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La bonne nouvelle

Un homme, dans un lit, reprend peu à peu connaissance. Une femme arrive, façon executive-woman, avec à la main un ordinateur portable dans une serviette.

Femme – Cher Monsieur bonjour !

Homme – Bonjour…

Femme – Excusez-moi un instant, ce ne sera pas long.

Homme – Je vous en prie…

Elle sort le portable de la serviette, l’allume et le place sur la table de nuit de façon à ce qu’il voie l’écran.

Femme – Vous vous souvenez du code, pour le wifi ?

Homme – Je ne me souviens même pas de mon nom.

Femme – Ça ne fait rien, on s’en passera. (Après s’être éclairci la gorge) Cher Monsieur, j’ai souhaité vous rencontrer sans tarder, parce que j’ai de bonnes nouvelles à vous annoncer.

Homme – Un nouveau produit, peut-être ? Un remède miracle ? Quelque chose qui pourrait me sauver la vie.

Femme – Vous m’ôtez les mots de la bouche, cher Monsieur. En effet, les nouveaux produits financiers que j’ai à vous proposer pourraient changer votre vie.

Homme – J’en conclus que vous n’êtes pas médecin.

Femme – Je suis votre conseiller financier. Vous êtes bien titulaire d’un compte au Crédit Général, n’est-ce pas ?

Homme – Oui, peut-être.

Femme – Et je peux vous assurer que vous faites partie de nos meilleurs clients.

Homme – Tant mieux. Parce que je ne suis même pas sûr d’être un bon catholique…

Femme – Rassurez-vous, ce n’est pas obligatoire pour spéculer en bourse. Et en tant que client privilégié de notre banque, j’ai tenu à vous proposer en priorité nos nouvelles opportunités de placement, d’un rendement absolument exceptionnel.

Homme – Ah oui…

Femme – Regardez ce graphique. (Elle lui montre une courbe.) Notre nouveau fonds d’investissement, Le Phoenix en Actions, a gagné 27% en six mois.

Homme – Le Phoenix ? Ah oui, ça fait rêver. Mais pourquoi ce nom ?

Femme – L’année d’avant, hélas, Le Phoenix avait perdu 73% de sa valeur boursière. C’est un placement risqué, réservé aux investisseurs les plus audacieux, mais qui renaît toujours de ses cendres !

Homme – Je ne suis pas sûr de pouvoir en dire autant.

Femme – Allons, je suis sûre de reconnaître en vous un battant. La bourse, c’est un placement toujours gagnant sur le long terme.

Homme – Vous savez, le long terme, pour moi… Je vous ai dit que je venais de recevoir l’extrême-onction ?

Femme – J’allais y venir, cher Monsieur. Je ne vous cache pas qu’il faut vous décider rapidement. Il s’agit d’une opportunité exceptionnelle. Mais il n’y en aura pas pour tout le monde. Nous ne pourrons servir que nos clients les plus réactifs.

Homme – Je ne suis pas sûr d’être encore très réactif, même aux traitements médicaux. À vrai dire, j’en suis à me demander si je ne suis pas déjà mort…

Elle ouvre sa housse et en sort une brochure qu’elle lui tend avec un sourire commercial.

Femme – Rassurez-vous… Nous avons aussi toute une gamme de produits en matière d’assurance-vie et d’assurance-décès.

Homme (prenant le document) – Merci…

Femme – Je vous laisse réfléchir, cher Monsieur. Nous n’allons pas non plus vous harceler, n’est-ce pas ? Nous sommes là avant tout pour vous conseiller…

Homme – C’est ça, je vais réfléchir.

Femme – Je vous laisse, j’ai d’autres investisseurs potentiels à voir dans cet établissement. D’ailleurs qu’est-ce que c’est ? Une sorte de maison de retraite ?

Homme – Une Unité de Soins Palliatifs.

Femme – Tout à fait. Alors à très bientôt. Mais réfléchissez vite, cher Monsieur. Dans votre cas, surtout, vous n’avez pas de temps à perdre… et ce serait dommage de passer à côté d’une telle opportunité.

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Extrême-onction

Un homme est assis dans son lit. Il regarde dans le vide. Arrive une femme, habillée en prêtre.

Femme – Bonjour mon fils.

Homme (à peine surpris) – Bonjour papa…

Femme – Je suis l’aumônier de cet hôpital.

Homme – Bonjour mon père.

Femme – Je suis venue dès que vous m’avez appelée.

Homme – Vous êtes vraiment sûr que c’est moi qui vous ai appelé ?

Femme – Quelqu’un m’a dit de venir vous voir. Il avait un léger accent roumain.

Homme – Ah oui… C’est mon chirurgien…

Femme – J’ai cru comprendre que c’était assez urgent… Mais si vous pensez que vous n’êtes pas prêt, je peux repasser un peu plus tard.

Homme – Non, non, je vous en prie. Et puis comme ça, ce sera fait. Au cas où. Enfin, je ne sais pas combien de temps c’est valable…

Femme – Valable ?

Homme – Je veux dire une extrême-onction. Si on ne meurt pas tout de suite, c’est valable combien de temps, après ? Dans les trois mois, j’imagine. Comme un certificat médical.

Femme – J’avoue que… On ne m’avait encore jamais posé la question. Et comme le cas ne s’est encore jamais présenté pour moi…

Homme – Vous voulez dire qu’aucune de vos ouailles n’a jamais survécu après avoir reçu votre viatique ?

Femme – C’est-à-dire que… En effet…

Homme – Et vous êtes vraiment sûr que je suis catholique ?

Femme – Ma foi… Je vous avoue que je n’ai jamais pensé à exiger un certificat de baptême dans ce genre de circonstances. Je vois mal un mourant mentir sur sa religion pour obtenir une extrême-onction in extremis. Vous n’êtes pas sûr d’être catholique, mon fils ?

Homme – Je ne me souviens pas non plus d’être juif ou musulman. Et comme je ne suis pas circoncis. Vous êtes sûr que je ne suis pas circoncis ?

Femme – Mon Dieu…

Homme – Excusez-moi, je vous embarrasse avec toutes mes questions. Mais vous savez, je n’ai pas trop l’habitude. C’est ma première extrême-onction…

Femme – Oui, je m’en doute… Souhaitez-vous au moins vous confesser, mon fils ?

Homme – Je ne sais pas, c’est… C’est obligatoire ?

Femme – Disons que c’est vivement conseillé. Pour le salut de votre âme.

Homme – Bon… Après tout, qu’est-ce que je risque ?

Femme – Je vous écoute, mon fils.

L’homme réfléchit, puis la regarde comme s’il la découvrait.

Homme – Je dois vous avouer que…

Femme – Oui ?

Homme – C’est un peu embarrassant.

Femme – Et pourquoi cela, mon fils ?

Homme – Vous ressemblez tellement à ma femme.

Femme – Je vois…

Homme – Vous comprendrez que pour un homme marié, avoir l’impression que son confesseur ressemble à sa femme…

Femme – Rassurez-vous, mon fils. Même si j’étais votre femme, je serais liée par le secret de la confession…

Homme – Bon… Mais, je ne sais pas très bien par où commencer…

Femme – Vous n’avez qu’à commencer par la fin.

Homme – C’est très difficile de se confesser quand on a perdu la mémoire, vous savez…

Femme – Est-ce qu’au moins vous vous sentez coupable, mon fils ? Ce serait un début…

Homme – Je ne sais pas… Est-ce qu’on est encore coupable quand on a perdu jusqu’au souvenir de ses fautes ?

Femme – Vous ne vous souvenez vraiment de rien ?

Homme – Je ne me souviens même pas où j’ai garé ma voiture.

Femme – Puisque vous n’êtes pas en mesure de confesser vos péchés, je vous donne malgré tout l’absolution. Au bénéfice du doute…

Homme – Merci de me faire confiance, mon père. J’essaierai de ne pas vous décevoir.

Femme – Mais n’oubliez pas de régulariser votre situation dès que vous le pourrez.

Homme – C’est promis. Juré craché sur vos tombes.

Elle le bénit d’un signe de croix.

Femme – Au nom du père, de la mère et du fils.

Homme – Amen.

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Dieu le Père

Une chambre d’hôpital. Un graphique médical au pied du lit. Un homme se réveille. Il a une perfusion. Une femme arrive, en blouse blanche de médecin.

Femme – Alors cher Monsieur ? Comment ça va aujourd’hui ?

Homme – Ça va… Enfin… Mais qu’est-ce que vous faites dans ma chambre ?

Femme – Ah… Cette simple question semble indiquer que vous n’avez pas encore tout à fait recouvré votre mémoire immédiate.

Homme – Je ne me souviens de rien… sauf que vous m’avez déjà dit ça.

Femme – Ne vous inquiétez pas, c’est très fréquent après ce genre d’intervention. Dès qu’on touche au cerveau…

Homme – Le cerveau ? Je vois…

Femme – Si vous voyez encore, c’est déjà ça… Écoutez, on ne va pas se mentir, votre état… est très préoccupant.

Homme – Vous voulez dire préoccupant pour moi, j’imagine ?

Femme – J’aurais aimé pouvoir vous annoncer de bonnes nouvelles, mais que voulez-vous ? Je ne suis pas Dieu le Père.

Homme – Ce qui pour moi serait plutôt en soi une bonne nouvelle.

Femme – Vous trouvez ?

Homme – Se réveiller d’une opération au cerveau et voir Dieu le Père…

Femme – Bien sûr… Donc, les résultats de nos premières analyses ne sont pas très encourageants… pour vous.

Homme – J’entends bien.

Femme – Si vous entendez encore, c’est déjà ça…

Homme – Et donc vous dites que… c’est grave.

Femme – Mon Dieu… Pas forcément…

Homme – Comment ça ?

Femme – Ce qui est grave, c’est que… nous ne savons pas du tout ce que vous avez.

Homme – Ah… Et j’imagine que ça… c’est grave pour vous.

Femme – Si on ne sait pas ce que vous avez, on ne sait pas non plus comment vous soigner. Bref, on ne sait pas quoi faire… Et quand on ne sait pas quoi faire, on ne sait pas quoi dire. Franchement, cher Monsieur, je ne sais pas quoi vous dire…

Homme – Écoutez, Docteur… Je peux vous appeler Docteur ?

Femme – J’ai obtenu mon diplôme de médecine en Roumanie… (Aux anges) Mais oui, je vous en prie. Appelez-moi Docteur.

Homme – Je sais que vous vous faites beaucoup de souci pour moi, mais pour ma part… c’est plutôt l’état mental de ma femme qui m’inquiète.

Femme – Votre femme ? Allons bon…

Homme – C’est difficile à croire, mais… Figurez-vous que ma femme se prend pour une martienne.

Femme – Voyez-vous ça…

Homme – Ça n’a pas l’air de vous étonner.

Femme – Si bien sûr, mais… Pour tout vous dire… (Elle consulte un dossier.) J’ignorais que vous étiez marié… En tout cas, ce n’est pas indiqué dans votre dossier médical.

Homme – Ils ont peut-être considéré que ce n’était pas une maladie assez grave pour être signalé.

Elle rit d’une façon un peu forcée.

Femme – En tout cas, vous avez retrouvé votre sens de l’humour. Et ça c’est bon signe, n’est-ce pas ? Vous connaissez Ionesco ?

Homme – Pas personnellement.

Femme – Il était roumain, comme moi. Et j’ai l’honneur de porter le même patronyme que lui. D’après ma mère, nous sommes vaguement apparentés.

Homme – Vraiment ?

Femme (sur le ton de la confidence) – Entre nous, j’ai toujours pensé que les Roumains étaient davantage faits pour le théâtre de l’absurde que pour la chirurgie du cerveau.

Homme – Merci Docteur Ionesco. C’est tout à fait le genre de propos rassurants qu’un patient a envie d’entendre de la bouche de son chirurgien en salle de réveil…

Femme – Mais je vous en prie. Je suis là pour ça. Si vous avez d’autres questions à me poser, n’hésitez pas.

Homme – Et… pour ma femme, vous pouvez faire quelque chose ?

Femme – Votre femme ? Mon Dieu… Il faudrait d’abord être sûr que vous avez bien une femme…

Homme – Ah oui, évidemment.

Femme – Et ensuite que votre femme n’est pas vraiment une extraterrestre.

Homme – Comment ça ?

Femme – Vous conviendrez que si votre épouse présumée est vraiment martienne, on ne peut pas la tenir pour folle si elle affirme venir de la planète Mars.

Homme – C’est vrai que vu comme ça…

Femme – En tout cas, c’est ce qu’on nous apprend dans les facultés de médecine en Roumanie.

Il la regarde comme s’il la découvrait seulement.

Homme – C’est fou, Docteur Ionesco…

Femme – Quoi donc ?

Homme – Ce que vous ressemblez à ma femme. Enfin, ce que vous ressembleriez à ma femme si j’étais marié.

Femme – Et pourtant… je vous assure que moi, je ne viens pas de la planète Mars.

Homme – Non, vous venez de Roumanie. Et… c’est bien vous qui m’avez opéré, n’est-ce pas ?

Femme – Malheureusement pour vous… J’imagine qu’un médecin venu d’un autre endroit de la galaxie aurait pu vous sauver.

Homme – Vous croyez…?

Femme – À ce qu’on dit, ces gens là sont beaucoup plus évolués que nous. En tout cas, on peut raisonnablement supposer que leurs médecins sont mieux formés que de simples internes ayant fait leurs études à Bucarest…

Homme – Oui, enfin…

Femme – Vous avez raison… À ce niveau-là de supputation, je me demande si on peut encore parler de suppositions raisonnables, n’est-ce pas ? Je vais vous laisser vous reposer… Je repasserai un peu plus tard…

Homme – Je peux vous demander encore un service ?

Femme – Tant que ce n’est pas de vous sauver la vie…

Homme – Si vous croisez ma femme, dites-lui que je ne suis pas marié.

Femme – Je n’y manquerai pas.

Homme – Merci.

Elle s’apprête à partir mais se retourne une dernière fois vers lui.

Femme – Je peux vous demander quelque chose, moi aussi ?

Homme – Tant que ce n’est pas comment je m’appelle.

Femme – Vous pourriez m’appeler encore une fois Docteur ?

Homme – Merci Docteur Ionesco. Au revoir Docteur.

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Immaculée conception

Un homme en pyjama rayé est couché dans un lit. Il se réveille peu à peu. Il se redresse, s’assied et regarde autour de lui, semblant ne pas savoir ce qu’il fait là. Une femme arrive. Elle paraît vingt ans de moins (vêtements plus jeunes, rouge à lèvres, allure décidée). Elle apporte sur un plateau un petit déjeuner sommaire.

Femme – Bonjour !

L’homme a visiblement un peu de mal à émerger.

Homme – Bonjour…

Femme – Comment ça va ?

Homme – Ça va… Je crois.

Femme – Tiens, voilà ton petit déjeuner.

Homme – Un petit déjeuner au lit ? Merci, mais… c’est en quel honneur ?

Elle ne répond pas, sourit avec indulgence, et s’assied à son chevet.

Femme – Je ne sais pas ce que vaut le café. Ce n’est sûrement pas un expresso.

Homme – Ça ne fait rien, je le boirai quand même… J’ai l’impression d’avoir la gueule de bois.

Il commence à boire son café et à manger une biscotte.

Femme – Désolée, je crois que ce sont des biscottes sans sel…

Il sourit et continue à mastiquer sa biscotte.

Homme – Tu sais ce que je me disais ?

Femme – Non…

Homme – Je ne pense pas qu’on puisse vraiment changer les choses.

Femme – Les choses ? Tu veux dire…

Homme – Ou les gens.

Femme – Ah oui…

Homme – Moi, par exemple, avec ma famille… J’ai tout de suite compris que ça ne pourrait pas marcher.

Femme – Ta famille ? Je te rappelle que je suis ta femme…

Homme – Non mais je ne parle pas de ça, bien sûr. Toi, c’est autre chose… (Un temps) Et tu es sûre qu’on est mariés ?

Femme – Pourquoi tu me demandes ça ?

Homme – Je ne sais pas… Je dors dans un lit à une place…

Femme – Ah oui…

Homme – Je ne me souviens même pas que je suis marié, tu te rends compte ? Le médecin m’a dit que c’était normal. Je n’ai pas encore recouvré la mémoire immédiate.

Femme – On est mariés depuis vingt ans…

Homme (ailleurs) – Oui, c’est bizarre, hein ? Vous n’avez pas encore recouvré la mémoire immédiate. C’est la dernière chose que j’ai entendu, et je ne me souviens que de ça… (Un temps). Je ne sais pas… Ça me vient peut-être de là…

Femme – Quoi ?

Homme – Ce besoin que j’ai toujours eu de tout gâcher… Pour ne pas risquer d’être déçu… (Il prend la pomme et la regarde.) Quand le ver est dans la pomme, ça ne peut se terminer bien pour personne.

Femme – Sauf pour le ver… (Il la regarde étonné, et elle se reprend aussitôt.) Excuse-moi, je ne sais pas pourquoi j’ai dit ça…

Homme – Non, tu as raison, c’est vrai… On ne pense jamais au ver.

Femme – Et puis tu n’es pas une pomme.

Homme – Je ne sais pas. Je ne sais plus.

Femme – Tu as bien pris tes médicaments ?

Homme – Quels médicaments ?

Femme – Je vais te chercher un verre d’eau.

Elle sort. Il croque à nouveau dans la pomme. Elle revient avec quelque chose de changé, dans le vêtement (un accessoire) ou la coiffure (une perruque). Rien d’extravagant, mais quelque chose de très voyant et d’un peu étrange. Il semble ne rien remarquer. Elle lui tend un verre d’eau, comme si de rien n’était.

Homme – Merci.

Il prend les cachets qu’elle lui tend et les avale. Elle le regarde fixement.

Homme – Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce que j’ai ?

Femme – Il faut que je te dise quelque chose.

Homme – OK.

Femme – Ce n’est pas facile.

Homme – Tu me fais peur…

Femme – Non mais, ce n’est pas à propos de toi. Enfin si, mais…

Homme – Bon…

Femme – Eh bien voilà, je… Je ne suis pas exactement… celle que tu crois.

Homme – Comment ça ? Mais je ne crois rien, moi.

Femme – Quand même, je suis ta femme.

Homme – Tu veux dire que… tu me trompes ?

Femme – Non, ce n’est pas du tout ça. Enfin…

Homme – Enfin quoi ?

Femme – Je ne te trompe pas, au sens où… Mais je t’ai trompé.

Homme – Quand ? Avec qui ?

Femme – Pas avec un autre homme, en tout cas, rassure-toi.

Homme – Je n’étais pas inquiet.

Femme – Non, par… je t’ai trompé, je veux dire que je ne t’ai pas dit la vérité. Je t’ai menti.

Homme – À propos de quoi ?

Femme – À propos de tout. Depuis toujours. En fait, je ne suis pas tout à fait une femme…

Homme – Je suis marié avec un homme et je ne m’en suis jamais rendu compte ?

Femme – Je ne suis pas un homme non plus.

Homme – D’accord… Entre les deux, donc.

Femme – Je dirais plutôt ni l’un ni l’autre.

Homme – Bon… alors c’est pour ça qu’on n’a jamais eu d’enfant, j’imagine.

Femme – Oui… Entre autre…

Homme – Parce qu’il y a autre chose ?

Femme – Je ne suis pas d’ici.

Homme – Ici ? Mais où est-ce qu’on est, au juste ?

Femme – Je viens d’un autre monde que le tien.

Homme – Tu es une sorcière… Tu t’appelles Samantha et je m’appelle Jean-Pierre.

Femme – Les sorcières, ça n’existe pas. Tout le monde le sait.

Homme – Donc tu n’es pas une sorcière non plus.

Femme – Tu te souviens de ma mère ?

Homme – Non.

Femme – Elle a accouché de moi après avoir reçu la visite d’un extraterrestre.

Silence. Il la regarde, semblant chercher quoi répondre.

Homme – J’ai l’impression d’avoir déjà entendu une histoire comme ça quelque part.

Femme – Dans une église, peut-être. À propos de la grossesse de la Vierge Marie.

Homme – Oui… Ou alors c’est à cause des médicaments…

Même pas Mort

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Lève-toi et marche

Un homme est couché dans le lit, en pyjama rayé. Il dort. Entre une femme qui pourrait être sa mère (vêtements vieillots, absence de maquillage, démarche peu dynamique). Elle s’approche du lit.

Femme – C’est l’heure… (Comme il ne répond pas, elle hausse le ton en le secouant énergiquement.) C’est l’heure !

L’homme se réveille en sursaut et la regarde, un peu perdu.

Homme – Maman ? Mais qu’est-ce que tu fais là ?

Femme – C’est l’heure, mon grand.

Homme – L’heure ? Quelle heure ?

Femme – Je ne sais pas. Mais c’est l’heure.

Homme – Mais enfin… L’heure de quoi ?

Il fait un effort pour se relever, avant de s’interrompre pour reprendre des forces.

Femme – Allez, fainéant ! Fais un effort, bon sang ! Lève-toi et marche !

Il reprend un peu ses esprits.

Homme – J’ai l’impression d’avoir déjà entendu ça quelque part.

Femme – Malheureusement, il faut que je te le répète tous les matins. (L’homme regarde sa mère avec un air étonné.) Ça va ? Tu as l’air bizarre…

Homme – C’est toi qui me dis ça ? Écoute maman, ne le prends pas mal, mais…

Femme – Quoi ?

Homme – Je te croyais morte…

Femme – Mais… je le suis.

Un temps.

Homme – Je me disais bien aussi que tu avais quelque chose de changé.

Femme (avec un air pincé) – Ah oui ?

Homme – Non mais… en mieux, je t’assure ! Et papa ?

Femme – Il est mort aussi. Et toi, tu es sûr que tu n’es pas mort ?

Homme – Je ne crois pas…

Femme – Donc tu n’es pas sûr.

Homme – J’imagine que quand on est mort, on le sait, non ?

Femme – Oh, ça… Tu manges bien, au moins ?

Homme – Je ne sais pas… Pourquoi ?

Femme – Si tu manges, c’est que tu n’es pas mort.

Elle fouille dans la poche de son manteau, et en sort une pomme, qu’elle lui tend.

Femme – Tiens, je t’ai apporté ça.

Il prend la pomme avec une certaine méfiance.

Homme – Une pomme… Comme la sorcière dans Blanche-Neige…

Femme – Tu te prends pour Blanche-Neige ?

Homme – Je me méfie, c’est tout.

Femme – Tu te méfies de ta propre mère ?

Homme – Je te rappelle que tu es censée être morte.

Femme – Tu me prends pour une sorcière, c’est ça ?

Homme – Je me méfie de l’eau qui dort. Alors de la mère morte…

La femme regarde autour d’elle.

Femme – Ce n’est pas très gai, cet endroit…

Il semble découvrir à son tour les lieux.

Homme – Non… Où est-ce qu’on est ?

Femme – Ça ressemble à un asile d’aliénés.

Homme – J’imagine que si j’étais fou, on m’aurait mis une camisole.

Femme – Et ta femme ? Elle vient te voir, de temps en temps ?

Homme – Non… Enfin, je ne me souviens pas bien… Je suis marié ?

Femme – Et tes amis ? Tu as des amis, au moins ?

Homme – Je ne sais pas. Je n’ai vu personne.

Femme – Qu’est-ce que tu veux, c’est comme ça… Depuis que tu es tout petit… Tu n’as jamais été très populaire…

Homme – Merci… Ça me remonte le moral…

Femme – Même moi, je me demande pourquoi je suis venue. Tu n’es même pas mort !

Homme – Désolé de te décevoir encore une fois.

Femme – Décidément, tu auras tout raté, dans ta vie. (Elle se lève, commence à partir mais se retourne une dernière fois.) Même ton décès.

Elle sort. Il regarde la pomme. Il croque dedans et repose le reste sur la table de nuit. Il mastique un moment avant d’avaler le morceau.

Homme – Donc, je ne suis pas mort…

Même pas Mort

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Retour

Fred arrive d’un côté, Cécile de l’autre.

Cécile – Fred ? Qu’est-ce que tu fais ici ?

Fred – Eh bien tu vois, je… Je suis revenu.

Cécile – Revenu ?

Fred – J’habite à Paris, maintenant.

Cécile – Super… Ça me fait plaisir de te voir.

Fred – Moi aussi… Comment ça va ?

Cécile – Ça va… Ça va mieux.

Fred – Je suis vraiment désolé.

Cécile – C’est la vie. Mais c’est dur…

Fred – Je comprends.

Cécile – Pour vous aussi, j’imagine. C’était votre ami.

Fred – Oui.

Cécile – Et toi, comment ça va ?

Fred – Ça va.

Cécile – Tu vas rester longtemps à Paris ?

Fred – J’ai acheté une maison.

Cécile – Tu as réussi à trouver une maison à Paris ?

Fred – Je travaille dans l’immobilier, tu sais.

Cécile – Ah oui, c’est vrai.

Fred – Parc Montsouris.

Cécile – Parc Montsouris… C’est le Sud, non ?

Fred – Le Sud de Paris, oui. C’est la première fois que j’achète une maison. Jusque là… j’étais plutôt du genre nomade.

Cécile – Et Max, tu l’as revu ?

Fred – Je le quitte à l’instant, là. Il m’a filé un coup de main pour mon déménagement.

Cécile – Les copains, c’est fait pour ça, non ?

Fred – Oui… Et toi, tu les vois toujours ? Je veux dire… depuis qu’ils sont divorcés.

Cécile – Bien sûr. Alice est une amie…

Fred – Ah oui, c’est vrai… Je crois même que sans toi…

Cécile – Quoi ?

Fred – Non, rien… Et donc toi… tu vas rester dans le coin.

Cécile – Pour l’instant, oui. Après on verra. Je ne sais pas très bien où j’en suis.

Fred – Je comprends… Alors on se reverra ?

Cécile – Peut-être. Mais là, je vais devoir y aller…

Fred – Bien sûr. D’ailleurs moi aussi.

Cécile – À bientôt, peut-être…

Ils s’apprêtent à partir chacun de leur côté. Il la rappelle.

Fred – Cécile ?

Cécile – Oui ?

Fred – Si je t’avais demandé de partir avec moi aux États-Unis, ce soir-là, tu m’aurais suivi ?

Cécile – Tu ne me l’as pas demandé.

Elle sourit et s’en va. Il reste là un instant, et part à son tour.

Les Rebelles

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Demande

Alice prend un café. Max arrive.

Alice – Ça va ?

Max – J’ai un peu mal aux cheveux, mais ça va. Je crois que j’ai un peu forcé sur le champagne…

Alice – Ce n’est pas tous les jours qu’on marie son meilleur copain.

Max – Non…

Alice – C’était sympa.

Max – Oui.

Alice – Ça fait longtemps qu’on ne s’était pas retrouvé comme ça, tous ensemble.

Max – Oui… Enfin… presque tous…

Alice – Il faudrait faire ça plus souvent.

Max – Oui. Il faudra trouver une autre occasion.

Un temps.

Alice – J’ai bien une idée, mais…

Max – Ah oui ?

Alice – Pas toi ?

Max – Je ne sais pas…

Un temps.

Alice – Ça fait déjà un moment qu’on est ensemble. Je suis enceinte…

Max (feignant la surprise) – Tu es enceinte ? (Elle n’a pas l’air de trouver ça drôle.) Je plaisante…

Alice – Je sais, traditionnellement… ce serait plutôt à toi de me faire ta demande, mais… comme ça ne vient pas.

Max – Je suis désolé, je ne pensais pas que… c’était important pour toi.

Alice – Je n’ai pas dit que c’était important, mais… ce serait logique, non ?

Max – Logique ?

Alice – Je veux dire, ce serait dans l’ordre des choses. On habite ensemble, on va avoir un enfant…

Max – Bien sûr.

Alice – Cache ta joie.

Max – Excuse-moi, c’est juste que… Je ne pensais pas qu’on aurait cette conversation ce matin. Je te l’ai dit, j’ai la gueule de bois…

Elle se lève.

Alice – Ce n’était déjà pas évidemment pour moi de t’en parler, mais là, tu vois, je me sens… vraiment mal.

Il se lève et la prend dans ses bras.

Max – Excuse-moi, je suis vraiment désolé. Bien sûr, on va se marier… On s’aime, non ?

Alice – C’est moi qui suis désolée. Pardon. Je n’ai pas été très… C’est ma première demande en mariage, tu comprends.

Max – Oui… Ça se voit un peu.

Alice – Mais il ne faut pas que ce soit une obligation, non plus… Si tu n’as pas envie…

Max – Alice, est-ce que tu veux être ma femme ?

Alice – Oui, je le veux

Max – Alors je nous déclare unis par les liens du mariage.

Alice – Vous pouvez embrasser la mariée…

Ils s’embrassent.

Les Rebelles

Demande Lire la suite »

Désaccord

Max est là avec une guitare basse qu’il est en train d’accorder. Vincent arrive avec une guitare.

Max – Tu as jeté un coup d’œil dans la salle ?

FredOuais…

Max – C’est plein à craquer, tu te rends compte ! Il y en a même qui essaient d’entrer par la sortie de secours, il paraît.

Fred – Ah ouais ?

Max – Tu ne vas pas le croire, il y a une nana qui m’a demandé un autographe…

Fred – Tu lui as laissé ton numéro ?

Max – Même pas…

Fred – Elle n’était pas terrible…?

Max – Elle avait quatorze ans…

Fred – D’accord…

Max – Non mais tu entends ça ?

Fred (la tête ailleurs) – Quoi ?

Max – Ils s’impatientent. Ils sont déjà en train d’applaudir. Notre public nous réclame !

Fred – Ah ouais…

Max – Fred ? Je sens qu’il se passe quelque chose, là. Tu verras, mon vieux. Dans quelques années, quand on sortira notre troisième album, et qu’on fera notre premier Olympia, on se souviendra de ce concert, et on se dira que c’est là où tout a commencé.

Vincent a l’air de chercher quelque chose.

Fred (préoccupé) – Ouais…

Max – Ça va ? Tu n’es pas trop défoncé, au moins ?

Fred – Non, non… Enfin si, mais…

Max – Qu’est-ce qui se passe ?

Fred – J’ai cassé une corde.

Max – Tu as largement le temps de la changer. Et puis si on se fait attendre un peu… Ça fera monter la pression.

Fred – Le problème c’est que… je n’ai pas la corde de rechange.

Max – Tu n’as pas de cordes de rechange ?

Fred – J’en ai, mais… pas celle-là.

Max – Comment ça pas celle-là ?

Fred – La corde de si. Je n’ai pas la corde de si.

Max – C’est une blague ?

Fred – Non…

Max – Putain Vincent…

Fred – Tu n’en aurais pas une, toi ?

Max – Si. J’ai deux jeux de cordes de rechange pour ma basse. Pourtant les cordes de basse, ça ne casse pas souvent, tu vois.

Fred – Désolé…

Max – Il n’y a pas un magasin de musique, dans le coin ?

Fred – On est dimanche.

Max – Putain… Alors qu’est-ce qu’on fait ?

Fred – Ben… je ne jouerai pas avec cette corde-là, voilà.

Max – Super…

Fred – Il m’en reste quand même cinq.

Max – Si tu n’en casses pas une autre d’ici là…

Fred – Qu’est-ce que tu veux ? C’est mon côté destroy. Jimi Hendrix cassait bien sa guitare sur scène…

Max – Ouais, mais lui il attendait la fin du concert. Et je suis sûr que lui, il avait toujours un jeu de cordes de rechange. Pourquoi tu n’as pas de cordes de rechange ?

Fred – Je n’avais pas de thune.

Max – C’est ça… Mais pour acheter de la beuh, là tu as toujours des thunes.

Fred avance vers lui, menaçant.

Fred – Eh, oh, tu te prends pour ma mère, ou quoi ?

Max – C’est toi qui me prends pour ta mère, Fred. Alors c’est moi qui devrais avoir des cordes de rechange pour ta gratte de merde, c’est ça ? J’en ai ras le bol de jouer avec une bande de loosers.

Fred – Personne ne te retient, Max. Tu fais chier tout le monde. Nous on est là pour s’éclater, pas pour entendre tes leçons de morale…

Fred s’en va. Vincent arrive.

Vincent – Tu as vu le monde qu’il y a dans la salle ?

Max – Ouais.

Vincent – Depuis qu’on a une chanteuse, on a beaucoup plus de succès, tu as remarqué ?

Max – Elle chante faux.

Vincent – Apparemment, les mecs ne viennent pas seulement pour l’écouter… Il faut dire que… Il y a un problème ?

Max – Fred a pété une corde.

Vincent – Et alors…?

Max – Il n’a pas de corde de rechange.

Vincent – Ah merde… (Il sort un joint, l’allume, tire une bouffée et le tend à Max.) Tu en veux ? C’est du Libanais…

Max – Non merci, je préfère rester lucide…

Vincent (hilare) – Lucide ?

Max – Alors toi aussi, tu es défoncé.

Vincent – Complètement. Bon, on y va ? Je crois que notre public nous réclame…

Max – Putain, Vincent, tu ne comprends pas ! Fred joue déjà comme un manche avec six cordes, alors avec cinq. Le public va nous massacrer…

Vincent – Le public ? Ne t’inquiète pas. C’est nos potes ! Et ils sont encore plus défoncés que nous…

Désaccord Lire la suite »

Entrée de secours

Il est debout, les bras croisés, devant une porte imaginaire. Elle arrive.

Cécile – Excusez-moi, c’est bien ici, l’entrée des artistes ?

Tom – Affirmatif.

Cécile – Donc c’est bien par là qu’ils vont sortir.

Tom – Qui ça ?

Cécile – Les membres du groupe ! Les Rebelles !

Tom – Ah, je ne crois pas, non.

Cécile – Vous venez de me dire que c’était là.

Tom – Je vous ai dit que c’était l’entrée des artistes.

Cécile – Et alors ?

Tom – Je ne vous ai pas dit que c’était la sortie des artistes.

Cécile – Parce qu’il y a aussi une sortie des artistes ?

Tom – Ça je n’en sais rien, mademoiselle. Moi on m’a dit de surveiller cette porte, je la surveille, c’est tout…

Cécile – Mais regardez, à côté du panneau « entrée des artistes », c’est aussi marqué « sortie de secours ».

Tom – Ah oui…

Cécile – Ça veut dire qu’ils peuvent aussi sortir par là.

Tom – S’il y a un incendie, oui.

Cécile – Vous pensez qu’ils ne sortiront par là que s’il y a un incendie ?

Tom – Un incendie ou…

Cécile – S’il y a une sortie de secours… il y a peut-être aussi une entrée de secours.

Tom – Pour quoi faire ?

Cécile – Je ne sais pas… Au cas où il y aurait un incendie dehors.

Tom – Peut-être.

Cécile – Donc vous ne savez pas par où ils vont sortir ?

Tom – Non.

Cécile – Vous n’êtes pas au courant de grand chose. Pour un vigile…

Tom – Je ne fais que mon boulot.

Cécile – Et c’est quoi votre boulot ?

Tom – De surveiller l’entrée des artistes.

Cécile – Pour ?

Tom – Pour que personne ne rentre.

Cécile – Sauf les artistes, donc.

Tom – Sauf les artistes.

Cécile – Bon, mais moi, je ne veux pas entrer. Je veux juste leur demander un autographe quand ils vont sortir.

Tom – Pour sortir, il faudrait déjà qu’ils soient rentrés.

Cécile – Ah parce qu’ils ne sont pas encore entrés ?

Tom – Non.

Cécile – Vous auriez pu me le dire avant.

Tom– Vous ne me l’avez pas demandé.

Cécile – D’accord…

Tom – Du coup, vous pourrez toujours leur demander quand ils vont rentrer.

Cécile – Leur demander quoi ?

Tom – Leur demander par où ils vont sortir.

Cécile – Ce serait plus simple que je leur demande un autographe directement quand ils vont entrer, non ?

Tom – Ça c’est vous qui voyez.

Cécile – Et si vous me laissiez entrer ?

Tom – Pour quoi faire ?

Cécile – Pour les attendre à l’intérieur. J’ai l’impression qu’il va pleuvoir…

Tom – Ah, ça, ça ne va pas être possible, mademoiselle. À moins que…

Cécile – À moins que…?

Tom – À moins que vous ne me laissiez votre numéro de téléphone.

Cécile – Vous ne manquez pas de culot, vous…

Tom – Non, mais je vous fais marcher.

Cécile – Quoi ?

Tom – Évidemment qu’ils sont déjà là, le concert commence dans un quart d’heure.

Cécile – D’accord… Vous êtes un comique, vous. Pour un vigile…

Tom – C’est sûrement parce que je ne suis pas vigile.

Cécile – Vous êtes qui, alors ?

Tom – Je viens pour le concert, comme vous. J’étais sorti fumer un pétard en attendant que ça commence. C’est un groupe du quartier, vous savez. Ce n’est pas les Rolling Stones. Vous croyez vraiment qu’ils ont les moyens de se payer un vigile ?

Cécile – Je ne sais pas…

Tom – En tout cas, ils ont déjà une fan. D’ailleurs, vous êtes la seule. Ça va leur faire plaisir.

Cécile – Je vous faisais marcher moi aussi. En fait, si je cherchais l’entrée des artistes, c’était pour pouvoir entrer sans payer. Comme je vous ai pris pour un vigile…

Tom – Je vois…

Cécile – Vous croyez que c’est possible de rentrer par là ?

Tom – Sûrement. J’ai bien réussi à sortir.

Cécile – Bon, ben j’y vais alors…

Tom – Mais je ne comprends toujours pas pourquoi vous tenez absolument à entrer par la sortie de secours.

Cécile – Je vous l’ai dit. Pour ne pas payer.

Tom – Payer ? Le concert est gratuit. Vous croyez vraiment que quelqu’un accepterait de payer pour écouter Les Rebelles ?

Elle semble interloquée.

Cécile – Vous avez raison, j’ai dû confondre avec un autre groupe…

Tom – Laissez-moi votre numéro. Quand il y aura un groupe qui vaut vraiment le coup, je vous appellerai…

Cécile – Bien sûr…

Il allume un joint et lui tend.

Tom – Vous en voulez ? C’est du Libanais.

Elle prend le joint, tire une bouffée, et fait la grimace.

Cécile – Ça vient du Liban, ça ?

Tom – En tout cas, le type qui me l’a vendu était libanais. Enfin c’est ce qu’il m’a dit…

Les Rebelles

 

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Pour finir

Un homme et une femme sont assis sur ce qui sʼavérera être des fauteuils de théâtre. Au choix du metteur en scène, les deux comédiens pourront aussi être assis dans la salle. La femme somnole. Lʼhomme la secoue un peu pour la réveiller.

Homme – Réveille-toi, le spectacle est fini. Les gens commencent à partir. Si on ne veut pas se faire remarquer...

La femme reprend peu à peu ses esprits.

Femme – Je suis vraiment désolée. Alors je me suis endormie ?

Homme – Je te poussais du coude de temps en temps quand tu commençais à ronfler, mais tu dormais tellement profondément… Je nʼai pas osé te réveiller.

Femme – Alors je nʼai rien vu de la pièce ?

Homme – Je ne sais pas si tu as raté grand chose. Je crois que moi aussi, jʼai piqué du nez à certains moments…

Femme – Cʼest curieux, jʼai fait des rêves bizarres.

Homme – Quels rêves ?

Femme – Je ne sais plus… De drôles dʼhistoires… Je ne pensais pas quʼon pouvait rêver autant en si peu de temps. Ça durait quoi, cette pièce ? Une heure ?

Homme – Une heure, en temps réel. Mais ça mʼa paru durer une éternité…

Femme – Moi, mes rêves, cʼétait du délire… Il y avait lʼinspecteur Colombo et Einstein qui arrivaient au paradis. Deux flics qui enquêtaient sur la mort de Van Gogh…

Homme – Dommage que tu ne tʼen souviennes plus. Tu aurais pu en faire une comédie à sketchs.

Femme – Ça me reviendra peut-être…

Homme – Mais pour lʼinstant, il faut y aller… Les gens commencent à nous regarder avec un drôle dʼair…

Femme – En tout cas, merci, jʼai passé un très bon moment.

Homme – Je suis content que ça tʼait plu.

Femme – Oui, on devrait aller plus souvent au théâtre…

Ils se lèvent pour sortir.

Drôles d’histoires

 

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