.

Avenir

Cécile et Alice sont assises et prennent un café.

Alice – Tu vas en Normandie pour l’anniversaire de Vincent ?

Cécile – Oui. Je peux t’emmener, si tu veux. Ma mère me prête sa voiture.

Alice – Super. (Un temps) Max m’a dit qu’il y serait, je crois.

Cécile – OK… (Un temps) Mais pourquoi tu me dis ça ?

Alice – Quoi ?

Cécile – Pour Max.

Alice – J’ai dit comme ça…

Cécile – Allez… J’ai entendu…comme un petit sous-entendu dans ta voix.

Alice – Pas du tout.

Cécile – On sera une centaine à cette fête. Pourquoi tu me parles de Max ?

Alice – Je ne sais pas… Max et toi…

Cécile – N’importe quoi. Qui est-ce qui t’a dit ça ?

Alice – Personne. Mais tout le monde sait qu’il est amoureux de toi, non ?

Cécile – Tout le monde ?

Alice – Sauf toi, apparemment. Il ne te plaît pas ?

Cécile – C’est lui qui t’a demandé de m’en parler ?

Alice – Pas du tout, je t’assure… (Un temps) Enfin, si, un peu…

Cécile – D’accord… Je pensais qu’on avait passé l’âge.

Alice – Eh ben pas lui, tu vois. (Un temps) Alors ?

Cécile – Je l’aime bien mais… c’est juste un copain.

Alice – Je vois.

Cécile – Oui, évidemment, j’ai bien remarqué que…

Alice – Quoi ?

Cécile – Qu’il me regardait bizarrement.

Alice – Il est plutôt mignon, non ?

Cécile – Mais il est tellement sérieux. Si je couche avec lui un soir, j’ai l’impression que le lendemain matin, il va m’apporter mon petit déjeuner au lit et me demander en mariage. Et qu’un mois après on sera en train de commander des meubles à la CAMIF.

Alice – Et…

Cécile – Je n’arrive à me projeter là-dedans.

Alice – Je comprends.

Cécile – Et puis franchement, un type qui n’a même pas le courage de te demander en face si tu veux sortir avec lui.

Alice – Il avait peur de prendre une veste, j’imagine.

Un temps.

Cécile – Et toi ?

Alice – Moi ?

Cécile – Il te plaît, Max ?

Alice – Je ne sais pas… Pourquoi pas…

Cécile – D’accord…

Alice – Non mais j’ai juste dit… pourquoi pas.

Cécile – Et lui il t’envoie me parler à sa place…

Alice – Il faut croire que tu l’impressionnes.

Cécile – Malheureusement, ce n’est pas réciproque. Vous vous voyez souvent ?

Alice – On révise le CAPES ensemble, parfois.

Cécile – Je vois… Je lui dis que tu as envie de sortir avec lui ?

Alice – Ce serait assez drôle…

Cécile – Oui.

Alice – Mais un peu cruel.

Cécile – Il l’a un peu cherché, non ?

Elles rient.

Alice – Et toi, qu’est-ce que tu fais l’année prochaine ?

Cécile – Je ne sais pas… Je ne sais déjà pas ce que je vais faire cet été.

Alice – Tu ne vas pas arrêter la fac, quand même ? Comme Fred…

Cécile – Fred ?

Alice – Il part aux États-Unis à la fin du mois.

Cécile – Ah oui… Il part pour longtemps ?

Alice – Je ne sais pas.

Cécile – C’est un drôle de type, Fred.

Alice – Plus drôle que Max, en tout cas.

Cécile – Non, je veux dire… il est toujours en train de déconner, mais…

Alice – Quoi ?

Cécile – Je ne sais s’il est aussi gai qu’il veut le faire croire.

Alice – Tu crois qu’il est gay ?

Cécile – Mais non… Enfin, je n’en sais rien. Tu crois qu’il est gay ?

Alice – Je ne sais pas… Tu n’as qu’à essayer, tu verras bien…

Cécile – En tout cas, il a bien raison de se barrer d’ici.

Alice – Ouais… Tu es déjà allé aux États-Unis, toi ?

Cécile – Je crois que le plus loin où je suis allée, dans ma vie, c’est l’Ardèche.

Alice – Non ? Tu n’as jamais pris l’avion ?

Cécile – Si… pour aller en Ardèche.

Alice – Tu déconnes ?

Cécile – Non, je t’assure. Et toi ? Tu as beaucoup voyagé ?

Alice – En tout cas, j’ai beaucoup déménagé. Jusqu’à l’âge de dix ans. Mon père était militaire. Mais déménager, ce n’est pas vraiment voyager, tu sais. J’ai vécu en Allemagne, et dans plusieurs pays d’Afrique. Je ne sais même plus lesquels. Pour moi, déménager, c’était surtout quitter mes copines. Quand j’arrivais quelque part, je savais qu’il ne fallait pas que je m’attache. Parce que six mois après, ou deux ans maxi, je partirais. Et je ne les reverrais plus jamais.

Cécile – Et après ?

Alice – Après mon père est mort, et on n’a plus déménagé. C’est terrible à dire, mais je crois que la mort de mon père, ça a été pour moi un soulagement… La possibilité, enfin, de pouvoir me fixer quelque part (Elle a l’air au bord des larmes) Tu ne vas pas déménager, toi ?

Cécile – Mais non, rassure-toi… Je reste là.

Cécile pose sa main sur celle d’Alice pour la rassurer.

Noir

Avenir Lire la suite »

Départ

Vincent et Fred sont assis à une table et prennent un café.

Vincent – Génial… Et donc tu pars dans trois semaines ?

Fred – Le premier mai, oui. Le jour de la fête du travail, moi je me barre en vacances pour an. Ou plus, on verra bien…

Vincent – Ce ne sera pas tout à fait des vacances, si ?

Fred – Quand j’aurai besoin de fric, je travaillerai un peu comme cuistot ou comme serveur. C’est très facile, là-bas. Il y a du boulot pour tout le monde. Et les Français sont très appréciés. Surtout dans la restauration. Sans parler des gonzesses, évidemment…

Vincent – Le mythe du French lover… Petit veinard… Tu vas t’éclater.

Fred – Tu n’as qu’à venir avec moi.

Vincent – Je ne peux pas, malheureusement. Je commence mon année de stage en septembre dans une banque à Paris. Et si je ne veux pas me taper trois heures de transport par jour, il faut que je bosse cet été pour me payer une chambre de bonne.

Fred – Ah ouais.

Vincent – C’est nettement moins glamour.

Fred – C’est sûr…

Vincent – Tu en as parlé à Max ?

Fred – Ouais. Je l’ai vu hier.

Vincent – Ça va ?

Fred – Tu le connais… Avec Max, ça ne va jamais vraiment.

Vincent – Il passe son CAPES dans deux mois, il est un peu sur les nerfs.

Fred – On ne se voit presque plus.

Vincent – Il bosse beaucoup, je crois.

Fred – Ou alors il m’en veut. Je ne sais pas pourquoi.

Vincent – Je crois qu’il nous en veut à tous les deux d’avoir arrêté le groupe. Et maintenant, toi tu t’en vas. Alors Les Rebelles, c’est fini ?

Fred – C’était déjà fini, non ?

Vincent – Il faut se rendre à l’évidence, on ne serait jamais devenus des stars.

Fred – Pas des stars du rock, en tout cas…

Vincent – De toute façon, j’ai revendu ma batterie pour payer la caution de ma chambre de bonne.

Fred – Et moi ma guitare pour acheter mon billet d’avion.

Un temps.

Vincent – Les Rebelles, quel nom à la con. Je ne sais plus qui avait trouvé ça à l’époque.

Fred – C’est moi.

Vincent – Ah oui, c’est vrai…

Fred – Quand j’étais interne au lycée, dans ma boîte de curés, c’était une vraie prison. On ne pouvait franchir les grilles de l’école que le week-end. Et encore, si on n’était pas collés. Et évidemment, ce n’était pas mixte.

Max – Oh putain…

Fred – Tu imagines un peu ? À l’âge où on ne pensait qu’à se débarrasser de notre pucelage, toute la semaine entre mecs, de jour comme de nuit. Je ne sais pas comment j’ai fait pour ne pas devenir homo.

Max – Et tu n’as pas essayé de t’évader ?

Fred – Un jour, j’ai organisé une grève pour protester contre nos conditions de détention. Tout le monde avait l’air partant. Mais au final, sur quatre cents élèves, on n’était que trois à refuser de rentrer en classe.

Vincent – Les Rebelles…

Fred – Il y avait un type dans ma classe qui se disait communiste. Le genre très bon élève, tu vois, mais très engagé politiquement. Je lui ai demandé pourquoi il refusait de participer à notre mouvement de protestation. Tu sais ce qu’il m’a répondu ?

Vincent – Non.

Fred – Il m’a dit : C’est une rébellion, pas une révolution…

Vincent – Ah ouais…

Fred – Je ne sais pas où il en est aujourd’hui avec sa révolution. Moi j’essaie de rester un rebelle.

Vincent – Et comment ça s’est terminé votre rébellion ?

Fred – J’espérais me faire virer, mais non. Même pas. On s’est fait coller pendant quatre week-ends de suite.

Vincent – Ah oui, je m’en souviens. On ne t’avait pas vu pendant un bon bout de temps.

Fred – Je me suis juré qu’après le bac, je ne laisserai plus personne m’enfermer quelque part. Et surtout pas dans un bureau…

Vincent – Ouais.

Fred – Ça ne te fait pas flipper, toi, la perpective de finir ta vie dans une banque ?

Vincent – Qu’est-ce que tu veux… Je ne suis pas aussi beau que toi, moi. Si je veux trouver des gonzesses, je ne peux pas compter que sur mon physique. Alors il faut que je me fasse un max de fric…

Fred – Je vais en profiter pendant que je suis encore jeune et beau, alors… Après… je miserai tout sur l’humour.

Silence.

Vincent – Tu viendras quand même en Normandie pour mon anniversaire ? C’est dans quinze jours.

Fred – Évidemment.

Silence.

Vincent – Tu es sûr que ça va ?

Fred – Nickel.

Vincent – C’est ce que tu voulais, non ? Partir d’ici. Découvrir le monde.

Fred – Ouais… Dans trois semaines, à moi l’Amérique ! Je vous enverrai des cartes postales, c’est promis.

Vincent – Et puis on se reverra.

Fred – Bien sûr…

Ils échangent un regard qui en dit long.

Noir

Départ Lire la suite »

Désaccord

Max est là avec une guitare basse qu’il est en train d’accorder. Vincent arrive avec une guitare.

Max – Tu as jeté un coup d’œil dans la salle ?

FredOuais…

Max – C’est plein à craquer, tu te rends compte ! Il y en a même qui essaient d’entrer par la sortie de secours, il paraît.

Fred – Ah ouais ?

Max – Tu ne vas pas le croire, il y a une nana qui m’a demandé un autographe…

Fred – Tu lui as laissé ton numéro ?

Max – Même pas…

Fred – Elle n’était pas terrible…?

Max – Elle avait quatorze ans…

Fred – D’accord…

Max – Non mais tu entends ça ?

Fred (la tête ailleurs) – Quoi ?

Max – Ils s’impatientent. Ils sont déjà en train d’applaudir. Notre public nous réclame !

Fred – Ah ouais…

Max – Fred ? Je sens qu’il se passe quelque chose, là. Tu verras, mon vieux. Dans quelques années, quand on sortira notre troisième album, et qu’on fera notre premier Olympia, on se souviendra de ce concert, et on se dira que c’est là où tout a commencé.

Vincent a l’air de chercher quelque chose.

Fred (préoccupé) – Ouais…

Max – Ça va ? Tu n’es pas trop défoncé, au moins ?

Fred – Non, non… Enfin si, mais…

Max – Qu’est-ce qui se passe ?

Fred – J’ai cassé une corde.

Max – Tu as largement le temps de la changer. Et puis si on se fait attendre un peu… Ça fera monter la pression.

Fred – Le problème c’est que… je n’ai pas la corde de rechange.

Max – Tu n’as pas de cordes de rechange ?

Fred – J’en ai, mais… pas celle-là.

Max – Comment ça pas celle-là ?

Fred – La corde de si. Je n’ai pas la corde de si.

Max – C’est une blague ?

Fred – Non…

Max – Putain Vincent…

Fred – Tu n’en aurais pas une, toi ?

Max – Si. J’ai deux jeux de cordes de rechange pour ma basse. Pourtant les cordes de basse, ça ne casse pas souvent, tu vois.

Fred – Désolé…

Max – Il n’y a pas un magasin de musique, dans le coin ?

Fred – On est dimanche.

Max – Putain… Alors qu’est-ce qu’on fait ?

Fred – Ben… je ne jouerai pas avec cette corde-là, voilà.

Max – Super…

Fred – Il m’en reste quand même cinq.

Max – Si tu n’en casses pas une autre d’ici là…

Fred – Qu’est-ce que tu veux ? C’est mon côté destroy. Jimi Hendrix cassait bien sa guitare sur scène…

Max – Ouais, mais lui il attendait la fin du concert. Et je suis sûr que lui, il avait toujours un jeu de cordes de rechange. Pourquoi tu n’as pas de cordes de rechange ?

Fred – Je n’avais pas de thune.

Max – C’est ça… Mais pour acheter de la beuh, là tu as toujours des thunes.

Fred avance vers lui, menaçant.

Fred – Eh, oh, tu te prends pour ma mère, ou quoi ?

Max – C’est toi qui me prends pour ta mère, Fred. Alors c’est moi qui devrais avoir des cordes de rechange pour ta gratte de merde, c’est ça ? J’en ai ras le bol de jouer avec une bande de loosers.

Fred – Personne ne te retient, Max. Tu fais chier tout le monde. Nous on est là pour s’éclater, pas pour entendre tes leçons de morale…

Fred s’en va. Vincent arrive.

Vincent – Tu as vu le monde qu’il y a dans la salle ?

Max – Ouais.

Vincent – Depuis qu’on a une chanteuse, on a beaucoup plus de succès, tu as remarqué ?

Max – Elle chante faux.

Vincent – Apparemment, les mecs ne viennent pas seulement pour l’écouter… Il faut dire que… Il y a un problème ?

Max – Fred a pété une corde.

Vincent – Et alors…?

Max – Il n’a pas de corde de rechange.

Vincent – Ah merde… (Il sort un joint, l’allume, tire une bouffée et le tend à Max) Tu en veux ? C’est du Libanais…

Max – Non merci, je préfère rester lucide…

Vincent (hilare) – Lucide ?

Max – Alors toi aussi, tu es défoncé.

Vincent – Complètement. Bon, on y va ? Je crois que notre public nous réclame…

Max – Putain, Vincent, tu ne comprends pas ! Fred joue déjà comme un manche avec six cordes, alors avec cinq. Le public va nous massacrer…

Vincent – Le public ? Ne t’inquiète pas. C’est nos potes ! Et ils sont encore plus défoncés que nous…

Noir

Désaccord Lire la suite »

Entrée des artistes

Il est debout, les bras croisés, devant une porte imaginaire. Elle arrive.

Cécile – Excusez-moi, c’est bien ici, l’entrée des artistes ?

Tom – Affirmatif.

Cécile – Donc c’est bien par là qu’ils vont sortir.

Tom – Qui ça ?

Cécile – Les membres du groupe ! Les Rebelles !

Tom – Ah, je ne crois pas, non.

Cécile – Vous venez de me dire que c’était là.

Tom – Je vous ai dit que c’était l’entrée des artistes.

Cécile – Et alors ?

Tom – Je ne vous ai pas dit que c’était la sortie des artistes.

Cécile – Parce qu’il y a aussi une sortie des artistes ?

Tom – Ça je n’en sais rien, mademoiselle. Moi on m’a dit de surveiller cette porte, je la surveille, c’est tout…

Cécile – Mais regardez, à côté du panneau « entrée des artistes », c’est aussi marqué « sortie de secours ».

Tom – Ah oui…

Cécile – Ça veut dire qu’ils peuvent aussi sortir par là.

Tom – S’il y a un incendie, oui.

Cécile – Vous pensez qu’ils ne sortiront par là que s’il y a un incendie ?

Tom – Un incendie ou…

Cécile – S’il y a une sortie de secours… il y a peut-être aussi une entrée de secours.

Tom – Pourquoi faire ?

Cécile – Je ne sais pas… Au cas où il y aurait un incendie dehors.

Tom – Peut-être.

Cécile – Donc vous ne savez pas par où ils vont sortir ?

Tom – Non.

Cécile – Vous n’êtes pas au courant de grand chose. Pour un vigile…

Tom – Je ne fais que mon boulot.

Cécile – Et c’est quoi votre boulot ?

Tom – De surveiller l’entrée des artistes.

Cécile – Pour ?

Tom – Pour que personne ne rentre.

Cécile – Sauf les artistes, donc.

Tom – Sauf les artistes.

Cécile – Bon, mais moi, je ne veux pas entrer. Je veux juste leur demander un autographe quand ils vont sortir.

Tom – Pour sortir, il faudrait déjà qu’ils soient rentrés.

Cécile – Ah parce qu’ils ne sont pas encore entrés ?

Tom – Non.

Cécile – Vous auriez pu me le dire avant.

Tom– Vous ne me l’avez pas demandé.

Cécile – D’accord…

Tom – Du coup, vous pourrez toujours leur demander quand ils vont rentrer.

Cécile – Leur demander quoi ?

Tom – Leur demander par où ils vont sortir.

Cécile – Ce serait plus simple que je leur demande un autographe directement quand ils vont entrer, non ?

Tom – Ça c’est vous qui voyez.

Cécile – Et si vous me laissiez entrer ?

Tom – Pour quoi faire ?

Cécile – Pour les attendre à l’intérieur. J’ai l’impression qu’il va pleuvoir…

Tom – Ah, ça, ça ne va pas être possible, mademoiselle. À moins que…

Cécile – À moins que…?

Tom – À moins que vous ne me laissiez votre numéro de téléphone.

Cécile – Vous ne manquez pas de culot, vous…

Tom – Non, mais je vous fais marcher.

Cécile – Quoi ?

Tom – Évidemment qu’ils sont déjà là, le concert commence dans un quart d’heure.

Cécile – D’accord… Vous êtes un comique, vous. Pour un vigile…

Tom – C’est sûrement parce que je ne suis pas vigile.

Cécile – Vous êtes qui, alors ?

Tom – Je viens pour le concert, comme vous. J’étais sorti fumer un pétard en attendant que ça commence. C’est un groupe du quartier, vous savez. Ce n’est pas les Rolling Stones. Vous croyez vraiment qu’ils ont les moyens de se payer un vigile ?

Cécile – Je ne sais pas…

Tom – En tout cas, ils ont déjà une fan. D’ailleurs, vous êtes la seule. Ça va leur faire plaisir.

Cécile – Je vous faisais marcher moi aussi. En fait, si je cherchais l’entrée des artistes, c’était pour pouvoir entrer sans payer. Comme je vous ai pris pour un vigile…

Tom – Je vois…

Cécile – Vous croyez que c’est possible de rentrer par là ?

Tom – Sûrement. J’ai bien réussi à sortir.

Cécile – Bon, ben j’y vais alors…

Tom – Mais je ne comprends toujours pas pourquoi vous tenez absolument à entrer par la sortie de secours.

Cécile – Je vous l’ai dit. Pour ne pas payer.

Tom – Payer ? Le concert est gratuit. Vous croyez vraiment que quelqu’un accepterait de payer pour écouter Les Rebelles ?

Elle semble interloquée.

Cécile – Vous avez raison, j’ai dû confondre avec un autre groupe…

Tom – Laissez-moi votre numéro. Quand il y aura un groupe qui vaut vraiment le coup, je vous appellerai…

Cécile – Bien sûr…

Il allume un joint et lui tend.

Tom – Vous en voulez ? C’est du Libanais.

Elle prend le joint, tire une bouffée, et fait la grimace.

Cécile – Ça vient du Liban, ça ?

Tom – En tout cas, le type qui me l’a vendu était Libanais. Enfin c’est ce qu’il m’a dit…

Noir

Entrée des artistes Lire la suite »

Les Rebelles

The Rebels –  Los Rebeldes (español) – Os Rebeldes (portugués)

Une comédie de Jean-Pierre Martinez

6 personnages : 4 hommes et 2 femmes

À l’âge adulte, nos vies ne sont pas toujours telles qu’on les avait rêvées à vingt ans. À l’inverse, le souvenir idéalisé de nos vingt ans est souvent assez éloigné de la réalité de notre jeunesse. Entre nos vies rêvées et notre vie tout court vient se nicher la nostalgie de tous les possibles. Reste l’éternelle question : aurait-on vraiment pu vivre une autre vie, ou bien tout cela était-il écrit à l’avance ? Cette comédie douce amère brosse par petites touches le portrait tragi-comique de quelques personnages aux destins contrariés.


Ce texte est offert gracieusement à la lecture. Avant toute exploitation publique, professionnelle ou amateur, vous devez obtenir l’autorisation de la SACD.


TÉLÉCHARGER
PDF GRATUIT
ACHETER
LE LIVRE
 
ACHETER
LE LIVRE
amazon

Les Rebelles Lire la suite »

Les fantômes

Il regarde dans un télescope dirigé vers la salle. Le personnage peut être un enfant, ou un adulte jouant un enfant. Elle est sa mère ou son professeur.

Elle – Tu vois cette étoile vers laquelle j’ai dirigé le télescope ?

Lui – Oui.

Elle – Autour de cette étoile tournent des planètes.

Lui – Oui, je les vois.

Elle – L’une de ces planètes est habitable, et elle est habitée.

Lui – Je la vois.

Elle – Les habitants s’appellent les hommes.

Lui – Je les vois.

Elle – Et ils ont réussi à rendre leur planète inhabitable.

Lui – Et alors ?

Elle – Alors ils sont tous morts.

Lui – Mais pourtant je les vois.

Elle – Parce que cette planète est située à des millions d’années-lumière de la nôtre. En réalité, ils sont déjà tous morts.

Lui – Alors ceux que je vois ne sont que des fantômes.

Elle – Oui. Le dernier est mort il y a 100.000 ans.

Lui – C’est marrant.

Elle – Oui.

Lui – Mais alors comment tu sais qu’ils sont morts ? Puisque l’image de leur fin du monde ne nous est pas encore parvenue…

Elle – La téléportation quantique est immédiate. Elle n’est pas soumise aux règles de l’espace-temps. Nous avons téléporté une sonde sur place il y a un mois. Aucune trace de vie à la surface.

Lui – Un suicide collectif… Mais pourquoi est-ce qu’ils ont fait ça ?

Elle – On ne sait pas.

Lui – On ne sait pas ?

Elle – Non. Pourtant on a fait des tas de découvertes scientifiques extraordinaires. Mais ça on n’a pas encore réussi à comprendre. Cela fait partie des mystères de l’univers qui nous restent encore à élucider.

Lui – Les fantômes d’une humanité disparue, sur une Terre dont ils ont fait un désert… Je vais les observer encore un peu, pour essayer de comprendre…

Noir

Brèves du temps qui passe

Les fantômes Lire la suite »

Le bac avec mention

Ils sont debout face au public.

Elle – Alors ça y est, on a le bac.

Lui – Oui… Mention Corona Virus.

Elle – Nos grands-parents ont eu le bac Mai 68, nous on aura le bac COVID-19.

Lui – À l’époque on avait donné le bac à tout le monde parce qu’il y avait trop de gens dans la rue pour réclamer plus de démocratie, aujourd’hui, avec le confinement, on ne peut même plus descendre dans la rue pour protester contre l’état d’urgence.

Elle – Sans parler de la montée des dictatures en Europe. Avant la chute du mur, la Hongrie était considérée comme le pays le plus démocratique du bloc soviétique, aujourd’hui c’est le pays le plus fasciste du bloc européen.

Lui – Comme quoi Einstein avait raison : tout est relatif. Ce ne sont pas les Hongrois qui ont changé, c’est le monde qui les entoure.

Elle – L’histoire nous montre qu’en Europe, la Hongrie a toujours joué le rôle de thermomètre. Quand la Hongrie a la fièvre, c’est que l’Europe va mal.

Lui – Et si j’osais, je dirais même que cette fois, ce thermomètre, on l’a vraiment dans le cul.

Elle – Oui…

Lui – Il ne faut pas oublier les leçons de l’Histoire.

Elle – Oublier l’histoire, c’est être condamné à la revivre.

Lui – On dirait un sujet du bac philo.

Elle – Heureusement qu’on n’aura pas à le passer.

Lui – Remarque, finalement, on est quand même assez calés en histoire.

Elle – On a le bac, après tout.

Lui – Je me demande quel genre de bac auront nos petits-enfants.

Elle – En tout cas, il vaudra mieux avoir le bac mention Louis-le-Grand que le bac mention Noisy-le-Grand.

Lui – On est dans la merde, je te dis.

Elle – Qu’est-ce qu’on peut y faire ?

Lui – Je ne sais pas. La révolution, ça ne marche pas. Le réformisme non plus.

Elle – Après chaque crise, on nous promet que plus rien ne pourra être comme avant.

Lui – Dans un sens ils ont raison. C’est encore pire après.

Elle – Qu’est-ce qui nous reste alors ?

Lui – L’amour. (Sans conviction) Tu veux sortir avec moi ?

Elle – C’est la pire déclaration que je n’ai jamais entendue.

Lui – En plus on ne peut même pas sortir. On est toujours confinés.

Noir

Brèves du temps qui passe

Le bac avec mention Lire la suite »

Le tableau

Il est là. Elle arrive avec un tableau, un portrait de jeune femme, tenant apparemment plus de la croûte que du chef d’œuvre, mais doté d’un cadre doré.

Lui – Qu’est-ce que c’est que cette horreur ?

Elle – Il était accroché au-dessus du lit de mon arrière-grand-mère, dans sa maison de retraite. Chaque fois que j’allais la voir, elle me répétait qu’après sa mort, ce tableau serait pour moi…

Lui – C’est très généreux de sa part. Surtout qu’à part cette croûte, elle n’a rien laissé d’autre à personne…

Elle – Ma mère y est allée hier pour débarrasser la chambre. Elle m’a donné le tableau.

Lui – C’est un portrait… C’est qui ?

Elle – Mon arrière-arrière-grand-mère, je crois…

Lui – Elle était plutôt pas mal… quand elle était jeune. Tu lui ressembles un peu…

Elle – Tu trouves ?

Lui – Et qu’est-ce que tu comptes en faire ?

Elle – Je ne sais pas… Je ne peux pas le jeter quand même…

Lui – Non, évidemment… De là à l’accrocher dans le salon…

Elle – On pourrait l’accrocher au-dessus de notre lit…

Lui – Tu plaisantes ?

Elle – Évidemment…

Lui – Elle avait quel âge, ton arrière-grand-mère exactement ?

Elle – Elle était née en 1910 à Auvers-sur-Oise.

Lui – À Auvers ? C’est dingue ! Tu te rends compte ? À vingt ans près elle aurait pu croiser Van Gogh.

Elle – Elle racontait toujours que sa mère l’avait bien connu.

Lui – Non…? Van Gogh ?

Elle – Ouais.

Lui – Mais quand tu dis bien connu…

Elle – Je ne sais pas.

Lui – Si ça se trouve tu es l’arrière-arrière-petite-fille de Van Gogh…

Elle – Va savoir…

Lui – Et comme il n’a pas d’autre descendance connue, tu serais l’héritière de sa fortune.

Elle – Sa fortune ?

Lui – Oui, remarque, tu as raison… Les gens qui ont acheté ses tableaux sont richissimes aujourd’hui, mais lui il est mort dans la misère. Et ce tableau…?

Elle – Mon arrière-grand-mère me disait qu’elle tenait ce tableau de sa mère…

Lui – Mais d’où il venait ? Qui l’a peint, ce tableau ?

Elle – Je ne sais pas.

Lui – Il n’est pas signé ?

Elle – Non… Ou alors la signature n’est plus visible.

Lui – Tu penses à ce que je pense ?

Elle – Oui… Mais non, ce n’est pas possible…

Lui – Si ton aïeule l’a bien connu… Personne n’en voulait, de ses toiles. Et il n’avait pas un sou. Je suis sûr qu’il aurait pu en donner une contre un repas chaud. Alors pour tirer un coup, tu penses bien…

Elle – Ne te gêne pas, traite mon arrière-arrière-grand-mère de pute !

Lui – Je ne dis pas ça mais… un petit cadeau.

Elle – Non, et puis tu l’as dit, regarde, c’est une croûte !

Lui – Franchement, j’ai vu certains tableaux dans des musées… Si on ne savait pas que c’était signé par de grands maîtres… Qu’est-ce qu’on y connaît en peinture, nous ?

Elle – Tu as raison… Il faudrait le faire expertiser…

Lui – Imagine un peu. Un Van Gogh. Même si ce n’est pas le meilleur, ça vaudrait des millions.

Elle – Il ne faut pas trop d’emballer quand même…

Lui – Oui… Après tout, il vaut peut-être mieux laisser planer le doute. Rêvons encore un peu, plutôt que de rompre le charme tout de suite.

Elle – Sans compter qu’une expertise, ça ne doit pas être donné. Tout ça pour qu’on nous dise que c’est l’œuvre… d’un peintre du dimanche.

Lui – Mais du coup, j’ai presque envie de l’accrocher au-dessus de notre lit, maintenant.

Elle – Pourquoi ça ?

Lui – Je ne sais pas… Penser que Van Gogh a peint ça pour niquer ton arrière-arrière-grand-mère. Et que maintenant ça vaut des millions. Ce serait le coup le plus cher du monde, non ?

Il prend le tableau pour le regarder.

Elle – Moi je ne suis pas sûre que ça me motive beaucoup.

Lui – Il pèse une tonne ce tableau, non ?

Elle – C’est vrai, j’ai remarqué aussi.

Lui – Finalement, je ne crois pas que ce soit une bonne idée de l’accrocher au-dessus du lit. Si on le prend sur la tronche…

Elle – Pourquoi il est aussi lourd, ce tableau ?

Lui – Ce n’est pas la toile, c’est forcément le cadre…

Elle – Habituellement, les cadres, c’est en bois…

Lui – Pour du bois, ça ferait très lourd.

Elle – Ou alors c’est de la fonte.

Lui – Un cadre en fonte ? Et puis ce n’est pas la couleur de la fonte.

Elle – C’est peut-être de la peinture.

Il gratte un peu le cadre avec son ongle.

Lui – On dirait que non…

Elle – Tu penses à ce que je pense ?

Lui – Oui… je ne connais qu’un métal qui soit doré.

Elle – Si c’est de l’or, c’est l’équivalent d’au moins un lingot.

Lui – Finalement, ce tableau a peut-être de la valeur.

Elle – En tout cas, on peut rêver…

Noir

Brèves du temps qui passe

Le tableau Lire la suite »

Urgence

Elle est là. Il arrive.

Lui – Excusez-moi, vous faites partie de…

Elle – Non.

Lui – D’accord, alors vous aussi, vous…

Elle – Oui.

Lui – Et vous attendez depuis longtemps ?

Elle – Longtemps ?

Lui – Non parce que je suis mort il y a déjà plus d’une heure et… j’attends toujours.

Elle – Qu’est-ce que vous attendez, exactement ?

Lui – Je ne sais pas… Qu’on s’occupe de moi.

Elle – Qu’on s’occupe de vous ?

Lui – J’étais allé aux urgences, parce que je ne me sentais pas bien… J’ai attendu cinq heures avant que quelqu’un s’intéresse à moi. Je me demande pourquoi on appelle ça les urgences. Si on m’avait pris tout de suite… C’est sans doute pour ça que j’en suis là d’ailleurs…

Elle – Sans doute.

Lui – J’ai l’impression d’avoir passé toute ma vie à attendre. On dit qu’on passe un tiers de sa vie à dormir, je crois que j’ai passé au moins un tiers de la mienne à attendre. Attendre le bus, attendre ma femme, attendre que ce soit l’heure, attendre que ce soit le moment, attendre qu’on veuille bien me recevoir, attendre chez le médecin, chez le dentiste, chez le coiffeur, attendre les vacances, attendre la retraite…

Elle – Si vous n’aimez pas attendre, ici, ça ne va pas vous aider.

Lui – Parce que vous pensez que ça va durer longtemps ?

Elle – L’éternité.

Lui – L’éternité ? Vous voulez dire… pour toujours ?

Elle – Quand on est mort, c’est pour toujours, non ?

Lui – Alors on va attendre comme ça jusqu’à…

Elle – Je vous conseille surtout d’arrêter d’attendre… et de rayer de votre vocabulaire tous les mots ayant un rapport avec le temps. Comme hier, aujourd’hui, demain… Ou depuis que et jusqu’à quand. Ou pendant combien de temps… Et surtout, surtout, d’oublier le mot urgence.

Lui – Je vois ce que vous voulez dire, mais… il va bien se passer quelque chose un jour ou l’autre, non ?

Elle – Non.

Lui – Bon… alors qu’est-ce qu’on fait ?

Elle – Rien. On ne fait rien. Qu’est-ce qu’on pourrait bien faire ? On est morts !

Lui – Je ne sais pas… Alors il ne va rien se passer, et on ne peut vraiment rien faire ?

Elle – Si. Il y a une seule chose que vous pouvez faire ici.

Lui – Ah oui ? Quoi donc ?

Elle – Faire le mort.

Il la regarde perplexe.

Lui – Bon...

Elle – Qu’est-ce que vous imaginiez ? La vie éternelle ?

Lui – J’espérais au moins échapper à la mort éternelle… Alors c’est ça l’au-delà ? Il n’y a rien après ?

Elle – On ne sait pas. Quand on aura perdu toute notion du temps… Quand on aura tout oublié… jusqu’à ne plus savoir qui on a été, on sera recyclé, peut-être. Notre âme en décomposition deviendra le compost sur lequel d’autres graines un jour repousseront. Mais pour l’instant… Je veux dire pour toujours en ce qui nous concerne… il faut faire le deuil de nous-mêmes.

Lui – D’accord… (Un temps) Donc il y a quand même un petit espoir de s’en sortir ?

Elle lui lance un regard perplexe.

Noir

Brèves du temps qui passe

Urgence Lire la suite »

Contrôle technique

Elle s’essuie les mains avec un chiffon plein de cambouis. Il arrive.

Lui – Bonjour, je viens récupérer la voiture que ma femme vous a laissée il y a une heure pour le contrôle technique.

Elle – Elle s’appelle comment ?

Lui – Céline. Céline Dumortier.

Elle – Et la voiture ?

Lui – Je… Je ne lui ai pas encore donné de petit nom, mais… c’est une 107 Peugeot. Elle est prête ?

Elle – Ah oui, la 107 Peugeot de Madame Dumortier, je vois très bien…

Lui – Et… elle est prête ?

Elle – Prête…? Ça dépend…

Lui – Ça dépend… Ça dépend de quoi ?

Elle – Ça dépend de ce qu’on appelle prête.

Lui – Ben… je ne sais pas. Est-ce que vous avez fait le contrôle technique ?

Elle – Oui. J’ai examiné le véhicule.

Lui – Et… est-ce que tout va bien ?

Un temps.

Elle – Je peux vous parler franchement ?

Lui – Euh… oui.

Elle – C’est une voiture qui ne va pas bien.

Lui – Qu’est-ce qu’il y a qui ne va pas ? C’est l’embrayage, c’est ça ? Je sentais qu’elle patinait un peu au démarrage…

Elle – Oui, l’embrayage, aussi. Mais ce n’est pas ça qui m’inquiète.

Lui – C’est plutôt moi qui devrais m’inquiéter, non ? Alors qu’est-ce qu’il y a au juste ?

Elle – C’est difficile à dire… C’est un état général, vous comprenez ?

Lui – Non. Vous pourriez être plus précise ?

Elle – C’est une voiture d’occasion, n’est pas ?

Lui – Oui, en effet.

Elle – Et la précédente propriétaire était une personne âgée.

Lui – Oui, comment vous savez ça ?

Elle – Une voiture qui a presque dix ans, mais en très bon état et avec très peu de kilomètres au compteur… On sent que c’est une voiture qui a passé beaucoup de temps bien au chaud au garage. Qui n’a jamais voyagé. Qui ne roulait pas beaucoup, mais dont sa propriétaire prenait grand soin… avant qu’on vous la confie.

Lui – Comment savez-vous que c’était une femme ?

Elle – L’embrayage, justement. Les vieilles dames font beaucoup cirer l’embrayage, c’est comme ça. Ce n’est pas de leur faute. C’est pour ça que l’embrayage est un peu fatigué.

Lui – Là c’est moi qui commence à fatiguer un peu… Si vous me disiez exactement ce qu’il y a à faire comme réparations ?

Elle – Ce n’est pas si simple, j’en ai peur… Elle est morte ?

Lui – Je pensais que c’était à vous de me le dire. C’est si grave que ça ?

Elle – Non, je parlais de la vieille dame à qui vous avez racheté cette pauvre voiture. Est-ce qu’elle est décédée ?

Lui – Mais je n’en sais rien moi ! Je ne sais même pas qui c’est, cette bonne femme. C’est le garage à qui j’ai acheté cette voiture qui m’a dit que l’ancienne propriétaire était une vieille dame qui roulait très peu.

Elle – À mon avis, elle est morte.

Lui – Ma voiture ?

Elle – Cette vieille dame.

Lui – Mais enfin, c’est absurde. C’est quoi, cette conversation ? Je vous demande si je peux repartir avec ma voiture, vous me parlez de son ancienne propriétaire !

Elle – C’est que les deux problèmes sont étroitement liés.

Lui – Ah oui ?

Elle – À l’évidence, cette voiture ne s’est jamais remise de la disparition de son ancienne propriétaire.

Lui – On ne sait même pas si elle est morte !

Elle – Elle est morte croyez moi.

Lui – Ma voiture ?

Elle – D’après ce que je constate, c’est une voiture qui dort dans la rue, je me trompe ?

Lui – Je n’ai pas de garage. Ça pose un problème ?

Elle – Vous pourriez au moins lui faire un brin de toilette de temps en temps. Laisser une voiture dans un état pareil, ce n’est pas chrétien.

Lui – C’est pour une caméra cachée, c’est ça ? Où est la caméra ?

Elle – Ce n’est pas une plaisanterie, cher monsieur. Les voitures aussi ont droit à un peu d’attention. De respect. D’affection même.

Lui – Bon, assez rigolé… Est-ce que oui ou non je peux repartir avec ma voiture ?

Elle – Tenez, voilà le certificat de contrôle.

Lui – Merci…

Elle – Et voici les clefs…

Lui – Très bien.

Elle – Mais permettez-moi de vous le dire, vous ne méritez pas cette voiture.

Lui – C’est la voiture de ma femme !

Il s’apprête à partir, furieux.

Elle – Et n’oubliez pas de changer l’embrayage !

Il sort.

Noir

Brèves du temps qui passe

Contrôle technique Lire la suite »