moi dans mon bureau, et qu’il a ôté lunettes et écharpe, que je l’ai reconnu. Son visage était parfaitement intact, et il m’apparut étrangement familier. Alfred Charlant ! Quelques semaines auparavant, la photo de cet homme, jusque là peu connu du grand public, était à la une de tous les journaux. Ce haut fonctionnaire au passé sulfureux avait été reconnu coupable dans une sombre affaire de détournement de fonds publics à grande échelle. Depuis, il était en fuite, et tout le monde le croyait déjà réfugié sous une fausse identité dans un paradis fiscal peu regardant sur la moralité de ses hôtes, pourvu que leurs comptes en banque soient bien fournis. Apparemment, l’homme, sous le coup d’un mandat d’arrêt européen, n’avait pas osé prendre le risque d’être reconnu à l’aéroport en tentant de quitter le pays. Quand on a un visage aussi médiatique, des faux papiers ne suffisent pas pour espérer passer inaperçu. C’est l’un des quelques inconvénients de la célébrité…

« Je veux changer de tête » me déclara l’homme sans autre préambule. Même si sa requête ne m’étonna guère, au vu de la situation délicate dans laquelle il se trouvait, il me fallut un instant pour répondre. « Je ne peux pas faire ça, vous le savez bien. Je me rendrais coupable de complicité en vous aidant ainsi à échapper à la police… ». L’homme ne parut pas le moins du monde désarçonné. « Vous allez pourtant le faire » affirma-t-il sans sourciller. Son assurance me glaça le sang. À l’évidence, il ne plaisantait pas. « Et pourquoi vous rendrais-je ce service ? » demandai-je la voix un peu tremblante. « Parce que des amis à moi retiennent votre fils en otage » répondit-il. « Ils ne le libéreront que quand j’aurais quitté le pays. Avec sur mon nouveau passeport, la photo du visage tout neuf que vous allez me sculpter de votre main d’artiste. ». Il esquissa un sourire. « Je vous laisse carte blanche, Docteur. Mais tant qu’à faire, rendez-moi plus beau pour commencer ma nouvelle vie. J’ai toujours rêvé d’avoir une tête de danseur de tango. Je veux être votre chef-d’œuvre… ».

Je n’avais pas le choix et, après avoir vérifié par téléphone auprès de ma femme que les menaces d’Alfred Charlant n’étaient pas du bluff, je dus m’exécuter dans la nuit même. J’étais un peu pris de court. Généralement, mes patients veulent seulement améliorer quelques détails ça et là, en gommant au passage leurs défauts les plus grossiers. Leur but n’est pas de se réveiller avec un visage entièrement différent, au point que leurs propres mères ne puissent les reconnaître. Il me fallait donc un modèle. Dans la précipitation, c’est en feuilletant une revue en lecture dans la salle d’attente de mon cabinet que je trouvai l’inspiration pour modeler le visage de playboy latin que mon machiavélique client semblait désirer. Je lui présentai la photo découpée dans le magazine et, ayant reçu son approbation, l’opération commença. Elle dura presque toute la nuit, mais au matin, malgré les bandelettes qui cachaient encore le nouveau visage d’Alfred Charlant, je savais que j’avais réalisé mon grand œuvre.

Après quelques jours de convalescence, un complice lui apporta un faux passeport flambant neuf, garni de la photo de sa nouvelle tête, et Alfred Charlant quitta ma clinique incognito en direction de l’aéroport. « Dès que j’aurais embarqué, quelqu’un vous fera savoir par téléphone à quel endroit vous pourrez retrouver votre fils. ». À sa décharge, je dois reconnaître que l’homme tint parole.

Quant à la fin de l’histoire, c’est par le numéro suivant de ce même magazine dans lequel j’avais découpé la photo du nouveau visage d’Alfred Charlant, que j’en appris tous les détails. À peine arrivé à sa destination, que j’avais devinée être l’Amérique du Sud, puisqu’il souhaitait avoir un visage de « latin lover » pour se fondre plus facilement dans la foule, l’homme fut immédiatement appréhendé par la police des frontières. Il s’en étonna. Avec sa nouvelle identité, il était persuadé de passer inaperçu. Il cria donc au quiproquo et, pour tenter de convaincre la police de le laisser partir, il avoua qu’il avait subi une petite opération de chirurgie esthétique. Ce qui, en soit, n’est pas un crime, protesta-t-il en clamant son innocence. De là peut-être venait le fait qu’on le prenait pour quelqu’un d’autre…

Le policier qui lui passa les menottes mit fin à ses espérances de retraite dorée en lui lançant d’un ton ironique : « Une opération de chirurgie esthétique ! Tiens, on ne me l’avait jamais faite, celle-là… Eh bien la prochaine fois que tu changes de tête, évite de te faire faire le visage d’un narcotrafiquant recherché par toutes les polices d’Amérique… ». Le policier, hilare, se tourna vers ses collègues. « Allez, on l’embarque. C’est Pedro Semprini. Ça fait des années qu’on essaie de mettre la main dessus. Et il espérait nous filer entre les doigts en changeant seulement son nom sur son passeport ».

Pour garder un souvenir de cette aventure, j’ai soigneusement recollé la photo dans le magazine, à l’endroit où je l’avais découpée. Elle accompagnait un article annonçant la mise à prix de la tête d’un des plus gros trafiquants de drogue de Colombie.

Traduction de cette nouvelle en chinois


LE VIAGER

Lorsque Marc m’avait montré cette annonce, trouvée dans notre boîte aux lettres, je n’avais pas été très emballée. Acheter une maison en viager, c’était parier sur la mort. Cela ne pourrait que nous rapporter des ennuis, je le sentais. Et des ennuis, dans le passé, j’en avais déjà eu mon compte… Sans parler du fait que cette dame pouvait très bien devenir centenaire ! Elle n’était pas si âgée… Marc, mon mari, voyait les choses plus sereinement. En tant que médecin, avait-il prévu au premier coup d’œil que notre propriétaire ne ferait pas de vieux os ?

Malgré mes réticences, je finis par céder. Une vraie maison en plein Paris, avec un jardin ! C’était un rêve que nous aurions cru inaccessible. Surtout depuis l’envolée des prix de l’immobilier… Le contrat passé avec la propriétaire paraissait avantageux. Elle occuperait deux pièces indépendantes donnant directement sur le jardin, et nous laisserait l’usufruit du reste de la maison. En l’échange d’un petit capital et d’une rente à vie qui, finalement, nous reviendrait moins cher qu’un crédit sur vingt ans ou trente ans…

Nous n’avions donc aucune raison d’être trop pressés que cette brave dame disparaisse. Même si, à l’évidence, nous ne serions vraiment chez nous qu’après sa mort. Heureusement, Monique, la dame en question, était très discrète. Dès notre emménagement, mon mari devint naturellement son médecin traitant. Elle souffrait, en effet, de divers maux propres à son âge. Mais rien de grave. Apparemment, en tout cas… Pour le reste, nous n’eûmes, hélas, guère le temps de faire sa connaissance. Quelques jours après notre arrivée dans la maison, la femme de ménage la trouva morte dans son lit…

Ce décès constituait en soi une aubaine d’un strict point de vue financier, puisque nous nous retrouvions, mon mari et moi, en moins d’une semaine, propriétaire d’un bien immobilier exceptionnel pour une bouchée de pain. Mais je n’eus pas le cœur à m’en réjouir. Je me doutais bien que cette bonne affaire ne manquerait pas d’attirer l’attention…

Ce qui devait arriver arriva. Trois jours après le décès de Monique, nous fûmes convoqués au commissariat pour répondre à quelques questions. Même si j’avais un sinistre pressentiment, je m’efforçais de rester calme. Compte tenu du contexte de cette disparition, ces soupçons étaient parfaitement légitimes.

Hélas, ce que nous appris l’inspecteur qui nous reçus ne nous rassura guère. L’autopsie venait de révéler que le décès de la vieille dame n’était pas dû à une cause naturelle. Elle avait succombé à une surdose de morphine. Mon mari reconnut sans difficulté avoir été le dernier le médecin traitant de Monique, mais nia lui avoir administré cette injection fatale.

Les protestations d’innocence de Marc, hélas, furent vaines. Cette vieille dame très digne n’était pas, a priori, une droguée. Il était donc peu probable qu’elle ait succombé à une overdose en s’injectant elle-même de la morphine. On ne voyait pas davantage pourquoi elle se serait suicidée par ce moyen étrange quelques jours après avoir vendu sa maison en viager…

Son médecin, en revanche, avait pu aisément se procurer de la morphine, et lui en administrer une dose mortelle sous un prétexte quelconque. Une vaccination contre la grippe, par exemple, puisque c’était la saison. Quant à l’erreur médicale, avertit l’inspecteur, elle serait difficile à plaider… puisque le décès fort opportun de cette patiente permettait à son médecin d’échapper à la rente à vie qu’il s’était engagé à lui payer…

Après le versement d’une lourde caution, je fus libérée sous contrôle judiciaire. Mais Marc resterait incarcéré jusqu’à son procès, qui ne s’annonçait pas sous les meilleures auspices… En attendant un jugement définitif, j’étais autorisée à garder la maison. Ce ne fut pas ce que je fis de mieux. Me retrouver seule dans cette sinistre demeure, cause de mon malheur, précipita ma déchéance. J’en vins moi-même à douter de l’innocence de mon mari. Je tombai dans une profonde dépression et me mis à boire…

Depuis mon accident, huit ans auparavant, ma santé, surtout psychique, était restée fragile. Ce deuxième revers était en passe de me détruire. Pourquoi le sort s’acharnait-il ainsi contre moi ? A l’époque, au volant de ma voiture, j’avais causé la mort d’un homme… Grâce au talent de mon avocat, j’avais pu échapper à une condamnation. Mais je gardais de ce drame un sentiment de culpabilité…

Privée de la présence réconfortante de mon mari, je repensai à cet homme que, par mon imprudence, j’avais lui aussi arraché à sa famille, et je décidai d’aller me recueillir sur sa tombe. Je n’y étais allée qu’une fois, à ma sortie de l’hôpital. Pendant le procès, auquel je n’avais pas eu le courage d’assister, j’étais encore en soins intensifs… C’était d’ailleurs à l’hôpital que j’avais fait la connaissance de Marc, encore interne alors, et qui s’était si bien occupé de moi…

En arrivant au cimetière, je retrouvai facilement l’endroit où était inhumé l’homme à qui j’avais malencontreusement arraché la vie. Il s’agissait d’un tombeau de famille. Je remarquai aussitôt qu’un autre nom avait été très récemment inscrit sur la pierre tombale. L’épouse de ma victime l’avait rejoint dans l’au-delà. Était-elle morte de chagrin, comme je mourrais peut-être moi-même si Marc était condamné à la prison à vie pour un meurtre qu’il n’avait pas commis ?

Soudain, mon sang se glaça. À coté du nom de cette dame figurait une photo dans un médaillon. Je la reconnus aussitôt. C’était la femme qui nous avait vendu sa maison en viager ! Elle ne s’était pas présentée à nous sous ce nom gravé dans le marbre, mais elle avait parfaitement pu reprendre son nom de jeune fille pour brouiller les pistes…

C’est alors que je compris. J’avais arraché son mari à Monique. Par ce suicide déguisé en meurtre, elle m’enlevait le mien. Elle s’était vengée de moi. Comme elle, j’étais condamnée à vivre seule, comme une veuve, dans cette sinistre maison où elle avait elle-même pleuré l’époux dont je l’avais privée…


NOCES DE SANG

Au volant de sa voiture, Sandra gravissait les derniers kilomètres de la route sinueuse qui conduisait à la villa où elle espérait trouver son amant. Elle avait le cœur battant. Malgré l’interdiction formelle que lui avait faite Charles, elle n’avait pu résister à la tentation d’aller le voir chez lui. Ou plutôt chez sa femme, puisque la superbe propriété située sur les hauteurs de Cannes appartenait à la riche veuve qu’il n’avait épousée, disait-il, que pour son argent.

Il y avait plus d’une semaine que Sandra n’avait pas vu l’homme qu’elle aimait. Depuis des mois, Charles lui promettait de quitter son épouse. Lors de leur ultime rendez-vous, il lui avait juré que cette fois, c’était pour bientôt. En attendant, Sandra devait être raisonnable et ne pas chercher à prendre contact avec lui. Mais Sandra, maîtresse délaissée, blessée dans son orgueil, n’en pouvait plus d’attendre. Il ne la prenait même plus au téléphone ! Et si c’était d’elle, dont il voulait se débarrasser en l’éloignant ainsi ? Elle devait en avoir le cœur net.

En arrivant sur le parking situé en bord de route, devant la villa, Sandra constata avec dépit que la voiture de Charles n’était pas là. Elle avait caressé l’espoir de le trouver seul à la maison… Elle aperçut en revanche le coupé sport de sa femme, garé à l’ombre d’un pin parasol. Sandra eut d’abord le réflexe de faire demi-tour. Elle craignait les conséquences d’un tête à tête avec cette mégère, qu’elle n’avait jamais vue. Mais le sort s’en mêla. Tandis qu’elle manœuvrait vivement pour repartir sans être vue, Sandra perçut un bruit caractéristique et, se penchant par la vitre ouverte, constata que sa roue avant gauche était dégonflée…

Impossible de refaire en sens inverse, avec un pneu crevé, les cinq kilomètres de route en lacets qui l’avait conduite jusque là. Quant à changer une roue sur ce parking sans attirer l’attention, il n’y fallait pas songer. Elle n’avait donc plus d’autre choix que d’affronter sa rivale.

Tandis que celle-ci, longeant la piscine, descendait vers elle pour s’enquérir de ce qui se passait, Sandra se sentit envahie par un sentiment de jalousie. Moulée dans un tailleur de grand couturier, avec ses cheveux blonds soigneusement tirés en chignon, Chantal avait certes l’air un peu sévère, mais elle ne manquait pas de classe. Etait-ce vraiment là la femme acariâtre que lui avait dépeinte Charles ?

« Je ne suis pas sûre de savoir changer une roue » s’excusa aimablement Chantal. « Et mon mari n’est pas là… ». Rassemblant son courage, Sandra improvisa. « Je vous remercie, mais je peux me débrouiller toute seule. Si vous m’autorisez à utiliser votre parking… ». Chantal sourit. « Faites comme chez vous. D’ailleurs, j’allais sortir. Mon mari m’attend au restaurant. ». Chantal ne remarqua pas le trouble de Sandra et poursuivit sur le ton de la complicité féminine. « C’est notre anniversaire de mariage, aujourd’hui… ». Sandra fit un effort sur elle-même pour se dominer. « Félicitation » lâcha-t-elle d’un ton glacial. Chantal s’éloignait déjà vers la villa.

En ouvrant le coffre de sa voiture, Sandra tremblait de colère. Alors c’était comme ça que Charles se préparait à rompre avec sa femme ? Elle se sentait trahie. Humiliée. Elle saisit son cric avec des envies de meurtre, hésitant seulement sur le choix de sa victime. Elle opta pour Charles. Après tout, cette pauvre Chantal n’était pour rien dans tout cela. Quant à lui, il ne payait rien pour attendre…

Pour comble de malchance, Sandra se souvint, en apercevant la roue de secours au fond de son coffre, qu’elle avait négligé de la faire réparer suite à sa dernière crevaison, quelques semaines auparavant. Elle s’apprêtait à fondre en larmes quand une main secourable se posa sur son épaule. « Il y des jours comme ça… », murmura gentiment Chantal avec un air compatissant. Revenue sur ses pas, l’élégante quadragénaire lui tendit un trousseau de clefs. « Je ne pars que dans un quart d’heure, le temps de changer de tenue. Je crains que cet ensemble ne soit un peu triste pour un anniversaire de mariage… Prenez ma voiture pour aller jusqu’au garage en bas. Ils vous répareront votre roue en cinq minutes. ».

Tandis qu’elle redescendait à vive allure, au volant du coupé sport de Chantal, la route qui serpentait jusqu’au garage, Sandra écumait de rage. Nul doute que si Charles s’était trouvé devant elle sur le bas côté, elle aurait volontiers fait un écart pour lui passer sur le corps !

La sonnerie de son portable l’arracha aux autres scénarios de meurtres qu’elle échafaudait déjà pour se venger de son amant. Saisissant l’appareil dans son sac à main, elle répondit d’un ton peu amène mais, reconnaissant la voix de son interlocuteur, elle se radoucit aussitôt. C’était lui ! Il osait la rappeler ! Plutôt que d’exploser, et de lui raconter ce qui venait de se passer, elle décida de faire comme si de rien n’était. Pour voir jusqu’où ce traître pousserait l’hypocrisie.

« Alors, ça y est ? » demanda-t-elle « Tu as quittée Chantal ? ». Bizarrement, cette question ne parut pas le démonter. « Un divorce me ruinerait » avoua-t-il. « Mais j’ai trouvé un autre moyen… ». « Ah, oui ? » commenta Sandra ironiquement. « Et comment comptes-tu t’y prendre ? ». « J’ai rendez-vous avec elle dans un quart d’heure » dit-il. « Elle devrait déjà être sur la route… ». Il marqua une pause avant de poursuivre, comme pour marquer la gravité de ce qui allait suivre. « J’ai trafiqué les freins de sa voiture » lâcha-t-il enfin. « Dans quelques secondes, elle devrait s’écraser au fond d’un ravin, et je serai enfin libre… ».

Le visage de Sandra se figea, tandis qu’elle digérait l’information que venait de lui communiquer son amant. Elle avala sa salive, avant d’appuyer lentement sur la pédale… Les freins ne répondaient plus, et les pneus du coupé sport, lancé à tombeau ouvert, mordaient déjà le bord du gouffre…

Vous m’en direz des nouvelles Lire la suite »

Comédies pour 11 à 13

Série Blanche et Humour Noir

10 à 13 comédiens et/ou comédiennes

10 : 8H/2F, 7H/3F, 6H/4F, 5H/5F, 4H/6F, 3H/7F, 2H/8F, 1H/9F, 10F
11 : 8H/3F, 7H/4F, 6H/5F, 5H/6F, 4H/7F, 3H/8F, 2H/9F, 1H/10F, 11F
12 : 8H/4F, 7H/5F, 6H/6F, 5H/7F, 4H/8F, 3H/9F, 2H/10F, 1H/11F, 12F
13 : 8H/5F, 7H/6F, 6H/7F, 5H/8F, 4H/9F, 3H/10F, 2H/11F, 1H/12F, 13F

L’hôpital était presque parfait… Le crime aussi. Une comédie policière teintée d’humour noir.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Le Plus Beau Village de France

12 ou 13 personnages :

3H/9F, 4H/8F, 5H/7F, 6H/6F, 7H/5F, 8H/4F, 9H/3F, 3H/10F, 4H/9F, 5H/8F, 6H/7F, 7H/6F, 8H/5F, 9H/4F

Beaucon-le-Château va être proclamé Plus Beau Village de France. Dans le même temps, le deuxième tour des élections municipales pourrait bien porter à la mairie un candidat du Front Populiste. Au bistrot La Part des Anges, les forces vives de la ville débattent pour savoir lequel du maire sortant ou de son opposante l’emportera. Une série d’imprévus vient alors troubler le bon déroulement du scrutin, qui viendront conforter le célèbre diagnostic de Winston Churchill : la démocratie est le pire des systèmes à l’exception de tous les autres.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Comme un téléfilm de Noël… en pire

9 à 11 comédiens

9 : 5H/4F ou 4H/6F
10 : 6H/4F ou 5H/5F ou 4H/6F

11 : 7H/4F ou 6H/5F ou 5H/6F ou 4H/7F

Kimberley a hérité de sa grand-mère la recette secrète de ses fameux cookies. À la veille de Noël, avec sa meilleure amie Jennifer, Kimberley s’apprête à ouvrir un salon de thé au pied de l’immeuble où habitait Mamy Yoyo. Un projet qui lui tient à cœur, dans lequel elle a investi toutes ses économies. Mais un promoteur sans scrupule est prêt à tout pour racheter sa boutique, afin de raser le bâtiment pour construire à la place une résidence de luxe. Kimberley parviendra-t-elle à surmonter ces épreuves, et à trouver enfin l’amour…? Un vrai scénario de téléfilm de Noël… en pire.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Revers de Décors

10 à 13 personnages (hommes ou femmes)

Juste avant les trois coups, les comédiens répètent une dernière fois. Mais un événement inattendu vient compromettre le début du spectacle. Une joyeuse farce sur le petit monde du théâtre…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Erreur des Pompes Funèbres en votre faveur

8 à 11 comédiens

11 comédiens : 1H/10F, 2H/9F, 3H/8F, 4H/7F, 5H/6F, 6H/5F, 7H/4F
10 comédiens : 1H/9F, 2H/8F, 3H/7F, 4H/6F, 5H/5F, 6H/4F
9 comédiens : 1H/8F, 2H/7F, 3H/6F, 4H/5F, 5H/4F
8 comédiens : 1H/7F, 2H/6F, 3H/5F, 4H/4F

Alban a organisé une petite réception pour honorer les cendres de son grand-père qui vient de disparaître. Mais suite à une erreur des Pompes Funèbres, c’est son propre nom qui figure sur le faire-part…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Miracle au Couvent de Sainte Marie-Jeanne

10 à 14 personnages très variable en sexe

14 personnages : 2H/12F, 3H/11F, 4H/10F, 5H/9F, 6H/8F, 7H/7F, 8H/6F
13 personnages : 2H/11F, 3H/10F, 4H/9F, 5H/8F, 6H/7F, 7H/6F
12 personnages : 2H/10F, 3H/9F, 4H/8F, 5H/7F, 6H/6F
11 personnages : 2H/9F, 3H/8F, 4H/7F, 5H/6F
10 personnages : 2H/8F, 3H/7F, 4H/6F, 5H/5F

À la boutique du couvent dont les ventes financent les bonnes œuvres des Sœurs, le célèbre Élixir de Sainte Marie-Jeanne aux nombreuses vertus ne fait plus recette. Jusqu’au jour où une Sœur a l’idée d’ajouter une herbe mystérieuse à la préparation. Le succès du nouveau cordial est stupéfiant. Le dernier miracle de Marie-Jeanne ?

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Miracle au Monastère de Sainte Marie-Jeanne

11 à 14 personnages très variable en sexe

14 : 6H/8F, 7H/7F, 8H/6F, 9H/5F, 10/4F, 11H/3F, 12H/2F
13 : 6H/7F, 7H/6F, 8H/5F, 9H/4F, 10H/3F, 11H/2F
12 : 6H/6F, 7H/5F, 8H/4F, 9H/3F, 10H/2F
11 : 6H/5F, 7H/4F, 8H/3F, 9H/2F
À la boutique du monastère dont les ventes financent les bonnes œuvres des moines, le célèbre Élixir de Sainte Marie-Jeanne aux nombreuses vertus ne fait plus recette. Jusqu’au jour où un jeune moine a l’idée d’ajouter une herbe mystérieuse à la préparation. Le succès du nouveau cordial est stupéfiant. Le dernier miracle de Marie-Jeanne ?
Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Café des Sports

Jusqu’à 16 personnages variable en sexe
Suite à un accident de corbillard, l’arrivée dans un café d’un cercueil qui s’avère contenir un billet de loto gagnant fournit le prétexte d’une comédie très enlevée.
Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE 


Spéciale Dédicace

12 personnages

7H/5F, 6H/6F, 5H/7F, 4H/8F 

Dans une petite librairie, une séance de dédicace se prépare.  Charles s’est enfin décidé à publier son premier roman. Tout laisse à penser que ce ne sera pas un best seller.  Mais à l’ère d’internet, un miracle est toujours possible…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Les Flamants Bleus

12 personnages

6H/6F (variabilité possible en sexe)

La saison commence mal pour Romain et Fanny, qui viennent d’ouvrir aux Saintes Maries de la Mer un hôtel baptisé Les Flamants Roses : en raison d’une grève entraînant une pénurie de carburant, les annulations tombent en cascade. Il va falloir convaincre les quelques naufragés de la route ayant échoué dans leur hôtel de prolonger leur séjour, et si possible attirer d’autres touristes pour sauver l’établissement de la faillite. Heureusement, la Camargue et les Camarguais ne manquent pas de charmes. Et la réceptionniste a plus d’un sortilège dans son sac… Une comédie en forme d’hommage irrévérencieux à la mythique Camargue.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Sur Un Plateau

7 à 12 comédiens
2H/5F, 3H/4F, 4H/3F, 5H/2F, 6H/1F
2H/10F, 3H/9F, 4H/8F, 5H/7F, 6H/6F, 7H/5F, 8H/4F, 9H/3F

L’animateur d’une obscure chaîne du câble reçoit un homme politique dont il doit assurer la promotion. Mais l’interview ne va pas se dérouler comme prévu…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Comédies à sketchs

 

Le Comptoir

Distribution très variable en nombre et sexe

Sur le zinc d’un comptoir, à l’heure des bilans, une femme qui se dit auteur raconte à la patronne des séquences marquantes de son existence. Ces récits fantasmatiques prennent vie sur la scène dans la salle du bistrot.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Avis de Passage

Distribution très variable en nombre et sexe :
Une trentaine de rôles masculins ou féminins, un même comédien pouvant interpréter plusieurs rôles.

Dans le hall d’un immeuble, entre les boîtes à lettres et le digicode, d’étranges personnages se croisent sans toujours se comprendre…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Brèves de Trottoirs

Jusqu’à 25 personnages (hommes et femmes)

Étranges histoires sur un trottoir…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


À cœurs ouverts

Jusqu’à 24 personnages (hommes et femmes)
Dans un bistrot situé en face d’un hôpital, et tenu par un drôle de patron, se croisent les destins d’hommes et de femmes à la recherche d’un cœur à prendre. Pour une transplantation, ou plus si affinité…

Téléchargez gratuitement le PDF ou achetez le LIVRE


Traduction et libre adaptation

 

L’Étoffe des Merveilles

De 10 à 14 personnages (variables en sexe)

Traduction et adaptation libre de l’intermède de Cervantès intitulé « Le Retable des Merveilles » : comment trois saltimbanques bernent des notables de village en leur faisant prendre des vessies pour des lanternes…

ACHETER LE LIVRE

Comédies pour 11 à 13 Lire la suite »

Comédie pour 7 à 8

Bienvenue à bord

8 à 10 personnages :

8 personnages : 2H/6F, 3H/5, 4H/4F
9 personnages : 2H/7F, 3H/6F, 4H/5F
10 personnages : 2H/8F, 3H/7F, 4H/6F, 5H/5F

Première sitcom métaphysique dont l’action se situe dans une maison de retraite médicalisée.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Café des Sports

7 à 10 personnages et jusqu’à 16
1H/6F, 1H/7F, 1H/8F, 1H/9F, 2H/5F, 2H/6F, 2H/7F, 2H/8F, 3H/4F,
3H/5F, 3H/6F, 3H/7F, 4H/3F, 4H/4F, 4H/5F, 4H/6F, 5H/2F, 5H/3F,
5H4F, 5H/5F, 6H/2F, 6H/3F, 6H/4F, 7H/2F, 7H/3F…

Suite à un accident de corbillard, l’arrivée dans un café d’un cercueil qui s’avère contenir un billet de loto gagnant fournit le prétexte d’une comédie très enlevée.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Il était un petit navire

7 comédiens
Certains rôles sont indifféremment masculins ou féminins
3H/4F, 2H/5F, 1H/6F

Six personnages mystérieux sont bloqués sur une île par une grève de ferry. Ils ont tous une bonne raison pour vouloir regagner le continent au plus vite. Ils embarquent sur un bateau de pêche piloté par un passeur improvisé. Mais le prix à payer pour cette traversée sera plus élevé que prévu… Une fable humoristique sur les travers de notre société.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Réveillon au Poste

6 à 10 comédiens
Tous les rôles jouables par des hommes ou des femmes

Le soir de Noël, deux inspecteurs sont de garde avec pour seule compagnie quelques naufragés du réveillon. C’est alors qu’un Ministre débarque pour rendre hommage au dévouement de la police. Évidemment, rien ne va se passer comme prévu…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Fake news de comptoir

6 à 10 personnages (hommes ou femmes)
Au comptoir de l’unique bistrot d’un village dépeuplé par l’exode rural, pour échapper à leur destin mortifère, patrons et clients inventent pour blaguer de fausses nouvelles… dont certaines pourraient être des prophéties auto-réalisatrices.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Erreur des Pompes Funèbres en votre faveur

8 à 11 comédiens

11 comédiens : 1H/10F, 2H/9F, 3H/8F, 4H/7F, 5H/6F, 6H/5F, 7H/4F
10 comédiens : 1H/9F, 2H/8F, 3H/7F, 4H/6F, 5H/5F, 6H/4F
9 comédiens : 1H/8F, 2H/7F, 3H/6F, 4H/5F, 5H/4F
8 comédiens : 1H/7F, 2H/6F, 3H/5F, 4H/4F

Alban a organisé une petite réception pour honorer les cendres de son grand-père qui vient de disparaître. Mais suite à une erreur des Pompes Funèbres, c’est son propre nom qui figure sur le faire-part…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Échecs aux Rois

8 comédiens
6H/2F, 5H/3F, 4H/4F, 3H/5F, 2H/6F

Ce n’est pas pour rien si l’on parle d’échiquier afin de décrire les forces en présence sur le champ de bataille politique. De fait, la politique s’apparente souvent à une partie d’échecs, excluant toute notion de morale. Que les uns ou les autres jouent avec les blancs ou avec les noirs, il s’agit toujours pour un camp de vaincre l’autre afin qu’il ne reste plus qu’un seul roi. Un jeu absurde, puisqu’avec la défaite de l’adversaire, c’est aussi la partie qui se termine. Et que le seul avenir possible ne saurait être qu’une éventuelle revanche. Tel est le sujet de cette comédie grinçante où roi et reine, et ceux qui intriguent pour les remplacer, n’hésitent pas à sacrifier les pions pour gagner la partie. Une illustration tragi-comique des extravagances auxquelles peuvent s’abandonner ceux qui succombent au virus de la politique…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

La représentation n’est pas annulée

8 comédiens
1H/7F, 2H/6F, 3H/5F, 4H/4F, 5H/3F, 6H/2F, 7H/1F

Une troupe de comédiens s’apprête à entrer en scène pour un spectacle sur les dernières heures de la vie de Molière. Rien n’est prêt et les difficultés s’accumulent. Jusqu’au vol de la recette du jour… Faut-il annuler la représentation en précipitant ainsi la ruine de ce théâtre au bord de la faillite, ou bien jouer coûte que coûte ? 

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Hors-Jeux Interdits

 7 comédiens
2H/5F, 3H/4F, 4H/3F, 5H/2F

Cinq personnes qui ne se connaissent pas et qui n’ont rien en commun se réveillent enfermées en un lieu inconnu. Qui les a conduit là et pourquoi ? L’arrivée de leurs deux kidnappeurs apportent plus de questions que de réponses… Mettant de côté leurs divisions, les otages sont contraints de privilégier le collectif pour espérer parvenir jusqu’aux prolongations. Tout en évitant soigneusement les hors-jeux…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Sur Un Plateau

7 à 12 comédiens
2H/5F, 3H/4F, 4H/3F, 5H/2F, 6H/1F
2H/10F, 3H/9F, 4H/8F, 5H/7F, 6H/6F, 7H/5F, 8H/4F, 9H/3F

L’animateur d’une obscure chaîne du câble reçoit un homme politique dont il doit assurer la promotion. Mais l’interview ne va pas se dérouler comme prévu…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Préhistoires Grotesques

7 ou 8 personnages
3 hommes et 4 femmes
4 hommes et 4 femmes

Dans une possible préhistoire peut-être à venir Sapionces et Nandertals se côtoient en bonne intelligence. Mais deux espèces humaines, n’est-ce pas au moins une de trop ?
Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

La maison de nos rêves

1 homme et 1 femme ou 2H/2F ou 3H/3F ou 4H/4F ou 5H/5F
Un couple vient d’acheter la maison de ses rêves, à un prix étonnamment bas. Qu’a-t-il bien pu se passer dans cette maison pour qu’elle n’ait pas trouvé preneur avant ? Les précédents propriétaires y sont morts dans des circonstances aussi dramatiques que mystérieuses… Un conte à rebours philosophique sur le destin tragicomique de l’humanité en général, et du couple en particulier.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE


Comédies à sketchs

Le Comptoir

Distribution très variable en nombre et sexe

Sur le zinc d’un comptoir, à l’heure des bilans, une femme qui se dit auteur raconte à la patronne des séquences marquantes de son existence. Ces récits fantasmatiques prennent vie sur la scène dans la salle du bistrot.

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Avis de Passage

Distribution très variable en nombre et sexe :
Une trentaine de rôles masculins ou féminins, un même comédien pouvant interpréter plusieurs rôles.

Dans le hall d’un immeuble, entre les boîtes à lettres et le digicode, d’étranges personnages se croisent sans toujours se comprendre…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Brèves de Trottoirs

Jusqu’à 25 personnages (hommes et femmes)

Étranges histoires sur un trottoir…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Théâtre télécharger gratuit textes comédie pour 7 8 9 10 11

Théâtre télécharger gratuit textes comédie pour 7 8 9 10

Comédie pour 7 à 8 Lire la suite »

Comédies pour 5

Sans Fleur Ni Couronne

5 personnages (hommes ou femmes)
La crémation de Jean-Luc est prévue à 15H35 précise. Quelques proches assistent à la cérémonie, peu nombreux, car le cher disparu ne laisse pas que de bons souvenirs. Mais un auteur, dit-on, continue à vivre à travers ses œuvres. Et si ces funérailles s’avéraient être sa meilleure comédie ?
Télécharger gratuitement PDF ou acheter le LIVRE

Diagnostic Réservé

5 ou 6 personnages (hommes et/ou femmes)
Patrick est dans un coma profond suite à un accident de Velib. Ses proches depuis longtemps perdus de vue sont appelés à son chevet pour décider de son sort afin d’éviter tout acharnement thérapeutique Mais cette décision collégiale est d’autant plus difficile à prendre que le patient s’avère ne pas être exactement celui qu’on croyait et qu’il est détenteur d’un secret qui pourrait rapporter gros…
Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Crise et Châtiment

5 ou 6 personnages : 1H/4F, 1H/5F, 2H/3F, 2H/4F
Un comédien au chômage, recruté par une banque en faillite, découvre qu’il a été engagé pour faire office de bouc émissaire. Mais le cauchemar ne fait que commencer…

Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Tout est bien qui commence mal

5 personnages : 3H/2F, 2H/3F, 1H/4F, 5F
Depuis des années, Fred et Alex attendent de pouvoir adopter un enfant. C’est le grand jour. L’inspectrice de l’Aide à l’Enfance est sur le point d’arriver chez eux pour évaluer la solidité du couple, le sérieux de leur projet d’adoption, et les conditions d’accueil de l’enfant. Mais catastrophe, Alex n’est pas au rendez-vous, ce qui risque de tout remettre en question. Fred va devoir trouver un moyen pour gérer cette situation délicate, à laquelle s’ajoute un problème de plomberie imprévu. À moins que l’arrivée du plombier ne fournisse une partie de la solution…
Télécharger gratuitement PDF ou acheter le LIVRE

Piège à Cons

5 personnages : 4H/1F, 3H/2F, 2H/3F, 1H/4F
À l’approche des présidentielles, un parti en perdition dans les sondages désigne pour le représenter un con de service afin qu’il endosse la responsabilité du naufrage. Tout en promouvant en secret un candidat hors parti à qui se rallier après sa victoire. Mais le con s’avère imprévisible… et les électeurs aussi.
Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Mortelle Saint Sylvestre

5 personnages : 1H/4F, 2H/3F, 3H/2F
Ce petit moment de panique, le 31 décembre, quand on n’a aucun plan pour la soirée… On est prêt à accepter n’importe quelle invitation pour ne pas fêter la nouvelle année tout seul. Au risque de passer le pire réveillon de sa vie…
Télécharger gratuitement le PDF ou  acheter le LIVRE

Happy Hour

5 ou 6 personnages : 1H/5F, 2H/4F, 3H/3F, 4H/2F, 1H/4F, 2H/3F, 3H/2F
Dans un bar de nuit, un inquiétant barman sert de confident à des clientes esseulées
ayant rendez-vous avec de mystérieux partenaires rencontrés sur le net…
Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Il était une fois dans le web

5 personnages : 2H/3F
La PDG d’une start up qui vient de licencier un cadre jugé peu performant, apprend que c’est le projet de ce looser qui vient d’être choisi par un client providentiel. Comment rattraper le coup… et à quel prix ?
Télécharger gratuitement le PDF ou acheter le LIVRE

Comédies pour 5 Lire la suite »

Miracle au Couvent de Sainte Marie-Jeanne

Miracle at Saint Mary Juana Abbey – Milagro en el Convento de Santa María-Juana  –  Milagre no Convento de Santa María-Joana – Miracolo nel Convento di Santa Maria Giovanna

Comédie de Jean-Pierre Martinez

10 à 14 personnages

14 personnages : 2H/12F, 3H/11F, 4H/10F, 5H/9F, 6H/8F, 7H/7F, 8H/6F
13 personnages : 2H/11F, 3H/10F, 4H/9F, 5H/8F, 6H/7F, 7H/6F
12 personnages : 2H/10F, 3H/9F, 4H/8F, 5H/7F, 6H/6F
11 personnages : 2H/9F, 3H/8F, 4H/7F, 5H/6F
10 personnages : 2H/8F, 3H/7F, 4H/6F, 5H/5F

À la boutique du couvent dont les ventes financent les bonnes œuvres des Sœurs, le célèbre Élixir de Sainte Marie-Jeanne aux nombreuses vertus ne fait plus recette. Jusqu’au jour où une Sœur a l’idée d’ajouter une herbe mystérieuse à la préparation. Le succès du nouveau cordial est stupéfiant. Le dernier miracle de Marie-Jeanne ?


Ce texte est offert gracieusement à la lecture. Avant toute exploitation publique, professionnelle ou amateur, vous devez obtenir l’autorisation de la SACD.


TÉLÉCHARGER GRATUITEMENT LE TEXTE EN PDF

 

Version pour 11 à 14 comédiens

Version pour 10 à 13 comédiens

 

 

 

 


ACHETER LE LIVRE FORMAT PAPIER

Cet ouvrage peut être commandé en impression à la demande sur le site The Book Edition, avec des réductions sur quantité (5% à partir de 4 exemplaires et 10% à partir de 12 exemplaires), livraison dans un délai d’une semaine environ.

 

 


mir

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Marie-Chantal – Alors… Comme vous pouvez le constater, notre gamme de produits est très variée. Nos articles phares restent cependant les cierges, à l’image de Sainte Marie-Jeanne, et notre célèbre élixir de jouvence, fabriqué comme vous le savez avec des herbes locales.

 

 

 

Jean-Bernard – D’un autre côté, la toxicité de cette liqueur n’est pas encore prouvée.

Marie-Chantal – Alors si ça peut leur faire du bien.

Miracle au Couvent de Sainte Marie-Jeanne Lire la suite »

Nos Pires Amis

How to get rid of your best friends –  Nuestros peores amigos – Os nossos piores amigos

Une comédie de Jean-Pierre Martinez

Pour 2 hommes et 2 femmes

Les amis, c’est parfois plus facile de s’en faire que de s’en défaire

Vincent et Juliette partent depuis toujours en vacances avec Patrick et Christelle. Mais ils aspirent maintenant à des relations plus haut de gamme susceptibles de servir leurs nouvelles ambitions professionnelles. Cherchant un prétexte pour se défaire de ces amis devenus encombrants, ils vont se prendre au piège de leurs propres mensonges. Il n’est pas si facile de se débarrasser de ses meilleurs amis…


Ce texte est offert gracieusement à la lecture. Avant toute exploitation publique, professionnelle ou amateur, vous devez obtenir l’autorisation de la SACD.


TÉLÉCHARGER
PDF GRATUIT
TÉLÉCHARGER
EBOOK GRATUIT

ACHETER LE LIVRE

jjj

Cet ouvrage peut être commandé en impression à la demande sur le site The Book Edition, avec des réductions sur quantité (5% à partir de 4 exemplaires et 10% à partir de 12 exemplaires), livraison dans un délai d’une semaine environ.


 

 

 

 

 

 

 

 

 

TEXTE INTÉGRAL DE LA PIÈCE

Nos Pires Amis

Les amis, c’est parfois plus facile de s’en faire que de s’en défaire

4 PERSONNAGES

Vincent

Juliette

Patrick

Christelle

Intérieur petit bourgeois moderne. Vincent achève de mettre en place une cave à vin électrique, avant de se plonger dans la lecture de la notice d’utilisation. Juliette arrive depuis l’extérieur et s’annonce avant d’entrer.

Juliette – C’est toi ?

Vincent – Oui.

Juliette – C’est moi !

Vincent – Dans ce cas, je pense que c’est bien nous…

Elle entre et pose un sac de courses dans un coin.

Vincent – Quelqu’un d’autre a les clés d’ici à part toi et moi ?

Elle ôte son imper, et dépose le courrier sur la table basse.

Juliette – On ne sait jamais. Ça pourrait être un voleur.

Vincent – Tu as raison… Ou même un terroriste… Bonsoir ma chérie.

Juliette – Bonsoir mon cœur.

Ils échangent un baiser rapide.

Vincent – Tu as passé une bonne journée ?

Juliette – J’ai travaillé sur mon nouveau scénario.

Vincent – Ah oui… Ça parle de quoi, déjà ?

Juliette aperçoit la cave à vin.

Juliette – C’est l’histoire d’une femme qui découvre que son mari est en réalité un extra-terrestre.

Vincent – Tiens donc… Et comment elle s’en aperçoit ?

Juliette – Elle se rend compte qu’il a bricolé le moteur de leur frigo et qu’il l’a transformé en module spatio-temporel pour tenter de regagner sa planète d’origine.

Vincent (la tête ailleurs) – Intéressant… Et ça se termine comment ?

Juliette – Je ne sais pas encore… Par un divorce, j’imagine…

Vincent – Super…

Juliette – Non, mais je te fais marcher, c’était pour vérifier que tu m’écoutais vraiment.

Vincent – Dommage, ça me plaisait bien, cette histoire…

Juliette – Je suis juste sortie faire quelques courses pour ce soir… Ils arrivent à quelle heure ?

Vincent (plongé dans sa notice) – Qui ?

Juliette – Les Envahisseurs ! Patrick et Christelle…

Vincent – Ah oui, c’est vrai… Patrick m’a appelé. Il passe prendre Christelle au salon et ils arrivent.

Juliette – Au salon ?

Vincent – Au salon de coiffure ! C’est nocturne ce soir, elle termine à 21 heures…

Juliette s’approche et regarde la cave à vin.

Juliette – Qu’est-ce que c’est que ça ? On a déjà un frigo, non ? Ne me dis pas qu’il est tombé en panne…

Vincent (fièrement) – Ce n’est pas un frigo, c’est une cave à vin.

Juliette – Une cave à vin ?

Vincent – C’est un peu comme un frigo. Mais c’est pour maintenir le vin à température constante.

Juliette – Pour…?

Vincent – Pour qu’il vieillisse dans de bonnes conditions…

Juliette – En général, nos bouteilles, on ne leur laisse pas tellement le temps de vieillir…

Vincent – …et pour que le vin soit à la bonne température quand on le boit.

Juliette – En même temps, on n’a pas de très grandes bouteilles, non plus…

Vincent – Raison de plus pour que le vin soit à la bonne température !

Juliette – Et ça t’a coûté combien, ce frigo à vin ?

Vincent – Pas très cher. C’est un client pour qui on bosse à l’agence…

Juliette – Combien ?

Vincent – Trois ou quatre cents euros, je ne sais plus.

Juliette – Trois cents ou quatre cents ?

Vincent – 399.

Juliette – Eh ben… Avec ça, on aurait pu s’acheter pas mal de bonnes bouteilles.

Vincent – Qu’on n’aurait pas pu boire à la bonne température…

Juliette – Ok, mais… On a déjà une cave, non ? Je veux dire une vraie cave. Au lieu d’y entasser nos vieux ordinateurs à température constante, on pourrait y stocker du vin.

Vincent – Ouais… J’y ai pensé.

Juliette – Ah oui quand même… Tu me rassures…

Vincent – Malheureusement, j’ai vérifié, la cave n’est pas à la bonne température.

Juliette – Sans blague ?

Vincent – Elle est un peu trop chaude. Ça doit être à cause de la chaudière.

Juliette – On n’a qu’à mettre la chaudière au milieu du salon ! Comme ça on pourra mettre le vin à la cave ! (Vincent lui lance un regard perplexe) Je plaisante.

Vincent – Et puis ce sera plus pratique d’avoir les bouteilles sous la main…

Juliette – Si tu le dis… (Elle regarde le courrier) Tiens, j’ai reçu mes résultats d’analyse…

Vincent (plongé dans le mode d’emploi) – Ah ouais…?

Juliette ouvre l’enveloppe et lit.

Juliette – Ouh la la, c’est compliqué… Alors… Normal, normal, normal… Ouf… Tous les résultats sont normaux.

Vincent (ailleurs) – Tant mieux…

Juliette – Aucune trace de cancer. Tu ne seras pas encore veuf tout de suite.

Vincent – La température…

Juliette – Non, je n’ai pas de température non plus, je te remercie…

Vincent – Je ne sais pas sur quelle température je dois la régler… Pour garder le vin, c’est plutôt 12 degrés… Mais pour le boire c’est plutôt 18…

Juliette – Bon, je vais mettre la table…

Vincent – Enfin, pour le vin rouge, parce que pour le blanc… C’est du blanc ou du rouge, qu’il amène, Patrick ?

Juliette – Tu n’as qu’à lui demander…

Vincent – Tu as raison, je lui envoie un SMS.

Il pianote sur son portable, et envoie le SMS. Le portable se met aussitôt à sonner.

Vincent – Eh ben, il est rapide… (Vincent prend l’appel) Ouais… (N’ayant pas l’air de savoir qui c’est) Stéphane…? (Se reprenant tout à coup, beaucoup plus concerné) Stéphane ! Non, non, bien sûr… C’est juste que j’attendais un autre appel de… Non, non, pas de problème… Bien sûr, on peut se tutoyer… Mais pas du tout, vous… Tu ne me déranges pas… On attend des amis, là, ils ne sont pas encore arrivés… Ouais… Ouais… Ah ouais… Ah ben oui, bien sûr… Ah ben non, au contraire… Ah ben si, tu penses bien… Ok… Ok… D’accord, on en parle lundi, Stéphane… Merci de me faire confiance, tu ne seras pas déçu, tu verras… Bonne soirée à toi, Stéphane…

Il raccroche, aux anges.

Vincent – C’était Stéphane…

Juliette – Stéphane…?

Vincent – Mon nouveau patron.

Juliette – Je ne savais pas qu’il s’appelait Stéphane.

Vincent – Je t’avoue que moi non plus. Quand il a racheté la boîte, il a commencé par virer dix personnes. Jusqu’à maintenant, pour moi, c’était Monsieur Zimmerman.

Juliette – Et maintenant vous vous tutoyez ?

Vincent – Attends, ce n’est pas fini… Il me confie le Web Marketing d’un nouveau client. Tiens, celui qui fabrique ces caves à vin, justement.

Juliette – Non ?

Vincent – Si tout se passe, bien, il m’a laissé entendre que je serai bientôt promu Responsable de Budget.

Juliette – Génial !

Vincent – Et en attendant, il me passe en CDI !

Juliette – Mais c’est merveilleux !

Ils s’enlacent.

Juliette – Je suis fière de toi, mon cœur.

Vincent – Merci…

Juliette prend un air plus sérieux.

Juliette – Écoute, je voulais attendre un peu avant de te l’annoncer, pour être vraiment sûre, mais moi aussi j’ai une grande nouvelle à t’annoncer.

Vincent – Tu n’es pas enceinte au moins ?

Juliette – Non, rassure-toi…

Vincent – Raconte !

Juliette – J’ai reçu un mail, tout à l’heure. Une maison de prod à qui j’avais envoyé mon premier scénario.

Vincent – Et alors ?

Juliette – Ils sont intéressés. Ils parlent de me signer une option !

Vincent – Une option ?

Juliette – Un précontrat, si tu préfères.

Vincent – Combien ?

Juliette – Comment ça, combien ?

Vincent – Le contrat, combien ?

Juliette – Non, mais pour l’instant, il n’y a pas d’argent. C’est juste une option, avec une clause d’exclusivité. Pour je n’aille pas proposer le sujet à quelqu’un d’autre, tu comprends ?

Vincent – Ah oui…

Juliette – Mais ça veut dire que le scénario les intéresse ! C’est un petit producteur indépendant. À Marseille. Évidemment, s’ils décident de tourner le film…

Vincent – Waou… Mais c’est super ! Moi bientôt Responsable de Budget, toi qui vends ton premier scénario…

Juliette – Tu as raison… Je ne sais pas pourquoi… mais je crois qu’on est sur une pente ascendante, là.

Vincent – Moi aussi… J’ai l’impression qu’on est en train de passer un cap.

Le portable de Vincent signale l’arrivée d’un SMS. Il jette un regard vers l’écran.

Vincent – Christelle… Ils amènent du rouge…

Juliette sort une bouteille de champagne de son sac.

Juliette – Et si tu réglais ta cave à vin sur champagne ! On pourrait fêter ta promo et la signature de mon premier contrat ?

Vincent – Avec Patrick et Christelle ?

Juliette – Tu as raison, il vaut mieux qu’on fête ça en amoureux…

Il prend la bouteille.

Vincent – De toutes façons, il n’est pas à la bonne température. On boira ça tous les deux quand on sera tranquilles. En attendant, je vais la mettre au frigo. Le champagne, c’est meilleur quand c’est bien frais.

Il sort avec la bouteille de champagne. Elle recommence à mettre la table.

Juliette – Et cette histoire de bateau, c’en est où ?

Vincent revient sans la bouteille.

Vincent – Ça y est, Patrick en a trouvé un. Une occase, sur le Bon Coin. Une affaire, apparemment…

Juliette – Comme la cave à vin… Combien ?

Vincent – Je ne sais pas encore exactement. Il nous dira ça tout à l’heure… Le seul problème, c’est que pour l’instant, il est à quai à Saint-Brieuc. Il va falloir qu’on trouve une remorque…

Juliette – Une remorque ?

Vincent – Pour l’amener jusqu’à Concarneau.

Juliette – Je pensais qu’un bateau… Pour aller de Saint-Brieuc à Concarneau…

Vincent – Attends, ça fait presque tout le tour de la Bretagne. Ce n’est qu’un petit voilier… Et nous, pour l’instant, on est des marins d’eau douce. Je ne suis pas encore prêt pour la Route du Rhum, moi…

Juliette soupire.

Juliette – Super… Une année de plus en Bretagne, alors… Avec Patrick et Christelle…

Un temps.

Vincent – C’est vrai que moi aussi, j’aimerais bien changer de temps en temps. Mais la Bretagne, ça a quand même certains avantages…

Juliette – Déjà, on ne se ruine pas en crème solaire…

Vincent – Sans compter qu’on n’a pas de location à payer.

Juliette – Ouais…

Vincent – Tu imagines combien ça nous coûterait si on devait louer une villa à Concarneau ?

Juliette – Bon, en même temps, ce n’est pas vraiment une villa… Moi j’appellerais plutôt ça un cabanon, pas toi ?

Vincent – C’était la maison de sa grand-mère…

Juliette – Oui… Et ils n’ont jamais fait de travaux depuis qu’ils en ont hérité…

Un temps.

Vincent – Concarneau… C’est quand même là où on s’est connus… Tu avais seize ans quand je t’ai rencontrée, avec Patrick, dans cette boîte, tu te souviens…

Juliette – En fait, je n’en avais que quinze. Mais le videur était le cousin de ma copine…

Il la prend un instant dans ses bras.

Vincent – Et c’est moi que tu as choisi…

Juliette – Oui… Tu y tiens vraiment, à ce voilier ?

Vincent – C’est surtout une idée de Patrick. Ça a l’air de lui faire tellement plaisir…

Juliette – Si c’est pour faire plaisir à Patrick, alors…

Vincent – Ils ne nous ont jamais rien demandé financièrement, pour la maison… C’est une façon de participer aux frais des vacances.

Juliette – Et moi, qu’est-ce que je ferai pendant que vous serez sur votre voilier ? Je parlerai chiffons avec Christelle ?

Vincent – Tu t’ennuies tellement, avec elle ?

Juliette – Ils sont très gentils, tous les deux, mais il faut bien reconnaître que…

Vincent – Ils sont un peu beaufs.

Juliette – On est presque des amis d’enfance, c’est vrai, mais qu’est-ce que tu veux ? On n’a pas évolué dans le même sens. À la longue, ça finit par se voir un peu… Lui maître nageur, elle coiffeuse… On a de moins en moins de choses à se dire… De quoi vous parlez, quand vous êtes tous les deux, avec Patrick ?

Vincent (embarrassé) – Ben…

Juliette – Moi si je veux discuter avec une coiffeuse, je vais chez le coiffeur. Personne ne part en vacances avec sa coiffeuse.

Vincent – Tu as raison, ces gens ne nous tirent pas vers le haut.

Juliette – C’est triste à dire, mais quand on est dans une montgolfière et qu’on veut s’envoler, il faut savoir lâcher du lest.

Vincent – Une montgolfière ?

Juliette – Un bateau, si tu préfères. Quand on veut passer un cap, et que le bateau est surchargé, il faut avoir le courage de sacrifier quelques poids morts pour continuer sa route et découvrir de nouveaux continents.

Vincent – C’est clair… Mais qu’est-ce que tu veux dire par là, exactement ?

Juliette – Les copains d’abord, c’est bien gentil. Mais quand on a l’impression que le bateau est en train de s’enfoncer, les copains, il faut savoir les jeter par dessus bord pour rester à flots. Et moi, Patrick et Christelle, et ben j’en ai jusque là, figure-toi.

Le portable de Christelle sonne et elle prend l’appel.

Juliette (très aimablement) – Oui, Christelle ? D’accord… Non, non, pas de problème, on vous attend… Ah oui ? On a hâte de savoir de quoi il s’agit… À tout à l’heure Christelle… (Elle repose son portable) Ils sont un peu en retard, mais ils arrivent. Et ils ont une bonne nouvelle à nous annoncer.

Vincent – Super…

Juliette – Une bonne nouvelle…

Vincent – À ton avis ? Qu’est-ce que c’est pour eux, une bonne nouvelle ?

Juliette – Ils ont dû changer la machine à laver en Bretagne.

Vincent – Ou installer des toilettes à l’intérieur de la maison.

Juliette – Là, il ne faut pas trop rêver quand même…

Ils restent un instant songeurs.

Vincent – Je t’ai dit que Stéphane avait une villa à Saint Rémy ?

Juliette – Saint Rémy les Chevreuse ?

Vincent – Saint Rémy de Provence ! Une résidence secondaire, si tu préfères. Avec piscine et tout…

Juliette – Non ?

Vincent – Juste à côté de celle de Michel Drucker. C’est très bobo, la Provence, tu sais. La côte d’Azur, c’est fini. C’est trop populo. L’été, ils sont tous là-bas. En Provence.

Juliette – Il t’a invité ?

Vincent – Pas directement… Mais il a dit devant moi que c’était l’endroit idéal pour se retrouver entre amis l’été. Maintenant qu’on se tutoie et qu’il m’appelle par mon prénom…

Juliette – Évidemment, si on n’est pas disponibles, il ne nous le proposera même pas…. Il sait qu’on passe tous les étés en Bretagne ?

Vincent – En tout cas, je ne m’en suis pas vanté…

Juliette – Saint Rémy de Provence… C’est sûr que ça fait plus rêver que Concarneau…

Vincent – Pour ton scénario, ce serait bien. Tout le showbiz est là-bas au mois d’août. Les gens de la télé, du cinéma…

Juliette – Ils ne sont pas à Concarneau, en tout cas, ça c’est sûr…

Un temps.

Vincent – Il n’y a pas un festival de films à Concarneau ? Le Festival de Concarneau, ça me dit quelque chose…

Juliette – Locarno. Le Festival de Locarno.

Vincent – Ah oui, c’est ça, tu as raison… Ça m’étonnait aussi…

Juliette – Locarno, c’est en Italie, sur le Lac Majeur. Tu penses bien que s’il y avait un festival à Concarneau, ce ne serait pas un festival de cinéma. Je ne sais pas moi. Le Festival de la Morue, peut-être… Ou du Bigorneau…

Vincent – Malheureusement, pour l’instant, à moins d’un miracle, ce sera encore la Bretagne…

Juliette – Et avec l’achat en commun de ce voilier, on en prend pour perpète.

Vincent – Ouais…

Juliette – On ne pourrait pas trouver un moyen de se défiler ?

Vincent – Ce sont des amis, quand même… Qu’est-ce qu’on pourrait bien leur dire ? On devait partir avec vous en Bretagne comme tous les ans, mais on a décidé que vous n’étiez pas assez bien pour nous ? Ils vont se vexer…

Juliette – Présenté comme ça, ils ne comprendraient pas, c’est sûr…

Vincent – Il faudrait trouver un moyen de se décommander… sans les froisser.

Juliette – Ouais, mais ça ne va pas être évident. Ça fait des années qu’on part en vacances ensemble. Et Patrick qui se lance dans l’achat d’un voilier avec toi… Une excuse bidon, ça ne va pas suffire.

Vincent – Il faudrait trouver un truc imparable… Le genre de choses qui coupe court à toute discussion…

Juliette – Bon, en attendant, je vais m’occuper de la cuisine pour ce petit dîner entre amis…

Vincent – Qu’est-ce que tu as fait de bon ?

Juliette – Moi rien, mais Picard nous a concocté… (Elle regarde sur le paquet) Tronçons de cabillaud gratinés avec un écrasé de pomme de terre…

Vincent – Ça l’air bon…

Juliette – C’est du poisson pané avec de la purée…

Elle sort. Vincent se replonge dans le mode d’emploi de sa cave à vin. La sonnette de la porte retentit. Il va ouvrir.

Vincent (off) – Salut Christelle ! Et ben alors ? Qu’est-ce que tu as fait de Patrick ?

Il revient avec Christelle, habillée de façon plutôt voyante et avec un certain mauvais goût. Elle porte un couffin et un sac.

Christelle – Il est en train de chercher une place. C’est de plus en plus difficile de se garer dans votre quartier. Comme on a la petite, je lui ai demandé de me déposer d’abord…

Vincent – Super… Mais tu ne m’avais pas dit que tu venais avec Sabrina…

Christelle – C’est la fille de la voisine qui devait la garder, mais elle a les oreillons…

Vincent – La fille de la voisine a les oreillons ?

Christelle – Non, Sabrina…

Vincent qui s’apprêtait à dispenser une caresse de bienvenue à l’enfant a un mouvement de recul.

Vincent – Les oreillons…?

Christelle – Enfin là, elle dort, heureusement… Je lui ai donné une cuillerée de sirop…

Vincent – Pour les oreillons…

Christelle – Pour la faire dormir ! Avec un peu de chance, elle nous foutra un peu la paix pendant le dîner. Depuis ce matin, elle n’arrête pas de pleurer…

Vincent – Bon… Tu peux la mettre dans la cave, si tu veux.

Christelle – La cave ?

Vincent – Je veux dire dans la chambre. Tu peux la mettre dans la chambre.

Christelle – Tu es sûr que ça va ?

Vincent – Et… ce n’est pas trop contagieux ?

Christelle – Un peu, si… Mais tu as déjà eu les oreillons, non ?

Vincent – Je ne sais pas…

Christelle – Je suis désolée, j’ai complètement oublié de te demander… Non parce que les oreillons, pour les hommes…

Vincent – Quoi ?

Christelle – Des fois ça peut provoquer des complications.

Vincent – Quels genres de complications ?

Christelle – Des problèmes de stérilité, par exemple.

Il affiche un air inquiet. Elle éclate d’un rire sonore.

Christelle – Non mais il n’y a pas de raison que tu chopes les oreillons… Tu les as sûrement déjà eu quand tu étais petit…

Vincent – Oui, sûrement…

Christelle – Je vais attendre un peu avant de la mettre dans la chambre… Je préfère être sûre qu’elle ne va pas se réveiller… Juliette n’est pas là ?

Elle retire son manteau qu’elle pose sur le canapé.

Vincent – Si… Si, si… Elle… Elle est dans la cuisine…

Christelle – Je te trouve bizarre depuis tout à l’heure… Il y a un problème ?

Vincent – Non… Non, non… Enfin…

Christelle – Quoi ?

Vincent hésite un moment avant de se lancer.

Vincent – Écoute, je ne voulais pas t’en parler mais… Juliette non plus, elle ne va pas très bien.

Christelle – Tu me fais peur… Ce n’est pas grave, au moins ? Ça ne va pas l’empêcher de partir en vacances avec nous ?

Vincent prend la lettre du laboratoire, sur la table basse.

Vincent – Elle vient d’apprendre qu’elle avait un cancer…

Christelle – Un cancer ? Oh, mon Dieu… Juliette, un cancer…

Vincent – Non, mais elle ne va pas mourir. Ce n’est pas un cancer grave.

Christelle – Pas grave ?

Vincent – Enfin si, mais…

Christelle – Elle est venue se faire coiffer au salon il y a à peine une semaine… Elle ne m’en a pas parlé du tout… Elle avait l’air en pleine forme…

Vincent – On a reçu les résultats du labo aujourd’hui.

Christelle – Oh merde… Mais c’est un cancer de quoi ?

Vincent – Je ne sais pas encore… Je veux dire, on ne sait pas encore exactement, mais… Du pied, je crois.

Christelle – Un cancer du pied ?

Vincent – Enfin, euh… C’est… une sorte de cor au pied, mais potentiellement cancéreux, si tu veux…

Christelle – Ah merde…

Vincent – Évidemment, ça remet en cause tous nos projets. Notamment nos projets de vacances…

Christelle – Je ne sais pas quoi dire…

Vincent – Surtout, tu ne lui en parles pas… À moins que ce soit elle qui décide de t’en parler la première…

Christelle – Bien sûr… Tu connais ma discrétion… Si je devais répéter tout ce que j’entends dans mon salon de coiffure, tu sais… Mais vous savez que vous pouvez compter sur nous tous les deux… Si vous avez besoin de quoi que ce soit…

Vincent – Merci.

Christelle – On est amis, non ? Si on ne peut pas compter sur ses amis quand on traverse ce genre d’épreuves…

Vincent – Oui, bien sûr… Mais on ne voudrait pas non plus…

Christelle – Et puis le cancer, au moins, ce n’est pas comme les oreillons, ce n’est pas contagieux.

Vincent – Je t’aide à amener tout ça dans la chambre ?

Vincent et Christelle sortent. Juliette revient pour apporter ce qu’il faut pour prendre l’apéritif. La sonnette de la porte retentit à nouveau. Elle sort un instant pour ouvrir.

Juliette – Ah ! Bonsoir Patrick.

Patrick – Salut ma poule. Tu as l’air surprise. C’était bien ce soir, non ?

Juliette – Mais oui, bien sûr, entre…

Elle revient avec Patrick, look plutôt beauf, une bouteille à la main.

Juliette – Christelle n’est pas avec toi ?

Patrick – Son manteau est là, ils doivent être dans la chambre en train de coucher la petite. Enfin, j’espère que c’est bien ça qu’ils sont en train de faire. Parce que je n’aime pas trop arriver chez un pote et le trouver dans sa chambre avec ma femme…

Il rit un peu bruyamment.

Juliette – Vous êtes venus avec le bébé ?

Patrick – Figure-toi qu’elle a la rougeole. Heureusement que tu n’es pas enceinte…

Juliette – Ah oui…

Patrick – Eh, tu nous l’aurais dit au moins, si tu étais enceinte ?

Juliette – Vous auriez été les premiers à le savoir…

Patrick – Non parce que la rougeole, pour les femmes enceintes, il paraît que… D’ailleurs, je crois que c’est plutôt les oreillons… Tiens j’ai apporté une bouteille de pif.

Il lui tend la bouteille. Elle la prend et jette un regard à l’étiquette.

Juliette – Côtes de Provence… Merci. C’est du rouge ou du blanc ?

Patrick – C’est du rosé. Tu peux le mettre au frigo, ça se boit bien frais.

Juliette – C’est Vincent qui va être content.

Patrick – Pourquoi ça ?

Juliette – Il t’expliquera… Au fait, je voulais te demander, pour le bateau…

Patrick – Vincent t’a dit ? Ça y est, je l’ai trouvé notre voilier !

Juliette – Oui, il m’a dit ça, mais…

Patrick – Tu sais comment il s’appelle ?

Juliette – Qui ?

Patrick – Le bateau ! Notre bateau ! Tu sais comment il s’appelle ?

Juliette – Non…

Patrick – Les Copains d’Abord ! Ce n’est pas un signe, ça ?

Juliette – Si, bien sûr, mais je voulais juste…

Patrick – Le problème, c’est qu’il faut que je trouve la remorque…

Juliette – Mais tu l’as déjà payé, ce bateau ?

Patrick – Je viens d’envoyer le chèque. Justement, c’est un peu pour ça qu’on vient aussi, parce que ce n’est quand même pas donné. Si j’avais pu, j’aurais avancé l’argent, tu penses bien, mais là… Si Vincent pouvait me faire un chèque de la moitié, je t’avoue que ça m’arrangerait…

Juliette – Et c’est justement ça qui va être compliqué…

Patrick – Comment ça, compliqué… J’en avais parlé avec lui et…

Juliette – Quand ?

Patrick – Pas plus tard qu’hier.

Juliette – Eh ben tu ne vas pas le croire mais… Vincent vient d’apprendre aujourd’hui qu’il était licencié…

Patrick – Licencié ? Ah merde…

Juliette – Il était en CDD et…

Patrick – Pourtant il m’avait dit que ça marchait très bien… et que son patron était très content de lui.

Juliette – Donc pour le bateau, évidemment, ça risque d’être un peu difficile…

Patrick – Non, mais attends, ce n’est pas le problème. Pour le bateau, on va s’arranger. Si je dois le payer tout seul… Et il me remboursera quand il pourra.

Juliette – Ce n’est pas seulement le bateau, malheureusement. C’est les vacances…

Patrick – Les vacances ?

Juliette – La Bretagne… Tu comprends… On ne va pas avoir les moyens de…

Patrick – Mais ça ne vous coûte rien ! On vous invite ! Et puis ce n’est pas parce qu’on est chômeur qu’on n’a pas le droit de prendre des vacances !

Juliette – Non mais… il faut que Vincent reste là, pour… Pour chercher un autre boulot, tu vois…

Patrick – Il en trouvera un après les vacances.

Juliette – Non, franchement… Je ne pense pas que ce soit une bonne idée… Il a tellement hâte de retrouver un job… Ce ne serait pas vraiment des vacances, pour lui, tu comprends… Et puis… Au cas où il y ait un contrôle de Pôle Emploi…

Patrick – Ah, oui c’est vrai… Pôle Emploi… Ah merde…

Vincent revient avec Christelle.

Vincent – Salut Patrick, ça va ?

Patrick – Ben oui, moi ça va… Et toi mon pauvre vieux ?

Vincent (un peu surpris) – Ça peut aller…

Ils se font la bise.

Christelle – Bonjour Juliette, comment ça va ? Enfin, je veux dire… Le boulot…

Juliette – Ça va, ça va…

Elles se font la bise.

Christelle – Tu as réussi à trouver une place ?

Patrick – Je me suis garé sur la place livraison de Pôle Emploi. Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de livraison un vendredi soir. Excuse-moi, Vincent, je ne dis pas ça pour toi…

Vincent (avisant la bouteille sur la table) – Ah, tu as apporté du vin ?

Patrick – Ben oui, tu m’as même envoyé un SMS pour savoir si c’était du rouge ou du blanc. C’est Christelle qui t’a répondu, moi je conduisais. En fait, c’est du rosé.

Vincent – Ah merde, du rosé…

Patrick – Vous n’aimez pas le rosé ?

Christelle – Enfin Patrick, tout le monde aime le rosé !

Patrick – Non, c’est juste que… Je ne sais pas trop à quelle température ça se boit…

Juliette – Vincent a acheté une cave à vin…

Patrick aperçoit l’engin.

Patrick – Ah oui, tiens, une cave à vin, dis donc… Merde…

Juliette – Mais dans le salon, ça va nous encombrer, non ? Et si on mettait ça dans la cave ?

Vincent – Dans la cave ?

Juliette – C’est une cave à vin, non ?

Vincent – Oui, remarque pourquoi pas…

Juliette – Le rosé, je vais le mettre dans le frigo.

Patrick – Le rosé, c’est meilleur quand c’est frais… Tu veux un coup de main pour transporter ça ?

Vincent – Ok… Mais je vais d’abord voir où je peux la mettre…

Patrick – Je viens avec toi… Alors comment ça marche, cette cave à vin ?

Vincent – Écoute, je suis encore en phase de rodage, là, mais…

Ils sortent.

Christelle – Je suis vraiment désolée pour ce qui vous arrive…

Juliette – Ce qui nous arrive ?

Christelle – Vincent m’a dit pour la mauvaise nouvelle…

Juliette – Ah oui…

Christelle – Je lui avais promis d’attendre que tu m’en parles, mais bon… On est amies, non ?

Juliette – Oui.

Christelle – À quoi ça sert d’avoir des amis si on ne peut pas compter sur eux dans des moments pareils ?

Juliette – Bien sûr.

Christelle lui prend les mains.

Christelle – Et puis tu vas t’en sortir, hein ?

Juliette – Moi ?

Christelle – J’ai plusieurs clientes au salon qui sont passées par là… En général, les femmes n’aiment pas beaucoup parler de ça. Mais tu sais, un salon de coiffure, c’est un peu comme un confessionnal.

Juliette – Ah oui…?

Christelle – Alors dis-moi, parce que Vincent n’a pas été très clair. C’est quel type de…

Juliette – De…?

Christelle – Ça te gêne d’en parler, je comprends… Mais je suis sûre que ça te ferait du bien de te confier à une amie…

Vincent et Patrick reviennent. Elles s’interrompent.

Vincent – Non mais on va la laisser ici pour l’instant. Il faut que je fasse un peu de rangement dans la cave d’abord…

Patrick – Mais qu’est-ce qui se passe ici ? Vous en faites une tête ? On dirait que quelqu’un est mort…

Christelle (à Vincent) – Tu ne lui as pas dit ?

Patrick – Si, Christelle m’en a parlé, mais bon… Ce n’est pas si grave que ça, quand même. Il n’y a pas mort d’homme…

Christelle – Comment ça pas grave ? Évidemment, ils vont s’en sortir. Maintenant, on a fait beaucoup de progrès, mais bon… De là à dire que ce n’est pas grave…

Patrick – Moi j’ai confiance dans mon Vincent. Il a toujours su rebondir. Il va retrouver du boulot.

Christelle – Du boulot ? Vincent ?

Juliette (à Vincent) – Excuse-moi, mais j’ai préféré leur dire, pour ton licenciement…

Vincent – Ah oui…

Christelle – Ah parce que… En plus de ça, Vincent a perdu son boulot ?

Patrick – En plus de quoi ?

Patrick et Juliette échangent un regard perplexe.

Christelle (à Vincent) – Je suis désolée, j’avais promis de ne pas en parler…

Patrick – Parler de quoi ?

Christelle – Juliette a un cancer.

Juliette lance un regard effaré à Vincent. Christelle se met à pleurer. Patrick la console. Vincent et Juliette semblent très emmerdés.

Patrick – Ah merde… Ah non… Un cancer ? Dites-moi que ce n’est pas vrai…

Vincent – Non, mais ne vous inquiétez pas. Tout va bien se passer. C’est juste que pour les vacances…

Patrick – Mais c’est un cancer de quoi ?

Juliette – C’est… un cancer de… Un cancer du pancréas.

Christelle – Vincent m’avait dit que c’était un cancer du pied… Ne me dis pas que c’est déjà en train de se généraliser…

Juliette – On est en train de faire des examens complémentaires….

Vincent – Il paraît qu’en médecine chinoise, le pancréas et le pied, c’est très lié.

Christelle – Écoute, au salon, je coiffe la femme d’un grand spécialiste du cancer. Le Professeur Bismuth. Normalement, pour avoir un rendez-vous avec lui, c’est plus compliqué que d’avoir un rendez-vous chez le coiffeur, crois-moi. Mais Marie-Agnès, sa femme, m’a dit que si j’avais besoin, un jour, elle mettrait mon dossier sur le dessus de la pile. Je vais lui en parler…

Juliette – Non mais ce n’est peut-être pas la peine de la déranger, tu sais…

Christelle – Attends, tu plaisantes ? Mais enfin Juliette ! on est amis, oui ou non ?

Juliette – Si bien sûr, mais…

Christelle – Ce type-là, à l’hôpital, on le considère comme un Dieu. Il paraît qu’il fait des miracles…

Patrick – Et puis pour ton boulot, Vincent… Je vais y penser… Tu sais à la piscine, je vois passer pas mal de monde, moi aussi.

Vincent – Je ne sais pas si… En tout cas, merci…

Patrick – En attendant, pas question de vous laisser abattre. On va tous en Bretagne cet été.

Christelle – L’air marin, ça vous fera du bien à tous les deux.

Patrick – Et pour le bateau, ne t’inquiète pas. On va s’arranger… En ce moment, ce n’est pas très facile pour nous non plus, mais bon… Je peux toujours prendre un petit crédit en plus.

Vincent – Je ne sais pas quoi te dire…

Patrick – Attends, tu sais comment il s’appelle le bateau ?

Vincent – Non ?

Patrick – Dis-lui, toi, Christelle.

Christelle – Amis pour la Vie.

Patrick – En fait, c’est les Copains d’Abord, mais bon… Alors tu vois, bien… Vous n’êtes pas tout seuls !

Christelle – Je crois que le bébé s’est réveillé… Tu peux m’aider, Patrick ? Je suis tellement chamboulée, je ne sais pas si je vais réussir à m’en sortir…

Patrick et Christelle sortent.

Juliette – Un cancer du pied ? Tu n’as pas trouvé mieux ?

Vincent – J’ai improvisé… C’est la première chose qui m’est passé par la tête…

Juliette – Ça fait toujours plaisir…

Vincent – Remarque, le coup de mon licenciement, ce n’est pas mal non plus…

Juliette – Tu trouves ?

Vincent – On peut toujours guérir d’un cancer, mais moi ? Qu’est-ce que je vais leur dire après les vacances ? Qu’ils m’ont réembauché ?

Juliette – C’est clair qu’on aurait mieux fait de se concerter un peu avant. L’improvisation, ce n’est jamais très bon…

Vincent – C’est sûr… Maintenant, je ne sais pas trop comment on va s’en sortir…

Juliette – Tu as raison, iIs ne vont jamais nous lâcher. C’est vrai qu’ils sont très gentils, mais bon… Ils sont surtout très collants…

Vincent – Des vrais sparadraps… Tu crois en être débarrassé, et tu te rends compte qu’ils te collent encore aux basques…

Juliette – Ils ne sont pas Bretons pour rien…

Vincent – Il faudrait trouver autre chose. Taper plus fort.

Juliette – Tu me fais peur…

Patrick et Christelle reviennent.

Christelle – On l’a changée, elle vient juste de se rendormir.

Patrick – Avec un peu de chance, on va pouvoir passer une bonne soirée. Enfin je veux dire… Compte tenu des circonstances.

Le portable de Patrick sonne et il prend l’appel.

Patrick – Ouais ? Ah oui, salut Marco. Ouais, ouais, ouais… Super ! Eh ben merci, je te revaudrai ça, mon pote. Ok, je suis avec Vincent là justement. D’accord, je te rappelle. (Il range son portable) C’était mon pote Marco. Son beauf peut nous prêter sa remorque pour transporter le bateau. Tu as une boule, toi ?

Vincent – Une boule ?

Patrick – Sur ta bagnole ! Pour accrocher la remorque…

Vincent – Ah oui… Enfin, non…

Patrick – Ce n’est pas grave. J’en mettrai une sur la mienne. Alors ça y est, mon ami ! On l’a notre voilier !

Christelle – Je crois que ces vacances en Bretagne vont nous faire le plus grand bien à tous.

Le portable de Vincent sonne et il prend l’appel.

Vincent – Ah Stéphane… Non, non, pas du tout… (Aux autres) Excusez-moi une minute…

Il sort.

Juliette – C’est Stéphane, son patron.

Patrick – Son patron ? Celui qui l’a foutu à la porte ?

Juliette – Eh oui…

Christelle – Et il continue à l’appeler Stéphane ?

Patrick – Il a toujours été trop gentil, Vincent, c’est ça son problème, et il y en a qui abusent…

Christelle – Trop bon, trop con.

Juliette – Ils sont en train de négocier les conditions de départ…

Patrick – Je croyais qu’il était en CDD. Il ne doit pas y avoir grand chose à négocier, non ?

Juliette – Je ne sais pas…

Christelle – Non mais dans quel monde on vit, je te jure… Vivement les vacances…

Juliette – Écoutez, pour les vacances, ça va vraiment être compliqué.

Christelle – Il ne faut pas vous laisser abattre, Juliette. Crois-moi, avec ce qui vous arrive, ça vous fera du bien à tous les deux.

Juliette – Justement, c’est… C’est de partir tous les deux… C’est ça qui ne va pas être possible…

Patrick – Et pourquoi ça ?

Juliette – Eh bien parce que… on va divorcer.

Christelle – Quoi ?

Patrick – Ce n’est pas possible…

Christelle – Dis-moi que ce n’est pas vrai…

Patrick – Pas vous…

Christelle – Pas maintenant. Avec ce que vous êtes en train de traverser tous les deux en ce moment.

Patrick – Vous devriez vous serrer les coudes, au contraire !

Juliette – En fait, c’est… C’est un truc auquel on pensait déjà depuis un certain temps. Je veux dire… Bien avant d’apprendre cette avalanche de mauvaises nouvelles. Et là on s’est dit que vraiment… Ce mariage… Ça ne nous portait pas chance, quoi…

Cette fois c’est Patrick qui se met à pleurer. Christelle le console. Vincent revient.

Vincent – Qu’est-ce qui se passe ?

Juliette – Je viens de leur dire… Pour notre divorce…

Vincent – Ah oui… Tu as bien fait…

Vincent paraît cependant un peu estomaqué.

Patrick – Je suis vraiment désolé, ce n’est pas mon genre de chialer comme ça devant tout le monde. Mais pour nous, vous étiez un modèle. Vincent et Juliette, c’était… Je ne sais pas, moi…

Christelle – Vincent et Juliette.

Patrick – Voilà. Quand on avait dit Vincent et Juliette, et ben…

Christelle – Il n’y avait plus rien à ajouter.

Patrick – C’était Vincent et Juliette, quoi.

Christelle – Et vous avez bien réfléchi ?

Vincent – On va laisser passer l’été. Prendre le temps d’y penser, chacun de son côté.

Juliette – Séparément.

Vincent – Alors vous comprenez bien que pour les vacances…

Juliette – On ne peut pas les passer ensemble en Bretagne.

Christelle – Je comprends, bien sûr….

Patrick – En tout cas, pas question qu’on choisisse entre vous deux, hein Christelle ?

Christelle – Évidemment.

Patrick – Vous restez tous les deux des amis. Et vous serez toujours les bienvenus chez nous.

Christelle – Et pour la Bretagne, et ben… Vous n’aurez qu’à venir à tour de rôle !

Patrick – Ah ben oui, tiens… Comme ça on pourra quand même profiter du bateau !

Christelle – Et puis comme ça, ça vous fait partir moins longtemps chacun… Avec les problèmes que vous avez…

Patrick – Vincent pourrait prendre la première quinzaine du mois d’août, et Juliette la deuxième…

Juliette – C’est gentil, mais je ne sais pas si… Qu’est-ce que tu en dis, toi, Vincent ?

Vincent – Je ne sais pas quoi dire…

Christelle – Eh ben ne dites rien…

Patrick – Mais quand même, ça m’en fout un coup…

Christelle – Oui, moi aussi.

Patrick et Christelle se mettent à pleurer tous les deux en même temps. Vincent et Juliette sont totalement démunis.

Christelle – Dire qu’on était témoins tous les deux à votre mariage, et que maintenant…

Juliette – Je vais aller m’occuper un peu de la cuisine. On ne va pas se laisser abattre, non plus… Vincent, tu leur sers un apéritif ?

Juliette sort.

Christelle – Écoute, Vincent, je t’ai toujours soutenu, mais là… Tu ne peux pas lui faire ça ! Pas avec ce qu’elle est en train de traverser en ce moment.

Vincent – Écoute, c’est elle qui…

Christelle – D’accord, Juliette n’a pas toujours été… exemplaire. Mais elle t’aime, et c’est ça qui compte.

Vincent – Comment ça, pas exemplaire ?

Christelle – Non, je veux dire… Tout le monde a ses défauts. Elle aussi. Mais souviens-toi, quand tu t’es fait opérer des amygdales ? Elle allait te voir tous les jours à l’hôpital…

Vincent – C’était les hémorroïdes…

Patrick – Oui, et ben elle, ce qu’elle a, c’est beaucoup plus grave que les hémorroïdes, crois-moi.

Christelle – Ok, la médecine a fait des progrès, mais on ne sait jamais.

Patrick – Aussi bien, dans trois ou six mois, tu seras veuf. Alors pourquoi se précipiter.

Christelle lance un regard interloqué à Patrick.

Christelle – Je ne l’aurais pas formulé comme ça, mais je pense aussi que ce divorce… Ce n’est vraiment pas la priorité, non ?

Juliette revient.

Juliette – Ce sera prêt dans cinq minutes. Vincent, tu veux bien t’occuper du vin. Je vais leur servir à boire, puisque tu ne l’as pas fait…

Vincent sort.

Patrick – Écoute, Christelle, je crois que vous êtes en train de faire la plus grosse connerie de votre vie.

Juliette – Tu crois ?

Patrick – Ok, Vincent a pu faire un petit accroc de temps en temps au contrat de mariage…

Juliette – Ah bon ? Tu sais quelque chose ?

Patrick – Pas spécialement… Mais c’est un homme, pas vrai ? Moi aussi, à la piscine, parfois… J’ai des tentations…

Christelle – Ah oui ?

Patrick – Quoi qu’il en soit, Vincent t’adore, c’est évident.

Juliette – Je sais mais…

Christelle – Mais quoi ?

Juliette – J’ai rencontré quelqu’un, voilà !

Christelle – Toi ? Tu as rencontré quelqu’un ?

Juliette – Quoi ? C’est si incroyable que ça ?

Christelle – Non, pas du tout, mais…

Juliette – Vincent ne voulait pas d’enfant. Et moi et bien… Je n’ai plus vingt ans, non plus.

Patrick – Comment ça, pas d’enfant ? En tout cas, Vincent ne m’a jamais dit à moi qu’il ne voulait pas d’enfant. Mais tu sais comment sont les hommes. Moi non plus, si Christelle n’avait pas un peu insisté.

Christelle – Un peu insisté ?

Patrick – Je veux seulement dire que d’avoir des mômes, ce n’est pas un besoin aussi impérieux pour nous. Mais une fois qu’ils sont là, on les adore, évidemment.

On entend des pleurs de bébé.

Christelle – Je suis contente d’apprendre que je t’ai forcé la main… Tu ne veux pas aller porter plainte pour viol, aussi ?

Patrick – J’essaie seulement d’arranger les choses, Christelle ! Je ne sais pas, moi… Peut-être que Vincent pensait que ce n’était pas le bon moment… Et entre nous, il n’avait peut-être pas tout à fait tort…

Christelle – À cause du cancer de Juliette ? Pas le bon moment ? Mais c’est monstrueux, ce que tu dis !

Patrick – À cause du licenciement de Vincent ! Mais je suis sûr qu’au fond de lui, il veut des enfants avec toi.

Juliette – Je t’assure que non, Patrick… D’ailleurs, ce n’est pas seulement qu’il ne veut pas… Il ne peut pas…

Christelle – Tu veux dire que… Vincent ne peut pas avoir d’enfants ?

Juliette – Non, bien sûr, mais… Il ne peut pas en avoir avec moi…

Patrick – Et pourquoi ça ?

Juliette – Parce que… Parce qu’il vient de m’avouer qu’il est homosexuel.

Blanc.

Christelle – Non…?

Vincent revient avec un tablier de style plutôt féminin autour de la table.

Vincent – On va peut-être passer directement à table, non ?

Christelle – Tu veux que je t’aide ?

Vincent – Mais non, restez assis. Juliette va m’aider…

Vincent et Juliette sortent.

Christelle – Ah oui, je comprends mieux, maintenant…

Patrick – Ah bon ?

Christelle – Pour le divorce. Je comprends que Juliette ait eu envie d’aller voir ailleurs…

Patrick – Ah oui…

Christelle – Franchement, j’ai l’impression de les découvrir, ce soir, tous les deux… Alors que ça fait des années qu’on se connaît…

Patrick – C’est incroyable… On croit connaître les gens, et puis…

Christelle – Et toi tu n’avais rien remarqué ?

Patrick – Remarqué quoi ?

Christelle – Qu’il était homo !

Patrick – Comment voulais-tu que je remarque un truc pareil ?

Christelle – Je ne sais pas… Vous passez beaucoup de temps ensemble tous les deux… Surtout pendant les vacances…

Patrick – Et alors ?

Christelle – Quand vous partez pendant des heures au large. En pédalo…

Patrick – Non mais ça ne va pas, non ?

Christelle – C’est vrai que je lui ai toujours trouvé un petit côté efféminé, mais bon…

Patrick – Efféminé ? Moi je n’avais rien remarqué. Mais maintenant que je le sais, c’est vrai que partir tout seul faire de la voile avec lui…

Christelle – Maintenant que tu sais qu’il est voile et vapeur…

Patrick – Ah les pauvres… Tu te rends compte ?

Christelle – Un licenciement, un cancer, un divorce. Et maintenant un coming out…

Patrick – La loi des séries… Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille…

Christelle – Je me demande si le fait d’apprendre que Vincent est homo, ça ne me perturbe pas encore plus que le cancer de Juliette.

Patrick – Eh oui… Quand on a un cancer, on arrive encore à guérir parfois. Mais quand on est homo…

Patrick fait tomber une pile de papier.

Patrick – Tiens, voilà ses résultats d’analyses, justement…

Christelle – Fais voir.

Patrick – Quand même…

Christelle – Si je dois en parler à la femme du Professeur Bismuth…

Patrick – Tu as raison.

Patrick lui tend le papier et elle le parcourt rapidement.

Christelle – Je ne comprends pas.

Patrick – C’est normal, le jargon des médecins, on n’y comprend jamais rien. C’est à croire qu’ils le font exprès.

Christelle – Non, je veux dire…

Patrick – C’est si grave que ça ?

Christelle – Ils disent que tout est normal !

Patrick – Normal ?

Christelle – C’est écrit là noir sur blanc ! Elle n’a rien du tout !

Patrick – Ce n’est pas possible… Fais voir…

Christelle – Tiens regarde !

Elle lui tend la feuille qu’il parcourt rapidement.

Patrick – Mais enfin… Qu’est-ce que ça veut dire ?

Le téléphone fixe sonne. Au bout de deux sonneries, on entend le message laissé par le correspondant.

Stéphane – Oui, c’est Stéphane, dis donc, pour rédiger ton CDI, il me faudrait quelques renseignements complémentaires. Rappelle-moi quand tu peux… Et pour Saint Rémy, c’est dommage, mais bon. Comme tu m’as dit que tu passais le mois d’août en Bretagne… Ce sera pour l’année prochaine, peut-être…

Patrick et Christelle échangent un regard atterré.

Patrick – Ils se sont bien foutus de nous… Mais pourquoi ? On n’est pas le premier avril, non ?

Christelle – Pourquoi ? Je ne sais pas… Il faut croire qu’on n’est pas assez bien pour eux…

Patrick – Quoi ?

Christelle – Ils veulent se débarrasser de nous, voilà ! Ils ne veulent plus partir avec nous en vacances, ils n’ont pas le courage de nous le dire en face, et c’est tout ce qu’ils ont trouvé.

Patrick – Non ? Ce n’est pas possible… Et le bateau ?

Christelle – Ils s’en foutent, de ton bateau ! Tu ne comprends pas ?

Un temps.

Patrick – Si, je commence à comprendre… Ça m’a pris un peu de temps… Mais je crois que là, ça commence à remonter jusqu’au cerveau…

Christelle – C’est vraiment minable… Le cancer, le licenciement, le divorce, tout ça c’était du baratin.

Patrick – Alors Vincent n’est pas homo non plus ?

Christelle – Ils nous ont menés en bateau, je te dis.

Patrick – Eh ben tu vois, je suis très déçu…

Vincent et Juliette reviennent avec un plat et autres victuailles qu’ils posent sur la table.

Juliette – Et voilà… On va pouvoir passer à table…

Ils prennent place en silence. Le malaise est palpable.

Vincent – Il ne faut pas que ça vous coupe l’appétit, non plus.

Vincent remplit les verres.

Vincent – Allez, santé ! Enfin, je veux dire…

Ils boivent.

Juliette – Il n’est pas mauvais…

Vincent – Oui, il est exactement à la bonne température.

Juliette – Ça va ? Vous ne dites rien…

Patrick – C’est… C’est qu’on est encore sous le choc…

Christelle – Oui, on est vraiment désolés, Vincent. Si on avait su…

Vincent – Pour… mon licenciement, tu veux dire.

Christelle – Oui, aussi, mais surtout…

Patrick – Si on avait su que tu étais homo.

Vincent (accusant le coup) – Ah oui…

Christelle – Juliette nous a tout raconté.

Patrick – Je sais, je ne suis pas le dernier à faire des plaisanteries douteuses là dessus. Mais tu sais bien que dans mon fondement… Je veux au fond de moi-même… Enfin… Je ne suis pas comme ça, quoi…

Vincent – Tu veux dire… Tu n’es pas homo…

Patrick – Je ne suis pas homophobe !

Vincent lance un regard perplexe à Juliette.

Vincent – Bien sûr…

Christelle – Quoi qu’il en soit… Homo ou pas, tu resteras toujours notre ami, Vincent.

Patrick – Parce que nous, on ne juge pas nos amis sur des détails comme ça, hein Christelle ? Pour nous, ce qui importe, en amitié, c’est la fidélité, tu vois…

Juliette – Bien sûr…

Christelle – De savoir qu’on peut compter sur ses amis en cas de problème, c’est ça qui est important.

Patrick – Le reste… Et puis entre amis, on doit pouvoir tout se dire, pas vrai ? On n’a pas besoin de se mentir…

Vincent – C’est sûr.

Christelle – Alors nous, on t’accepte comme tu es, Vincent.

Patrick – Et si tu veux continuer à partager avec moi de bons moments sur ce voilier, comme on le faisait avant sur notre pédalo… Enfin, je veux dire… Et bien moi je suis partant.

Vincent – Merci, je… Je suis vraiment très touché… Mais je ne sais pas si…

Juliette – Mais mangez, je vous en prie ! Ça va refroidir…

Ils commencent à manger en silence.

Juliette – Et c’était quoi, votre surprise, à vous ?

Christelle – Quelle surprise ?

Juliette – Tu m’avais parlé d’une surprise au téléphone…

Patrick – Ah, oui, ça…

Christelle – Oh, maintenant, ça n’a plus beaucoup d’importance.

Patrick – On leur dit quand même ?

Christelle – C’est toi qui vois…

Patrick – On a presque honte de vous le dire. Avec ce qui vous arrive…

Christelle le regarde, étonnée.

Juliette – Dites toujours.

Patrick – Christelle avait comme cliente une vieille dame au salon.

Christelle – Elle venait se faire coiffer tous les samedis matin à l’ouverture.

Patrick – Quelqu’un de très seule. Pas de famille. Juste un caniche…

Christelle – Madeleine.

Vincent – Tu parles d’un nom, pour un caniche…

Patrick – Non, c’est la dame qui s’appelait Madeleine.

Juliette – Bien sûr…

Christelle – Je m’en occupais bien de Madeleine. Elle voulait toujours que ce soit moi qui la coiffe. Je lui faisais la conversation. J’écoutais ses petites histoires. Je lui racontais les miennes. Elle m’aimait beaucoup. Elle avait toujours dit qu’elle ne m’oublierait pas quand elle mourrait. Je pensais que c’était des mots.

Patrick – Ou qu’elle nous laisserait une bricole, un bijou, quelques centaines d’euros…

Christelle – Elle est décédée il y a un mois. Sans héritier. Son notaire nous a appelés hier.

Patrick – Elle a désigné Christelle comme légataire universelle.

Christelle lance un regard étonné à Patrick, mais ne laisse rien paraître aux deux autres de sa surprise.

Juliette – C’est incroyable, cette histoire !

Vincent – Combien ?

Christelle – On ne sait pas encore exactement, mais le notaire a parlé d’une villa à Monaco. Avec piscine, et tout.

Patrick – On a un peu l’impression d’avoir gagné au loto… Tu te rends compte, pour un maître nageur, hériter d’une piscine ?

Vincent – Eh oui, c’est… C’est comme… un mineur qui hériterait d’une mine. Je veux dire une mine d’or, bien sûr…

Juliette – C’est dingue ! Mais vous n’avez pas l’air contents ? Moi, je ne sais pas… Si un truc comme ça m’arrivait…

Christelle – Maintenant qu’on sait le malheur qui vous frappe… Ça gâche un peu la fête…

Patrick – Et puis on préfère ne pas s’emballer trop vite… On attend d’avoir tous les détails.

Christelle – Non mais vous nous imaginez milliardaires ? Nous ?

Patrick – Patrick et Christelle, propriétaires d’une villa à Monaco !

Christelle – À Monaco, vous vous rendez compte ? Non seulement on serait riches, mais on ne paierait plus d’impôts.

Patrick – Non, il doit y avoir une couille quelque part.

Vincent – Comment ça une couille ?

Patrick – Des fois, il y a des successions…

Vincent – Quoi ?

Patrick – Parfois il y a des dettes, aussi… Tu crois devenir riche, et résultat, tu te retrouves avec un tas de créanciers au cul.

Christelle – Il faut bien réfléchir avant d’accepter ce genre de trucs.

Juliette – Rassurez-moi… Vous n’avez pas refusé, au moins ?

Christelle – On a demandé l’état exact de la succession.

Patrick – Sous bénéfice d’inventaire, ils appellent ça. Le notaire doit nous rappeler.

Christelle – Mais quand même, si jamais c’était vraiment vrai… Quel dommage que vous ne puissiez pas en profiter avec nous…

Juliette – Et oui…

Vincent – Mais vous ne mangez rien ! Allez-y !

Christelle – C’est très bon, mais toutes ces émotions… Ça nous a coupé l’appétit, tu vois…

Patrick – Vous permettez qu’on aille fumer une cigarette sur le balcon ?

Juliette – Non mais vous pouvez fumer ici.

Christelle – On ne va pas en plus te faire respirer notre fumée cancérigène…

Patrick et Christelle sortent. Embarras de Vincent et Juliette.

Juliette – C’est incroyable, cette histoire d’héritage…

Vincent – Ouais… Que ça leur arrive à eux…

Juliette – Patrick et Christelle.

Vincent – Ouais… J’ai un peu de mal à les imaginer tous les deux dans une villa à Monaco.

Juliette – C’est un peu comme ces gens qui gagnent au loto, et qui deviennent milliardaires du jour au lendemain. Quand on est pas préparés…

Vincent – C’est curieux, moi si ça m’arrivait… Je me sens tout à fait capable de faire face.

Juliette – Oui, moi aussi…

Vincent – Comme quoi le hasard fait bien mal les choses…

Silence.

Juliette – Remarque, c’est vrai qu’ils sont très gentils…

Vincent – Tu as vu leur réaction quand on leur a annoncé que tu avais un cancer et que j’étais licencié ?

Juliette – Sans parler de notre divorce…

Vincent – Et de mon homosexualité… Tu vois, moi qui pensais que Patrick était un horrible homophobe… Eh ben non, il était prêt à m’accepter comme je suis.

Juliette – Attends, je te rappelle que tu n’es pas vraiment homo, non ? Ou c’est moi qui ai raté un épisode.

Patrick et Christelle reviennent, le sourire aux lèvres.

Patrick – En fait on n’a pas fait que fumer…

Vincent – Ah non ?

Christelle – On en a profité pour passer quelques coups de fils, et on a de bonnes nouvelles à vous annoncer.

Juliette – Ah oui ?

Christelle – Ça y est, tu as rendez-vous avec le Professeur Bismuth la semaine prochaine. Jeudi à 10 heures.

Juliette – Je ne sais pas quoi te dire…

Patrick – Moi j’ai téléphoné à mon directeur à la piscine.

Vincent – À la piscine ?

Patrick – Si vraiment on hérite de la vieille, je ferai maître nageur seulement pour mes amis dans ma propre piscine, à Monaco.

Christelle – Adieu la Bretagne !

Patrick – Donc si ça t’intéresse de me remplacer.

Vincent – Te remplacer ?

Patrick – Ils vont forcément avoir besoin d’un autre maître nageur à la piscine.

Vincent – Mais je ne sais pas si…

Patrick – Maître nageur, ce n’est pas la mer à boire. Tu sais nager ?

Vincent – Oui…

Patrick – Et ben c’est bon ! T’es embauché !

Vincent – Je ne sais pas quoi dire…

Christelle – Eh ben ne dites rien !

Patrick – On est amis, non ?

Christelle – Si on était dans votre situation, vous feriez la même chose pour nous, pas vrai ?

Vincent – Si bien sûr…

On entend le bébé pleurer.

Christelle – Excusez-moi un instant.

Patrick – Je t’accompagne.

Patrick et Christelle sortent. Vincent et Juliette échangent un regard embarrassé.

Vincent – Je me demande si tous ces mensonges, c’était une si bonne idée que ça…

Juliette – Oui, je ne sais pas comment on va s’en sortir.

Silence.

Vincent – Tout ce qu’ils font pour nous… Je commence à culpabiliser…

Juliette – C’est vrai que… Je n’aurais pas imaginé ça d’eux…

Vincent – Des amis comme ça, on n’est pas prêts d’en retrouver.

Juliette – Tu veux dire… des amis avec une villa à Monaco…

Vincent – Aussi, oui…

Silence.

Christelle – Tu crois qu’on peut encore rattraper le coup ?

Vincent – Ça ne va pas être évident.

Christelle – Ouais…

Vincent – Il faudrait juste que d’ici à la fin de la soirée, tu guérisses de ton cancer, que je retrouve du boulot, qu’on se redécide à vivre ensemble…

Juliette – Et que tu changes d’orientation sexuelle.

Patrick et Christelle reviennent, hilare.

Patrick – Ça y est, cette fois c’est sûr !

Vincent – Pour mon poste de maître nageur, tu veux dire !

Patrick – Le notaire vient de nous appeler. Tout est clean. Pas un centime de dettes à la banque.

Christelle – C’est même tout le contraire… Les comptes de Madeleine sont pleins à craquer ! Ça déborde de partout !

Patrick – Et tu sais quoi ? On hérite aussi d’un yacht qui mouille actuellement dans le port de Monaco !

Christelle – Crois-moi Juliette, quand j’ai entendu ça. Il n’y a pas que le yacht qui mouillait…

Patrick – Adieu le petit rafiot du bon coin… Et celui-là, crois-moi, on n’aura pas besoin de remorque pour le transporter. Il est livré avec tout l’équipage !

Vincent – Non…

Patrick – Et tu sais comment il s’appelle ?

Vincent – Les Copains d’Abord ?

Patrick – Non, celui-là, il s’appelle Les Copains d’Avant…

Juliette – Mais c’est génial…

Vincent – Oui, on est vraiment contents pour vous.

Les sourires de Patrick et Christelle se figent soudain.

Patrick – Pardon… Sous le coup de la joie… On avait oublié un instant le malheur qui vous frappe…

Christelle – Quel dommage que vous ne puissiez pas profiter de tout ça avec nous…

Vincent – Eh oui…

Patrick – Avec votre divorce.

Juliette – Eh non…

Vincent et Juliette échangent un regard, puis c’est Vincent qui se lance.

Vincent – Non mais en fait, nous aussi on a bien réfléchi à ce que vous nous avez dit tout à l’heure.

Juliette – Il faut bien écouter les conseils des amis, non ?

Vincent – C’est vous qui avez raison. On ne divorce plus.

Patrick – Comment ça ? Je croyais que tu étais homo…

Vincent – Ça non plus, je ne suis plus très sûr…

Patrick – Ah bon…

Christelle – Mais alors du coup… Vous seriez disponibles cet été ? Ah non, je suis bête, évidemment… Avec ton cancer du pied…

Patrick – C’était pas le foie, plutôt ?

Juliette – Le pancréas.

Christelle – C’est ça, le pancréas. Ce n’est pas le meilleur, il paraît…

Vincent – Parfois, on en guérit.

Christelle – Ok, le Professeur Bismuth fait des miracles, mais il faut être réaliste, quand même.

Patrick – On ne voudrait pas vous donner de faux espoirs, non plus.

Christelle – Non, pour les vacances à Monaco, on va plutôt demander à François et Catherine, hein Patrick ?

Juliette – Ou alors on attend un peu pour voir s’il n’y aurait pas une erreur de diagnostic… On ne sait jamais…

Patrick – Eh ben… C’est fou, ça… On dirait que maintenant, ils regrettent de ne pas pouvoir partir en vacances avec leurs vieux amis, hein Christelle ?

Christelle – Peut-être parce que maintenant, on est milliardaires et qu’on a une villa à Monaco ?

Patrick – C’est sûr que c’est autre chose que de partir avec deux beaufs dans leur bicoque à Concarneau…

Vincent et Juliette échangent un regard paniqué.

Vincent – Non mais pas du tout…

Juliette – C’est juste que…

Christelle – Ne vous fatiguez pas, on sait pour ton soi-disant cancer et toi ton licenciement…

Patrick – C’est juste sur le fait de savoir si Vincent n’est pas vraiment un enculé qu’on n’est pas encore sûr.

Vincent – Enfin, je vous jure que…

Juliette – Mais pas du tout, enfin… C’est un épouvantable malentendu…

Christelle – On est tombés par hasard sur tes résultats médicaux.

Patrick – Et ton patron vient de laisser un message à propos de ton CDI… Il faudra que tu le rappelles, d’ailleurs…

Christelle – Vous vous êtes bien foutus de nous, hein ?

Patrick – Alors on n’est pas assez bien pour vous, c’est ça ?

Christelle – Enfin ça, c’était avant. Avant qu’on touche le gros lot !

Vincent – On est vraiment désolés…

Christelle – Allez viens, mon Patrick, on s’en va.

Juliette – Non mais vous n’allez pas partir comme ça !

Patrick – Tu vas chercher la petite ?

Christelle s’apprête à sortir.

Vincent – Ok… Ok, c’est vrai, on a déconné.

Juliette – On n’en pouvait plus, de la Bretagne. Ça peut se comprendre…

Vincent – Vous êtes nés là-bas, vous, mais nous, on n’est pas bretons !

Vincent – Quand on rentre à la fin du mois d’août, on est tellement blancs que les gens pensent qu’on prend nos vacances en septembre.

Juliette – Au début, on cherchait juste un prétexte pour se décommander.

Vincent – Sans vous vexer, parce que vous êtes de vrais amis.

Juliette – Après, les choses se sont enchaînées…

Vincent – Et c’est vrai que ça a un peu dérapé.

Juliette – Ça doit être cette histoire de bateau. On a eu peur de s’engager pour des années.

Vincent – Je n’osais pas vous le dire, mais personnellement, rien que d’y penser, ça me donne envie de vomir.

Patrick – Merci…

Vincent – Mais non, ce que je veux dire, c’est que… En bateau, j’ai le mal de mer, voilà.

Patrick (ironique) – Et tu crois que sur un yacht de trente mètres tu aurais moins le mal de mer, c’est ça ?

Juliette – Mais on s’en fout de ce yacht, je vous assure !

Vincent – Ce qu’on ne veut pas, c’est vous perdre comme amis, vous comprenez ?

Juliette – Et puis un yacht, ça doit beaucoup moins bouger qu’un petit voilier, non ? Je veux dire, pour le mal de mer…

Christelle – On est très déçus… Je pensais qu’on était de vrais amis. Des amis pour la vie.

Patrick – Les copains d’abord… Tu parles…

Christelle – Est-ce qu’on n’a pas toujours été là pour vous, nous, quand vous aviez des problèmes…

Juliette – Si bien sûr mais…

Un temps.

Vincent – Nous aussi.

Patrick – Quoi ?

Juliette – C’est vrai, nous aussi on vous a toujours soutenus.

Vincent – Tiens, quand ça n’allait pas si fort dans votre couple, par exemple.

Juliette – Quand Christelle a eu envie d’aller voir ailleurs avec son collègue du salon de coiffure. Avant de se rende compte qu’il était homo lui aussi.

Vincent – Pourquoi lui aussi ?

Patrick – C’est quoi, cette histoire ?

Christelle – Merci, Juliette, tu es vraiment une bonne copine.

Patrick – Non mais c’est quoi, cette histoire ?

Christelle – Ne t’inquiète pas, je t’expliquerai… Tu ne vois pas qu’ils espèrent s’en sortir en essayant de foutre la merde dans notre couple…

Juliette – Je suis désolée… Je ne voulais vraiment pas…

Christelle – Toujours là pour nous aider, mon cul… Vous étiez surtout là pour passer des vacances gratuites en Bretagne, oui.

Patrick – Pourquoi ils seraient allés voir ailleurs ? On ne vous a jamais demandé de participer aux frais d’entretien de la maison, pas vrai ?

Juliette – Pour les courses, on faisait quand même moitié moitié…

Christelle – Et maintenant, tout d’un coup, ils se rendent compte qu’on bronze très peu en Bretagne.

Patrick – On leur a peut-être proposé mieux ailleurs, va savoir…

Christelle – À Saint Rémy lès Chevreuse…

Patrick – C’est Saint Rémy de Provence, plutôt.

Juliette – Non, mais pas du tout.

Patrick – Ou alors c’est quand je t’ai demandé de payer la moitié du bateau que tu as changé d’avis…

Vincent – Je t’assure que non, c’est juste que…

Patrick – Allez viens Christelle, il vaut mieux qu’on s’en aille… Sinon je risque de lui foutre mon poing sur la gueule, à cet enculé.

Vincent – Je t’en prie… Évitons au moins les dérapages homophobes.

Juliette – Asseyez-vous, je vous en supplie. On ne va pas se quitter comme ça, sur un malentendu. Tiens, j’avais justement mis une bouteille de champagne au frais, spécialement pour vous…

Juliette s’empresse d’aller chercher le champagne.

Vincent – On ne va pas le laisser perdre, ce champagne… Allez ! En souvenir de tous les bons moments qu’on a passés ensemble. Après, si vous voulez, vous partirez.

Patrick et Christelle se rasseyent à contrecœur. Juliette revient avec la bouteille. Vincent sort des flûtes. Silence. Il ouvre la bouteille et remplit les verres.

Patrick – Ok, on va le boire votre mousseux. Mais ça ne nous empêchera pas de vous dire ce qu’on pense de vous ?

Christelle – C’est vrai, pour qui vous vous prenez ?

Patrick – Vous vous croyez vraiment supérieurs à nous ?

Christelle – Parce que vous avez… une cave à vin ?

Patrick (ironique) – Une cave à vin…

Vincent – Oui, bon, ça va…

Christelle – Parce que Vincent travaille dans l’informatique ?

Vincent – Le web marketing

Patrick – Et que Juliette se prend pour un écrivain ?

Juliette – Écrire, c’est toute ma vie, vous comprenez… Et pour réussir dans ce business, il faut rencontrer du monde… C’est pour ça que j’ai eu envie de… Enfin… De changer un peu d’atmosphère…

Christelle – De changer d’atmosphère… Parce que nous, on t’empêche de respirer, peut-être ?

Juliette – Excusez-moi, ce n’est pas ce que j’ai voulu dire…

Vincent – Pour moi aussi, mon métier, c’est important. J’ai de l’ambition, je l’avoue… Et c’est vrai que… ça m’a peut-être fait oublier un instant où étaient les vraies valeurs… Comme l’amitié… Hein, Juliette ?

Patrick – Tu as toujours été jaloux de moi, c’est ça la vérité.

Vincent – Moi, jaloux de toi ? Il ne faut pas exagérer, non plus… Pourquoi j’aurais été jaloux de toi ? Je veux dire avant que vous ne touchiez cet héritage ?

Patrick – Ah oui, c’est vrai… Comment est-ce que… le grand Vincent, à qui on vient juste de proposer un CDI dans sa boîte de marketing téléphonique, pourrait bien être jaloux d’un simple maître nageur ?

Vincent – C’est du web marketing, en fait… Mais bon, c’est vrai, pourquoi je serais jaloux de toi ?

Patrick – Je ne sais pas moi… Parce que je suis sorti avec ta femme avant toi ?

Vincent – Quoi ?

Juliette baisse la tête, mais ne dément pas.

Patrick – Tu n’étais pas au courant ?

Christelle – Moi non plus…

Juliette – Non, mais c’était juste une histoire d’un soir.

Vincent – Quel soir ?

Juliette – Dans cette fameuse boîte où on est sortis ensemble pour la première fois.

Vincent – On s’était rencontrés l’après-midi même. C’est moi qui t’avais donné rendez-vous là-bas !

Juliette – Oui, bon… Patrick est arrivé le premier. Je n’avais pas encore de lentilles de contact à cette époque-là. Je n’avais pas mis mes lunettes et…

Vincent – Et alors ?

Juliette – Il faisait noir, dans cette boîte. Vous vous ressembliez un peu. Je l’ai pris pour toi…

Vincent – Tu trouves qu’on se ressemble ?

Juliette – À l’époque, vous vous ressembliez. Et puis je n’avais pas mes lunettes, je te dis… J’étais déjà un peu bourrée. Mais dès que tu es arrivé, je me suis rendu compte de mon erreur…

Vincent – Merci… Ça me touche beaucoup.

Juliette – C’est quand même avec toi que je me suis mariée, non ?

Vincent – Oui… J’espère que tu avais mis tes lentilles le jour où tu m’as dit oui…

Christelle – Alors comme ça, tu es sortie avec Juliette ?

Patrick – Je ne te connaissais pas encore !

Juliette – C’est juste un quiprocu, je t’assure. Je veux dire un quiproquo…

Vincent – Je connaissais les femmes qui trompent leur mec, mais celles qui se trompent de mec…

Juliette – Non mais attends, c’était avant que je sorte avec toi !

Vincent – C’était le même soir… Tu es sortie avec deux mecs dans la même soirée !

Juliette – Mais je croyais que c’était toi ! Le mec que j’avais rencontré l’après-midi même, dont j’étais tombé tout de suite amoureuse. Évidemment, quand Patrick s’est mis à me parler, après, je me suis vite rendu compte que lui, il n’était pas bac plus cinq.

Christelle – Après ? Après quoi ?

Juliette – C’est seulement en sortant de sa voiture, quand je t’ai aperçu sur le parking, que j’ai compris mon erreur…

Vincent – En sortant de sa voiture ? Ah d’accord… Et dire que moi, j’ai dû attendre un mois avant que tu m’accordes tes faveurs…

Juliette – Non mais vas-y, traite-moi de salope, aussi !

Juliette se met à pleurer.

Patrick – Excuse-moi, je ne voulais pas…

Christelle – Il vaudrait peut-être mieux qu’on s’en aille…

Juliette – Finissez au moins votre poison… Je veux dire votre poisson…

Ils se remettent à table et mangent en silence.

Vincent – Tronçon de cabillaud gratinés et son écrasé de pommes de terre.

Juliette – C’est du poisson pané avec de la purée.

Christelle – En tout cas, c’est très bon.

Patrick – Et ça se marie très bien avec le champagne.

Vincent – Je vous ressers…

Ambiance glaciale. Vincent emplit à nouveau les flûtes, et lève la sienne.

Vincent – À votre nouvelle fortune ! Vous l’avez bien mérité…

Patrick – Mérité, il ne faut pas exagérer… C’est juste un héritage qui nous tombe dessus par miracle…

Juliette – Je ne crois pas aux miracles, c’est que vous avez dû faire quelque chose de bien pour le mériter. Cette vieille dame qui vous a couché sur son testament, elle a bien su voir que Christelle, c’était juste quelqu’un de bien, comme dit la chanson…

Silence.

Patrick – Ouais… Mais maintenant qu’on est milliardaires, comment on va savoir que vous êtes vraiment des amis, et pas seulement des pique-assiettes ?

Christelle – Je vais voir si tout va bien à côté…

Elle sort. Ils continuent à manger. Le portable de Patrick sonne. Il répond.

Patrick – Ouais…? Ouais… Ah, ouais… Non ? Ce n’est pas vrai ? D’accord… Merci de nous avoir appelés…

Christelle revient. Patrick range son portable.

Christelle – Elle dort… Qu’est-ce qui se passe ?

Patrick (effondré) – Il y a eu un glissement de terrain, à Concarneau.

Christelle – Et alors ?

Patrick – La maison… Elle a été engloutie par la mer.

Vincent – C’est une blague ?

Patrick – Non…

Christelle – Oh mon Dieu…

Patrick – Les vacances sont à l’eau…

Juliette – C’est le cas de le dire…

Elle rit nerveusement. Patrick et Christelle la fusillent du regard.

Vincent – Mais maintenant, avec cet héritage qui vous tombe dessus… Ça a moins d’importance, cette vieille bicoque à Concarneau, non ?

Patrick – Cette vieille bicoque ? C’est la maison de ma grand-mère…

Juliette – Non, mais enfin… Il n’y avait même pas les toilettes à l’intérieur de la maison… Maintenant que vous êtes propriétaires d’une villa avec piscine à Monaco…

Vincent – J’imagine que là-bas, il y a les wc à l’intérieur…

Patrick et Christelle semblent pourtant effondrés.

Christelle – À Monaco…

Patrick – Ne me dites pas que vous avez vraiment cru à une connerie pareille…

Juliette – Quoi ?

Patrick – Nous aussi on vous a mené en bateau !

Christelle – On n’est pas scénaristes, mais tu vois, nous aussi on sait inventer des histoires…

Vincent – Donc vous n’êtes plus milliardaires ? Enfin, je veux dire… Vous ne l’avez jamais été.

Christelle – Eh ben non, tu vois, on est restés des prolos…

Patrick – Et maintenant, en plus, on n’a nulle part où aller en vacances avec la petite cet été.

Juliette – Alors ta cliente, au salon, elle n’est pas morte ?

Christelle – Si…

Patrick – Et c’est vrai aussi qu’elle ne nous a pas oubliés sur son testament.

Christelle – Elle nous lègue son caniche…

Patrick – Rien qu’en toilettage, il doit coûter plus cher que sa défunte maîtresse en coiffeur.

Christelle – Et dire qu’on n’avait même pas encore fini de payer les travaux.

Juliette – Quels travaux ?

Christelle – Ah on ne vous a pas dit ? On a fait installer les toilettes à l’intérieur de la maison.

Patrick – Et maintenant tout ça a été engouffré dans l’océan. Comme si Dieu avait tiré la chasse…

Vincent – C’est vrai que c’était assez près de la mer, mais je n’aurais jamais pensé.

Patrick – Avec le réchauffement climatique…

Vincent – Mais vous êtes assurés, non ?

Christelle – On n’avait pas réglé la facture. Pour pouvoir payer le bateau…

On entend des pleurs de bébé.

Christelle – Je m’en occupe…

Patrick – Je vais t’aider.

Ils sortent.

Juliette – Au moins, ça règle définitivement le problème des vacances en Bretagne…

Vincent – Oui parce qu’avec ce marmot qui n’arrête pas de brailler, tu imagines les nuits qu’on aurait passées là-bas.

Juliette – Ça n’aurait pas été des vacances, c’est clair.

Vincent – Mais bon… Si seulement ce glissement de terrain était arrivé trois heures plus tôt, on se serait épargné tout ça…

Juliette – Non, mais on ne peut pas les laisser tomber…

Vincent – Tu crois ? Pourtant je t’avoue que cette idée m’avait traversé l’esprit un instant. (Elle lui lance un regard de reproche) Mais tu as raison, ce sont nos meilleurs amis…

Les deux autres reviennent.

Christelle – Elle s’est rendormie…

Patrick – Je ne sais pas comment on va faire…

Christelle – Pour commencer, on va faire une croix sur les vacances.

Patrick – Mais ça ne règle pas notre déficit à la banque. J’avais déjà fait un petit crédit pour payer ma part du bateau…

Vincent – Un crédit ? Non ?

Patrick – Tu penses bien que si j’avais eu de quoi le payer tout seul, je ne t’aurai jamais demandé de participer…

Juliette – Et pour le bateau, tu ne peux pas annuler ?

Patrick – J’ai déjà fait le chèque. Le type était pressé, il avait un autre client. Je lui ai juste demandé d’attendre quelques jours avant de l’encaisser. Le temps que Vincent me verse sa part.

Christelle – Vous vous rendez compte ? On se retrouve avec un bateau mais plus de maison en Bretagne pour en profiter !

Patrick – Je pourrai toujours faire du voilier tout seul sur la Seine. Parce que j’imagine que maintenant, toi, ça ne t’intéresse plus de me rembourser la moitié.

Vincent – Mais enfin Patrick, pour qui tu me prends ?

Patrick – Quoi ?

Vincent – On est amis, oui ou non ?

Patrick – Je t’avoue que je ne sais plus très bien…

Vincent – C’est combien, le bateau ?

Christelle – 6.000 euros.

Juliette – Ah oui, quand même…

Patrick – Ça faisait 3.000 euros chacun…

Vincent sort son chéquier et remplit un chèque.

Vincent – Tiens, voilà un chèque de 6.000 euros. Je te demande juste d’attendre lundi pour l’encaisser. Le temps que je puisse vider mon livret A pour créditer mon compte. Ce n’est presque plus rémunéré, le Livret A, de toute façon.

Patrick – Tu vas acheter tout seul un bateau sur lequel tu ne pourras jamais naviguer ?

Christelle – Mais pourquoi ?

Vincent – Comment il s’appelle, ce bateau ?

Patrick – Les Copains d’Abord…

Vincent – Eh ben alors !

Juliette – Et puis merde, on le fera naviguer quand même, ce voilier. Il y a bien des gîtes à louer pour pas trop cher du côté de Concarneau, non ?

Patrick – Un gîte ? Mais on n’aura jamais les moyens de payer notre part de la location !

Juliette – Ça fait des années que vous nous invitez dans votre… splendide villa avec vue sur la mer à Concarneau !

Patrick – Maintenant, c’est plutôt vue sous la mer, mais bon…

Juliette – Cette année, c’est nous qui vous invitons !

Christelle – Mais vous êtes fous ! Vous allez vous ruiner !

Vincent – Je vais commencer par revendre ma cave à vin… Tu as raison, ce n’est pas vraiment de l’ordre de l’indispensable…
Patrick – Non mais je te les rembourserai, ces trois mille euros. Même si je dois vendre un de mes reins.

Christelle – Ouais, enfin, avec tout le pastis que tu t’enfiles, je ne sais pas ce qu’ils peuvent encore valoir, tes rognons… Il faut voir les choses en face. On n’est pas vraiment sûr de pouvoir vous le rendre un jour, votre pognon…

Juliette – Ne t’inquiète pas. Les histoires d’argent, entre amis… Ce n’est pas ça qui compte vraiment, non ?

Patrick – Alors là, on ne sait pas quoi dire…

Vincent – Eh ben ne dis rien.

Les deux autres se marrent.

Vincent – Quoi ? Qu’est-ce que j’ai dit encore ?

Christelle – Non, mais attend, c’est une blague aussi.

Juliette – Quoi ?

Patrick – La maison de Concarneau ! Elle n’a rien !

Têtes abruties des deux autres.

Christelle – Vous avez l’air presque déçus ?

Vincent – Non, pas du tout, mais…

Juliette – Pourquoi nous avoir monté un baratin pareil ?

Patrick – C’est vous qui dites ça ?

Christelle – On voulait seulement vérifier si vous étiez de vrais amis ou pas.

Patrick – Et maintenant, on est fixés.

Patrick embrasse Vincent, et Christelle Juliette.

Christelle – Maintenant, on sait qu’on peut vraiment compter sur vous.

Patrick – Et si demain vous en avez marre de la Bretagne, vous nous le dites, tout simplement, d’accord ?

Christelle – Plutôt que d’aller vous inventer des cancers, des licenciements, des divorces…

Juliette – Non mais pas du tout !

Vincent – On part tous ensemble en Bretagne cet été, comme prévu !

Patrick – Et pour le bateau ?

Juliette – Il s’appelle comment, ce bateau, déjà ?

Christelle – Les Copains d’Abord.

Vincent – Alors on le garde, non ?

Pleurs de bébé.

Christelle – Bon, je crois qu’on ferait mieux d’y aller maintenant. On a tous eu assez d’émotions pour ce soir… Je vais chercher le bébé.

Elle va prendre le couffin.

Juliette – Mais alors c’était quoi, la surprise, en vrai ?

Patrick – Ah, oui, la surprise… Ça y est, on a décidé de la date du baptême, pour Sabrina.

Christelle revient avec le couffin.

Christelle – On pensait faire ça en Bretagne, cet été…

Juliette – Super…

Patrick – Et on avait pensé à vous pour être le parrain et la marraine…

Vincent – Non ?

Christelle – Vous êtes nos meilleurs amis, non ?

Patrick – C’est pour ça qu’on était aussi déçus…

Christelle – Alors ?

Vincent – Alors quoi ?

Patrick – Vous acceptez ?

Vincent – Mais bien sûr ! Hein Juliette ?

Juliette – Rien ne pouvait nous faire plus plaisir.

Patrick et Christelle écrasent une larme.

Christelle – Vous ne pouvez pas imaginer la joie que ça nous fait.

Patrick – Allez, il vaut mieux qu’on s’en aille maintenant, sinon on risquerait de se mettre à pleurer…

Le bébé se met à pleurer. Christelle prend le bébé dans le couffin et le met dans les bras de Vincent, plutôt embarrassé.

Christelle – Tu es son parrain, maintenant…

Vincent – Tu es sûr que ce n’est pas trop contagieux, quand même…

Ils sourient tous avec un air idiot. Christelle remet le bébé dans le couffin. Ils s’embrassent. Patrick et Christelle s’en vont. Vincent et Juliette restent seuls.

Juliette – Tiens on va finir le champagne…

Ils remplissent les flûtes et trinquent.

Vincent – La bonne nouvelle, c’est que je ne suis pas licencié, et que tu n’as pas de cancer.

Juliette – Et surtout que tu n’es pas homo et qu’on ne va pas divorcer…

Vincent – La mauvaise nouvelle c’est qu’on n’échappera pas au mois d’août à Concarneau avec ces deux abrutis.

Juliette – Et ce marmot qui n’arrête pas de brailler jour et nuit…

Vincent – Sans compter que maintenant, en plus, on est parrain et marraine…

Juliette – Oui, on fait presque partie de la famille…

Vincent – Autant dire qu’on n’est pas près de s’en débarrasser…

Juliette – Les amis, parfois, c’est plus facile de s’en faire que de s’en défaire…

Ils lèvent leurs verres pour trinquer une dernière fois.

Vincent – Bon ben alors…

Juliette – À l’amitié !

Ils boivent. Un temps.

Vincent – Il mériterait d’être un peu plus frais, non ?

Noir

 

 Scénariste pour la télévision et auteur de théâtre,

Jean-Pierre Martinez a écrit une cinquantaine de comédies

régulièrement montées en France et à l’étranger.

Toutes les pièces de Jean-Pierre Martinez

sont librement téléchargeables sur :

http://comediatheque.net

Ce texte est protégé par les lois relatives

au droit de propriété intellectuelle.

Toute contrefaçon est passible d’une condamnation

allant jusqu’à 300 000 euros et 3 ans de prison

Paris – Novembre 2015

© La Comédi@thèque – ISBN 979-10-90908-65-9

Ouvrage téléchargeable gratuitement

librairie théâtrale vente livres théâtre en ligne comédies contemporaines

librairie théâtrale vente livres théâtre en ligne comédies contemporaines

librairie théâtrale vente livres théâtre en ligne comédies contemporaines

Nos Pires Amis Lire la suite »

ΚΑΦΕΝΕΙΟΝ «ΤΟ ΤΕΡΜΑ»

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


ΚΑΦΕΝΕΙΟΝ «ΤΟ ΤΕΡΜΑ»

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


ΚΑΦΕΝΕΙΟΝ «ΤΟ ΤΕΡΜΑ»

Jean-Pierre Martinez

Μετάφραση/απόδοση   Χριστίνα Μανιά

17 πρόσωπα

Χαρίλαος : ιδιοκτήτης
Φρόσω:   η γυναίκα του
Ερασμία: η υπάλληλος
Ζήσης: νεκροθάφτης
Ευθύμης: νεκροθάφτης
Ζωή: η κόρη του θανούντος
Νεφέλη: εγγονή του θανόντος
Αιμίλιος: καθηγητής φιλοσοφίας
Ιωσήφ: υδραυλικός
Κίτσα: γυναίκα του θανούντος/ με ελαφριά άνοια
Γρηγόρης: ταχυδρόμος
Κωφάλλαλη ζητιάνα
Μαρία: Κοπέλα αλλοπαρμένη
Ιουλία: πελάτισσα στο καφέ
Σοφία: πελάτισσα στο καφέ
Αργύρης: πελάτης στο καφέ
Άννα: πελάτισσα και συνάδελφος του Αργύρη
Θανάσης: ο μακαρίτης

Βρισκόμαστε σε ένα καφέ-μπαρ με μία μεγάλη μπάρα στη μέση. Δεξιά αριστερά έχει τραπέζια. Πάνω από τη μπάρα ψηλά έχει μία ταμπέλα που γράφει ΚΑΦΕΝΕΙΟ «ΤΟ ΤΕΡΜΑ»

Ο Χαρίλαος είναι πίσω από την μπάρα και προσπαθεί να λύσει σταυρόλεξα. Η γυναίκα του η Φρόσω πηγαίνει συνεχώς από πάνω του και τον εκνευρίζει. Η Ερασμία η υπάλληλος σφουγγαρίζει ενώ η Μαρία η αλλοπαρμένη κοπέλα κάθεται σε ένα τραπέζι.

Η Φρόσω πάει πάνω από το κεφάλι του Χαρίλαου και διαβάζει δυνατά

Φρόσω: Θέλει το κοινό του….αρχίζει από Θ.

Ερασμία: Θέατρο.

Φρόσω: Αχ μπράβο… Γράψτο Χαρίλαε τι το κοιτάς;

Χαρίλαος: Δεν είναι θέατρο ( εκνευρισμένος)

Ερασμία ( πηγαίνει κι αυτή από πάνω του τώρα): Ε πως δεν είναι θέατρο; Είστε σίγουρος;

Χαρίλαος: Το θέατρο είναι έξι γράμματα εδώ θέλει πέντε. Θα με παρατήσετε τώρα;

Μπαίνει ο ταχυδρόμος.

Φρόσω: Είπαμε γράμματα και κατά φωνή. Τι καλά μας φέρνεις Γρηγόρη;

Γρηγόρης: Καλημέρα Φρόσω. Ούτε υπουργείο να ήσασταν βρε παιδί μου τόση αλληλογραφία. ( Της δίνει έναν πάκο με γράμματα)

Φρόσω: Υπουργείο … ( ειρωνικά) Ορίστε κι ο υπουργός από εκεί τρομάρα μας( δείχνει τον Χαρίλαο) ΔΕΗ, νερό, τηλέφωνο, έλεος πια όλα μαζί έρχονται… Ένα ουζάκι όπως πάντα;

Γρηγόρης: Ε όχι και ούζο πρωί πρωί. Πιάσε ένα τσίπουρο.

Φρόσω: Ορίστε.

Το πίνει μονοκοπανιά. Κι αυτή τον κοιτάζει έκπληκτη.

Γρηγόρης: Να σε ρωτήσω κάτι κάποια κυρία Καστρινού την ξέρεις;

Φρόσω: Καστρινού;

(βγάζει ένα συστημένο)

Γρηγόρης: Μάλιστα κυρία Καστρινού. Μένει στο 13. Στο διπλανό κτίριο.

Φρόσω: Α ναι..

Γρηγόρης: Δεν βρήκα όμως το όνομά της στο κουδούνι.

Φρόσω: Δεν μου κάνει εντύπωση…

Γρηγόρης: Σε ποιον όροφο μένει;

Φρόσω: Πριν έμενε στον έβδομο, τώρα πολύ πιο ψηλά…

Γρηγόρης: Δηλαδή σε ποιον όροφο;

Φρόσω: Σε κανέναν. Πέθανε πριν από δεκαπέντε μέρες.

Γρηγόρης: Όχι ρε γαμώτο… ( κοιτάζει τα χαρτιά του) δηλαδή κάτι σαν μετακόμιση…

Φρόσω: Θα μπορούσες να το πεις κι έτσι….Στη λεωφόρο Αναπαύσεως.

Γρηγόρης: Το λέω γιατί έχω ένα συστημένο για εκείνην…

Φρόσω: Α…μάλιστα…

Γρηγόρης: Τι να κάνω τώρα;

Φρόσω: Κι εγώ που να ξέρω;

Γρηγόρης: Μήπως έτυχε να σου αφήσει κάποια διεύθυνση;

Φρόσω: Αφού σου είπα πως πέθανε.

Γρηγόρης: Α..ναι…τι πρόβλημα κι αυτό τώρα…Και εμένα ποιος θα μου υπογράψει το συστημένο;

Φρόσω: Τι να σου πω…

Γρηγόρης: Άρα δεν θα ξανάρθει…

Φρόσω: Το βρίσκω λίγο απίθανο…

Γρηγόρης: Καθόλου δεν με εξυπηρετεί αυτό.

Φρόσω: Έτσι είναι Γρηγόρη μου σε όλες τις δουλειές, ξέρεις. Πάντα υπάρχουν κάποιοι σπαστικοί τύποι που το μόνο που θέλουν είναι να σου κάνουν τη ζωή δύσκολη.

Γρηγόρης: Τι να κάνω τώρα; Μήπως θα μπορούσες να υπογράψεις εσύ στη θέση της;

Φρόσω: Εγώ;

Γρηγόρης: Έλα καλέ, μία μικρή εξυπηρέτηση μεταξύ γειτόνων. Κι έτσι δεν θα χρειαστεί να ξανάρθω.

Φρόσω: Γιατί να ξανάρθεις;

Γρηγόρης: Για να της παραδώσω το συστημένο.

Φρόσω: Αφού σου λέω πέθανε. Καπούτ. Γιόκ. Τι δεν καταλαβαίνεις; Κι αν υπάρχει ένα τουλάχιστον πλεονέκτημα στο να είσαι μακαρίτης είναι ότι δεν λαμβάνεις πλέον καθόλου αλληλογραφία.

Γρηγόρης: Μάλιστα.

Φρόσω: Άσε ένα ειδοποιητήριο.

Γρηγόρης: Λες;

Φρόσω: Τι είναι τέλος πάντων αυτό το συστημένο; Ειδοποίηση από την εφορία; Από το ΊΚΑ από τράπεζα;

Γρηγόρης ( κοιτάζει τον φάκελο): Είναι από τον ΟΠΑΠ

Φρόσω: τον ΟΠΑΠ;

Γρηγόρης: Άρα θα είναι καλά νέα.

Φρόσω: Νομίζεις ότι εκεί που είναι, της κάνουν διαφορά τα κακά από τα καλά νέα;

Γρηγόρης: Ναι αλλά, ο ΟΠΑΠ….

Φρόσω: Για να δω… Πράγματι είναι από τον ΟΠΑΠ

Γρηγόρης: Έπαιζε λόττο;

Φρόσω: Δεν ξέρω… Την πετύχαινα που και που εδώ απ’ έξω… είχε κι ένα μικρό σκυλάκι…

Γρηγόρης: Και τι έπαθε;

Φρόσω: Τα κακάρωσε είπαμε

Γρηγόρης: Και το σκυλάκι;

Φρόσω: Όχι καλέ, αυτή.

Γρηγόρης: Και το σκυλί τι απέγινε;

Φρόσω: Που θες να ξέρω άνθρωπέ μου.

Γρηγόρης: Είναι θλιβερό αυτό. Ένα μικρό σκυλάκι να είναι τώρα ολομόναχο…Δεν καταλαβαίνω όλους αυτούς τους ανθρώπους που παίρνουν ένα ζώο και μετά το παρατάνε.

Φρόσω: Λες να έχει κερδίσει κάνα μεγάλο ποσό;

Γρηγόρης: Αν έχει κερδίσει δεν πρέπει να αργήσει να εμφανιστεί γιατί υπάρχει και μία προθεσμία ξέρεις. Αν κάποιος δεν πάει να πάρει την επιταγή του πριν να λήξει η προθεσμία τα χάνει όλα. Και το ποσό ξαναμπαίνει στο παιχνίδι…

Φρόσω: Πω τι κρίμα…

Γρηγόρης: Τι κάνουμε λοιπόν;

Φρόσω: Κάνουμε;

Γρηγόρης: Αφού είπες πως είναι κρίμα.

Φρόσω: Καλά με έπεισες θα υπογράψω.

Γρηγόρης: Κι έτσι δεν θα χρειαστεί να ξανάρθω.

Παίρνει τον φάκελο και τον ανοίγει.

Γρηγόρης: Λοιπόν;

Φρόσω: Είναι μία επιστολή απόλυσης.

Γρηγόρης: Δηλαδή δεν είναι επιταγή;

Φρόσω: Δούλευε στον ΟΠΑΠ. Της στέλνουν τη λήξη του συμβολαίου.

Γρηγόρης: Έλα ρε γαμώτο…Όχι μόνο δεν κέρδισε το λόττο αλλά έχασε και τη δουλειά της. Δεν είναι καθόλου αστείο. Άντε να βρεις δουλειά στις μέρες μας…

Φρόσω: Κυρίως αν είσαι πτώμα.

Γρηγόρης: Και βεβαίως δεν κερδίζουν ποτέ άνθρωποι σαν κι εμάς το λόττο ε; Άνθρωποι που έχουν πραγματικά ανάγκη.

Φρόσω: Όχι..

Γρηγόρης: Χθες διάβασα στην εφημερίδα ένα άρθρο για έναν τύπο που κέρδισε 8 εκατομμύρια στο λαχείο και λέει πως δεν έχει αλλάξει τίποτα στη ζωή του και ζει όπως πριν. Μα είναι δυνατόν;

Φρόσω: Τι να…

Γρηγόρης: Άκου λέει να μην αλλάξει τίποτα στη ζωή του. Είναι άδικο. Κάποιοι άνθρωποι δεν θα έπρεπε να κερδίζουν τίποτα και ποτέ.

Φρόσω: Έτσι όπως…

Γρηγόρης: Λοιπόν δεν έχω καιρό για κουβέντες, πρέπει να συνεχίσω τη γύρα μου.

Φρόσω: Κι αυτό τι να το κάνω;

Γρηγόρης: ( καθώς φεύγει πάλι σέρνοντας) Ότι θες. Αρκεί το ξεφορτώθηκα εγώ….

Μπαίνει ο Αιμίλιος καθηγητής φιλοσοφίας με μία τσάντα και βιβλία.

Χαρίλαος: Βρε καλώς τον κύριο Αιμίλιο.

Αιμίλιος: Χαίρετε…έναν καφέ παρακαλώ.

Χαρίλαος: Ένα τσιπουράκι αντ’ αυτού;

Αιμίλιος: Αντ’ αυτού ποιανού;

Χαρίλαος: ( με το μπουκάλι στο χέρι): Αντί του καφέ. Σας βλέπω λίγο νευρικό κύριε Αιμίλιε . Ο καφές δεν ενδείκνυται ενώ το τσιπουράκι βοηθάει να χαλαρώσεις .

Αιμίλιος: Όχι ευχαριστώ….Πρέπει να παραδώσω μάθημα σε λίγη ώρα.

Χαρίλαος: Και λοιπόν; Θα σας κάνουν αλκοτέστ οι μαθητές σας;

Αιμίλιος: Τώρα που το λέτε…. Γιατί όχι;

Ο Χαρίλαος σερβίρει τον Αιμίλιο και επι τη ευκαιρία βάζει και στον εαυτό του. Η Μαρία που κάθεται τόση ώρα σε ένα τραπέζι σηκώνεται να φύγει περνάει δίπλα από τον Αιμίλιο τον κοιτάζει χαμογελάει και πάει κοντά του.

Μαρία: Με θυμάσαι;

Αιμίλιος: Όχι

Μαρία: Έχουν περάσει κάποια χρόνια βέβαια αλλά ..

Αιμίλιος: τώρα που σας βλέπω καλύτερα ίσως…

Μαρία (παρεξηγημένη): Ίσως;

Αιμίλιος: Δηλαδή ναι, τώρα μου ήρθε. Τι κάνεις;

Μαρία: Μια χαρά εσύ; Τι κάνεις εδώ;

Αιμίλιος: Τίποτα το σπουδαίο.

Μαρία: Δηλαδή άλλαξα τόσο πολύ;

Αιμίλιος: Μα γιατί το λες αυτό;

Μαρία: Γιατί πριν από λίγο έδειξες πως δεν με γνώρισες.

Αιμίλιος: Σου ζητάω συγγνώμη απλώς δεν περίμενα να σε δω εδώ.

Μαρία: Πάντως εσύ δεν άλλαξες καθόλου.

Αιμίλιος ( κολακευμένος): Σε ευχαριστώ πολύ.

Μαρία: Λοιπόν πως πας;

Αιμίλιος: Τα ίδια και τα ίδια…

Μαρία: Πολυλογάς όπως πάντα…( γελάει) Είσαι καιρό εδώ;

Αιμίλιος: Μπα πριν από λίγο ήρθα.

Μαρία : Πρέπει να φύγω, αλλά χάρηκα πάρα πολύ που σε ξαναείδα.

Αιμίλιος: Κι εγώ πολύ.

Μαρία: Ελπίζω να τα ξαναπούμε.

Αιμίλιος: Να μη χαθούμε.

Μαρία: Να φιληθούμε όπως παλιά;

Αιμίλιος: Γιατί όχι;

Ορμάει και τον φιλάει στο στόμα σε ένα κινηματογραφικό φιλί. Αυτός μένει κόκκαλο.

Μαρία: Τα ξαναλέμε σύντομα Πέτρο μου.

Αιμίλιος στην αρχή χαμένος : Ναι τα λέμε…. ( αφού μείνει μόνος) Πέτρο;

Ο Χαρίλαος ξαναβάζει δύο τσίπουρα ένα σε αυτόν κι ένα στον Αιμίλιο. Δύο γυναίκες μπαίνουν

Ιουλία: Ένα ντεκαφεϊνέ με μία ζάχαρη όπως συνήθως.

Σοφία: Εγώ θα πάρω έναν καπουτσίνο και ξαναρχίζω από αύριο τη δίαιτά μου.

Ιουλία : Πότε την ξεκίνησες;

Σοφία: Χθες…( βλέπει κάτι άνδρες να περνάνε απ’ έξω κι αρχίζει να βάφεται.)

Χαρίλαος : ( διαβάζοντας εφημερίδα) Το γραφείο μετανάστευσης θα δώσει άδεια εργασίας σε έναν αριθμό νεαρών μεταναστών. Εδώ που τα λέμε οι μετανάστες είναι σα τα πιτμπουλ. Επειδή υπάρχουν κάποια σκατένια την πληρώνει όλη η ράτσα. ( Πίνει λίγο από το τσίπουρο ) Περίεργη γεύση έχει αυτό το τσίπουρο δεν βρίσκετε;

Αιμίλιος: Η αλήθεια είναι πως δεν είναι και πολύ δυνατό…

( Πάει να βάλει το μπουκάλι στο ράφι και βλέπει πως είναι σχεδόν άδειο)

Χαρίλαος: Δεν είναι δυνατόν! Μέχρι χθες ήταν σχεδόν γεμάτο. Δεν το ήπια εγώ όλο αυτό.

( Παίρνει έναν μαρκαδόρο και μαρκάρει πάνω στην ετικέτα τη στάθμη.)

Ιουλία: Πιστεύεις στο Θεό;

Σοφία: Ανάλογα τη μέρα. Αλλά βλέποντας αυτούς τους πυροσβέστες που κάθονται εδώ απ’έξω νομίζω ότι υπάρχει Θεός.

Ιουλία: ( ανήσυχη) Τι έχει αρπάξει πουθενά φωτιά;

Σοφία: Μόνο φωτιά; Φωτιά και λάβρα. Έξω κάθονται χριστιανή μου… Απέναντί μας. Καλά δεν τους είδες;

Ιουλία: Όχι δεν βλέπω τίποτα…

Σοφία: Είναι κάτι κούκλοι, με κάτι σώματα…Τι μανάρια είναι αυτά καλέ;

Ιουλία: Που το ξέρεις ότι είναι πυροσβέστες;

Σοφία: Καλά ολόκληρο πυροσβεστικό όχημα παρκαρισμένο δεν το βλέπεις;

Ιουλία: Νομίζω ότι πρέπει να πάρω καινούριους φακούς επαφής.

Σοφία: Θέλεις φακούς για να δεις ολόκληρο φορτηγό;

Ιουλία: Έχω την εντύπωση πως δεν βλέπω πολύ καλά αυτή τη στιγμή. Ακόμη κι εσένα σε βλέπω θολή.

Σοφία: Εγώ πάλι που βλέπω τζάμι, σου λέω ότι πραγματικά χάνεις.

Ιουλία: Όντως. Αυτή τη στιγμή έχω χάσει την όρασή μου.

Σοφία: Καλά είδες μαύρισμα; Μου φαίνονται όμως λίγο κουρασμένοι

Ιουλία: Κι εγώ κουράστηκα να βλέπω έτσι θολά.

Σοφία: Ίσως να έρχονται από κάποια αποστολή. ( με πομπώδες ύφος) Γενναίοι πολεμιστές, μέσα στην κάπνα έχοντας την αίσθηση της ολοκλήρωσης και του καθήκοντος. Βάζουν τη ζωή τους σε δεύτερη μοίρα.

Ιουλία: Λες να ξέχασα να τους βάλω;

Σοφία: Τους φαντάζομαι με τους τεράστιους πυροσβεστικούς σωλήνες τους να παλεύουν όλη νύχτα με τις φλόγες…

Ιουλία: Για να τσεκάρω μισό λεπτό ( βάζει το δάχτυλο μέσα στο μάτι της)

Σοφία: Ούτε μια ματιά δεν μας έχουν ρίξει. Είναι απίστευτο, λες και μόλις παντρευτούμε δεν μας βλέπουν και τόσο καλά και μετά από καμιά δυο εγκυμοσύνες γινόμαστε πλέον εντελώς αόρατες.

Ιουλία: Κι όμως…. ( ψάχνοντας ακόμη με το δάχτυλο)

Σοφία: Τι θλίψη! Φεύγουν…

Ιουλία: Δεν είναι δυνατόν

Σοφία: Μα ναι σου λέω, κοίτα εκεί.

Ιουλία: Έχω βάλει και τους δύο στο ίδιο μάτι.

Κοιτάζονται

Σοφία : Μα τι γίνεται αυτός ο καφές κόκκαλα έχει;

Χαρίλαος με τους καφέδες : Καλά δεν πήραμε και φωτιά….

Ο Αιμίλιος πίνει ακόμη ένα τσίπουρο και πνίγεται την ώρα που βλέπει να μπαίνουν μέσα ντυμένες στα μαύρα η Ζωή και η κόρη της η Νεφέλη. Η Νεφέλη κι ο Αιμίλιος κοιτάζονται με νόημα φευγαλέα. Η Ζωή δεν παίρνει χαμπάρι. Ο Αιμίλιος χώνεται πίσω από μια εφημερίδα. Οι δύο γυναίκες κάθονται

Ζωή: Τι φρίκη εδώ μέσα

Νεφέλη: Είναι κάπως πιο λαϊκό

Ζωή: Είναι εντελώς παρακμιακό

Νεφέλη: Είναι το μόνο καφενείο απέναντι από το νεκροταφείο, μην περιμένεις να σφύζει από ζωή.

Φρόσω: Τι θα πάρετε κυρίες μου;

Ζωή: Ένα τσάι με….( κοιτάζει αηδιασμένη γύρω της) ένα τσάι σκέτο.

Νεφέλη: Μία λεμονάδα.

Ζωή: Καφενείο το Τέρμα. Αυτό είναι όνομα για καφενείο απέναντι από γήπεδο όχι απέναντι από νεκροταφείο.

Νεφέλη: Ενώ αν το έλεγαν Καφενείο ο Μακαρίτης θα σου έκανε καλύτερα.

Ζωή: ( αναστενάζοντας) Δεν ήταν σκωληκοειδίτιδα τελικά…

Νεφέλη: Σκωληκοειδίτιδα στα 75 του! Να μπερδεύεις μία κίρρωση του ήπατος με σκωληκοειδίτιδα δεν σε κάνει και βασιλιά της διάγνωσης…

Ζωή: Την πρακτική του έκανε κι αυτός ο καημένος ο γιατρουδάκος. Τι να κάνει; Παίρνουν και τρεις κι εξήντα. Πάντως έτσι κι αλλιώς δεν υπήρχε σωτηρία Δεν μπορώ να πιστέψω πως ο παππούς σου πέθανε.

Νεφέλη: Να σου θυμίσω ότι πριν γίνει παππούς μού ήταν πατέρας σου.

Ζωή: Ναι αλλά η αλήθεια είναι πως πάντα δυσκολευόμουν τόσο πολύ να επικοινωνήσω μαζί του.

Νεφέλη: Τώρα λύθηκε το ζήτημα μια και καλή.

Ζωή: Έχω μία φίλη που έκανε 15 χρόνια ψυχανάλυση για να μπορέσει να βελτιώσει την επικοινωνία και τη σχέση διαλόγου με τον πατέρα της. Δεκαπέντε ολόκληρα χρόνια το φαντάζεσαι;

Νεφέλη: Και;

Ζωή: Στα 15 χρόνια ο πατέρας της πέθανε.

( Η Νεφέλη και ο Αιμίλιος ρίχνουν κλεφτές ματιές)

Νεφέλη: Η γιαγιά;

Ζωή: Εδώ ξέχναγε πως ήταν παντρεμένη, άντε να της εξηγήσουμε τώρα πως είναι χήρα….Δεν είναι και πολύ ευχάριστο όλο αυτό.

Νεφέλη: Ναι η αλήθεια είναι πως σπάνια βρίσκει κανείς ευχάριστη κηδεία.. Το ήξερες εσύ πως ο παππούς είχε κλείσει συμφωνία με γραφείο τελετών;

Ζωή: Όχι

Νεφέλη: Είναι κάπως. Δεν μπορώ να με φανταστώ να διαλέγω το φέρετρο από πεύκο ή οξιά ή δεν ξέρω τι άλλο και να επιλέγω το χρώμα της εσωτερικής επένδυσης Μπρρρρρρ ( ανατριχιάζει)

Ζωή: Παρόλα αυτά είναι πρακτικό. Δεν χρειάζεται τρέξουν οι άλλοι για τίποτα.

Νεφέλη : ( ειρωνικά) Κι ούτε να πληρώσουν τίποτα.

( Η Ζωή βγάζει ένα καθρεφτάκι και κοιτάζεται)

Ζωή: Παναγία μου! Αν με συναντούσα στον δρόμο δεν θα με αναγνώριζα! Πηγαίνω να βαφτώ λιγάκι γιατί σε λίγο θα νομίζουν όλοι πως εγώ είμαι το πτώμα…

Η Ζωή πηγαίνοντας προς την τουαλέτα πέφτει πάνω στον Αιμίλιο που προσπαθεί ανεπιτυχώς να κρυφτεί πίσω από ένα βιβλίο του Καντ.

Ζωή: Αιμίλιε; Η Ζωή είμαι! Θυμάσαι; Ήμασταν μαζί στο λύκειο.

Αιμίλιος: ( κάνει τον ενθουσιασμένο) Α Ζωή!

Ζωή: Τι γίνεσαι βρε παιδί;

Αιμίλιος: Παραμένω ακόμη στο λύκειο. ( τον κοιτάζει περίεργα) Ως καθηγητής εννοείται (χαζογελάνε) Κι εσύ;

Ζωή: Εγώ παντρεύτηκα… και μετά χώρισα…

Χαρίλαος πίσω από την μπάρα διαβάζοντας την εφημερίδα : Κάποιες φορές ένα καλό διαζύγιο είναι καλύτερο από έναν κακό γάμο…

( Τον κοιτάζει άγρια)

Ζωή: Γράφεις ακόμη θεατρικά;

Αιμίλιος: Τώρα γράφω κυρίως βιβλία.

Ζωή: Α θέλω οπωσδήποτε ένα με αφιέρωση.

Αιμίλιος ( αμήχανα) : Ναι γιατί όχι.

Ζωή: Κατά τα άλλα; Είσαι παντρεμένος; Έχεις παιδιά;

Αιμίλιος: Όχι είμαι μόνος.

Ζωή: Τι αστείο. Η κόρη μου θα πρέπει να έχει την ηλικία των μαθητών σου…Νάτη εδώ είναι!

Αιμίλιος: Η Νεφέλη! Κοίτα σύμπτωση. Είναι μαθήτριά μου. Δεν ήξερα ότι ήταν κόρη σου…

Ζωή: Έχει το επίθετο του πατέρα της. Εξάλλου είναι το μόνο που μας άφησε πριν την κάνει. Είσαι γυμναστής έτσι δεν είναι; Μου έχει πάρει τα αφτιά για τον γυμναστή τους.

Αιμίλιος ( τα χάνει) : Όχι…είμαι φιλόλογος και καθηγητής φιλοσοφίας…

Ζωή: Α μάλιστα. Η αλήθεια είναι πως έχεις πιο πολύ την κοψιά του φιλολόγου… Για πες δεν φαίνεται να υπάρχει μεγάλος έρωτας ανάμεσα στην κόρη μου και τους κλάσσικούς έ; Τι θα γίνει θα μπει στο πανεπιστήμιο φέτος; Τρία χρόνια το παλεύει. Αναρωτιέμαι μήπως έχει επιλέξει λάθος κατεύθυνση. Ήταν πάντα πιο πολύ των θετικών επιστημών. Και μεταξύ μας τώρα όλα αυτά τα θεωρητικά δεν οδηγούν και πουθενά.

Αιμίλιος: Να δηλαδή.

Ζωή: Εγώ πάντως να δεν καταφέρει τίποτα ούτε φέτος θα τη γράψω σε μία ιδιωτική σχολή να κάνει business. Έχω βρει μία πολύ καλή. Είναι ακριβή αλλά τι να κάνουμε. Εξάλλου πλέον στο πανεπιστήμιο μπαίνει κι η κουτσή Μαρία.

Νεφέλη: Μαμά:

Ζωή: Ε μα! Δεν είναι εύκολο για μία γυναίκα να μεγαλώνει μόνη της ένα παιδί. Εξάλλου όπως έχει πει και κάποιος για την ανατροφή των παιδιών: « Κάντε ότι θέλετε έτσι κι αλλιώς λάθος θα είναι.»

Αιμίλιος: Ο Φρόιντ….

Ζωή: Για να το λες…Λοιπόν συγνώμη λίγο

( Πηγαίνει βιαστική προς την τουαλέτα)

Νεφέλη: Δεν ήξερα πως γνωρίζατε τη μητέρα μου.

Αιμίλιος: Ούτε εγώ..

Νεφέλη: Πρέπει οπωσδήποτε να τα πούμε απόψε…για αυτό σας είπα να έρθετε εδώ. Να βρεθούμε στο σπίτι σας;

Αιμίλιος: Άκου Νεφέλη, αυτό πρέπει να σταματήσει. Είναι πάθος. Ε… Λάθος.

Νεφέλη: Λάθος;

Αιμίλιος: Σε λίγο καιρό θα δώσεις εξετάσεις. Θα μπεις στο πανεπιστήμιο και θα φύγεις. Εγώ θα μείνω ξανά στην τρίτη Λυκείου όπως πάντα.

Νεφέλη: Εξετάσεις; Δύο χρόνια τα πάω σκατά επίτηδες για να είμαι στην τάξη σου. Αλλά τώρα ξαφνικά σε βολεύει να περάσω ε; Να με ξεφορτωθείς ώστε την επόμενη χρονιά να βρεις άλλη πιτσιρίκα για να της κάνεις ιδιαίτερα μαθήματα…

( Της κάνει νόημα ικετευτικά να μιλάει πιο σιγά)

Αιμίλιος: Θα μπορούσα να είμαι πατέρας σου!

Νεφέλη: Ακριβώς. Για αυτό θα σου κάνω μήνυση για αποπλάνηση ανηλίκου.

Αιμίλιος: Μα είσαι είκοσι ενός.

Νεφέλη: Καλά λοιπόν για σεξουαλική παρενόχληση.

Αιμίλιος: Σε παρακαλώ ηρέμισε λίγο. Για το καλό σου το λέω.

Νεφέλη: ( ειρωνικά) Το καλό μου….Είσαι ένα ανθρωπάκι.

( Η Ζωή βγαίνει από την τουαλέτα.)

Ζωή: Τα λέτε; Λοιπόν πρέπει να φύγουμε. Έχω μια κηδεία στα σκαριά. Πέρνα καμιά μέρα από το σπίτι να τα πούμε. ( παιχνιδιάρικα στο αφτί του όλο νόημα) Να θυμηθούμε ίσως και τα παλιά…. Πάμε Νεφέλη; Και να σου πω , μην μου την κουράζεις πολύ….

( Μάνα και κόρη φεύγουν. Ο Αιμίλιος έχει μείνει σαν χαμένος. Ο Χαρίλαος που δεν έχει χάσει λέξη του βάζει λίγο τσίπουρο.

Χαρίλαος: Οι κίνδυνοι του επαγγέλματος….

Αιμίλιος: Μπορώ να βασιστώ στη διακριτικότητά σας; Εδώ παίζεται η δουλειά μου…

Χαρίλαος: Ο καφετζής είναι όπως ο πνευματικός. Ακούει τα πάντα αλλά δεν λέει λέξη.

( Ξαναμπαίνει η Νεφέλη και βάζει κάτι στο χέρι του Αιμίλιου)

Νεφέλη: Ορίστε! Είναι οι πρώτες πετυχημένες εξετάσεις της ζωής μου. Κι αυτή τη φορά χάρη σε εσένα. Σου χαρίζω το δίπλωμα ως αναμνηστικό!

( Φεύγει κι ο Αιμίλιος βλέπει στα χέρια του ένα τεστ εγκυμοσύνης το κο και μετά το πετάει πανικόβλητος πάνω στην μπάρα και φεύγει να κυνηγήσει τη Νεφέλη)

Χαρίλαος: οι δύο γραμμές είναι δίδυμα

( Μπαίνει η Ερασμία από την κουζίνα με ένα περιοδικό. Σιγουρεύεται πως δεν την βλέπουν τα δύο αφεντικά της και βάζει και πίνει δύο τσίπουρα απανωτά. Μετά γεμίζει το μπουκάλι με νερό. Την ώρα που γυρίζει ο Χαρίλαος να την κοιτάξει με καχυποψία ανοίγει το περιοδικό Κυνηγός και Φύση…

Φρόσω: Σκέφτεσαι να ξεκινήσεις το κυνήγι τώρα;

Ερασμία: Όχι! Είναι για τις αγγελίες…

( την κοιτάνε και οι δύο περίεργα)

Ερασμία: Τις αισθηματικές αγγελίες.

Χαρίλαος : Κατάλαβα αντί για μπεκάτσες, κυνήγι ανδρών…

Φρόσω: Και λοιπόν;

Ερασμία: Είναι όπως τα αυτοκίνητα προτού αγοράσεις θέλεις να κάνεις κάποιο test drive.

Φρόσω: Και τι έγινες βρήκες κάνα καλό μοντέλο;

Ερασμία: Δυστυχώς στην ηλικία μου με βλέπω για μεταχειρισμένο. Αρκεί να είναι σε καλή κατάσταση.

( Χτυπάει ένα κινητό)

Ερασμία : Το δικό μου πρέπει να είναι. Μου πήρε ένα τατς ο γιος μου για τα Χριστούγεννα. Πρέπει να βαδίζουμε με την εποχή μας…. Πως στο διάολο ανοίγει αυτό όμως;;;

( την κοιτάνε άναυδοι να πατάει όλα τα κουμπιά μαζί )

Ερασμία ( απαντάει και βάζει σέξι παθιάρικη φωνή) : Εμπρός…ναι η ίδια…Ω καλημέρα….Ναι ναι…. Πάνω από σαράντα…ναι

( βλέπει ότι την ακούει ο Χαρίλαος και πάει πιο πέρα)

Ερασμία: Δηλαδή πιο κάπου στη μέση…λίγο πιο κοντά στα πενήντα από τα σαράντα…Ναι έπεσα τυχαία στην αγγελία σας στο Κυνηγός και Φύση….Όχι δεν κυνηγάω…. Το ξεφύλλισα στην κομμώτριά μου… όχι ούτε αυτή κυνηγάει….Ναι διαζευγμένη…..Κι εσείς…..Από τι πέθανε;…..Αν τι κρίμα. Πόσο θα υπέφερε…..Ναι ναι συμφωνώ απολύτως……Κι εγώ σε αυτές τις περιπτώσεις είμαι υπέρ της ευθανασίας…..Μία ένεση και τέλος τα βάσανα…

( Οι άλλοι δύο έχουν μείνει)

Ερασμία: Ναι καταλαβαίνω….μεγάλο κενό…..Όχι εγώ δεν έχω κάποιο ζώο….Έχω έναν γιο όμως 17 χρονών….Μην νομίζετε βρωμίζει εξίσου το σπίτι….Σας αρέσουν τα παιδιά; …..Ε τώρα σε αυτή την ηλικία….Λίγο δύσκολο….Κοιτάξτε επειδή δεν μπορώ να μιλήσω αυτή τη στιγμή θέλετε να περάσετε από το Καφενείο Το Τέρμα; Όχι δεν είναι απέναντι από κάποιο γήπεδο…Απέναντι από το νεκροταφείο. ….Ναι μάλιστα….Τα λέμε αργότερα…

Η Ερασμία το κλείνει. Ο Χαρίλαος ελέγχει τη γραμμή στο μπουκάλι με το τσίπουρο και πίνει και λίγο.

Ερασμία: Καλέ τον κυρ Θανάση τον έχετε δει καθόλου αυτές τις μέρες;

Χαρίλαος: Τρεις μέρες τώρα δεν έχει έρθει να παίξει το λόττο του….θα πρέπει να είναι άρρωστος.

Ερασμία: Αφού κάθε φορά παίζει τα νούμερα του ΑΜΚΑ του θα ήταν κρίμα να το χάσει επειδή δεν έπαιξε.

( Χαρίλαος διαβάζει ξανά την εφημερίδα, βλέπει κάτι και τινάζεται)

Χαρίλαος: Μιλώντας για λόττο, το είδατε αυτό;

Φρόσω/ Ερασμία μαζί: Ποιο;

Χαρίλαος: Το τζακ ποτ που κέρδισε είχε παιχτεί εδώ.

Ερασμία: Πλάκα κάνετε

Χαρίλαος: Κοιτάξτε 10 εκατομμύρια.

Ερασμία: Ευρώ;

Χαρίλαος: Εμ τι ρούβλια; Φαντάζεστε πόσα χρήματα είναι;

Φρόσω: Θα είναι σίγουρα κάποιος που γνωρίζουμε…

Ερασμία: Μπορεί να είναι ελεύθερος…

Φρόσω: Που να ξέρουμε . Πολλοί προτιμούν να παραμείνουν ανώνυμοι

Ερασμία ( Κοιτάζοντας τον Χαρίλαο που πίνει ξανά τσίπουρο): Ναι όπως οι αλκοολικοί. Λοιπόν πηγαίνω για ψώνια στο σούπερ μάρκετ

( Έχει ήδη βγει όταν αρχίζει πάλι να χτυπάει το κινητό της)

Χαρίλαος: Γαμώτο ξέχασε το μαραφέτι της …( το σηκώνει) Εμπρός…όχι δεν είμαι η Ερασμία…Είμαι ο Χαρίλαος…Ποιος τη ζητεί; ο Ιωσήφ;….Ποια αγγελία;….Κυνηγός…..α ναι….ναι…μισό λεπτό….όχι δεν ενδιαφέρομαι για την αγγελία….δεν είναι δικό μου το κινητό….δεν είναι πλάκα….μισό λεπτό να σας εξηγήσω….το έκλεισε ο μαλάκας!

Χαρίλαος: Ιωσήφ; Δεν φαντάζομαι να είναι από καμιά θρησκευτική αίρεση;

( Μπαίνουν ο Αργύρης κι Άννα)

Αργύρης: Χαίρετε δύο καφέδες ( κάθονται)

Αργύρης: Ξέρεις νομίζω ότι τα αφεντικό μου θέλει να με διώξει.

Άννα: Έλα…

Αργύρης: Όταν διασταυρωνόμαστε πλέον στον διάδρομο δεν μου λέει πια καλημέρα. Παλιά τρώγαμε μαζί το μεσημέρι μια φορά την εβδομάδα.

Άννα: Δεν σημαίνει κάτι αυτό …ίσως να πήζει στη δουλειά.

Αργύρης: Δεν ξέρω….Έχει αρχίσει πάλι να μου μιλάει ψυχρά και στον πληθυντικό από εκεί που μου μιλούσε στον ενικό και κάναμε πλάκες.

Άννα: Δεν σημαίνει κάτι αυτό…Μπορεί και να σημαίνει ότι σε σέβεται και σε παίρνει στα σοβαρά.

Αργύρης: Ναι αλλά μόλις μου πήρε έναν μεγάλο λογαριασμό που είχα και τον έδωσε στον τύπο που μόλις προσέλαβε

Άννα: Δεν σημαίνει κάτι αυτό….Μπορεί να μην θέλει να σε κουράζει. Γι αυτό προσέλαβε κι άλλον για να μην πήζεις.

Αργύρης: Ναι αλλά τώρα δεν πήζω καθόλου. Για την ακρίβεια εδώ και μία εβδομάδα δεν έχω καθόλου δουλειά. Μου πήραν όλες τις αρμοδιότητες

Άννα: Δεν σημαίνει κάτι αυτό….Μπορεί να θέλει να είσαι εντελώς ελεύθερος για το επόμενο μεγάλο project.

Αργύρης: Δεν είμαι σίγουρος. Είχα ένα μεγάλο γραφείο στον τελευταίο όροφο δίπλα στο δικό του και τώρα είμαι στο ισόγειο σε μία τρύπα. Και έδωσε το γραφείο μου στον καινούριο.

Άννα: Δεν σημαίνει κάτι αυτό…Τουλάχιστον τώρα δεν το έχεις όλη μέρα πάνω από το κεφάλι σου. Μπορείς έτσι να είσαι όλη μέρα στο Ίντερνετ και να παίζεις παιχνίδια.

Αργύρης: Αυτό είναι αλήθεια αλλά τώρα μου έκοψαν και το Ίντερνετ.

Άννα: Δεν σημαίνει τίποτα αυτό…μπορεί να είναι και βλάβη.

( Ο Χαρίλαος τα ακούει τόση ώρα κι έχει αρχίσει να φορτώνει.)

Αργύρης : Το χειρότερο είναι πως αναρωτιέμαι αν τα έχει με τη γυναίκα μου.

Άννα: Όχι!!

Αργύρης: Δεν ξέρω, χθες το απόγευμα τους είδα να βγαίνουν από το ίδιο ξενοδοχείο….Θα μου πεις δεν σημαίνει τίποτα αλλ…

Άννα: Τώρα αυτό μπορεί να είναι κι ένα σημάδι…. (

( Βγαίνουν)

( Μπαίνουν δύο νεκροθάφτες, με μαύρο κουστούμι και μαύρα γυαλιά ηλίου)

Χαρίλαος: Να κι Blues Brothers ! Πως πάνε οι δουλειές;

Ζήσης: Τι να πω. Οι παραδόσεις χάνονται. Τώρα πλέον καθυστερούν ακόμη και στις κηδείες. Περιμένοντας θα πιούμε στα όρθια ένα ποτηράκι. Αλλά πρέπει να ρίχνω και κάνα βλέφαρο στην νεκροφόρα.

Ευθύμης: Φαντάζεσαι να μας την κλέψουν με το φέρετρο και όλα μέσα. Δεν είναι απίθανο. Γίνονται τόσα στις μέρες μας. Δεν ακούσατε για αυτούς που περνούσαν λαθραία τσιγάρα μέσα σε νεκροφόρες;

Χαρίλαος : Μην σου κάνει εντύπωση σε λίγο καιρό με όλα αυτά τα θανατερά που γράφουν πάνω στα πακέτα, θα γίνεται και η νόμιμη μεταφορά των τσιγάρων με νεκροφόρες. Λοιπόν τι σας δίνω τα συνηθισμένα; Μία μπύρα και άσπρο κρασί;

Ζήσης: Δεν αλλάζουμε τις καλές συνήθειες. Είδες χθες τον αγώνα;

Χαρίλαος: Μην αρχίσουμε τώρα τη συζήτηση. Το δεύτερο γκολ δεν ήταν…

Ζήσης: Τι δεν ήταν;;;

Χαρίλαος: Ήταν οφσάιντ…

Ζήσης: Οφσάιντ;

( Μπαίνει η Ερασμία)

Χαρίλαος: Δεν ήταν οφσάιντ το δεύτερο;

Ερασμία: ( με φανατισμό φιλάθλου) Άμα είναι πουλημένος ο αλήτης ο διαιτητής. Αν τα παίρνει το παλιοτόμαρο. Που να μην σώσει… τι να λέμε….( φεύγει προς τα μέσα)

Την κοιτάνε έκπληκτοι

Ο Χαρίλαος τους ξανασερβίρει

Ευθύμης: Όπα. Φτάνει. Αρκετοί είναι οι νεκροί στους δρόμους.

Ζήσης: Οι δικοί μας πελάτες στην κατάσταση που είναι δεν μπορούν να πάθουν τίποτα πια. Αν και…θυμήσου τον περασμένο μήνα την κυρία Καστρινού…

Χαρίλαος: Ποια; ( Πετάγεται και η Φρόσω)

Ζήσης: Που ο άνδρας της είχε το ψιλικατζίδικο λίγο παρακάτω. Ε αυτή πέθανε από καρδιακή προσβολή.

Φρόσω: Ναι το ξέρω είχα και μια συστημένη επιστολή να της δώσω.

Ζήσης: Λοιπόν πήγαμε την κυρία Καστρινού για καύση στην Βουλγαρία. Αλλά ο κόπανος ο άνδρας της δεν μας είχε πει ότι η γυναίκα του είχε βηματοδότη. Κι έτσι στη μέση της διαδικασίας Μπουμ! Η μπαταρία λιθίου εξερράγη, από τη ζέστη κι η πόρτα του φούρνου πετάχτηκε πάνω στον τοίχο!

Ευθύμης: Ευτυχώς δεν τραυματίστηκε κανείς.

Ζήσης: Αλλά δεν μπορώ να σου περιγράψω την όλη κατάσταση, της οικογένειας, και βεβαίως της κυρίας Καστρινού.

Χαρίλαος : Έχει και το δικό σας επάγγελμα τους κινδύνους του.

Ζήσης: Μια χαρά πελάτισσά σου ήταν Καστρινού έτσι δεν είναι;

Χαρίλαος: Η αλήθεια είναι πως το έτσουζε αρκετά.

Ευθύμης: Μήπως τελικά δεν έφταιγε μόνο η μπαταρία λιθίου για την έκρηξη….

Χαρίλαος: Πάντως μου κάνει εντύπωση που δεν έχω δει τον κυρ Θανάση. Σήμερα είναι η μέρα που παίζει πάντα….

Ζήσης: Τον κυρ Θανάση; Είναι παρκαρισμένος απέναντι σε ένα πολυτελές αυτοκίνητο.

Χαρίλαος: ( ενθουσιασμένος) Έλα ! Αυτός κέρδισε το τζακ ποτ;

Ζήσης: Όπως το πάρει κανείς. Αυτός είναι μέσα στη νεκροφόρα.

Χαρίλαος: Πλάκα κάνεις;

Ευθύμης: Κίρρωση του ήπατος.

Χαρίλαος: Δεν μπορώ να το πιστέψω….Καημένος κυρ Θανάσης….Τον είχα δει πριν από τρεις μέρες. Είχε παίξει το λόττο του όπως συνήθως… Και σκέψου ότι θα μπορούσε να κερδίσει. Εδώ παίχτηκε το δελτίο που κέρδισε!

Ερασμία ( Βγαίνοντας από την κουζίνα μαζί με τη Φρόσω) : Μπορεί να είναι αυτός…

Χαρίλαος: Τι πράγμα;

Ερασμία: Ο νικητής! Δεν έχει ακόμη εμφανιστεί. Ε αυτός έχει έναν καλό λόγο να μην έχει εμφανιστεί….

Χαρίλαος : Δεν είναι δύσκολο να το μάθουμε αυτός έπαιζε πάντα το ΑΜΚΑ του. Τα νούμερα που κέρδισαν είναι 23, 11, 19, 30, 16, 5. Ποιο είναι όμως το ΆΜΚΑ του κυρ Θανάση;

( ανασηκώνουν όλοι τους ώμους)

Ερασμία: Θα ήταν όμως πολύ κωλόφαρδος:

Ζήσης: Ε τώρα δεν το λες και κωλοφαρδία αυτό που του συνέβη.

Χαρίλαος: Οι κληρονόμοι θα ήταν πολύ κωλόφαρδοι. Γιατί δεν νομίζω να τους έχει αφήσει και σπουδαία πράγματα.

Φρόσω: Εκτός από άδεια μπουκάλια..

Ευθύμης: Τι θα έκανες εσύ Χαρίλαε αν κέρδιζες το Λόττο;

Χαρίλαος: Θα κερνούσα όλο το μαγαζί.

Ερασμία: Εγώ θα πήγαινα ταξίδι στο διάστημα ( την κοιτάζουν όλοι έκπληκτοι)
Τι με κοιτάτε έτσι; Δεν έχετε ακούσει πως πλέον οι εκατομμυριούχοι μπορούν να κάνουν βόλτα στο διάστημα;

Ζήσης: Άντε κέρασέ μας έναν γύρο για να το γιορτάσουμε.

Χαρίλαος : Τι να γιορτάσουμε;

Μπαίνει μία κωφάλαλη ζητιάνα που πουλάει κάτι αγαλματάκια. Ακουμπάει 5 μικροσκοπικούς νάνους πάνω στον πάγκο. Ακουμπάει επίσης κι ένα χαρτί. Η Ερασμία και η Φρόσω σκύβουν να διαβάσουν

Χαρίλαος : Τι λέει;

Φρόσω: Δεν λέει είναι κωφάλαλη.

Χαρίλαος: Τι γράφει τέλος πάντων;

Ερασμία: Πως πουλάει διακοσμητικά κήπου κι αν πάρουμε τα έξι, το έβδομο είναι δωρεάν.

Ζήσης: Μα τι είναι;

Ευθύμης: Δεν είναι οι επτά νάνοι;

Ερασμία: Εδώ είναι μόνο πέντε!

Χαρίλαος: Κι επίσης είναι πάρα πολύ μικρά για τον κήπο. Θα πρέπει κανείς να ξυρίσει το γκαζόν για να τα βλέπει

Ευθύμης: ( ψυχοπονιάρικα) : Κι αν παίρναμε από δύο ο καθένας;

Χαρίλαος: Και τι να κάνουμε με δύο νάνους ο καθένας;

Ερασμία: Και κυρίως που είναι μόνο πέντε…που είναι μονός αριθμός

Ζήσης: Γιατί αν ήταν επτά;

Φρόσω: ( φωνάζοντας δυνατά) Όχι ευχαριστούμε δεν θα πάρουμε

Ερασμία: Μην φωνάζεις δεν ακούει.

Φρόσω: Δεν φωνάζω απλώς μιλάω καθαρά για να διαβάσει τα χείλη μου…

Η ζητιάνα βγαίνοντας : Εσύ διάβασε τα δικά μου. Άι χέσου….

Φρόσω: Κοίτα που πήγαμε και να τη λυπηθούμε.

Ερασμία: Όλο αυτό μου θυμίζει μία ιστορία.

Χαρίλαος: Τη Χιονάτη;

Ερασμία: Όχι ένα μυθιστόρημα που μόλις τελείωσα. ( βγάζει ένα τύπου άρλεκιν από την τσάντα της και το ακουμπάει στον πάγκο)

Ερασμία: Ο τίτλος είναι « Μία γυναίκα είναι μια γυναίκα» Εκτυλίσσεται στη Φλόριντα. Είναι η ιστορία μιας εκατομμυριούχας κωφάλαλης γυναίκας που ερωτεύεται έναν Γάλλο ιεροσπουδαστή που είναι σε αποστολή στο Μαϊάμι. Κι είναι εγκλωβισμένη γιατί δεν μπορεί να του εξομολογηθεί τον έρωτά της.

Ευθύμης ( ο μόνος άνδρας που δείχνει ενδιαφέρον) Επειδή προορίζεται για παπάς;

Ερασμία: Και για αυτό αλλά κυρίως γιατί είναι μουγκή. Κι αυτός από την πλευρά του είναι επίσης ερωτευμένος αλλά δεν μπορεί να την κάνει να το καταλάβει…

Ευθύμης: Επειδή είναι ντροπαλός;

Ερασμία: Και για αυτό αλλά κυρίως επειδή είναι κουφή.

Φρόσω: Καλά δεν μπορεί να διαβάσει τα χείλη της;

Ερασμία: Μπορεί…αλλά το πρόβλημα είναι πως αυτός μιλάει Γαλλικά κι αυτή δεν μπορεί να καταλάβει γιατί είναι Αμερικάνα….

Ευθύμης: Α μάλιστα….

Ερασμία: Έτσι αυτός μαθαίνει κρυφά την γλώσσα των κωφαλάλων;

Φρόσω: Στα Αγγλικά;

Ερασμία ( δεν της δίνει σημασία): κι έτσι την ημέρα του Αγίου Βαλεντίνου της εξομολογείται τον έρωτά του.

Ευθύμης ( όλο αγωνία): Και λοιπόν;

Ερασμία: Αυτή από τη συγκίνηση ξαναβρίσκει την ακοή και την ομιλία

Χαρίλαος: Τζάμπα η νοηματική δηλαδή.

Ερασμία: Όχι βέβαια. Γιατί αποφασίζουν αν ανοίξουν ένα σχολείο για κωφάλαλους.

Ευθύμης: Και παντρεύονται;

Ερασμία: Εννοείται.

Φρόσω: Μα νόμιζα πως πήγαινε για παπάς.

Ερασμία: Από καθολικός γίνεται προτεστάντης για να μπορέσουν να παντρευτούν.
( οι γυναίκες κι ο Ευθύμης αναστενάζουν από το ρομαντικό του θέματος )

Ερασμία: Λοιπόν καλά όλα αυτά αλλά εγώ έχω δουλειά στην κουζίνα…

Χαρίλαος: Καλά που το θυμήθηκες.

( φεύγει για μέσα )

Ο Χαρίλαος διαβάζει πάλι εφημερίδα και οι δύο νεκροθάφτες συνεχίζουν να πίνουν.

Ζήσης: Σας είπα τι με ρώτησε η κόρη μου σήμερα που την πήγαινα στο σχολείο με τη νεκροφόρα;

Χαρίλαος: Την πας στο σχολείο με τη νεκροφόρα;

Ζήσης: Γιατί όχι; Είναι το επαγγελματικό μου αυτοκίνητο. Τι νεκροφόρα, τι φορτηγό με κατεψυγμένα. Λοιπόν ξέρεις τι με ρώτησε;

Χαρίλαος: Όχι

Ζήσης: Που πάμε όταν πεθάνουμε;

Χαρίλαος: Και τι της απάντησες;

Ζήσης: Τι νομίζεις;

Χαρίλαος: Δεν ξέρω.

Ζήσης: Ακριβώς αυτό.

Χαρίλαος: Ποιο;

Ζήσης: Δεν ξέρω.

Χαρίλαος: Και;

Ζήσης: Μου είπε: Μα μπαμπά όταν πεθαίνουμε πάμε στο νεκροταφείο.

Χαρίλαος: Θα πρέπει να εξεπλάγη που με τη δουλειά που κάνεις δεν το ξέρεις ακόμη.

Ευθύμης: ( με φιλοσοφική διάθεση) : Που πάμε όταν πεθαίνουμε…Εδώ δεν ξέρουμε που πάμε όσο ζούμε…

Ο Χαρίλαος αδειάζει το μπουκάλι στο ποτήρι του Ευθύμη.

Χαρίλαος: Άντε θα σε καλοπαντρέψουμε. Πάω να φέρω κι άλλο από το υπόγειο.

Ευθύμης: ( διαβάζει την εφημερίδα) Πολύνεκρο δυστύχημα. Τη βίασε ο πεθερός της την ημέρα του γάμου της κι αυτή έπεσε στις ράγες του τρένου προκαλώντας τον εκτροχιασμό του…

Ζήσης: Θα έχουμε δουλειά πάλι.

( βγαίνει η Ερασμία και σκουπίζει τον πάγκο)

Ζήσης: Τι κάνει ο γιος σου;

Ερασμία: Μια χαρά. Τον έχει στείλει η σχολή του για πρακτική

Ζήσης: Α μπα; Που;

Ερασμία: Στα Μακντόναλντς στο Ακρωτήρι Κανάβεραλ.

Ευθύμης: Νομίζω ότι το λένε Κένεντι πια.

Ερασμία: Τέλος πάντων εκεί που φεύγουν οι πύραυλοι.

Ζήσης: Τέλος πάντων και τι κάνει εκεί; Είναι στο τμήμα του μάρκετινγκ;

Ερασμία: Όχι είναι στο ταμείο.

Ζήσης: Στο ταμείο.

Ερασμία: Είναι η αμερικάνικη φιλοσοφία αυτή. Πρέπει να ξεκινάς από τα χαμηλά.

Ευθύμης: Στα Μακντόναλντς;

Ερασμία: Ναι αλλά στο Κανάβεραλ. Δεν παίρνουν όποιον κι όποιον να σερβίρει χάμπουργκερ στους κοσμοναύτες.

Χαρίλαος: Όχι ρε γαμώτο ( επιστρέφει) Έχω ένα μέτρο νερό στο υπόγειο.

Ευθύμης: Νερό!!

Φρόσω: Πρέπει να κλείσουμε την παροχή.

Ερασμία: Κι εγώ πως θα κάνω τη λάντζα;

Χαρίλαςο: Το κρασί ξεχάστε το.

Ζήσης: Δεν πειράζει δώσε μας ότι έχεις εδώ. Ο καλός ο μύλος όλα τα αλέθει.

( τους σερβίρει από ένα άλλο μπουκάλι)

Χαρίλαος: Θα πρέπει να τα έπαιξε η αποχέτευση. Πάντως κάτω γίνεται της κακομοίρας. Το μόνο που βλέπεις είναι να επιπλέουν άδεια μπουκάλια.

Ευθύμης: Τουλάχιστον να ήταν γεμάτα.

Ζήσης: Μα γιατί κρατάτε τα άδεια;

Ευθύμης: ( αναπολώντας) Θυμάμαι όταν ήμουν μικρός μάζευα μπουκάλια για να τα πάω στο μπακάλικο και να πάρω μερικά ψιλά. Ωραία χρόνια τότε. Είσαι παιδί, ούτε έννοιες, ούτε τίποτα. Τι όμορφα χρόνια

Ερασμία: Ναι ωραία όλα αυτά τα ρομαντικά αλλά εγώ πως θα κάνω τη λάντζα;

Χαρίλαος: Καλά θα φωνάξω τον υδραυλικό.

( Ψάχνει στον κατάλογο)

Ζήσης: Πάντως έχει αργήσει πολύ να ξεκινήσει η κηδεία. Τι θα γίνει θα ξημερώσουμε εδώ πέρα; Έχουμε και δουλειές;

( ο Ευθύμης διαβάζει εφημερίδα) Ευθύμης: Οι Έλληνες κάνουν σεξ δύο φορές την εβδομάδα. Κουλό είναι αυτό.

( Ο Χαρίλαος παίρνει τηλέφωνο)

Φρόσω : Τι γίνεται με τον υδραυλικό;

Χαρίλαος: Δεν απαντάει.

Ερασμία: Πάω τότε στον φούρνο.

Ευθύμης: ( στην Ερασμία): Το ξέρατε εσείς ότι οι Έλληνες κάνουν σεξ δύο φορές την εβδομάδα;

Ερασμία: Κι οι Ελληνίδες;

Ευθύμης: Δεν λέει.

Φρόσω: Για δοκίμασε στο κινητό του.

Ερασμία: Άκου δύο φορές την εβδομάδα ούτε στον ύπνο τους.

Ευθύμης: Κατά μέσο όρο.

Χαρίλαος: Τι θα γίνει τώρα; Εδώ ο κόσμος καίγεται θα το βουλώσετε; Ναι όχι…δεν το έλεγα σε εσάς…Ναι η γραμμή είναι χάλια…δεν σας ακούω καλά….α είστε στο αυτοκίνητο….Κοιτάξτε έχει πλημμυρίσει το υπόγειό μου…. Είναι μεγάλη ανάγκη. Στο Καφενείο των φιλάθλων….όχι απέναντι από το γήπεδο….Απέναντι από το νεκροταφείο….Ναι…Εμπρός….Εμπρός…..Με ακούτε;

( Ακούγονται φρένα στο δρόμο και μετά ο ήχος τρακαρίσματος)

Ζήσης: Αν είναι δυνατόν

Χαρίλαος: κόπηκε η γραμμή

Ευθύμης: πρώτη φορά βλέπω ιπτάμενο φέρετρο.

( Οι νεκροθάφτες βγαίνουν τρέχοντας κι ο Χαρίλαος με τη Φρόσω κοιτάζουν από το τζάμι)

Χαρίλαος: Κοίτα πως έγινε η νεκροφόρα. Καημένε κυρ Θανάση, ευτυχώς που ήσουν ήδη μακαρίτης.

( Μπαίνει ο Ιωσήφ κρατώντας μία ηλικιωμένη γυναίκα από το μπράτσο)

Κίτσα: Καλά δεν βλέπετε που πάτε;

Ιωσήφ: Εσείς πεταχτήκατε έτσι. ( στον Χαρίλαο και τη Φρόσω) Είστε μάρτυρες. Διέσχισε τον δρόμο σαν την τρελή.

Κίτσα: Με πατάει με το αυτοκίνητο και με λέει και τρελή. Ωραίοι τρόποι.

Φρόσω: Καθίστε πέντε λεπτά να συνέλθετε.

Ιωσήφ: Δεν της δίνετε να πιει κάτι να στανιάρει;

( Της δίνει λίγο από το τσίπουρο και η γριά το πίνει μονορούφι)

Κίτσα: Σαν νερό είναι αυτό εδώ.

( Της ξαναβάζουν και το πίνει πάλι μονορούφι.)

Κίτσα: Νιώθω ακόμη αδύναμη

Χαρίλαος: Α όχι άλλο φτάνει.

Ιωσήφ: Αυτή δεν έχει πάθει τίποτα. Αντιθέτως το αυτοκίνητό μου είναι…

Κίτσα: Παραλίγο να τα κακαρώσω κι αυτός ασχολείται με τα σιδερικά…

Ιωσήφ: Ναι κυρά μου γιατί πριν να γίνει σιδερικά ήταν ένα ολοκαίνουριο φορτηγάκι. Και τώρα πρέπει να κάνουμε δήλωση. Που είναι οι νεκροθάφτες;

Φρόσω: Λοιπόν πως πάει γιαγιούλα;

Κίτσα: Που είναι η γιαγιούλα;

Φρόσω: Πρέπει να ειδοποιήσουμε την οικογένειά της. Να έρθουν να την πάρουν. ( στην Κίτσα) Θέλετε να καλέσουμε τα παιδιά σας;

Κίτσα: Τα παιδιά; Δεν είμαι σίγουρη ότι έχω.

Φρόσω: Δεν είστε σίγουρη;

Κίτσα: Νομίζω ότι είχα αλλά δεν ξέρω τι τα έκανα.

Ιωσήφ: Να πάρω τηλέφωνο τον ασφαλιστή.

Φρόσω: Πως σας λένε;

Κίτσα: Κι εσάς τι σας νοιάζει; Αστυνομία είστε;

Ιωσήφ: Δεν απαντάνε. Μα που είναι κι αυτά τα κοράκια να συνεννοηθούμε;

Φρόσω: Είστε παντρεμένη;

Κίτσα: Μάλλον, αφού πήγαινα να βρω τον άνδρα μου όταν αυτός ο βλάκας έπεσε πάνω μου.

Ιωσήφ: Θα πω καμιά κουβέντα τώρα

Χαρίλαος: Που είναι ο άνδρας σας;

Κίτσα: Πέθανε

Φρόσω: Παναγία μου! Στο τρακάρισμα;

Κίτσα: Ποιο τρακάρισμα;

Ιωσήφ: Δεν υπήρχε κανένας άλλος μαζί της. Λοιπόν αφού δεν έχει τίποτα να την κάνω εγώ..

Χαρίλαος: Δεν είστε καλά. Μας την κουβαλήσατε εδώ αφού την χτυπήσατε με το αυτοκίνητο και τώρα θέλετε να την παρατήσετε εδώ; Εγώ έχω ήδη προβλήματα με τα νερά στο υπόγειο. Αυτή μου έλειπε τώρα. Τι το περάσαμε εδώ πέρα, μπάστε σκύλοι αλέστε….

Ιωσήφ: Ωραία και τι κάνουμε τώρα;

Φρόσω: Τι γράφει ο τάφος του άνδρα σας;

Κίτσα: Νομίζω «Αναπαύσου εν ειρήνη»

Χαρίλαος: Δεν λέμε αυτό. Τι όνομα γράφει;

Κίτσα: Και που να ξέρω.

Χαρίλαος: Πρέπει να είναι από το σοκ. Ας περιμένουμε λίγο και θα συνέλθει. Για σκεφθείτε λίγο από τι γράμμα αρχίζει το όνομα του άνδρα σας;

Κίτσα: Να σας πω από τι αρχίζει το δικό σας; Από Μ και τελειώνει σε κας.

Χαρίλαος: Θα της πω καμιά κουβέντα τώρα.

Φρόσω: Τα έχει λίγο χαμένα θα έλεγα.

Χαρίλαος: Λίγο;

Ιωσήφ: Μήπως το έχει σκάσει από κάποιο ίδρυμα;

( όλη αυτή την ώρα η γριά κάνει γκριμάτσες)

Ιωσήφ: Μήπως είναι γκόλ;

Χαρίλαος: Γκόλ;

Ιωσήφ: Ε με τα τσίπουρα που της δώσατε.

Χαρίλαος: Α τώρα φταίω κι εγώ από πάνω! Μήπως θέλετε να φωνάξουμε τους μπάτσους;

Ιωσήφ: Ας μην τους ενοχλήσουμε τώρα. Ας την αφήσουμε λιγάκι και θα συνέλθει. Πάω να δω αν παίρνει μπρος το φορτηγάκι μου αλλιώς θα πρέπει να φωνάξουμε γερανό.

( Μπαίνουν οι νεκροθάφτες με το φέρετρο)

Φρόσω: Τι κάνετε;

Ζήσης: Τον κακομοίρη τον κυρ Θανάση δεν θα τον αφήναμε με το φέρετρο στη μέση του δρόμου.

Κίτσα: Ποιος Θανάσης;.

( Ακουμπάνε το φέρετρο στο μπαρ)

Ζήσης: ( παίρνοντας το κινητό που έχει ξεχάσει η Ερασμία) Μπορώ να πάρω μισό λεπτό στο γραφείο τελετών;

Χαρίλαος Και δεν παίρνεις, της Ερασμίας είναι.

Κίτσα: ( αναρωτιέται μόνη της )Θανάσης; Θανάσης

Ζήσης: Δεν απαντάνε το κέρατό μου. Θα έχουν πάει για φαγητό.

Ευθύμης: Πρέπει όμως να πάμε να του φέρουμε άλλο καπάκι γιατί αυτό διαλύθηκε.

Ζήση: Είναι μέσα στο συμβόλαιο.

Χαρίλαος: Εδώ πρέπει να γίνει αυτό;

Ζήσης: Έτσι δεν θα χρειαστεί να αναβληθεί η κηδεία. Η οικογένεια είναι στο ανθοπωλείο. Δεν θα μας πάρει πάνω από ένα τέταρτο.

Ευθυμης:…Ίσα μέχρι να πάμε και να φέρουμε ένα καπάκι. Είμαι σίγουρος ότι θα ήταν χαρούμενος να περάσει τις τελευταίες του στιγμές εδώ μαζί σας. ..Που να τον βάλουμε για να μην είναι μέσα στη μέση.

Χαρίλαος: Το υπόγειο είναι πλημμυρισμένο άρα μόνο στην κουζίνα….

( Παίρνουν το φέρετρο και το πάνε στην κουζίνα, ο Χαρίλαος τους ακολουθεί απελπισμένος)

Κίτσα: Λες να είναι ο άνδρας μου αυτός;

( Χτυπάει το τηλέφωνο της Ερασμίας. Δεν είναι κανείς εκεί οπότε το σηκώνει η Κίτσα)

Κίτσα: Παρακαλώ….Αν μπορείτε να με λέτε Ερασμία;….Και γιατί όχι….αν σας κάνει κέφι….Όχι μάλλον χήρα θα έλεγα….Πέσατε πάνω στην ώρα….Νομίζω ότι είναι να τον θάψουμε σε λίγο…..Ναι προς το παρόν είναι στην κουζίνα….Εμπρός….Εμπρός….Τι αγενής το έκλεισε… ( πηγαίνει με το κινητό προς την κουζίνα)

( Επιστρέφουν από την κουζίνα τα κοράκια με τον Χαρίλαο και από την είσοδο μπαίνουν η Ζωή και η Νεφέλη)

Ζωή: Μα τι συνέβη στον μπαμπά;

Ζήσης: Ένα τροχαίο.

Νεφέλη: Μα εγώ νόμιζα πως ήταν κίρρωση του ήπατος

Ζήσης: Μισό λεπτό να σας εξηγήσω

( Παίρνουν μαζί με τον Ευθύμη τη Ζωή και βγαίνουν προς τα έξω να της εξηγήσουν ενώ ο Αιμίλιος μπαίνει φουριόζος ψάχνοντας τη Νεφέλη)

Αιμίλιος: Το είπες ήδη στη μητέρα σου;

Νεφέλη: Όπως βλέπεις εδώ προσπαθούμε να θάψουμε τον παππού μου. Νομίζεις πως είναι η κατάλληλη στιγμή να της πω πως είμαι έγκυος από τον καθηγητή μου και πρώην συμμαθητή της και πρώην τι άλλο…

Φρόσω: ( που τα έχει ακούσει) Έτσι είναι η ζωή άλλοι φεύγουν κι άλλοι έρχονται.

Αιμίλιος: Πολύ φιλοσοφία έχει πέσει σε αυτό το καφενείο.

Φρόσω: Έτσι είναι οι καφετζήδες είναι σαν τους φιλοσόφους. Ακούνε πολλά και λένε λίγα και καλά.

( Παίρνει την Νεφέλη παράμερα απελπισμένος)

Αιμίλιος: Μα πως έγινε αυτό;

Νεφέλη: Θες να σου κάνω μήπως και διάγραμμα;

Αιμίλιος: Συγγνώμη απλώς …εγώ…

Νεφέλη: Τα έχεις παίξει εντελώς…σε λυπάμαι κακομοίρη μου. Πλάκα σου έκανα.

Αιμίλιος: Τι πλάκα; Πως πλάκα;…

Νεφέλη: Το τεστ βρε χαζέ ήταν αρνητικό.

Αιμίλιος: ( Το βγάζει από την τσέπη του εκείνη την ώρα περνάει ο Χαρίλαος και το κοιτάζει κι αυτός.

Χαρίλαος: Α ναι, θα έπρεπε να έχει μία γραμμή…

( Ο Αιμίλιος του ρίχνει ένα βλέμμα κι ο Χαρίλαος το βουλώνει και φεύγει πίσω από το μπαρ

Νεφέλη: Ήθελα να δω πόσο με αγαπάς…..Κατάλαβα μια χαρά…Πάνω να βρω τη μαμά..( φεύγει)

Αιμίλιος: Νομίζω πως χρειάζομαι ένα τσίπουρο

( Τον σερβίρουν)

Αιμίλιος: Περίεργη γεύση έχει το τσίπουρό σας. Σαν νερωμένο.

( Ο Αιμίλιος πηγαίνει προς την τουαλέτα, ενώ βγαίνει από την κουζίνα η Κίτσα)

Κίτσα: Εγώ δεν κρατούσα ένα τηλέφωνο πριν από λίγο;

Ιωσήφ: Δεν θα καταφέρουμε ποτέ να κάνουμε τη δήλωση. Που πήγαν πάλι οι νεκροθάφτες. Έχω κι έναν θερμοσίφωνα να τοποθετήσω.

Χαρίλαος: Είστε υδραυλικός;

Ιωσήφ: Μάλιστα

Χαρίλαος: Πως σας λένε;

Ιωσήφ: Ιωσήφ.

Χαρίλαος: Εσάς περίμενα, σαν το Μεσσία.

Ιωσήφ: ( κάνοντας πλάκα) Ε αντί για τον ίδιο ήρθε ο πατέρας του. ( γελάει με το αστείο του). Λοιπόν το πρόβλημα έχετε;

Χαρίλαος: Πρέπει να τα έπαιξαν οι σωληνώσεις. Μιλάμε για βιβλική καταστροφή.

Ιωσήφ: ( ρίχνει μια ματιά από τη σκάλα προς το υπόγειο): Χριστός κι Απόστολος.

Φρόσω ( που βγαίνει εκείνη την ώρα από μέσα): Θα μπορέσετε να το φτιάξετε;

Ιωσήφ: Πως περπατώντας πάνω στο νερό; Άλλος τα έκανε αυτά; ( γελάκι, αυτή τον κοιτάζει έκπληκτη)

Χαρίλαος: Και τώρα τι κάνουμε;

Ιωσήφ: Φωνάξτε την πυροσβεστική. Ή Αλλιώς μπορείτε να περιμένετε μέχρι να εξατμιστεί.

Φρόσω: Ναι αλλά εγώ δεν έχω νερό τώρα..

Ιωσήφ: Καλέ τι λέτε το υπόγειό σας είναι τίγκα. ( γελάκι αλλά βλέπει τον Χαρίλαο που έχει φουντώσει και μαζεύεται και το αλλάζει) Θα διακόψω την παροχή μόνο στο υπόγειο για να έχετε νερό εδώ.

( Πηγαίνει πίσω από το μπαρ για να κάνει δουλειά)

Χαρίλαος: Όλα σε εμένα τυχαίνουν

Ιωσήφ: Όλοι το ίδιο λένε.

( Βγαίνει από την τουαλέτα που έχει ρίξει νερό στο πρόσωπό του)

Αιμίλιος: Ή εγώ δεν είμαι καλά ή υπάρχει ένα πτώμα στην κουζίνα…

Χαρίλαος: ( που κοιτάζει τι κάνει ο υδραυλικός) Μην ανησυχείτε είναι περαστικό…

( Ο υδραυλικός βγαίνει πίσω από το μπαρ)

Χαρίλαος: Τελειώσατε κιόλας;

Ιωσήφ: Ναι. Μπορείτε να χρησιμοποιήσετε τη βρύση. Πάρτε με τηλέφωνο όταν δεν θα έχει πια νερό το υπόγειο.

Χαρίλαος: Τι σας χρωστάω

Ιωσήφ: 100 ευρώ

Χαρίλαος: 100 ευρώ για 5 λεπτά εργασίας;

Ιωσήφ: Είναι βάση τιμοκαταλόγου. Θέλετε να σας τον δείξω;

Χαρίλαος: Τώρα τι να τον κάνω; Πριν έπρεπε να τον δω.

Φρόσω: Και σκέψου πως ένας γιατρός σπουδάζει 10 χρόνια για να πάρει 50 ευρώ.

Ιωσήφ: Την επόμενη φορά που θα πλημμυρίσετε φωνάξτε Ωριλά….Λοιπόν πρέπει να την κάνω. Σας αφήνω την κάρτα μου. Όταν επιστρέψουν τα κοράκια ας με πάρουν για να κάνουμε τη δήλωση.

Ερασμία: ( επιστρέφει από τον φούρνο) : Εντάξει η βλάβη;

Χαρίλαος: Νερό έχουμε πάντως.

Ερασμία: Άντε γιατί έχουν μείνει πίσω οι δουλειές μου με όλα αυτά. ( Πηγαίνει προς την κουζίνα κι ακούγεται ένα ουρλιαχτό)

Χαρίλαος : Αμάν ξέχασα να της πω για τον κυρ Θανάση. ( πηγαίνει μέσα να την βρει)

Κίτσα: Ποιος Θανάσης;

( Βγαίνουν από την κουζίνα και τη κρατάει για να την στηρίξει)

Χαρίλαος : Είπαν κάνα τεταρτάκι, δεν θα αργήσουν να επιστρέψουν να τον πάρουν. Κάθισε λίγο εδώ.

( Πηγαίνοντας προς το μπαρ βλέπει τα κλειδιά του Ιωσήφ)

Χαρίλαος: Ξέχασε τα κλειδιά του το καθίκι.

Ερασμία: Ποιος;

Χαρίλαος: Αυτός ο αρχικλέφτης ο υδραυλικός. Ας φωνάξει κλειδαρά τώρα να δει τη γλύκα.

Ερασμία: Αναρωτιέμαι που μπορεί να είναι….

Χαρίλαος: Σου είπα τα ξέχασε στο μπαρ.

Ερασμία: Όχι δεν καταλάβατε. Τι μπορεί να έκανε με το δελτίο του λόττο;

Φρόσω: Με το τζακ ποτ;

Ερασμία: Μπορεί να το έχει ακόμη πάνω του…

(Κοιτάζουν προς την κουζίνα. Και η Κίτσα.)

Ιωσήφ: Δεν ξέρω τι έκανα με τα κλειδιά μου. Μήπως τα είδατε κατά τύχη;

Χαρίλαος: Α δεν ξέρω… Τι κλειδιά ήταν;

Ιωσήφ: Του φορτηγού, του σπιτιού του…γενικά όλα.

Χαρίλαος: Θέλετε να φωνάξω έναν κλειδαρά; Θα πληρώσετε βάσει τιμοκαταλόγου.

Ιωσήφ: Ας ψάξουμε λίγο μπας και τα βρούμε…

Χαρίλαος Μήπως είναι αυτά;

Ιωσήφ: Ναι μπράβο.

( Κάνει ότι πάει να του τα πετάξει και πέφτουν δήθεν τυχαία στο υπόγειο.)

Χαρίλαος: Τι ατυχία έπεσαν μέσα στο υπόγειο. Τώρα θα πρέπει να περιμένουμε να εξατμιστεί το νερό.

Ιωσήφ: Κάτι μπορεί να γίνει. Θα φέρω μία αντλία από το φορτηγό.

Χαρίλαος: Είδατε άμα θέλετε…Ακόμη κι ο Ιωσήφ κάνει θαύματα.

( Καθώς βγαίνει ο Ιωσήφ)

Χαρίλαος: Φαντάζομαι πως είναι μέσα στην τιμή έτσι δεν είναι; Αλλιώς αφήστε το νερό να εξατμιστεί μόνο του.

Ιωσήφ: Μα και βέβαια είναι στην τιμή ( βγαίνει βρίζοντας, ενώ ο Χαρίλαος βάζει τα κλειδιά που τελικά δεν είχαν πέσει στην τσέπη του.)

Χαρίλαος: Θα το κάνεις λαμπίκο, καθίκι, μέχρι να βρεις τα κλειδιά σου.

( Η Κίτσα πηγαίνει προς την κουζίνα)

Χαρίλαος: Ψάχνετε κάτι;

Κίτσα: Θέλω ένα σκρατς

( Της το δίνει)

Χαρίλαος: Κάνει 1 ευρώ

( Η Κίτσα πέφτει πάνω στον Αιμίλιο όλο χαμόγελο)

Κίτσα: Δεν είναι δυνατόν! Με θυμάσαι;

Αιμίλιος: Όχι…

Κίτσα: Ούτε κι εγώ…

Χαρίλαος: τι θα γίνει θα το πάρετε το σκρατς ή όχι;

Κίτσα (στον Αιμίλιο) : Μπορείς να μου δανείσεις ένα ευρό καλό μου παιδί. Δεν ξέρω τι έκανα το πορτοφόλι μου.

(Ο Αιμιλιος πληρώνει, κι έρχεται η Ερασμία και ψάχνει στον πάγκο του μπαρ)

Χαρίλαος: Εσύ τι ψάχνεις τώρα;

Ερασμία: Το κινητό μου….Μήπως το είδατε πουθενά;

Χαρίλαος: Εδώ πάνω ήταν πριν από πέντε λεπτά. Που στο διάολο εξαφανίστηκε.

(Η Κίτσα εκμεταλλεύεται το γεγονός ότι όλοι είναι απασχολημένοι και πηγαίνει προς την κουζίνα.

Χαρίλαος: Α κάποιος σε πήρε νωρίτερα…

Ερασμία: Και του απαντήσατε εσείς;

Χαρίλαος: Ε, ναι

Ερασμία: Και λοιπόν;

Χαρίλαος: Ήταν κάποιος …Ιωακείμ….Μωυσής….

Ερασμία: Ιωσήφ.

Χαρίλαος: Άι γειά σου.

Ερασμία: Και τι είπε;

Χαρίλαος: η αλήθεια είναι…πως …δηλαδή….να εξεπλάγη κάπως που το σήκωσα εγώ ….και…Τέλος πάντων είπε ότι δεν θα μπορέσει να έρθει στο ραντεβού.

Ερασμία: Τι να σας πω τώρα

(Τον κοιτάζει έξαλλη κι αρχίζει να διαβάζει το βιβλίο της)

Χαρίλαος: Εγώ φταίω που για να εξυπηρετήσω απάντησα κιόλας.

(Μπαίνουν η Ζωή και η Νεφέλη με ένα μικρό λουλούδινο στεφάνι. Ο Αιμίλιος προσπαθεί να τραβήξει την προσοχή της Νεφέλης που τον αγνοεί.

Ζωή: Είναι απίστευτο. Ακόμη κι οι νεκροί παθαίνουν τροχαία στις μέρες μας…Βάζω στοίχημα ότι μιλούσε στο τηλέφωνο.

Νεφέλη ( αφηρημένη): Ο παππούς;

Ζωή: Ο υδραυλικός που τράκαρε τη νεκροφόρα

(Κάθονται και η Νεφέλη κοιτάζει το στεφάνι) Νεφέλη: Καλό σου ταξίδι παλικάρι μου; Δεν είναι κάπως υπερβολικό αυτό για τον παππού;

Ζωή: Είχα ξεχάσει να παραγγείλω κι αυτό το είχαν ήδη έτοιμο. Μια χαρά είναι. (αναστενάζει) Λοιπόν σε προειδοποιώ όταν πεθάνω θέλω να με θάψετε με το κινητό μου.

Νεφέλη: Ορίστε;

Ζωή: Σε περίπτωση που δεν είμαι πραγματικά πεθαμένη. Τόσα ακούμε. Είναι ο φόβος μου να με θάψουν ζωντανή…Α πα πα πα. Εσένα δεν σε τρομάζει αυτό;

Νεφέλη: Δε το έχω σκεφτεί ποτέ.

(Η Ζωή βλέπει τον Αιμίλιο που προσπαθεί να φύγει διακριτικά κάνοντας σινιάλο στη Νεφέλη να τον πάρει τηλέφωνο.)

Ζωή: Για πες μας Αιμίλιε εσύ που είσαι της φιλοσοφικής. Νομίζεις ότι υπάρχει ζωή πριν τον θάνατο;

Αιμίλιο;: Μετά εννοείς.

Ζωή: Και πριν και μετά. Το ίδιο είναι…

Αιμίλιος: Αναρωτιέμαι αν το θέλουμε να υπάρχει… Γιατί δεν ξέρουμε τι μας περιμένει κι από εκεί. Γιατί όπως γράφω στο τελευταίο μου μυθιστόρημα « Μπορεί να είσαι κωφάλαλη αλλά τουλάχιστον ζεις. Όταν πεθάνεις μπορεί να είναι ακόμη χειρότερα…»

( Ακούγοντας αυτή τη φράση η Ερασμία πετάγεται πάνω με έκπληξη)

Ερασμία: Μα αυτή είναι μία φράση από το « Μία γυναίκα είναι μία γυναίκα». Αυτό το φωνάζει ο Μισέλ στη Σαμάνθα την στιγμή που αυτή ετοιμάζεται να πηδήξει στον γκρεμό για να αυτοκτονήσει. Εσείς είστε η Καλλιρόη Φωκά ;

Αιμίλιος: Ναι…κάποιες φορές. Μην το φωνάζετε. Θα προτιμούσα να μην ακουστεί πολύ.

Ερασμία: Καταβρόχθισα το βιβλίο σας σε μία νύχτα. Όπως κι όλα τα άλλα εξάλλου. Τώρα το ξαναδιάβαζα για να το εμπεδώσω. Μπορείτε να μου το υπογράψετε;

Αιμίλιος: Βεβαίως γιατί όχι.

Ερασμία (πανευτυχής) Σας ευχαριστώ. Τα μυθιστορήματά σας θα έπρεπε να τα δίνει δωρεάν ο ΕΟΠΥΥ αντί για αντικαταθλιπτικά χάπια….

Αιμίλιος: Προσπαθώ να δώσω στις γυναίκες το κομμάτι του ρομαντισμού που δεν βρίσκουν στην καθημερινή τους ζωή.

Φρόσω( κοιτάζοντας το σέξι εξώφυλλο) : Πράγματι

Αιμίλιος: Αρχικά δοκίμασα να γράψω τραγωδίες αλλά δεν πουλάνε. Εδώ μετά βίας παίζονται οι αρχαίες, θα παιχτούν οι δικές μου;

Ερασμία: Καλέ τι τραγωδίες και πράσινα άλογα. Αυτά εδώ είναι βιβλία. Βγαλμένα από τη ζωή. Γεμάτα έρωτα και δράματα και δάκρυα.

Αιμίλιος: ( στη Φρόσω): Να τολμήσω να σας δώσω ένα αντίτυπο;

Φρόσω: Γιατί όχι. Εξάλλου όπως λέτε « Μία γυναίκα είναι μία γυναίκα.»

Αιμίλιος ( της δίνει ένα και το υπογράφει): Λοιπόν πρέπει να φύγω. Οι μαθητές μου με περιμένουν…

Νεφέλη: Στο καλό Καλλιρόη…

( Ο Αιμίλιος φεύγει με πεσμένα φτερά. Η Φρόσω ξαναρχίζει το σταυρόλεξο. Η Κίτσα βγαίνει από την κουζίνα,

Φρόσω: Θέλει το κοινό του…. Από Θ…

Κίτσα: Θέαμα!

( Γυρίζουν και την κοιτάζουν όλοι άναυδοι)

Φρόσω: Θέαμα…πέντε γράμματα… απίστευτο

Ζωή: Μαμά τι κάνεις εδώ;

Κίτσα: Ήρθα για την κηδεία. ( στον Χαρίλαο) Ποια είναι αυτή;

Χαρίλαος : Η μητέρα σας είναι; Δεν ξέραμε πια τι να την κάνουμε; ( χαμηλόφωνα) Το έχει χάσει έ;

Ζωή: Ας πούμε πως έχει επιλεκτική μνήμη…Θυμάται απέξω το ΑΜΚΑ του άνδρα της..

Κίτσα: 23, 11, 19, 30, 16,5.

Ζωή : Αλλά τις περισσότερες φορές ξεχνάει πως έχει άνδρα. Εδώ που τα λέμε τώρα πλέον δεν έχει, οπότε καλύτερα…

Χαρίλαος: Ποιο είναι το ΑΜΚΑ του άνδρα σας;

Κίτσα: 23,11,19,30,16,5

Χαρίλαος ( κοιτάζοντας τα νούμερα): Κέρδισε. Ρε τον κυρ Θανάση.

( Εκείνη τη στιγμή ξαναμπαίνει η Μαρία η αλλοπαρμένη κοπέλλα κρατώντας ένα μπλοκ ζωγραφικής. Βλέπει τη Ζωή και πηγαίνει προς το μέρος της.

Μαρία: Με θυμάσαι;

Ζωή ( δοκιμάζει την τύχη της για να μην την απογοητεύσει): Ελένη;

Μαρία: Μαρία

Ζωή: Βέβαια Μαρία:

Μαρία: Μόλις σε είδα είπα αμέσως αυτή κάπου την ξέρω και ξαφνικά μου ήρθε. Κάτι στην έκφρασή σου…

Ζωή: Είναι απίστευτό, πόσα χρόνια έχουν περάσει;

Μαρία: Άσε τι να τα λέμε τώρα; Δεν με γνώρισες όμως έ;

Ζωή: Ναι δηλαδή.. όχι αμέσως αλλά τώρα θυμήθηκα τα πάντα… το πηγούνι…τα μάτια… τη μύτη…

Μαρία: Ε ναι..

Ζωή: Είπα Ελένη γιατί μού θύμισε μία φίλη της μαμάς μου. ( καταλαβαίνοντας την γκάφα της) Δεν έχεις όμως αλλάξει καθόλου. Αναλλοίωτη στον χρόνο ε…

Μαρία: Ε μετά από τόσα χρόνια…

Ζωή: Όχι θέλω να πω…. Σε αναγνωρίζει κανείς αμέσως…Άμα ξέρει ότι είσαι εσύ….Λοιπόν μένεις εδώ κοντά;

Μαρία: Ναι πάντα στο ίδιο μέρος…Εσύ ; Μένεις εδώ κοντά;

Ζωή: Όχι. Εγώ ήρθα για την κηδεία του πατέρα μου…

Χαρίλαος : Για να δούμε θα γίνει ποτέ….( τον κοιτάζει έντονα)

Ζωή: Τι να πεις στην ηλικία μας….Για πες μου είσαι παντρεμένη;

Μαρία: Έχω τέσσερα παιδιά…

Ζωή: Α μπράβο. Εγώ έχω μία κόρη.

(Δεν έχουν τι να πουν. Κοιτάζει το ντοσιέ στο χέρι της και πιάνεται από αυτό)

Ζωή: Ζωγραφίζεις ακόμη;

Μαρία: Ε ναι θες να δεις;

Ζωή: Δεν έχω πολύ χρόνο αλλά στα πεταχτά…

( Της δείχνει τα σκίτσα της που είναι φρίκη)

Ζωή: Α μάλιστα είναι…( δεν ξέρει τι να πει)

Μαρία: Πρέπει να βελτιώσω την τεχνική μου βέβαια…

Ζωή: Όχι είναι μια χαρά…. Αυτό το άλογο είναι υπέροχο

Μαρία: Είναι η γάτα μου…

Ζωή: Μα βέβαια είναι ξεκάθαρο…να τα αφτιά… το μουστάκι…Είναι αφηρημένη τέχνη ε;

Μαρία: Όχι. Προσπαθώ να είναι όσο πιο ρεαλιστική γίνεται.

Ζωή: Εγώ ξέρεις δεν το έχω και πολύ με τη ζωγραφική. Δεν καταλαβαίνω και πολλά πράγματα.

Μαρία: Το ξέρεις πως ήμουν ερωτευμένη μαζί σου όταν ήμασταν στο σχολείο;

Ζωή: Ορίστε;

Μαρία: Δεν τόλμησα ποτέ να στο πω τότε. Τι παράξενο. Μου κάνει καλό όμως που στο λέω τώρα.

Ζωή: Ναι.. δηλαδή…

Μαρία: Πρέπει να φύγω. Έχω ραντεβού σε μία γκαλερί να δείξω τα σχέδιά μου. Αν κάνω έκθεση θα σε φωνάξω.

Ζωή: Ναι…αν…

Μαρία: Να σε φιλήσω όπως παλιά;

Ζωή: ( αμήχανα) γιατί όχι;

Μαρία: ( τη φιλάει και φεύγει προς τα έξω. Και στην έξοδο της φωνάζει)

Μαρία: Ξέρεις προσπάθησα να σε βρω τόσες φορές στο Facebook αλλά Χριστίνα Παπαδοπούλου βρωμάει το τόπος… που να σε βρω…. Φιλιά

Ζωή: Χριστίνα Παπαδοπούλου;

( Μπαίνουν οι νεκροθάφτες με το καπάκι)

Ευθύμης: Να μαστε κι εμείς.

Ζωή: Καιρός ήταν.

Ζήσης: Μην ανησυχείτε όλα θα διορθωθούν στο πιτς φυτίλι.

Χαρίλαος : Να σας πως κάτι προτού βάλετε το καπάκι.

( Τους μιλάει χαμηλόφωνα)

Ζήσης: Είναι κάπως λεπτή η θέση μας.

Ευθύμης: Είναι που δεν έχουμε δικαίωμα να ψάξουμε στις τσέπες….

Χαρίλαος: Να ρωτήσετε τους δικούς του. Είναι μεγάλο το ποσό βρε αδελφέ…

Ζωή: Τι γίνεται πάλι;

Ζήσης: Είναι λεπτό το ζήτημα…

Νεφέλη: Έχουμε ξεπεράσει τις λεπτότητες εδώ και ώρες…

( Της εξηγούν)

Ζωή: Όχι, δεν βρήκαμε τίποτα.

( Συνεχίζουν να εξηγούν και η Κίτσα που κρυφακούει πηγαίνει προς την κουζίνα)

Νεφέλη: Δεν είναι δυνατόν.

Ζωή: Το τζακ ποτ;

Ζήσης: 10 εκατομμύρια ευρώ. Δεν κοστίζει τίποτα να το ελέγξουμε τώρα;

Ευθύμης: Μετά θα είναι κάπως δύσκολο.

( οι γυναίκες δέχονται και τα κοράκια πάνε στην κουζίνα. )

Νεφέλη: Το ήξερες εσύ ότι ο παππούς έπαιζε λόττο;

Ζωή: Εγώ δεν ήξερα τον παππού καλά καλά θα ήξερα τι έκανε;

(Βγαίνουν και φέρνουν το φέρετρο που το ακουμπάνε πάνω στο μπαρ)

Ζωή ( όλο ενθουσιασμό) Λοιπόν;

(Η κόρη της την κοιτάζει αυστηρά ότι θα έπρεπε να δείχνει πιο σεβασμό στη θέα του φέρετρου

Ζωή: ( με πένθιμο ύφος) Λοιπόν;

(Της κάνουν νόημα πως δεν βρήκαν τίποτα)

Ζωή: Ψάξατε καλά;

(Ο Ζήσης βγάζει ένα δελτίο από την τσέπη του.)

Ζήσης: Πλάκα σας έκανα!

Ζωή( χοροπηδώντας) Το τζακ ποτ; Ζήτω! ( Συνειδητοποιώντας πάλι τις συνθήκες παίρνει πένθιμο ύφος προς τον Χαρίλαο) Δεν έχω παίξει ποτέ λόττο. Τι πρέπει να κάνω για να πάρω τα χρήματα;

Χαρίλαος : Για ένα τέτοιο ποσό πρέπει να πάτε στα κεντρικά του ΟΠΑΠ. Δεν νομίζω να φαντάζεστε ότι έχω στο ταμείο να σας πληρώσω….Μπορώ να δω το δελτίο; Όπως και να το κάνεις εδώ συμπληρώθηκε.

(Του το δίνει τελετουργικά)

Ζωή: Καημένε πατέρα!! Και παραλίγο να μην κάνω αποδοχή κληρονομιάς.

Χαρίλαος: Αν είναι δυνατόν.

Ζωή: Τι συμβαίνει;

Χαρίλαος αυτό δεν είναι δελτίο του λόττο!

Ζωή: Ορίστε;

Χαρίλαος: Είναι ένα σκρατς.

Νεφέλη: Ε και;

Χαρίλαος : Δεν είναι το τζακ ποτ. Αλλά μια στιγμή κάτι κερδίζει κι αυτό.

(Περιμένουν όλοι με αγωνία)

Ζωή: Λοιπόν;

Χαρίλαος: Ένα ευρώ.

Ζωή: Σωθήκαμε! Ήταν πολύ ωραίο για να είναι αληθινό.

Χαρίλαος: Και τότε που είναι το δελτίο του λόττο που έπαιξε. Γιατί το θυμάμαι ότι το έπαιξε.

Ερασμία: Λέτε να του το έκλεψαν;

( Όλοι κοιτάζουν αρχικά τα κοράκια και μετά γυρίζουν προς την Κίτσα που έχει πάει σε μια γωνιά. Τη πλησιάζει ο Χαρίλαος._

Χαρίλαος: Τι έχετε στο χέρι σας; ( παλεύουν) Δεν το αφήνει με τίποτα η καρακάξα…

( Καταφέρνει να της το πάρει η Φρόσω)

Ζωή: Λοιπόν;

Χαρίλαος: Είναι δελτίο του λόττο. ( το κοιτάζει) Όχι ρε γαμώτο

Ζωή: Τι έγινε πάλι;

Χαρίλαος: δεν είναι το ΑΜΚΑ του!

Κίτσα : 23, 11, 19, 30, 16,5.

Νεφέλη: Ορίστε;

Χαρίλαος: Προφανώς εκείνη τη μέρα ο βλάκας έπαιξε άλλα νούμερα.

Νεφέλη: Ε και;

Φρόσω: δεν είναι λοιπόν αυτός που κέρδισε.

Νεφέλη: Καιρός ήταν να τελειώσει αυτή η κωμωδία.

Ερασμία : Και τι νούμερα έπαιξε αφού δεν έπαιξε το ΆΜΚΑ του

Κίτσα: 23, 11, 19, 30, 16,5.

Φρόσω: Αυτά εδώ ( της δείχνει το δελτίο)

Ερασμία: Καλέ αυτό είναι το κινητό μου. Θα πρέπει να το είδε στις αγγελίες του περιοδικού…. Αν τον μπαγάσα….Παρεμπιπτόντως που είναι το κινητό μου;

Χαρίλαος: Δεν το βρήκα. Πάρε από το σταθερό να χτυπήσει να το βρούμε.

( Το τηλέφωνο χτυπάει μέσα στο φέρετρο)

Φρόσω: Μα τι δουλειά έχει εκεί μέσα;

Ερασμία: Και πως θα πάρω εγώ το κινητό μου; Το χρειάζομαι. Περιμένω σημαντικά τηλεφωνήματα.

( Το τηλέφωνο αρχίζει να χτυπάει ξανά)

Ερασμία: το βλέπετε;

Χαρίλαος : ( στου νεκροθάφτες) Έχει βάλει μία αγγελία για γαμπρό στο Κυνηγός και Φύση… και δεν έχει σταματήσει να χτυπάει.

Ευθύμης: Κυνηγάτε; Δεν λυπάστε τα κακόμοιρα τα ζωάκια;

Ζήσης: ( ζοχαδιασμένος) Τι θα γίνει με αυτό το φέρετρο; Άνοιξε κλείσε άνοιξε κλείσε….

( Ανοίγουν το καπάκι και βγάζουν το τηλέφωνο που συνεχίζει να χτυπάει. Το παίρνει η Ερασμία και απαντάει με σέξι φωνή)

Ερασμία: Παρακαλώ;…

(Βλέπει ότι όλοι την κοιτάζουν και απομακρύνεται για να μιλήσει. Οι νεκροθάφτες κλείνουν το καπάκι)

Χαρίλαος: Και τότε ποιος είναι ο κερδισμένος;

(Ανεβαίνει από το υπόγειο ο Ιωσήφ ουρλιάζοντας και χοροπηδώντας)

Ιωσήφ: Δεν είναι δυνατόν. Κέρδισα… Κέρδισα το λόττο. Τώρα άκουσα τα νούμερα στο ραδιόφωνο…Και μάλιστα το είχα παίξει εδώ προχθές….

Χαρίλαος : Κοίτα τον κωλόφαρδο.

Ερασμία: Συγχαρητήρια…Το όνομά σας;

Ιωσήφ: Ιωσήφ.

Ερασμία: Ιωσήφ; Εσάς περιμένω σαν τον Μεσσία..

Ιωσήφ: Κι εσείς;…. Εδώ είμαι…. Λοιπόν κερνάω το μαγαζί.

(Χτυπάει το κινητό της Ερασμίας πάλι. Το κλείνει χωρίς να απαντήσει)

Ερασμία: Τέλος. Η περίοδος του κυνηγιού έκλεισε.

(Χτυπάει το τηλέφωνο)

Φρόσω: Καφενείο Το τέρμα σας ακούω….

Φρόσω: (σε όλους) είναι ο παπάς. Ρωτάει αν η κηδεία είναι για σήμερα ή για αύριο;

Ζήσης: Για σήμερα είναι αλλά δεν βιαζόμαστε. Πες του να έρθει να πιει μαζί μας ένα ποτηράκι.

Ιωσήφ: (δείχνει το φέρετρο) Αυτός ποιος είναι;

Χαρίλαος : ο κυρ Θανάσης. Μεγάλη ιστορία. Μα τι έκανα τα κλειδιά σας;

(Κοιτάζει το φέρετρο. Και μετά τον Ζήση)

Ζήσης: Ε όχι!!!

Χαρίλαος : Τι να σε κεράσω;;;

Ευθύμης: ο κακόμοιρος ο κυρ Θανάσης δεν έχει καμία τύχη. ( κοπανάει το φέρετρο) ούτε να τσουγκρίσει μαζί μας δεν μπορεί.

(Βγάζουν το καπάκι για να πάρουν τα κλειδιά και ανασηκώνεται ο κυρ Θανάσης. Εκεί που όλοι πίνουν και τσουγκρίζουν και γελάνε μένουν κόκκαλο)

Κυρ Θανάσης: Και μετά σου λένε αιώνια ανάπαυση. Ούτε στην άλλη ζωή δεν βρίσκει κανείς ησυχία τελικά.

Ζήσης: ( τείνει ένα ποτήρι προς το μέρος του) : Έλα ένα τελευταίο στην Υγειά μας.

www.sacd.fr

ΚΑΦΕΝΕΙΟΝ «ΤΟ ΤΕΡΜΑ» Lire la suite »